нaιne.
Cher Toi,
Je ne sais même pas pourquoi je dis "cher", puisque tu ne l'es pas. Si tu pouvais me quitter, partir, me laisser, j'en serais contente. Je ne sais même pas ce que tu es exactement, ni qui tu es. Cependant, je sais ce que tu me fais. Et c'est pour ça que je ne veux plus de toi. J'aimerais que tu disparaisses, définitivement. Mais comment faire ? Comment faire pour que tu me fiches la paix ? Tu n'as même pas de forme, je ne sais pas à quoi tu ressembles, alors comment puis-je savoir ce qui serait le plus efficace contre toi ?
Tu me tues, tu me gâches la vie, tu me brises de l'intérieur. Alors que mes yeux savent s'émerveiller des choses les plus simples, tu arrives à me les brûler devant ces mêmes choses. Tu arrives à me faire ressentir des émotions négatives que je ne ressentais pas avant. Depuis que tu es là, je me fais tellement de mauvaises illusions. J'ai l'impression que je ne réussirai jamais rien dans ma vie, j'ai encore moins confiance en moi, en mes ami.es, en tout. J'ai l'impression d'être seule au monde. Partout. Au lycée, à la maison, sur les réseaux sociaux, dans ma tête. Partout. J'ai l'impression que tout ce qui faisait ma vie me délaisse, m'abandonne. Alors je ne vais te le dire qu'une fois...
Va-t'en. Laisse-moi. Je ne veux plus de toi ! Je veux que tu partes ! Je veux que tu meures, je veux que tu voles en éclat, je veux que tu te brises comme tu me détruis ! Je veux que tu exploses violemment, je veux que tu t'effaces, je veux t'oublier ! Je veux te vaincre ! Je ne veux plus te sentir, je ne veux plus que tu existes ! Laisse-moi respirer ! Laisse-moi tranquille ! Va établir ta dictature ailleurs ! Va imposer tes volontés et tes visions obscures ailleurs qu'en moi ! Arrête de briser mon cœur ! ARRÊTE !
Tu n'as pas de forme, mais je vais t'en attribuer une. Tu es cette personne froide, insensible, narquoise, mesquine, cette personne en face de moi, assise sur cette chaise, qui me regarde de façon mauvaise. Ton regard est dur et tranchant, ton sourire faux et glacial, tes mains croisées sur la table sont immobiles et meurtrières, ta posture est arrogante, orgueilleuse. Tu te tiens droit.e, tu me fixes sans cligner des yeux, tu me sondes, tu me communiques tout ce qu'il y a de plus mauvais. Par ton regard froid et vide tu aspires mon âme, mes émotions positives, puis tu les fais voler en éclats. Elles s'éparpillent tout autour de moi, dans cet air saturé par ta violence.
Je te fixe et ma mâchoire se contracte. Je dois me faire violence pour ne pas me lever d'un seul bond, pour ne pas arracher mes écouteurs de mes oreilles ni pousser violemment mon téléphone, mon ordinateur et mes affaires scolaires sur le côté avant de te mettre mon poing dans ta figure. Oh oui, tu peux rire et me dire que de toute façon, tu n'es pas matériel, je m'en contrefiche. Dans ma tête tu te prendrais toute ma rage et ma haine dans la face, et ça me satisfait grandement.
Tu ne mérites rien d'autre que de souffrir. Toi qui passes ta vie à gâcher la mienne, toi qui passes ton temps à me tourmenter, me tourner autour, me souffler aux oreilles ce que je ne veux pas entendre, ce que je ne dois pas entendre.
Le pire c'est que tu arrives à me persuader de tous ces mensonges. Oui, je suis seule au monde. Tout le monde me tourne le dos. Hier, dans mon lit, je n'ai pas trouvé le sommeil, et ce à cause de toi. Tu as passé toute la journée à me susurrer à l'oreille que j'étais seule et que plus personne ne m'aimait, que tout le monde m'ignorait. Tes paroles ont hanté ma nuit, l'ont peuplée de cauchemars et de pleurs que je n'avais jamais eus.
La tête levée vers le Ciel hier soir, j'ai imaginé que tu étais là, au milieu de ces chauves-souris qui dansaient au-dessus de moi, j'ai espéré que tu étais là, car je criais, je criais ma douleur, je criais ma violence, je hurlais mon envie de te briser. Je veux gagner contre toi. Je veux gagner cette guerre, mais...
