Texte n°3

Ton choix

Je ne veux plus le faire

Assis dans notre cuisine, j'avais tenu à profiter du room service pour notre dernier repas.

-J'ai bien réfléchi et je crains que ce ne soit une... erreur.

À cause de l'effort que parait lui demander, il se contentait d'un débit lent, ponctué par moments de pauses plus ou moins courte. Il n'était pas encore au stade du lecteur vocal.

Et dire qu'on étaitt du groupe qui était passé par Londres. Tout ce temps et préparatifs. Un véhicule amenagé envoyé par la clinique devrait passer nous prendre dans un instant. J'avais demandé à l'accueil de nous appeler dès leur arrivée. Toutes nos affaires étaient réglées et mises en ordre. On avait même rédigé nos testaments...

Richard me manquait. Lui, il avait toujours été vif, droit dans ses bottes. Fiable, serein, confiant en son jugement et ses décisions.

-Comme tu voudras répondis-je placidement

Je me levai en emportant assiettes et couverts.

-Je vais appeler la clinique pour les prévenir

-Tu n'as rien... à... redire ?

-C'est ton choix, donc non.

-Tu avais pourtant l'air ravi m'assena t-il. Je veux que tu me dises ce que je pense deviner..

Je le connaissais par-coeur et réciproquement. Combien de temps devrais-je encore tenir ? Malgré tout, j'avais du mal à m'y résoudre. Il était malade. Ce n'était pas sa faute.

Je m'assis face à lui et le fixa sans ciller. Il était si pathétique. Richard lui, était l'incarnation de la force et de la virilité.

-Tu veux savoir ce que je pense ? On s'est marié à vingt ans. Tout notre entourage parlait de folie de la jeunesse, sans doute. Et c'est à présent terminé. Continuer à prétendre le contraire c'est juste malsain.

Je ne supportais pas de le voir ainsi, vivant mais mort à l'intérieur.Les larmes coulèrent de mes yeux sans que je ne puise les retenir.

-L'eutha... Notre plan est le bon. Toi et ensuite moi. Tu as la maladie de Charcot, on a fait face ensemble. Mais plus les années passent, plus je te perds. La perspective que tu sois mourrant n'est pas le probleme. La vérité est que je ne veux pas me lever tous les matins aux côtés d'un étranger.

Il me fixait sans rien dire, alors je continuai

-Je pensais que ta maladie m'avait enseignée le don de soi mais c'est faux. Chaque fois que je te regarde, tout ce que je vois c'est tout ce que j'ai perdu.

-Alors divorçons ! Moi je suis malade, la mort m'attend quoi qu'on fasse ! Cat, tu dois continuer à vivre.

-Tu ne comprends rien ! Je suis morte en même temps que lui !

-Mais arrête de dire ça ! Je suis... devant toi !

-Non ! Je t'interdis de dire ça ! Richard était pleins de vie, charmant, il était tout pour moi. Toi ? Toi tu n'es qu'une pâle copie de ce qu'il a été. Et malgré tes efforts, tu ne parviendras jamais à l'égaler !

Je priai pour que le ciel me pardonne.

-Combien de temps allons-nous continuer à être spectateur de nos vies ? Nous sommes tous les deux la dernière branche de nos familles respectives. On ne sera plus jamais heureux, alors... pourquoi lutter ?

Après une éternité, il répondit :

-D'accord, on suis le plan si tu m'appelles par mon nom

Je n'arriverai pas à le dire. Ce n'était pas lui. Toutefois, si cela pouvait contribuer à le faire céder...

Il mima mollement un geste de sa main droite, comme pour me dire "allez, j'attends".

Je pris une grande inspiration. Le téléphone de la chambre sonna quand, je l'appella pour la première fois depuis sept ans.

-C'est l'heure... Richard

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