Rare sont les Idéals générés par plusieurs personnes car souvent l'un des membres est plus apte à le devenir que les autres .L'Amour est l'un d'eux. Quand on y pense cela semble logique : il faut deux personnes pour qu'on puisse parler d'amour alors qu'une seule suffit pour haïr. Avant de commencer, j'ai une petite question pour vous: à votre avis d'où vient l'Idéal de l'Amour ?

Sans grande surprise je suis sûr que 80% d'entre vous ont directement pensé à Roméo et Juliette. En effet, l'histoire des deux amants semblent être le point de départ parfait pour l'apparition d'un Idéal. Pourtant il existe un nombre incalculable de personnes qui seraient prêtes à affronter le monde pour l'élu de leur coeur, car la véritable difficulté en amour n'est pas de s'opposer aux autres : c'est de continuer à aimer l'autre même quand tout va mal. Combien de couples se sont brisés à la première difficulté ? Combien d'hommes et de femmes n'ont pas su respecter leur serment « dans la pauvreté et dans la maladie... » ? Vous l'aurez donc surement deviné, aujourd'hui je vais vous conter l'histoire d'un couple qui , même touché par une malédiction , n'a jamais cessé de s'aimer : Voici l'histoire d'Alice et de Roy.

Ses cheveux bruns brillaient à la lueur des rayons du soleil de cette belle journée d'été tandis que la jeune fille profitait du paysage qui s'étendait à l'infini sous ses yeux. A ses côtés se tenait un garçon au teint pâle dont les cheveux noirs se dressaient en bataille sur la tête . Depuis leur première rencontre quelques mois plus tôt à un mariage, Roy était tombé sous le charme d'Alice. Là où Roy était assez timide malgré son imposant physique et ses yeux vairons que les filles trouvaient magnifique, Alice était une fille souriante, curieuse et enjouée avec de beaux yeux verts et des taches de rousseur sur les joues. En dépit de ces différences, leur amour était sincère et aucun des deux n'aurait pu imaginer sa vie sans l'autre. Un amour à priori idyllique à une exception près : Alice était victime d'une malédiction. En effet, à chaque passage de saison, sa personnalité changeait du tout au tout passant de rêveuse et aventurière au printemps à maussade et manquant de confiance en elle en hiver. Elle en avait donc tout naturellement parlé à Roy avant que ce dernier ne s'engage avec elle. Mais le jeune homme était trop amoureux pour s'inquiéter de quoique ça soit : il aimait Alice de tout son coeur et rien ne pourrait les séparer. Il promit donc de ne jamais la quitter doive t'il en mourir

Les amants voyagèrent alors à travers le monde afin de découvrir les merveilles qu'il recelait. Avec Alice à ses côtés, Roy vivait un véritable rêve éveillé : la moindre recherche se transformait en chasse aux trésors, les malheurs étaient aussi rares que courts et chaque journée était une nouvelle aventure qu'il n'aurait échangé pour rien au monde. Pourtant à quelques rares occasions, Roy remarqua que sa compagne paraissait particulièrement maussade mais il mit cela sur le compte d'une mauvaise journée et ne s'inquiéta pas outre mesure. Et avant même qu'ils ne puissent s'en rendre compte, l'automne touchait à sa fin et les premiers flocons tombaient déjà, forçant le couple à passer s'arrêter un temps dans la ville montagneuse de Selen.Roy passa une nuit très agité, et à son réveil, il ne put retenir un cri : Alice avait disparue et dans son lit se trouvait une femme à la chevelure aussi blanche que la neige.

« —Pourquoi tu cries ? , demanda la femme en se levant tout en étouffant un bâillement.Elle se retourna alors vers Roy, toujours dans l'incompréhension.—Qui es-tu et où est passé Alice ? répondit Roy en reculant pris de panique.Il était sûr de n'avoir rien bu la veille et de s'être endormi en discutant avec Alice. Alors qui était cette femme ?—Mais qu'est ce que tu racontes , lâcha l'inconnue montrant de signes d'énervement, c'est moi, Alice. Je t'ai prévenu qu'avec les saisons, mes cheveux changent de couleur. Tu n'écoutes donc jamais ce que je dis ? »Roy essaya alors de reprendre son calme et analysa la femme qui se tenait devant lui : même si les cheveux n'étaient plus les même, cette femme était bien Alice. Pourtant quelque chose ne collait pas , elle qui était toujours de bonne humeur paraissait distante et froide ce matin. Mais il en fallait plus pour décourager le jeune homme qui s'approcha pour enlacer sa compagne :