C'est impossible. Tu me l'as dit toi-même, tu seras toujours là. Le sourire sadique que tu arbores me donne des envies de meurtres. Je pourrais aller dans la cuisine, prendre un couteau et poignarder violemment toutes les personnes présentes dans la maison tellement je veux tuer. Tuer quelque chose. Tuer quelqu'un. C'est toi que je veux tuer. Mais tu es tellement persuasif, ou persuasive, que tu arriverais à me faire croire que tu habites l'une des personnes qui me sont le plus chères, me poussant à la condamner. Je te hais pour ça.
La pluie tombe. Elle frappe violemment les vitres et le toit de la maison. J'imagine que c'est la pluie de mes coups sur ton corps, sur toi. Je n'ai pas assez de mots pour décrire tout ce que je ressens envers toi.
Oui, tu perds ton sourire. Tu sais, personne ne pourra t'aimer. Tu as beau être magnifique, d'une beauté renversante, ça n'est pas pour autant que tu es quelqu'un dont on veut dans notre vie. Ou quelque chose, je ne sais pas.
J'aimerais tellement savoir ce qui te permet de vivre, d'exister. Je prendrais cette chose dans mes mains, je la broierais si fort que du sang noir - noir comme ton cœur - en coulerait, se répandrait tout autour de toi, pour te noyer dans ses profondeurs abyssales, pour te plonger dans un océan de négativité et de violence sans nom. Tu m'empêches de respirer, de vivre.
Tu me fais angoisser pour tout et rien, tu me fais haïr mes amies alors qu'elles ne font rien de mal, tu me les fais détester parce que tu arrives à me persuader qu'elles ont tout ce que je n'ai pas et que j'aimerais avoir, plus qu'autre chose. Tu arrives à me faire rager quand les gens parlent sans moi alors qu'ils savent que je suis là. Tu arrives à me faire ressentir tout ça alors que je n'en veux pas. J'aimerais tellement que tu vives la même chose. J'aimerais tellement te traîner dans la boue, te priver de tout ce qui fait ta joie obscure, étaler tout autour de ma maison tout ce qui est signe de ta victoire, pour l'écraser, danser dessus, cracher dessus, vomir ta tête et ton être dessus, l'éclabousser de ton sang, et faire brûler tout ce joyeux mélange de ton âme noircie et indésirable.
Tu ne mérites pas d'habiter en moi, tu ne mérites pas de vivre dans ma maison. J'arrive à te laisser derrière moi pendant un court instant, cet instant magique où je suis seule, dans un autre monde, le seul monde où j'accepte de l'être. Pour ne plus avoir peur de penser, pour ne plus avoir peur que les autres entendent ce que j'imagine et qu'ils me jugent.
« Are you alone ? Are you afraid ? » Voilà ce qui résonne à mes oreilles actuellement. « Are you searching for me ? » Oui, je suis seule, à cause de ta présence. Oui, je suis effrayée de ce que tu aimes me faire. Et non, je ne te cherche pas. Je cherche ton ennemi.e. Celui ou celle qui te ferait définitivement disparaître de ma vie. Je cherche ce qui aurait le pouvoir de t'effacer.
Et voilà que tu retrouves ce stupide sourire arrogant.
Oui, tu as raison. Tu ne pourras jamais disparaître. Je n'y arrive pas. Et je n'y arriverai jamais.
Je n'arrive plus à te regarder dans les yeux. Je détourne la tête, toute rage envers toi se volatilise. J'ai encore perdu. Encore.
Je te déteste tellement, mais je te laisse gagner. Tu es trop fort.e, j'abandonne.
Encore une fois. Et tu recommenceras. Et je te fixerai à nouveau dans les yeux, je te défierai encore. Et j'abandonnerai à nouveau. Et tu regagneras. Toujours.
Peut-être qu'au fond je n'ai pas envie de te battre ? Pas pour l'instant ? Comme si ça me faisait une excuse pour tous ces moments de violence qui me gagnent, ces envies de me foutre en l'air, ces envies d'abandonner mes projets.
Car au fond, c'est ce que tu veux. Me voir tout abandonner, tout perdre. Et voilà que je tremble de nouveau. De désespoir, mais par dessus-tout, de haine.
Parce que, oui, je me hais.
Je me hais de te laisser gagner, je me hais d'être faible. Je te hais de me faire perdre, je te hais d'être aussi fort.
Impossible de te vaincre ? Non. Mais difficile ? Oui.
Ça me paraît insurmontable. Le prix à payer est trop cher. Je ne peux pas, je ne peux plus.
Une larme coule.
Je me hais si fort.
Sarah.
~~~~
Ce texte a été écrit dans l'optique d'un concours ; le thème était la haine, et j'ai obtenu la première place ^^
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top