CHAPITRE 5

Les portes de l'ascenseur s'ouvrent à l'accueil vers huit heures trente. Young-sun s'est changé pour éviter toute contamination. Il se dirige vers son collègue Hyun-su.

— Tu as sonné en bas ? questionne-t-il.

C'est le plus jeune de l'établissement. Il s'occupe, entre autres, de l'accueil et de la procédure de funérailles avec les familles.

Hyung ! Ça va ?

Hyun-su lui rappelle étrangement Jungsook. Lui aussi l'appelle hyung dans ses cauchemars. Pour autant, ils sont très différents physiquement. Jungsook a ce qu'on pourrait appeler une « puppy face », il est d'une taille moyenne et possède un style plutôt classique. Quant à Hyun-su, autant dire que c'est un géant. Il a un tatouage entier sur le bras droit qui part de sa main à son épaule. Il a également une seule boucle d'oreille au lobe gauche. Il a un style complètement différent de Jungsook, un peu « bad boy » comme diraient les femmes. En même temps... Ce n'est pas la même époque !

Hyun-su continue sur sa lancée.

— Oui, il n'y a pas de réseau en bas. Le lieutenant Jung Il-wan l'avait oublié... Il t'aurait laissé des messages sur ton portable, mais il a finalement appelé ici. Il veut te voir.

Young-sun serre la mâchoire. Ce n'est pas qu'il n'aime pas Il-wan, mais ce type est du genre pressé et par moment beaucoup trop amical.

— Pour le cadavre défiguré ? On y a passé que trois heures ce matin... On ne fait que commencer les examens.

Hyun-su fait une petite moue.

— Je me doute, mais, tu sais comment il est... Il veut des réponses, même celles minimes.

— Oui, je sais.

— Il avait l'air heureux de reprendre une affaire avec toi aussi... La dernière fois, c'était il y a presque neuf mois, non ?

— C'est ça.

Young-sun se force à ne pas rouler des yeux devant Hyun-su. Il n'aime plus vraiment traîner dans les locaux de police. Les gens sont trop hypocrites là-bas. Hyun-su lui donne un nouveau sourire. Il serre le poing et le lève légèrement.

Fighting, hyung !

Young-sun le remercie silencieusement. Il sort ses clés de voiture, sort de l'établissement et se dirige vers cette dernière. Il met dans son GPS l'adresse du commissariat et se met en route.

Durant son trajet, il s'arrête à un feu rouge en plein centre-ville. Les passages piétons y sont immenses. Il tapote son index sur son volant en rythme, en attendant... Tout en se demandant quel reproche « gentil » et hypocrite Il-wan va encore lui faire. Il n'aime pas vraiment ses remarques. Ils ont chacun leur boulot, chacun leurs missions... Il-wan doit rester à sa place de flic. Il n'est pas médecin légiste. C'est le rôle de Young-sun, pas le sien. Il n'y connaît rien, au final ! Alors, ses remarques à deux balles, il peut les garder pour ses collègues malpolis...

Young-sun soupire. Rien que de penser à cette future rencontre l'agace déjà. Il serre son volant. Certaines de ces phalanges deviennent blanches. Sa mâchoire est contractée. Son regard est posé sur le feu rouge. Il espère qu'il prendra son temps pour passer au vert.

Ses yeux se posent ensuite sur la foule qui traverse la route. Séoul est une ville qui ne dort jamais. Alors, voir autant de monde ne le choque pas. Les Coréens ont l'habitude de commencer le travail tôt et de finir très tard.

Mais soudain... Son sang ne fait qu'un tour et il reste scotché par une scène surréaliste.

Poppy Clarke... La fille de ses cauchemars... Elle est en train de déambuler tranquillement face à sa voiture.

Elle est... Réelle ?

Il ferme les yeux pour essayer de l'effacer de sa vision. Ça lui est déjà arrivé de voir Poppy à la place d'un autre cadavre, se réveillant et essayant de lui serrer le cou... Ou encore, de se tourner dans son lit et de croiser son regard. Alors, peut-être que là, c'est aussi une vision... Ça ne peut être que ça !

Mais quand il ouvre les yeux, elle est encore là. Elle est de l'autre côté maintenant. Bordel. C'est la même fille. Exactement la même. Sans les vêtements d'époque évidemment.... Mais c'est elle. Il n'y a aucun doute. Il en est persuadé. Il l'observe s'éloigner de lui, alors que des klaxons tentent de l'extirper de sa torpeur.


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"Fighting" est un mot hybride traduisant un encouragement

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