Un cours particulier

Pour la première fois de ma vie, je suis inquiet pour cette rentrée. Tout simplement parce que ce n'est pas une rentrée comme les autres. Ce qu'on me demande de faire est impossible. Non pas parce que je n'ai pas confiance en moi, mais parce que je ne sais pas du tout comment faire ce genre de cours...

Je pousse la porte de la salle, après avoir pris une profonde inspiration.

- Bonjour à tous.

- Bonjour, répond en chœur cette petite salle.

- Je suis Monsieur Balley, votre nouveau professeur de positivité.

Comment perdre toute une classe, en une étape, écrit par moi-même.

- Je vais vous apprendre à positiver, me sentis-je obligé de rajouter.

Les élèves se regardent tous, en se demandant sûrement si c'est une blague. Un élève lève la main.

- Oui, jeune homme ?

- C'est un vrai cours, ce machin-là ?

Maintenant, cherchons ensemble comment expliquer à ces élèves que oui, c'est un vrai cours et que je suis même payé pour ça.

- Oui, c'est un vrai cours.

- Mais c'est nul ! rajoute-t-il

- Non ! On ne dit pas « c'est nul », on dit « Super ! Enfin un cours qui sort de l'ordinaire ».

Certains élèves remontent leurs lunettes, d'autres me regardent, plein d'empathie.

- Avez-vous compris le principe ?

Un long soupir se fait entendre.

- On ne soupire pas ! Au contraire, on remplace le « p » par un « r ».

... Et on pense au pauvre professeur qui va faire ça toute son année.

- Bien. Qu'est-ce qui vous déprime le plus ?

Une minute de silence. Puis une élève tente sa chance.

- Ce cours...

Je n'ai qu'une envie, reprendre mes affaires et partir loin d'ici, en courant.

- Et si on faisait un peu de Yoga, pour vous relaxer ?

- Non ! hurlent-ils.

Je m'assoie à mon bureau, et regarde la salle. Non, je n'ai pas préparé de cours. Que voulez-vous préparer ? Rien... Un autre élève lève la main. Finalement, je suis content qu'on discute autant dans mon cours.

- De toute façon M'sieur, tout ce qu'il nous faudrait pour positiver c'est de supprimer les cours.

- Oui, mais vous comprendrez que...

- Et les filles avec ! crie un autre garçon.

- N'importe quoi ! s'énerve l'une d'entre-elles. Dans ces cas là faut vous supprimer aussi !

- Non ! Parce que vous vous passez votre temps à gueuler !

¬- Et vous à jouer les gros bras !

- C'est parce qu'on en a ! Alors que vous, vous êtes insupportable, avec vos règles !

- C'est qu'une fois par mois ! dit une deuxième fille. Alors que chez vous la connerie c'est pour toute votre vie.

- Une fois par mois... C'est vite dit ! Quand on vous entend on pourrait croire que vous les avez tous les jours !

Le ton commence à monter, je décide d'intervenir.

- S'il vous plaît, nous devons discuter calme...

- Faut supprimer les professeurs aussi ! On se réincarnerait tous en chien !

- Et pourquoi pas en chat ?

- Parce que les chats c'est pour les fragiles.

Alors que je suis concentré, sur cette discussion qui est animée, je vois un premier bouchon de stylo voler devant mes yeux. Puis un deuxième. Et même un cahier.

- STOP ! je tente de crier, mais les voix des élèves sont plus fortes que la mienne.

Heureusement, la sonnerie vient vite les couper. Sans un mot, ils prennent leur sacs et se dirigent vers la sortie. Ce premier cours est un véritable échec.