Chapitre 48

Les divers paysages s'enchaînaient à une vitesse folle, on pouvait passer d'une campagne paisible à une ville polluée et animée, de quoi faire discuter les plus petits enfants présents dans le train. Namjoon, lui, n'accordait aucune attention particulière à ces splendides décors. Son esprit était ailleurs, et même la mélodie qui sortait de ses écouteurs n'arrivait point à le ramener sur terre.

Il aurait tant aimé se rendre dans cette ville dans d'autres circonstances, et surtout de son plein gré. Cette fois-ci, il y était presque obligé. L'effort provenait de lui, soit, mais s'il ne le faisait pas, il serait sans doute encore dans son lit à broyer du noir et à attendre vainement qu'un miracle se produise. Sauf qu'après toutes ces tribulations, il avait bien compris que les miracles n'étaient que mirages. Personne n'allait arranger ses problèmes, personne ne pouvait le comprendre, il devait donc se débrouiller tout seul. 

La vie était si dure avec lui, pourquoi n'avait-il aucun répit ? Tant ses maux le torturaient, il n'en voyait plus le bonheur que lui apportaient ses amis, du soutien qu'ils lui offraient, les encouragements de son ex-femme s'évanouissaient eux aussi tout comme les solutions offertes par son psychologue.

Actuellement, le châtain était vide. Il ne savait même pas d'où il puisait son énergie pour voyager et confronter ses pires cauchemars. C'était comme s'il n'avait plus aucun contrôle sur son corps et qu'il regardait celui-ci se mouvoir sans son accord. Et cela lui laissait une sensation dérangeante, à la fois satisfaisante car il n'avait pas l'impression de se fatiguer, mais détestable car il semblait perdre tout contrôle. Vivre éprouvé par des sentiments contradictoires était tellement exténuant. 

Une voix monotone réveilla la plupart des passagers, Namjoon y compris, afin de leur informer que leur destination était à cinq minutes de leur position, demandant poliment de n'oublier aucun bagage. Ces quelques minutes passèrent, les personnes s'attroupaient devant les portes, impatients de quitter ce lieu fermé et étouffant. Peu secoué par l'arrêt définitif du véhicule, tout le monde sortit en un rien de temps, profitant de la basse température de la ville. 

Son léger sac sur le dos, Namjoon quitta la gare sans plus tarder. Voici donc Pohang. Des années auparavant, il avait crié à ses parents de s'y rendre dans l'unique but de profiter des plages et des couchers de soleil extraordinaires. À cause des soucis de santé de son père, ils ne s'y étaient donc guère rendus. Jamais il n'aurait cru y aller pour faire son deuil. Non, jamais.

Souhaitant dégourdir ses jambes après ce trajet interminable, il marcha un long moment, sans se préoccuper du chemin qu'il aurait du suivre. Après tout, les taxis n'étaient aucunement rares dans ce genre de métropole touristique. Ce n'est qu'une heure plus tard qu'il décida enfin de lever sa main pour interpeller l'une des trois voitures blanches sur son passage. Un taxiteur fort aimable nota l'adresse que lui dicta notre protagoniste adresse qu'il connaissait par cœur tant sa conversation avec cet inconnu repassait inlassablement dans sa tête avant de se mettre en route.

Alors qu'il souhaitait se reposer ne serait-ce que quelques instants, ses angoisses prirent le dessus, à tel point que le parcours se fit étrangement plus court. Lorsque le chauffeur se retourna afin de lui dire qu'ils étaient arrivés, le châtain souffla péniblement, lui tendant la monnaie nécessaire et se présentant devant une petite maison. À dire vrai, il n'y avait pas plus basique comme demeure, elle était identique à celles aux alentours, mais cette même simplicité l'embellissait. 

Le pas lourd, son organe vital battant la chamade et le corps tremblotant, il toqua à la porte après avoir vérifié d'être à la bonne adresse. Au courant de sa venue, une personne lui ouvrit presque immédiatement. Revoir son visage lui rappelait les paroles tenues lors de leur thérapie de groupe et ce souvenir lui laissa un goût amer tandis qu'il écouta son vis-à-vis se présenter, très réservé.

"Bonjour, Monsieur Kim. J'espère que vous n'avez eu aucun problème lors du voyage.

- Non, tout s'est bien passé je vous en remercie. Appelez-moi Namjoon.

- Très bien, Namjoon. Je m'appelle Jeon Jungkook. Mon conjoint, avec qui vous avez échangé, est dans le salon. Venez, il fait vraiment froid en ce moment."

Le noiraud se décala pour l'inciter à rentrer dans ce territoire inconnu. Notre protagoniste ne s'attarda pas sur la joliesse de l'endroit, une haine incommensurable et une soif de vérité prenaient une trop grande place en lui. Il était là, chez les parents de Kim Shinhye, cette adolescente qui avait tant brutalisé sa précieuse fille. S'il avait été au courant de tout cette histoire plus tôt, bien sûr qu'il se serait rendu céans dès les premières occasions. Malheureusement, avec des "si" on refait inutilement le monde, cela ne servait à rien de se morfondre. Il fallait avancer, il y était contraint.

