Chapitre 4

PDV Yuki

Réveillée par les talons de ma mère qui résonnent dans toute la maison, je grogne en repoussant les draps. Décidément, elle parvient à être énervante avant même que je ne la vois. Qui se promène en talons aiguilles dans sa propre demeure ? Bah ma mère, à priori. Les chaussons ne doivent pas être assez classe pour elle.

Avant de descendre, je me plante devant l'une de mes fenêtres et l'ouvre. L'air frais du matin vient frapper mon visage. En ce mois d'octobre, les températures se rafraîchissent, mais c'est toujours agréable.

J'observe le paysage qui m'entoure. De grandes plaines d'abord, puis un peu plus loin, une large forêt. Malgré ma vue perçante, je ne peux rien distinguer de ce que cachent les grands arbres qui la composent. C'est ce qui me plaît dans cet endroit. Il faut y aller pour percer ses mystères. Et chaque jour en réserve de nouveaux. Si l'on fait encore quelques kilomètres, on peut apercevoir l'océan. Ce n'est pas vraiment l'endroit que je préfère. Trop fréquenté, trop à découvert. Je préfère m'enfoncer dans le noir que de m'exposer en pleine lumière. Je savoure une dernière brise sur mes joues et quitte la pièce, laissant l'air pur de l'extérieur venir s'installer dans celle-ci en mon absence.

Je fais un rapide détour par mon dressing pour enfiler une tenue de sport, et écoute mon ventre qui crie famine.

Quand j'arrive dans la cuisine, j'attrape mon petit déjeuner déjà préparé par notre gouvernante. Mayu, comme son nom l'indique, est une vraie douceur. Du haut de ses 1200 ans, elle est celle qui m'a élevée, qui m'a choyée, et fais devenir la personne que je suis aujourd'hui. Je lui dépose un rapide baiser sur la joue -je ne suis pas friande des contacts- et j'avale rapidement le verre contenant du sang de brebis, mon préféré.

Tenant mon assiette de gaufres d'une main, je me dirige vers la table avec le sourire. Jusqu'à ce que j'aperçoive ma mère attablée à celle-ci. Silencieusement, je tente de faire demi-tour, mais trop tard, je suis repérée. Je souffle et me retourne pour aller m'installer, le plus loin possible d'elle. Je tente de faire comme si elle n'était pas là et croque dans la première de mes douceurs. Mais c'était sans compter sur ses répliques acerbes.

- Tu manges encore ces cochonneries ?

Ouai, je préfère les gaufres à ton espèce de salade de soja qui a l'air répugnante, surtout au petit déjeuner. Mais comme je n'ai pas envie de lui répondre, je me contente de la fixer en croquant une nouvelle fois, me fichant bien du chocolat qui coule sur mon menton.

- Mayu !

Ma gouvernante rentre dans la pièce et se courbe devant ma mère, tandis que je secoue la tête.

- Cessez donc de faire ce genre de repas à ma fille. Comment pouvez-vous décemment lui faire manger ce genre de chose !

J'interviens alors, excédée.

- Peut-être parce que c'est ce que j'aime. De toute façon je n'ai pas besoin de ton avis sur mon régime alimentaire, alors cesse de t'en prendre à Mayu.

- Je ne m'en prends pas à Mayu, je lui explique comment faire à présent.

- C'est elle qui m'a élevée, alors si quelqu'un devait recevoir des explications sur comment me gérer, ce serait plutôt toi.

- Ne me parle pas ainsi !

Sentant la discussion devenir tendue, la gouvernante s'éclipse dans la cuisine et nous laisse à nos disputes.

- Mais oui, allez mange ton herbe et laisse moi me repaître de vraie nourriture.

Elle tape du poing sur la table, dans une veine tentative d'autorité.

- C'est la dernière fois que tu me parles ainsi et que tu manges ces cochonneries ! Maintenant tu dois faire attention à ta ligne.

C'est sur que j'ai besoin de perdre du poids. Attendez, non, j'en ai pas besoin en fait. Au contraire, il faudrait que j'en prenne pour pouvoir travailler un peu plus mes muscles.

- Et pourquoi donc ?

- Parce que tu ne trouveras jamais d'époux si tu finis obèse.

Je ne sais pas pourquoi, mais je me doutais bien qu'elle allait me rabâcher les oreilles avec cette histoire de mariage. Elle est vraiment fatigante.

- Je ne compte pas trouver d'époux, donc autant manger des gaufres. Le plaisir est bien plus important.

Je la vois devenir rouge, et je crois que je suis vraiment en train de l'énerver. Tant mieux.

