Utopie 8




La Frontière entre le rêve et le cauchemar
       

La chaleur étouffante rend mes vêtements lourds de sueur. Mon souffle humide passe à travers le foulard qui protège ma visage des gifles du sable. Les yeux plissés, la respiration rapide, les membres fatigués, je me fraye un chemin dans les dunes de sable.


À cause de l'immense chaleur, le désert semble irréel, flouté. D'un mouvement lent, je soulève la tête pour regarder le soleil. L'astre me regarde de haut, ses rayons brûlant mes bras nus. Il doit être quatre heures de l'après-midi.


À l'emplacement de mon cœur, collée contre ma poitrine comme si l'argent était fondu dans l'os, ma chaîne militaire laisse entendre des tintements mécontents.


Je m'arrête net lorsque des vertiges me gagnent. Cela fait plusieurs jours que je marche, sans manger ni boire. Mon souffle saccadé me donne l'impression d'étouffer, alors d'un geste vif je retire le foulard qui protège une grande partie de mon visage.


Mes pensées dérivent vers ma vie d'autrefois. Ma femme, mes enfants. Je n'arrive même pas à me souvenir de leurs visages...


Mon esprit revient dans mon corps. Je remarque alors que la tempête de sable a prit fin, et que la nuit est tombée. La température glaciale brûle mes muscles, causant autant de douleurs que le feu. J'enlève ma flasque vide sur le sol, et me couche à terre. Le sable encore chaud me réchauffe à travers mes vêtements.


J'enroule mon foulard autour de ma bouche après avoir inspiré de l'air sablé, puis passe les bords derrière mes oreilles. En chien de fusil, je commence à m'assoupir.


**


Un lueur aveuglante me réveille. J'ouvre un œil en grognant, cherchant le soleil des yeux pour le maudire du regard. Lorsque la lumière de mon ennemi ne m'apparaît pas, mon autre œil s'ouvre. Je me redresse doucement en ignorant la douleur dans mon crâne et mes courbatures insupportables.


J'ai beau tourner la tête de droite à gauche, du paradis aux enfers, l'ennemi ne se manifeste toujours pas. Je baisse le regard pour regarder ma main plongée dans le sable. Les grains sont à peine tièdes. Pour une matinée ? Impossible. Je devrais à peine résister à la chaleur du sol à travers mes chaussures.


Par force de l'habitude, comme après avoir éteint le réveil, je me laisse tombé en arrière en soupirant. Ma tête heurte violemment quelque chose, et ma bosse derrière mon crâne lance des piques dans tout mon corps.


Des papillons s'envolent devant mes yeux, et je me masse doucement les tempes en balançant mon corps d'avant en arrière. Un cri de douleur s'échappe d'entre mes lèvres serrées.


En levant la tête, je remarque des feuilles vertes. Des branches marrons. Un tronc dure et poilu. Et, entrelacé aux doigts imposants de l'arbre, un ruisseau. Jamais la joie ne m'avait emporté aussi haut. Lorsque je bois l'eau fraîche et rassasiante, je sens des gouttes se mêler à la fraîcheur. C'est mes larmes d'espoir.


Mes veines alors parcourues d'énergie, je me relève. Je pose une main sur le tronc rêche du végétal, comme une accolade à un ancien ami. Je dirige ensuite mon regard devant moi. Ma mâchoire inférieure se décroche en voyant ça, mes yeux s'écarquillant soudainement.


Mes pieds me propulsent en avant, et je courre à une allure incroyable. Des yeux, je fixe le rêve au devant. Sauf que je suis bien éveillé.


Lorsque mes pieds trébuchent sur quelque chose, je m'affale de tout mon long sur le sol. Je soupire en maudissant mon manque d'équilibre. Je relève la tête, et c'est alors que je vois le vert rayonnant.


À perte de vue, un gazon s'étend tout autour de moi. Quand je jette un coup d'œil en arrière, je remarque que la limite du sable et de l'herbe forme une sorte de frontière entre le cauchemar et le rêve.


Je ne sens même plus l'odeur répugnante des grains. Seules la terre et l'herbe rejettent une odeur enivrante et inlassable.


Alors que je me relève doucement, une lueur blanche m'aveugle. Je protège mes yeux de mes mains, et me baisse doucement. Lorsque mes paumes s'écartent de mon visage, je sens une douce chaleur caresser mes cheveux. En regardant droit devant, j'écarquille une nouvelle fois les yeux. Mon émerveillement est sans limite. Les mots ''majestueux'' ou encore ''divinement éblouissant'' me semble trop faible face à la perfection devant moi.


Une sorte de château en verre se dresse devant moi, ses hautes tours dominant le ciel au-delà des dieux. La lumière se reflète sur chaque paroi de chaque structure en éblouissant les petites maison aux pieds du palais.


Celles-ci flottent sur l'eau, et je remarque que le ruisseau de toute à l'heure se jette dans ce lac magnifique. Énormément de rivières décrivent des sillons dans l'herbe, veines se créant un chemin jusqu'au cœur éclatant de vie.


Les rayons du soleil illuminent le paysage utopique, donnant alors un effet de rêve à tout ça. Néanmoins, après avoir frotté mes yeux, pincé vigoureusement mes bras puis mon visage, je ne me réveille pas en sursaut. Car je suis bel et bien réveillé.


De Lenamj2012 .

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