Ses muscles ne parvenaient pas à se décontracter, cette situation l'embarrassait, voire l'embêtait fortement. Lui qui avait réussit à reprendre des forces ces dernières semaines, cette rencontre avait tout gâché. Jungkook et son compagnon lui avaient fait remonter d'atroces souvenances qu'il tentait désespérément de faire disparaître. Au départ, suite à la lecture du journal et des messages de sa douce Jaein, il pensait avoir franchi une étape primordiale, prêt à aller de l'avant. Ces efforts furent ruinés dès l'évocation de cette harceleuse sans pitié. Il avait grimpé six marches pour en tomber de deux. Il espérait alors que cette entrevue se termine rapidement et correctement.

Arrivé dans un grand salon, peut-être un peu trop grand d'ailleurs, il vit un grand homme, aussi élégant que son petit-ami, tourner autour de la table, téléphone à l'oreille. Ses traits étaient durs, il semblait se disputer avec l'autre personne au bout du fil, mais son expression changea du tout au tout quand il vit Namjoon arriver près de lui. Raccrochant sans même saluer son interlocuteur, le grisé se courba en guise de politesse. Évidemment, notre héros en fit de même.

"Bonjour, je suis Kim Taehyung. Merci d'avoir pris la peine de venir ici.

- C'est moi qui vous remercie. Je suis aussi désolé de vous déranger avec ça.

- Je pense que nous avons tous besoin d'en parler. Asseyez-vous donc."

Bien qu'à travers ces banalités reflétait une certaine bienveillance, l'ambiance demeurait pesante. Chacun avec leur préoccupation, les trois parents ne savaient par où commencer.

Namjoon semblait davantage confiant par écrit, c'était indéniable. C'était bien lui qui avait pris l'initiative de contacter ces deux jeunes parents afin de planifier une rencontre. Il avait facilement expliqué, de manière très brève, qu'il souhaitait des informations sur "cette gamine qui a sympathisé, rit, attristé, blessé, harcelé puis tué " sa fille, sa raison de vivre. Son message avait été d'une étrange violence, toutefois mélangée à de la compassion. Taehyung, comprenant pleinement la position du destinateur, n'avait fait qu'accepter sa proposition qui, pour sûr, allait les troubler à jamais.

Sous un silence absolu, le plus jeune d'entre tous, Jungkook, remarqua la colère qu'échappait involontairement l'invité, qui, en réalité ne s'en voulait qu'à lui-même. Incertain, il lui adressa ces quelques mots poignants.

"Namjoon, s'il vous plaît, ne nous blâmez pas plus que nous le faisons déjà. Nous savons que nous n'avons pas été de bons parents.

- Suis-je en droit de le faire ? S'étonna t-il, dérangé par sa crainte. Je suis loin d'avoir été le père parfait, elle.. serait encore présente sinon.

- Je suis sincèrement désolé. Intervint le grisé. Je souhaite m'excuser pour tout ce qui s'est passé. Je m'en veux d'avoir été aveugle, de ne pas avoir vu la détresse de Shinhye au point où elle torture les autres pour recevoir de l'attention... Je n'aurais jamais cru cela d'elle.

- On ne peut pas connaître nos enfants sur le bout des doigts. Ne vous excusez pas. Je veux juste savoir.. pourquoi. Pourquoi est-ce qu'elle s'en ait prise à ma fille sans raison. Je ne devrais peut-être pas vous déranger pour si peu mais je sais que je me noierai de questions si je ne le fais pas maintenant."

Il devait à tout prix rassemblait tous les éléments de cette triste histoire pour y tirer un trait de manière irrévocable.

Comment un enfant peut, à ce point, nuire ses semblables au point de les tuer ? N'a t-il donc aucun remord ? Comment peut-il passer sa vie entière à se mentir et à mentir aux autres pour de l'attention à laquelle ses parents peuvent répondre ? Pourquoi s'en prendre à des innocents ? 

Le jeune couple firent leur possible afin de répondre à ses questions silencieuses.

"Je me suis séparée de mon ex-femme à ses douze ans. Je pensais qu'elle l'avait accepté mais je me suis lourdement trompé apparemment. Accepta Taehyung, les larmes aux yeux. Jungkook est arrivé un an après et, bien qu'il était encore étudiant et gardait un caractère enfantin, il a été rapidement le père parfait que tout le monde rêvait d'avoir."

Cette famille aussi avait connu la douleur de la séparation, d'un déchirement brutal laissant des cicatrices d'abord imperceptibles qui allaient se manifester des années plus tard. Le châtain comprenait, en rajoutant sa propre expérience, que le divorce faisait d'incroyables ravages sur les enfants. Il avait tant été concentré sur sa propre douleur à cette époque-là qu'il n'avait aucunement décelé la détresse de Jaein.