« —Je suis désolé Alice j'aurais dû être plus attentif c'est ma faute, après une brève pause il ajouta en riant, le blanc te va vraiment bien. »La réaction d'Alice fut simple, elle se contenta d'éviter et Roy et effaça ses excuses d'un revers de main. Puis sans un mot, elle alla s'asseoir dans son lit et sortit un livre qu'elle commença à lire. Le jeune homme était totalement déboussolé : il n'avait pas l'habitude d'être rejeté de cette manière et surtout sans aucune explication. Qu'est ce qui se passait ici ? Tentant une nouvelle approche, il essaya de tirer sur la corde sensible d'Alice :« —Ça te dirais d'aller faire un bonhomme de neige, proposa-t-il avec un grand sourire. »Même si Roy détestait le froid, il savait de source sure qu'Alice avait toujours rêvé de pouvoir profiter de la neige: l'attention lui ferait surement plaisir ! A sa grande surprise, la jeune femme leva à peine les yeux avant de refuser simplement l'offre et de se concentrer à nouveau sur son livre. C'était plus que Roy ne pouvait en supporter, perdu et ne sachant pas quoi faire il décida d'aller prendre l'air afin de se rafraîchir les idées . Une marche qui se révéla infructueuse car après quelques heures de marche, Roy rentra à l'auberge congelé et sans solution. Rien n'avait changé dans la chambre excepté le fait qu'Alice avait fait monter une tasse de thé. Du reste, elle lisait toujours son livre et salua à peine son compagnon à son retour. La neige empêchant la suite du voyage, durant les semaines suivantes Roy tenta de proposer toutes les activités qui auraient pu plaire à Alice sans succès : elle se contentait de refuser poliment avant de retourner à sa lecture. Elle ne parlait quasiment plus et le jeune homme était dépassé par cette malédiction qui lui avait volé la femme qu'il aimait.C'est ainsi qu'après deux semaines de ce traitement aussi glacial que la neige, Roy sortit un soir pour échapper au silence de mort de la chambre. Les étoiles étaient magnifiques ce soir-là mais le jeune homme était inconsolable : chaque chose lui rappelait sa compagne perdu et la beauté des étoiles ne faisait que rajouter à sa tristesse. Pouvait-il continuer ainsi ? Surtout que ça n'était que le premier d'une longue série d'hivers : pouvait-il passer 5, 10 , 20 hivers à être ainsi mis de côté ? Pleins d'idées noires, Roy rentra à l'auberge en soupirant. A peine avait-il monté quelques marches qu'il entendit des sanglots : c'était la voix d'Alice ! Pris au dépourvu, Roy s'approcha discrètement de la chambre afin de comprendre ce qui se passait. A travers la porte, on entendait Alice se morfondre :

« —Il va me quitter c'est sûr, dit-elle entre deux sanglots, . Ça n'est qu'une question de temps avant qu'il s'en aille comme tous les autres. »Roy se rappela alors sa promesse : il avait juré de ne jamais quitter Alice même s'il devait mourir, alors comment pouvait-il penser à l'abandonner ? De plus, depuis le début, il avait essayé de lui proposer toutes sortes d'activités mais n'avait pas tenu compte de ce qu'elle voulait vraiment faire. Il avait voulu superposer ses attentes sur cette Alice qui ne pouvait y répondre malgré tous ses efforts. Et au lieu de l'aider à surmonter cette épreuve il l'a blâmait de ne pas y arriver. Quel idiot il était ! Alice avait rendu cette aventure inoubliable, c'était à lui de l'aider maintenant.Cette réflexion faite, il se rappela que l'Alice d'hiver allait toujours chercher du thé à ce moment de la soirée. Prenant les devants, il alla en chercher une avant de monter à nouveau dans sa chambre. Alice avait rapidement séché ses larmes en l'entendant arriver. Il lui tendit simplement la tasse avec un sourire chaleureux et alla s'asseoir à ses côtés pour l'observer lire en silence.Durant le reste de l'hiver, il décida de ne plus chercher à imposer des choses à l'Alice d'hiver mais plutôt à lui montrer qu'il l'aimait avec des petites attentions : une référence au livre qu'elle lisait, quelques fleurs, un mot d'amour écrit sur un bout de papier...Là où l'Alice normale aimait l'action, l'Alice d'hiver préférait les longues discussions au calme. Et c'est ainsi que le jeune garçon appris une grande leçon cet hiver :

Il est facile d'aimer quand tout a va bien , mais c'est dans la véritable obscurité qu'on trouve qui compte vraiment pour nous.

L'hiver laissa alors la place au printemps, durant lequel les amants reprirent leur voyage. Alice avait échangé sa chevelure blanche pour une brune claire et avec, elle avait récupéré sa joie de vivre et sa bonne humeur. Puis arriva l'été où elle devint une véritable amazone, voulant danser, chanter , rugir et courir sous le ciel étoilé. Sa chevelure était aussi écarlate que le feu et sa passion plus brulante que le soleil.Chaque saison amenait son lot de nouveauté, révélant une nouvelle part de celle qu'il aimait. Mais cette fois au lieu de la repousser, il l'accepta tout entière avec ses qualités, ses défauts. Avec ses rires et ses pleurs. Avec sa joie et sa tristesse. Et encore aujourd'hui le couple voyage de ville en ville pour réconcilier les amoureux et leur apprendre l'importance de l'acceptation.

FIN