PDV Shota

Les alliances que le bijoutier me montre ne me plaisent pas particulièrement, jusqu'à ce que l'une d'elles attire mon attention. Couleur d'or avec de petits motifs simplets en argent, je la trouve bien mieux que n'importe quel autre. C'est celle-là que je vais offrir à Hizahi... Mon cœur s'emballe étrangement quand je pointe le bijou et l'homme potelé s'empresse de chercher une taille qui ferait à mon homme. Comme nous avons environ des doigts semblables, c'est moi qui l'essaie avec une légère timidité. Finalement, porter une bague ne sera pas si désagréable. J'observe le résultat avec admiration.

-Shota? Si on m'avait dit que je te croiserais ici, je ne l'aurais pas cru!

Je me raidis lorsque je reconnais cette voix et je m'empresse de retirer la bague avant de tourner la tête vers Midnight. En tenue civile assez vulgaire, la femme me regarde avec amusement avant de s'approcher. Je n'ai pas particulièrement envie qu'elle me pose des questions. Ce que je souhaite faire est privé.

-Qu'est-ce que tu fais là, grognai-je.

-Je passais dans le coin pour regarder les nouveaux bijoux et... attends, c'est ce que je pense que tu as dans les mains?

La femme fixe ma main, les yeux brillants, et je détourne la tête d'embarras. Avoir su que je la croiserais ici, j'aurais surement été dans une boutique plus éloignée. Nemuri s'avance pour regarder de plus près ma trouvaille, puis un large sourire se crée sur ses lèvres.

-Tu vas enfin lui demander sa main? Mais c'est tellement génial! Vous êtes beaucoup trop mignons tous les deux! J'imagine déjà la réaction de Hizashi.

-Bon, garde ça pour toi s'il te plait. Je ne suis pas encore certain que c'est une bonne idée avec les médias.

Je sors mon porte-monnaie pour payer l'alliance que le bijoutier met silencieusement dans un petit boitier. C'est quand je vois cet écrin que je me dis que cette demande en mariage est la meilleure idée qui soit. Comme Midnight l'a dit, Hizashi sera l'homme le plus heureux du monde. Dans le fond, son bonheur est tout ce qui m'importe et je devrais me moquer de l'avis des autres. Je me rappelle malgré moi de notre premier baiser...

15 ans plus tôt...

Cette année, Yuei a décidé de faire plaisir à ses élèves en organisant un voyage scolaire de plusieurs jours en montagne. Même si nous avons un peu d'entrainement à faire chaque jour, cette sortie qui permet de passer du bon temps en compagnie de nos camardes de classe me plait beaucoup. Nous apprenons à nous connaitre dans un contexte hors que l'école. Chaque moment loin de ma maison est apprécié, surtout quand je suis avec Hizashi.

Nous passons notre séjour dans deux petits chalets en rondins qui se trouvent à quelques minutes de marche d'un centre de ski. Entourée d'une verdoyante forêt, la bâtisse de droite est réservée aux filles alors que l'autre est pour les garçons. Comme les chambres sont communes, j'ai pris un lit superposé avec Hizashi. Cette ambiance de camp de jour est vraiment agréable.

Des skis nous sont fournis pour que nous puissions aller profiter des pentes dans nos temps libres. C'est la première fois de ma vie que je pratiquais ce sport et grâce à mon équilibre déjà bien développé, j'ai rapidement appris à être doué contrairement à mon meilleur ami dont les chutes n'attendent pas l'autre. C'est parfois gênant de devoir m'arrêter avec lui en plein milieu de la piste pour l'aider à remettre ses skis qui sont restés plus haut. Il lui est même arrivé deux fois de m'emporter avec lui dans sa chute.

-J'ai les oreilles gelées, je ne sens plus aucune partie de mon corps, se plaint Hizashi sur la route qui mène au chalet.

-C'est normal si tu te roules plus souvent dans la neige que tu te laisses glisser, répliquai-je.

-C'est la faute de mes skis. Je suis certain que les tiens vont mieux que les miens. Si ça se trouve, ils ont été trafiqués pour m'empêcher d'être un skieur professionnel!

Je souris légèrement et nous pénétrons dans le chalet. Dès que la chaleur caresse mon visage, je m'empresse de retirer mon large manteau et tout mon habit d'hiver. Cette dernière est légèrement trouée par endroit et loin d'être joli contrairement à celle des autres. Près de moi, le blond fait de même, tout tremblant. J'étends nos vêtements mouillés près du feu de bois et je vais retrouver Hizashi qui s'est enroulé dans les couvertures de son lit.

