SabrinaCatrain
Le soleil est encore à son paroxysme aujourd'hui et les températures douces pour cette saison, nous annoncent un hiver dans une douceur printanière.
Les arbres ont beau avoir perdu leur feuillage, il n'en reste pas moins que ce n'est pas encore cette année que nous allons fêter les fêtes de Noël comme ceux de mon enfance. Un blanc immaculé de neige à perte de vu, ou chacun, les voisins, les amis, la famille se regroupaient autour d'un vin chaud, alors que nous, les mômes, nous participions au concours des plus beaux bonhommes de neige du village.
J'en souris encore en y pensant, ça c'était de l'hiver, froid et sec. Rien de tel pour tuer les microbes, comme aimaient le dire les anciens.
- Sophie ton sac ne va pas se préparer tout seul ma grande, m'interpelle ma grande sœur Annie.
Je n'ai absolument pas envie d'aller à ce fichu voyage organisé pour toute la famille. Je n'ai qu'une envie, du haut de mes dix-sept ans, c'est de rester cloîtrer chez moi ou alors, aller faire la fête avec les copines. Non pas m'ennuyer à mourir dans un repas de famille ou je suis la seule de mon âge et dont les gamins vont continuellement me sauter dessus pour que je joue avec eux.
Quelle poisse...
C'est avec nonchalance que je me dirige vers cette maudite valise, l'ouvre et regarde dans mes placards ce que je peux bien amener. Rien, absolument rien ne me fait envie et du coup, j'y jette tout et n'importe quoi, mais j'enfourne quand même mon pyjama, que je compte bien garder du matin au soir, histoire de leur faire comprendre que les années suivantes, ce sera sans moi..Na..
Même si ce n'est qu'une semaine, c'est devenu trop pour moi. Merde je suis une adulte maintenant, ils ne peuvent pas m'oublier ne serait-ce que cette maudite semaine ?
Tu sais ma chérie, c'est une coutume depuis des générations, on se retrouve tous les ans pour ne pas se perdre de vu définitivement...Que de belles paroles Maman, et moi j'en ai rien à cirer de leur coutume à la con voilà.
Qu'est-ce que je donnerais pour avoir juste une petite tempête de neige, ainsi l'avion ne pourrait pas décoller et adieu ces vacances ennuyeuses...Pitié, s'il y a quelqu'un là-haut, faites juste un petit signe quoi, dis-je sur mon balcon.
- Hey, salut Sophie, à qui demandes-tu un signe ? Me prend en flagrant délit, mon charmant nouveau voisin d'en face, installé lui aussi sur son balcon de chambre.
- Salut Kylle, non rien, en fait si, je suis obligée d'aller à une réunion de famille à l'autre bout du monde, parce qu'il en est ainsi tous les ans et j'en n'ai pas envie, lui avoué-je.
- Pourquoi tu ne leur dis pas, ils comprendront non ?
- Pfff, on voit que tu ne connais pas mes parents, même une jambe cassée ne les arrêterait même pas, c'est dire, soupiré-je.
- Et donc tu demandais quoi au tout puissant ? Parce que c'est bien à lui que tu t'adressais, je me trompe, se moque-t-il.
- Ne ris pas, je voudrais juste une belle petite tempête de neige pour que l'avion ne puisse pas décoller, mais de toute évidence, c'est encore une fois une prière en l'air. T'as vu le temps, on se croirait au mois de Mars, c'est pitoyable, pleurniché-je.
Je le vois mettre son index dans sa bouche et le ressortir aussitôt, le pointant en l'air, le bougeant dans les quatre directions, nord, sud, est et ouest avec une mine renfrognée, comme s'il cherchait à prendre la température.
- Tu pars quand ? me demande-t-il.
- Demain matin monsieur météo, je peux savoir ce que tu cherches exactement ?
- Humm, demain...matin...Monsieur météo t'annonce que tu vas rester coincée ici et adieu les vacances forcées, rit-il.
- C'est ça ouais...T'as lu ça dans une blague carambar, pfff, t'es vraiment trop con, soufflé-je de désespoir en retournant dans ma chambre.
