Il était une fois, dans une vieille bâtisse de pierres, une veuve épuisée, mère de sept enfants. Après la mort de son mari, emporté par une longue maladie, elle se retrouva sans le sou. Seule face à l'adversité, elle acceptait tous les travaux possibles pour nourrir sa marmaille. Ses fils l'aidaient aux champs, tandis que ses filles s'occupaient de la maison. La vie ne leur faisait pas de cadeaux.

À l'approche de l'hiver, la veuve redoutait que ses enfants ne succombent au froid. Alors, elle rassemblait des bouts de laine trouvés ça et là pour tisser une grande couverture de laine, souvent jusque tard dans la nuit. Cette nuit-là, le vent hurlait, les enfants étaient blottis les uns contre les autres, perdus dans un sommeil profond, quand tout à coup, la porte d'entrée claqua violemment. Une énorme silhouette se dessina, terrifiante au point que la veuve recula jusqu'au mur. Tériel, l'ogresse hideuse, fit son apparition. Avançant vers le métier à tisser, elle rassura la veuve terrifiée : « N'aie crainte, laisse-moi t'aider ! » Incapable de dire un mot, la veuve la regarda se mettre à tisser.

La veuve, pétrifiée, pensait que l'ogresse allait les dévorer elle et ses enfants une fois la couverture terminée. Mais ce ne fut pas le cas. L'ogresse tissa une couverture, puis une autre jusqu'à l'aube, puis déclara avant de partir : « Tes enfants ne craindront pas le froid cet hiver. L'an prochain, je reviendrai. » Et pendant sept ans, à chaque hiver, l'ogresse revenait pour tisser sept couvertures.

Au septième hiver, alors que l'aîné des enfants avait dix-sept ans, l'ogresse demanda en paiement le fils aîné pour « services rendus ». La veuve comprit alors la ruse de l'ogresse et, se rappelant les avertissements de sa grand-mère sur cette créature qui dévore ses victimes, pensa à un stratagème pour sauver son fils. Elle lui conseilla de téter le sein de l'ogresse pour devenir son enfant, car même une ogresse ne peut dévorer son propre enfant. Le fils fit comme sa mère l'avait instruit, et bien que furieuse, l'ogresse le kidnappa sans le dévorer.

Emprisonné dans un sac, le jeune homme survécut à un long et obscur voyage jusqu'au repaire de l'ogresse, un lieu sinistre peuplé de cris d'animaux nocturnes. L'ogresse l'enferma dans une cage, où il dut survivre aux retours de chasse du monstre qui, chaque soir, engloutissait des quantités monstrueuses de viande crue, lui lançant parfois des restes.

Les jours passèrent, et grâce à son astuce et à son endurance, le jeune homme survécut, rappelant souvent à l'ogresse qu'elle ne pouvait manger son propre fils. Un jour, une perdrix, qui était en réalité la princesse Clair-de-Lune transformée par sa marâtre jalouse, apparut et proposa son aide. Elle lui donna un bâton magique pour tuer l'ogresse, lui expliquant que frapper l'ogresse à la tête avec ce bâton embrasé mettrait fin à ses jours, car c'est là que résidait son âme.

Le jeune homme tua l'ogresse comme prévu mais ne put s'échapper, les clés étant inaccessibles. Quelques jours plus tard, la perdrix revint, lui procura les clés, et il put enfin s'échapper. En reconnaissance, il promit de briser le sort de la princesse. Après un voyage périlleux, où il défit sept pieuvres géantes comme l'exigeait le sort, il retourna victorieux au royaume de la princesse. Le roi, ému par son courage et sa bravoure, accepta de rompre le sort et offrit la main de sa fille à son sauveur.

Les jeunes mariés vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants, honorant toujours l'homme qui, avec courage et astuce, avait su transformer leur destin.