-Tu as vraiment si froid? Demandai-je curieusement.

-Je suis officiellement un pauvre glaçon.

Ses petites lunettes sont embrumées par-dessus ses beaux yeux verts, ce qui m'amuse. Sans réfléchir, je me glisse près de mon meilleur ami sous les couvertures pour aussi profiter de cette chaleur. Sans que je comprenne pourquoi, les joues du blond tournent au rouge  et il détourne le regard. Ma main se pose sur la sienne qui est glaciale et j'essaie de la réchauffer. Depuis ma fête d'anniversaire, il nous arrive souvent de nous tenir la main.

-Tu es vraiment très froid, remarquai-je, si ça se trouve, tu vas attraper un bon rhume.

-T-tu crois? Je n'espère pas.

Je me contente de hausser les épaules et je m'allonge un peu mieux sur le lit. Cela fait trois jours nous sommes toujours trop nombreux dans cette bâtisse, donc je profite de notre solitude pour me reposer un peu. Hizashi me regarde avec un petit sourire avant de s'allonger près de moi. Comme le lit est petit, nos corps se retrouvent collés et je sens son souffle chaud effleurer agréablement mon visage. Cette proximité fait battre mon cœur... Je me sens toujours si bien avec lui, mais je ne saurais dire pourquoi.

Le blond retire ses lunettes qu'il pose près de lui pour être plus confortable, puis ses petits yeux verts légèrement inégaux croisent les miens. Je n'ai pas envie de parler, mais je vois à ses joues qu'il semble hésiter à dire quelque chose. Je sais que le silence le rend souvent mal à l'aise, mais habituellement, il le supporte pour moi.

Hizashi prend une grande inspiration. Il ouvre la bouche pour dire quelque chose, mais il la referme aussitôt. Pourquoi semble-t-il tout à coup si timide? Je viens pour lui poser la question, mais le blond avance rapidement son visage vers le mien. J'ouvre grands les yeux quand ses lèvres se retrouvent collées aux miennes, pas certain de bien comprendre la situation. Est-ce qu'il m'embrasse? Pourquoi?

Mon meilleur ami se retire, comme si son propre geste le terrifiait. Il me fixe, attendant surement de voir ma réaction. Ses joues sont plus rouges qu'une tomate.

-Pourquoi as-tu fais ça... soufflai-je.

-C'est... je... bah c'est que... je t'aime!

Hizahi détourne la tête en fermant les yeux, comme pour fuir ma réaction. Vient-il juste de me dire ce que je pense? J'ai la tête qui bourdonne étrangement, le cœur qui s'emballe. Mon meilleur ami me fait une déclaration d'amour... il m'a embrassé... Voyant que je ne réponds pas, il prend une grande inspiration et reprend.

-Tu m'as toujours plus, mais ça doit faire un moment déjà que j'ai réalisé que je suis amoureux de toi. Je sais que ça peut paraitre étrange. Je suis un gars et ton meilleur ami, mais... mais si tu ressens la même chose, j'aimerais devenir plus. Je ne veux rien gâcher entre nous si tu n'as aucun sentiment!

Suis-je amoureux de lui? Je ne connais rien à l'amour, mais je sais que je n'ai jamais été aussi bien avec quelqu'un qu'avec lui. Il me rend heureux et j'apprécie tout particulièrement nos petits contacts physiques. Simplement penser à ce rapide baiser me plait.

-J'aimerais que tu recommences, avouai-je timidement.

-Hein?

-Que... que tu colles tes lèvres aux miennes...

Hizashi ouvre la bouche, surpris. Il hoche positivement la tête et avance timidement son visage vers le mien. J'attends les yeux fermé, plus gêné que jamais. Lorsque ses lèvres se pressent contre les miennes une nouvelle fois, je me raidis. C'est si étrange comme sensation... chaud. Le blond passe maladroitement une main sur ma joue et je m'éloigne brusquement quand sa langue pousse sur ma bouche. Qu'est-ce qu'il fait ?! Je le regarde, choqué.

-Pourquoi tu as léché mes lèvres? Demandai-je, c'est bizarre.

-J-je voulais juste t'embrasser avec la langue.

-Ah... d'accord.

Sans attendre, je reprends le baiser. C'est toujours aussi gênant, mais je commence déjà à m'y habituer. Je vais vite en devenir dépendant.