Kylle est gentil, beau gosse et on est du même âge tous les deux, mais des fois je lui arracherais bien les yeux avec ses blagues à deux balles. Mais je rigole bien avec lui. Il vient du Canada et je l'écouterais parler, sans ses blagounettes, pendant des heures avec son accent du Quebec. Les filles du lycée sont folles de lui, mais c'est toujours avec moi qu'il aime traîner et je ne sais pas pourquoi.
La fille on ne peut plus ordinaire, la fille lambda, qui évite d'attirer les regards et me fond dans la masse, ni vu ni connu. Mais lui, Kylle, aime être en ma compagnie et je dois dire que je l'apprécie énormément, c'est mon ami, on pourrait même dire, mon meilleur ami...
Je finis de remplir ma valise et m'affale sur mon lit encore plus dépitée qu'il y a une heure, parce que l'heure approche et en plus il va falloir se lever à trois heures du mat' pour être à l'aéroport à cinq heures, deux heures avant le décollage.
Quelle misère !! Qui plus est, je ne suis pas du tout du matin et ça va être horrible dans tous les sens du terme. Sale matinée, sale journée, sale vacances...
- Ahaaaaa...!!!! hurlé-je en tapant du pied sur mon lit en m'arrachant les cheveux.
- Qu'est-ce qu'il t'arrive ma grande ? m'interroge Annie, de sept ans mon aînée.
- Tu ne te rends même pas compte de la torture que vous m'infligez avec ces vacances à chier...
- Hey, mais tu vas arrêter tes caprices tout de suite jeune fille, intervint ma mère rouge de colère.
- Je suis désolée maman, mais mets-toi un peu à ma place, je vais être seule au monde là-bas...
- Elle n'est pas obligée de venir, maman, je pense qu'elle sait se débrouiller seule maintenant, défend ma cause ma sœur.
Je m'assieds sur le bord de mon lit, le sourire qui s'élargit et tout se ratatine lorsque ma mère insiste sur ma présence parmi les miens. Mes épaules s'affaissent et ma sœur quitte la chambre en hochant la tête avec une moue, pour me signifier qu'elle a fait de son mieux, mais en vain.
De retour face au plafond, je cogite à ce que je vais pouvoir encore inventer pour éviter ces maudites vacances. Mais malheureusement, je crois déjà avoir fait le tour de la situation et c'est dépitée que je passe à table, tel un automate. Idem pour le passage à la salle de bains et au brossage de dents.
Il est une heure du matin et je n'ai toujours pas réussi à fermer l'œil, quelle poisse...J'ai fait un tour complet dans mon lit, sans trouver ce fichu sommeil et j'ai les nerfs à bloc.
En plus d'avoir ma tête de renfrogné, les cernes vont m'achever et finir mon masque des beaux matins horripilants, super...
Un objet percute mon carreau de chambre me fait sursauter dans mon lit, suivi d'un second. Me levant à pas de loup, je me dirige vers ma fenêtre et comme par magie, j'ai été entendue. J'ouvre les battants en grand, et un vent glacial me percute le visage avec des flocons de neiges énormes.
- Alors tu vois, je te l'avais dit, m'interrompt Kylle, rejoins-moi en bas Sophie.
- J'arrive !!!
Je ne prends même pas la peine de faire un minimum de bruit et compte bien réveiller la troupe pour leur annoncer que les vacances sont finies. J'enfile ma paire de bottes, mon bonnet et mon blouson et pars rejoindre Kylle en bas de chez moi.
Je passe la porte d'entrée et je lui saute dans les bras, pendant que les premiers flocons de neige tapissent le paysage de son blanc immaculé.
- Comment t'as su, ris-je en continuant à l'étreindre.
- En fait, j'en savais rien du tout, je voulais juste te remonter le moral ma belle, m'avoue-t-il, en posant ses lèvres contre les miennes.
Lorsque mes parents m'ont surpris en train d'embrasser Kylle sous la neige, ma mère a capitulé et m'a laissé le choix à partir de ce jour, de participer ou non à cette maudite réunion de famille. Et j'y suis retournée quelques années après en compagnie de Kylle, pour annoncer notre mariage sous les premiers flocons de neige.
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