Énée et Bérénice

La plus grande erreur de Bérénice avait été d'épouser Hérode.

La seconde, celle d'aimer Énée.

Hérode avait été gentil, un temps. Puis la jalousie avait commencé à le ronger, comme le venin d'une vipère qui se serait infiltré entre la confiance et le doute.

Il avait peur. Il était devenu violent. Il ne voulait plus qu'elle sorte, de crainte qu'elle rencontrât son amant dans la rue.

La paranoïa s'était installée et avait fait son œuvre. Bérénice restait cloîtrée dans sa chambre jour et nuit.

Et quand Énée avait enfin réussi à la revoir, Hérode les avait surpris. Énée avait pu s'enfuir, mais Bérénice était depuis enfermée à la cave par l'esprit possessif d'Hérode.

*

Énée avait forcé la serrure et descendait les escaliers poussiéreux. Au plafond luisait une ampoule en fin de vie, faiblarde, qui clignotait par intermittences.

Bérénice était accroupie dans un coin, enroulée dans des couvertures. Sa silhouette grise était parcourue de spasmes, peut-être pleurait-elle. Elle bondit quand Énée lui toucha l'épaule pour lui signifier sa présence. Et quand il voulut soulever le drap qui couvrait son visage, elle hurla.

"Noli me tangere ! [ne me touche pas !]

- Viens... Je vais te sortir de là. J'ai tout prévu. Il faut juste que tu me suives.

- Je ne veux pas que tu me regardes."

Elle se leva, le forçant à se détourner. Énée lui attrapa la main pour la conduire dans l'escalier. Elle se laissa faire, petite chose sans force et désespérée.

Ils remontèrent lentement, ensemble, le chemin de la liberté.

Mais, fatiguée, affaiblie par sa captivité, Bérénice buta sur l'avant-dernière marche. Énée se retourna pour la rattraper, l'ampoule eut un sursaut de lumière, le voile glissa sur le côté, dévoilant ses cicatrices, Bérénice hurla, Énée hurla, la lumière s'éteignit, Énée lâcha sa main, Bérénice disparut dans les ténèbres et ne reparut plus.

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