- Quand vas-tu cesser de répondre et faire ce qu'on te dit !

- Quand je te considérerais comme quelqu'un qui a son mot à dire sur ma vie ? C'est-à-dire jamais.

Elle se lève et s'approche de moi, comme si elle voulait me dominer. Je me retiens de rire.

- Tu vas te marier. Je vais de ce pas chercher des prétendants convenables.

Alors je me lève aussi, et malgré ses talons, je la dépasse. j'approche mon visage bien près du sien, et je sens qu'elle n'est pas rassurée. Elle n'est qu'une soumise, tandis que j'ai une âme de dominante. Elle se sait bien en position de faiblesse.

- Espère toujours.

Je quitte rapidement la pièce, et même la maison, ne voulant pas en entendre plus. Je me prends de plein fouet la fraîcheur matinale et c'est comme si je respirais de nouveau. Parler avec ma mère, c'est comme suffoquer. Avant de n'entendre ses talons taper au sol, je me mets à courir à travers les plaines, vers la forêt que j'aime tant. Je me sens revivre tandis que le vent fait voler mes cheveux. J'ai besoin de me détendre, et pour cela, rien de mieux qu'une petite partie de chasse. Rien d'autre ne peut me calmer après ce genre de discussion mère/fille.

Je m'avance entre les arbres et le soleil se retrouve caché à ma vue par leurs hauteurs vertigineuses. Là, la vie des bois se révèlent à moi. Les crépitements des feuilles, le faon qui galope, les oiseaux qui chantent. Je m'enfonce encore et encore dans les bois jusqu'à ne plus entendre le moindre bruit de civilisation. Je monte dans un arbre, pour observer les environs d'en haut.

Je reste un instant subjuguée par la beauté des lieux avant de me concentrer sur ce qui m'intéresse, trouver une proie. Je développe au maximum mon ouïe et ma vue afin de trouver ce que je cherche.

Un lapin, trop petit, un sanglier, peu appétissant, un crapaud ? Beurk.

Mais je n'ai pas le temps de choisir celui ou celle que je vais prendre en chasse. Un cri me parvient, et je tourne rapidement la tête. Mes yeux se plissent pour mieux distinguer d'où vient celui-ci. Je finis par apercevoir une tête blonde qui court tant bien que mal dans le forêt. Je me concentre sur son visage. Des larmes. De la peur. De quoi a-t-il peur ?

C'est un humain, vu sa rapidité peu significative. Une dizaine d'année à vue d'œil, des cheveux blonds et une gueule d'ange. Pas le genre à s'attirer des ennuis. Un animal le prend en chasse ?

La réponse vient, et au final, j'avais presque raison. Un groupe d'environ six hommes le rattrapent. L'un d'eux empoigne son bras frêle et le tire vers lui. Le gamin se débat, il crie, appelle au secours. Qui sont ses hommes ? Des rebelles je suppose, mais pour qu'ils s'en prennent à l'un des leurs, ce doit être de sacrés extrémistes. Perchée dans mon arbre, je pèse le pour et le contre. Ils sont nombreux, de bons muscles, et surtout, blindés d'armes. Je sens d'ici l'acier de leurs balles. Si j'interviens, je peux peut-être sauvé le gamin, mais je doute de sauver mes fesses aussi.

Je regarde sa bouille pleine de larmes et je souffle. Mon bon cœur me perdra. Je me laisse tomber de mon perchoir et atterris en face d'eux. Ils me regardent, surpris, avant d'afficher des sourires aux dents jaunes. Ouai, de bons gros psychopathes.

- Vous pouvez pas trouver un adversaire à votre taille ?

- Une petite vampire, tient tient. Quelle bonne pêche aujourd'hui.

Désolé mon coco mais je ne suis pas une proie.

- Lâche ce gamin.

- Mais bien sur, ce sera tout ?

Non, rajoute moi une dose de politesse bien cuite s'il-te-plaît.

Je vois les autres hommes sortirent leurs armes et je me maudis d'être partis de la maison sans rien prendre. Je maudis ma mère aussi, c'est de sa faute après tout. Oui, je compte mettre chaque merde qui m'arrive sur son dos. Que voulez-vous, c'est le retour de médaille pour toutes ces années d'ignorances.

Rapidement, je m'avance vers un premier. Celui-ci m'envoie un poing que j'évite, heureusement pour moi, les hommes sont moins rapides que mon géniteur. Je lui donne un coup de genou pendant que j'évite le deuxième qui arrive par ma gauche. Ma main attrape sa nuque et je lui frappe violemment la tête contre celle de son pote. Je me retourne pour contrer le coup du troisième, en envoyant mon pieds dans le ventre d'un autre. Mon cerveau et mon corps sont en mode automatique.