Cette situation n'était pas anodine. Les enfants n'étaient pas idiots. Ils savaient que les ruptures étaient une grande épreuve pour leurs parents. Par conséquent, ils feintaient l'indifférence dans le seul et unique but de les rassurer, et de leur dire en quelque sorte "je vais bien moi, prends soin de toi avant tout, mon bien-être doit passer après le tien". Et, bien sûr, Namjoon, Chanmi et Taehyung y avaient cru tout bêtement. Aujourd'hui, ils en payaient le prix fort.

"Vous savez Namjoon, j'étais loin de me douter qu'elle était capable de tels chantages. En temps normal, c'est une fille on ne peut plus normal comme on dirait. Lui confia le noiraud après une longue heure de conversation. Elle avait des soucis dans son établissement mais on lui apportait tout l'amour dont elle avait besoin, elle avait l'air contente malgré tout. Je ne lui ai pas appris à faire ça.

- Et maintenant que tout cela se soit passé, j'imagine que vous avez quelques réponses ?"

À cette question, les deux amoureux pâlirent d'un seul coup, ils se regardèrent, anxieux. Quant à leur réaction, le plus âgé en fut troublé. Depuis tantôt ils enchaînaient les sujets sensibles les uns après les autres mais cette "simple" question leur avait fait perdre tous leurs moyens. Comme s'ils s'apprêtaient à partager la pire nouvelle du monde.

Et c'était le cas.

Bien qu'angoissé, Taehyung lui répondit honteusement, un minimum rassuré par la main de son amant qui s'était logée sur son genou.

"Écoutez... Il faut savoir que Shinhye, ce jour-là, n'a commis aucune tentative de suicide."

Confusion.

Compréhension.

Étonnement.

Fureur.

Namjoon était passé par toutes ces étapes en seulement une minute. Et il était loin de se calmer car les révélations n'étaient pas achevées.

"Nous avons lu tous ses messages. Ce jour-là, elle était avec nous, à un dîner de famille et je peux assurer qu'elle allait bien.

- Ou semblait aller bien. Hésita le coloré.

- Le lendemain, quand elle a appris par une de ses amies que votre fille avait mis fin à ses jours il y avait de cela quelques heures, elle est restée dans sa chambre. Sans jamais descendre pour manger ou discuter. On avait pensé qu'elle avait juste besoin de se reposer comme les cours devenaient intenses...

- Et puis le soir, j'ai voulu prendre un anti-douleur parce que j'avais une minuscule fièvre. Notre armoire à pharmacie était complètement vide, il ne restait plus rien. Je ne sais même pas pourquoi j'ai spontanément couru dans sa chambre... J'étais arrivé trop tard. Elle était au sol, blanche, les yeux révulsés, et..."

Jungkook vit une profonde angoisse habiter son conjoint, il lui demanda donc de ne point continuer. Lui non plus ne se sentait pas bien, il avait envie de crier, de pleurer et de se frapper tant cette étiquette de beau-père indigne ne parvenait pas à s'effacer de son front. Ce drame familiale ne l'avait en aucun cas aidé.

De son côté, le châtain resta taiseux, bouleversé par cette révélation.

"Et toutes les autres fois où elle a menacé Jaein de se tuer, où elle la laissait sans nouvelle pendant des jours en lui faisant croire qu'elle séjournait à l'hôpital, elle mentait aussi. On a passé des nuits entières à voir quel message correspondait à quel moment de la journée. La plupart du temps, elle était avec nous lorsqu'elle envoyait ce genre de message.

- Rien ne pourra excuser nos erreurs et notre ignorance, mais nous sommes sincèrement désolés Namjoon. J'aurai tellement souhaité être au courant de tout ça pour l'arrêter à temps, elles auraient été sauvées toutes les deux."

Dans sa voix, une profonde sincérité pouvait être discernée. Il pouvait parier que ses vis-à-vis étaient prêts à se mettre à genoux pour implorer son pardon. Mais il n'avait pas besoin de ça. En réalité, il n'avait plus besoin de quoi que ce soit. C'est pourquoi il se redressa du divan, se préparant physiquement à se lever.

"Je ne peux pas vous en vouloir. Plus le temps passe, plus je me rends compte à quel point être parent est tellement compliqué. Beaucoup plus qu'on ne le croit. Vous vous en voulez déjà bien assez, je ne vais pas en rajouter, je n'en vois aucun intérêt. J'ai eu mes explications et je les ai eues, je suis désolé si cela vous a fait remonté, tout comme moi, d'horribles souvenirs. Je sais combien c'est dur de tout perdre."

Enfin... Il leur restait l'amour. Chose que Namjoon n'avait pas.

"Je ne vais pas vous déranger plus longtemps. J'ai besoin de réfléchir et de me reposer, j'espère que vous le comprenez. Je vous remercie de m'avoir accepté ici. Si jamais vous avez besoin de quoi que ce soit, n'hésitez pas à me contacter. Restez forts."

💜💜💜

Coucou, moi rapide = exploit

PS: dans les chapitres précédents, j'ai écrit Park Shinhye au lieu de Kim Shinhye, je modifie ça quand je peux.

Bonne journée

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