— Je pensais à vous justement. Je me disais qu'on ne s'était pas vus depuis les fêtes de fin d'années. Vous ne travaillez plus avec ce beau jeune homme ? questionne Go Hae-dal sur leur chemin.

Madame Go est une collaboratrice de la police judiciaire. Pam l'a rencontré à plusieurs reprises depuis le mois de Septembre. C'est grâce à elle que les enquêtes se complètent. Le docteur Kang ne pourrait pas en apprendre plus sur la vie de la victime sans l'aide de Madame Go. Et Il-wan – ou le lieutenant Baek - ne pourrait pas mener des interrogatoires plus précis sur les suspects. Les archives de l'état civil sont d'une grande importance. C'est une mine d'or.

— Plus maintenant... Nous connaissons des complications sur une affaire en cours. Mes collèges sont débordés, alors, ils m'ont envoyé chercher les documents adéquats, ment la jeune Française.

Madame Go lâche un soupir exténué en secouant la tête.

— Et ils envoient la stagiaire faire les sales besognes... C'est culotté !

— C'est malheureusement le monde du travail.

Madame Go sort une carte et la passe dans une machine. La porte, face à elles, s'ouvre. Elles continuent leur chemin.

— Vous m'avez dit avant le nouveau siècle, c'est ça ?

— Oui. Je n'ai pas de date précise... Mais ce serait entre les années vingt et les années quatre-vingt, logiquement.

Madame Go ouvre une autre porte et pénètre dans une immense pièce renfermant une multitude d'étagères, contenant elles-mêmes des dossiers cartonnés. Des registres sont positionnés devant chaque rangée d'étagères.

— Le nom, c'est Hee Jia, c'est ça ? vérifie madame Go.

— Oui.

Elle compte avec son doigt et s'avance. Pam la suit silencieusement. Madame Go s'arrête à la quatrième rangée sur leur gauche. Elle feuillète le registre.

— Je l'ai trouvé ! « Étagère quatre, tablette C », lit-elle.

Elle se tourne pour sourire à Pam.

— Allons-y !

La jeune blonde tente de cacher son agitation. Elle se mordille nerveusement le pouce droit. Elle est à la fois excitée, impatiente et apeurée. Elle est à quelques secondes de découvrir la vérité... Le suspense est à son comble.

Madame Go s'arrête à l'endroit indiqué dans le registre. Elle glisse son doigt sur la ferraille de la tablette et s'arrête devant un dossier. Elle le sort, parmi une centaine sur la même tablette, et le tend à Pam.

— Voici le dossier de Hee Jia.

— Merci beaucoup. Votre aide m'est vitale.

Pam ouvre le dossier, mais plusieurs documents glissent et tombent au sol. Pam fléchit les genoux. Madame Go l'arrête.

— Non, non, je vais le faire.

Elle incline la tête pour la remercier et commence à parcourir les différents documents encore présents dans le dossier, tandis que madame Go regroupe les autres documents. Pam déniche le livret de famille.

Ong Beom était bien le mari de Hee Jia. Ils se sont mariés en 1950. Ils ont eu un fils, Ong Jung, mais qui est décédé très jeune, en 1972. Il y a un autre nom que Pam n'arrive pas à lire... C'est un vieux document brunit par le temps... Elle croit lire Hee Min ou Hee Jin... Probablement son père.

Cette découverte ne l'aide pas. Si cette famille a perdu son fils très jeune, il ne devrait plus y avoir de descendance. Alors, qui imite leurs crimes ? Des fans ? Des falsificateurs ? Des personnes qui les connaissaient et qui ont pris la relève ?

Pam est déçue et en colère. Young-sun s'est sacrifié pour une information vétuste.

Madame Go se redresse en soupirant et en organisant les documents dans ses mains.

— Aigoo ! Cette Hee Jia était une jolie jeune femme dans les années soixante... Vous savez à qui elle me fait penser ?

— Non, à qui ? questionne Pam en continuant à farfouiller dans le dossier à la recherche de documents utiles.

— Irene du groupe Red Velvet. Vous connaissez ?

Le sang de Pam se glace. Elle croit avoir mal entendu sur le coup.

— Qui ça ?