Je crois que je me prends un coup dans le dos, mais je le sens à peine, trop occupé avec deux molosses devant moi.

Les coups s'enchaînent, j'en donne, j'en reçois, mais je crois que je m'en sors plutôt bien car celui qui tenait le gamin peste avant de le lâcher pour venir aider ses potes.

Comme je le pensais, la probabilité que je m'en sorte est assez faible, quand je vois que je commence à fatiguer, et que si l'un d'eux reste à terre, ce n'est pas le cas des autres. Heureusement, je n'ai pas besoin de dire au petit de courir pour qu'il le fasse. Malheureusement, l'un des gars le voit et le suit.

J'ai un choix à faire, alors je le fais. Au moment où l'homme le rattrape, je me dégage des autres pour courir et lui sauter sur le dos. Je laisse suffisamment d'avance au gosse pour qu'il parte, tandis que les autres types arrivent dans mon dos. Je sens une aiguille se planter dans ma peau et vu la douleur, je sais qu'elle contient de l'acier liquide. Avant de tomber dans les vapes, j'ai juste le temps de voir le regard du petit qui se retourne une dernière fois. Tant de gratitude dans ses petits yeux. Et tant de pitié. Mais c'était lui ou moi. J'ai vécu 400 ans, et je peux supporter plus que lui. Je suppose que je mérite plus de me faire prendre.

Quand je rouvre les yeux, c'est violemment. Bordel, de l'eau glacée dans la tronche, vraiment ? On est encore au Moyen-âge ? Je relève la tête vers le bourreau et râle.

- Réveillée ?

- Non, non, je dors les yeux ouverts. Bah oui andouille.

Et je me prends un poing. Que voulez-vous, j'ai jamais été trop du genre à me taire.

Il se met à blablater et je ne l'écoute pas, tentant de cerner ce qui m'entoure. A première vue, on est dans une grotte. J'essaye de me concentrer pour écouter, et je ne mets pas longtemps à entendre des gémissements, des pleurs et des plaintes. Ils ont donc des otages, et à en juger par les odeurs aux milieux du sang et de la merde, on a des loups, et des humains. Je suis donc seule de mon espèce, et vraisemblablement, dans une cellule plutôt isolée. Ça commence bien comme réveil. Surtout que si je reste en vie, je risque de passer pas mal de temps ici avant que ma famille ne me cherche. Ils ont l'habitude de me voir disparaître quelques jours de temps en temps, donc là, ils doivent être tranquillement en train de manger.

Une vive douleur dans la cuisse me fait sortir de mes pensées. Aucun cri ne sort de ma bouche, même quand je vois la lame dans ma jambe. Heureusement, ce n'est pas de l'acier. Je relève la tête vers le mec en face de moi.

- Tu vas m'écouter !

Ce qu'il est susceptible ! Mais ce qui semble l'énerver encore plus, c'est que je reste insensible avec une jambe trouée.

- Quoi ? Tu t'attendais à ce que je hurles ? J'ai 400 ans coco, t'es pas le premier à me torturer. Va falloir faire mieux.

Un sourire sadique s'affiche sur son visage.

- Oh, alors je suppose que tu ne vas rien vouloir me dire sur ton espèce de roi, et sur ton peuple de monstre ?

- C'est sur que si tu demandes aussi gentiment, il y a peu de chance.

Et puis vu qui je suis, je vais rien cracher évidemment. J'aurai plus d'infos à lui donner que n'importe qui, mais ça, il ne le sait pas. C'est d'ailleurs étonnant qu'il espère avoir des infos de simples vampires. Ou loups, ou humains. Mais je suppose que certains peuvent leur donner des informations utiles, selon qui ils prennent. Et vu ma façon de me battre, ils doivent penser que je ne suis pas juste une jeune fille, mais plutôt une personne qui en sait long sur les stratégies militaires de mon peuple. Une guerrière quoi. J'en suis une, c'est vrai. Et pas n'importe laquelle en plus. Mais bon, je ne fais pas à proprement parler de l'armée. J'agis dans l'ombre. Et c'est comme ça qu'on m'appelle d'ailleurs. Shadow. Personne ne connaît mon visage, ni mon identité. Mais c'est une histoire que je garde pour plus tard.

Je me reconcentre sur l'humain taré quand il fait tourner sa lame dans ma cuisse.

- Mauvais choix. Tu vas avoir mal. Très mal.  

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Yuki a un bon caractère hein ? Vous appréciez ? 

Je vous dis à mercredi pour la suite, 

Kiss :*

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