La Femme au Briquet
"Ma pauvre chérie, tu te promènes seule, triste, dans la nuit. Autour, les gens se pressent, une bûche et des paquets sous le bras. Pas toi. Les parfums envahissent les rues, troublent les sens, se fondent en un ensemble écœurant.
"Et toi, tu marches, et tes larmes imperturbables ruissellent sur tes joues rougies par le froid. Tes bottes sont trempées, ta jupe bat tes jambes gelées, et ton souffle se transforme en nuages de coton au rythme de tes pas. Ta tristesse, ta solitude, j'en suis le seul responsable.
"J'aurais dû rester, et rien ne serait arrivé. Nous serions tous deux autour du sapin, à rire et chanter les comptines de maternelle, vivants dans cette même joie indistincte où est un jour apparu l'amour.
"Oublie ton chagrin, je t'en prie. La vie vaut mieux que moi et mon éternelle insouciance qui causa notre perte. Les rues se vident, tu es seule, tu as froid, mais tu refuses de rentrer dans cette maison vide où nous avons vécu tant de bonheur, et où tu as appris ton plus grand malheur.
"Sous les lumières de Noël, triste en ce jour de réjouissances, tes larmes pour moi sont superflues et inutiles. Je devrais être à tes côtés, mais on ne peut jamais prévoir quand la mort nous rattrapera. La vie est une course folle, et elle s'arrête toujours au pire moment.
"Tu sors cet horrible paquet de cigarettes. Fumeuse, va ! Tu sais combien je le déteste.
"À la lueur de ton briquet, des silhouettes étranges glissent sur les murs. Avant même que le tabac s'embrase, tu stoppes ton geste, interdite. Mon ombre aérienne se découpe dans ta lumière. Je serai toujours à tes côtés.
"Ma chérie...
"La vie est une course folle. Des retardataires du réveillon déboulent dans la rue, dans leur monstre de métal rugissant. Ils freinent, mais c'est déjà trop tard.
"Et tu me rejoins, avec encore ce petit sourire aux lèvres, plein d'espoir."
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