Elle prend les documents que madame Go lui tend. Elles font un échange. Pam est médusée, troublée, embrouillée... Elle ne comprend pas ce qui se passe, et pourtant, dans ses mains, elle tient la même photo qu'elle a trouvée dans les cartons du docteur Kang. Sa tête se secoue. Ça doit être un sosie ou quelque chose comme ça...

Mais non. La photo suivante, c'est le docteur Kang bébé. La même que Pam a déjà vu aussi. Sa gorge s'assèche et Pam a des bouffées de chaleur. Son rythme cardiaque bat dans ses tympans. Un autre document prouve l'acte de vente de la Vieille Bâtisse à leur nom. Un autre certifie leur décès dans les années deux mille...

Traître, perfide, félon, scélérat... Les mots ne manquent pas pour décrire le docteur Kang. Il mène une double vie de criminel et de manipulateur... Il a abusé de sa confiance. De leur confiance.

Pam inspire longuement pour ne pas craquer. Ses mains tremblent. Elle ressent de la honte. Ong Jung n'est pas mort. Ong Jung est le docteur Kang. Il ne faut pas être idiot pour comprendre qu'il s'est fait passer pour mort pour avoir une nouvelle identité, et ainsi, faire encore plus de victimes.

Le carnet. Bordel... Le carnet ! Pam s'en souvient. C'était le carnet qu'elle n'avait pas osé ouvrir, il y a deux mois de ça. Elle avait cette preuve depuis le début sous les yeux... Que c'est pénible !

Young-sun savait à quoi ressemblait les meurtriers et le bébé. Il a reconnu Hee Jia. C'est pour ça qu'il n'aime pas le groupe Red Velvet... L'autre jour, il a éteint la radio quand leur musique passait. Et quand Pam lui a montré la photo, Young-sun a tout de suite compris. Il s'est rendu à la Vieille Bâtisse pour mettre les preuves en sécurité. Il a dû voir la photo du docteur Kang bébé... Pour lui, cela a probablement été une trahison encore plus difficile. Le docteur Kang était comme un mentor, comme un père pour lui...

Si Sang-kyu est dans le coup, alors... C'est qu'il est surement de la même famille du docteur Kang, voir son fils. Pam ne voit pas d'autres solutions. Sang-kyu ne lui a jamais présenté ses parents. Il parlait très peu d'eux pour éviter que Pam ne pose de question... Il l'a trahi, elle aussi.

Et pour le lieutenant Baek ? Les aidait-il à détruire et à cacher des preuves pour qu'ils ne soient pas confondus ? Le docteur Kang a de l'argent. Le lieutenant Baek aime l'argent... Il a été corrompu.

Ran Kang-goo. Ils n'ont jamais pu avoir toutes les informations sur lui... Et Pam n'a pas eu le temps d'entamer cette recherche. 

— Madame Go, excusez-moi...

— Omo ! Ma petite ! Vous êtes toute pâle... Et tremblante comme une feuille !

Elle tend les documents et désigne le dossier.

— S'il vous plait, cachez-le pour moi... Mais ce n'est pas tout. Vous vous souvenez de ce Ran Kang-goo ? Mes collègues ont cherché toutes les informations sur lui, et ils n'ont quasiment rien trouvé.

— Rien trouvé ? Impossible ! Son dossier était aussi lourd qu'un cartable de collégien.

Pam fronce des sourcils. Son cœur s'accélère.

— Comment ça ?

— Il y avait tout sur sa vie privée et sur sa vie professionnelle. Je m'en souviens très bien ! Le plus gros document du dossier était une sorte de registre.

— Un registre ?

— Oui ! C'était un locataire de voiture. À l'époque, les gens signaient un registre en face du modèle de voiture qui louaient... Vous n'étiez pas au courant ?

Pam se maintient à l'étagère pour éviter de s'évanouir.

— Vous vous souvenez du nom de ce collègue ? Celui qui a pris le dossier ?

— Arf, c'était il y a plusieurs mois de ça... Je crois que c'était un lieutenant... Oui, je me souviens ! Très bel homme en tout cas, si vous voulez mon avis. J'ai été marié quatre fois, je sais de quoi je parle !

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"Aigoo" est une autre traduction de « Oh mon dieu »