Hors compétition : Nexiou

« Rends la moi sale petit monstre ! »

Un cri résonna dans le couloir, des bruits de pas précipités frappèrent le parquet, un porte claqua. Une adolescente débaroula en tornade dans une chambre d'enfant, l'air enragé. Elle était rouge de colère, ses yeux lançant des éclairs au petit garçon qui se cachait tant bien que mal derrière son lit.

« Jeffrey sort d'ici tout de suite ! »

Un petit rire répondit à sa demande, l'énervant un peu plus. Avançant dans la pièce, elle contourna le lit, et avant que ledit Jeffrey ne parvienne à se glisser sous son lit, elle le tira par le pied. Riant comme jamais, le petit garçon faisait mine de cacher quelque chose derrière son dos. L'adolescente le retourna dans tous les sens, et tenta de lui faire desserra ses petits poings fermés.

« Jeffrey dépêche-toi de me rendre cette maudite clé ! »

Entre deux rires, le concerné finit par répondre :

« Mais je l'ai pas Cholé ! »

« Arrête de mentir. »

Chloé parvint enfin à ouvrir les doigts de son petit frère, mais rien.

« Jeffrey !! Elle est où ? »

La jeune fille perdait patience, elle n'aimait pas jouer à ce genre de chose, surtout avec cette clé.

« Mais je l'ai pas je te dis ! »

Se frottant le front, l'adolescente finit par lancer :

« Bon tant pis je vais tout répéter à papa. »

Jeffrey se redressa, posant ses petits poings sur ses hanches, et tout en fronçant les sourcils, répliqua :

« Non tu le feras pas. Et d'abord je l'ai pas ta stupide clé. »

Chloé lâcha un râle de colère, et attrapa la peluche préférée de son petit frère.

« Arrête Chloé ! »

« Dépêche-toi de me dire où tu l'as mise, sinon je tranche la tête de ton stupide pingouin ! »

« Non ! Arrête ! »

Des larmes commencèrent à monter à l'orée des paupières de Jeffrey, son petit visage devint cramoisi, et il s'agrippa à sa grande sœur qui faisait mine d'étrangler sa peluche.

« C'est pas moi ! C'est Barbara qui jouait avec ! Rends-moi Pirou ! »

  Chloé le fixa un moment pour voir s'il lui mentait, mais elle eut la confirmation que non. Soupirant, elle rendit la stupide peluche à son frère, et sortit de la chambre en claquant violemment la porte. Elle eut le temps d'entendre Jeffrey lui crier qu'elle n'était qu'une vilaine grande sœur, mais Chloé n'en tint pas rigueur.

Elle croisa Barbara qui revenait de dehors, et lui lança hargneusement :

« Où tu l'as mise cette clé ?! »

Elle la fixa un instant, mais pour toute réponse, elle n'eut qu'un miaulement  aigu. Levant les yeux au ciel, Chloé se rendit au salon. Si cette maudite chatte avait joué avec la clé, elle pouvait être n'importe où. Personne ne pouvait rien laisser traîner dans la maison, au risque de voir un objet important disparaître. La chatte de la maison prenait un malin plaisir à jouer avec tout ce qu'elle trouvait, et il était rare de retrouver ses jouets éphémères. Frank, son père la vit arriver dans le salon, et Chloé s'allongea par terre pour regarder sous les meubles. Surpris son paternel lança :

« Ca y est, ma fille est folle. »

En voyant qu'il n'avait pas de réponse ou de réaction de la part de sa fille aînée, il renchérit :

« Qu'est-ce que tu cherches Chloé ? »

L'adolescente se redressa en grognant, et en époussetant ses vêtements.

« C'est ton stupide chat qui a joué avec la clé de la boîte de noël ! »

Frank soupira, posant son journal sur la table basse, il se leva et répondit :

« On va la retrouver ma chérie. »

Chloé secoua la tête, les larmes aux yeux :

« Non on la retrouvera pas à temps, Noël est dans deux jours. » 

« Tu sais, Barbara ne l'a pas mangée. Si elle a joué avec, elle est sous un meuble, ou coincée sous un tapis. »

La jeune fille haussa les épaules, peu convaincue. Jeffrey arriva en trombe dans le salon, et tout en posant le regard sur sa sœur, demanda :

« Pourquoi tu pleures Chloé ? »

« Je pleure pas sale petit monstre. C'est de ta faute si on a perdu la clé, c'est toi qui la prise dans ma chambre ! »

« Non c'est pas vrai ! »

« Si c'est vrai ! »

Le père finit par s'interposer entre ses deux enfants qui se regardaient avec colère.

« C'est bon, ça suffit ! On va la retrouver Chloé, et Jeffrey tu n'as pas à prendre des affaires dans la chambre de ta sœur sans lui demander la permission. »

Alors que le petit garçon aurait voulu répliquer, le regard sévère de son père le rendit muet.

« Allez-vous deux, Chloé tu vas chercher dans la cuisine, Jeffrey tu cherches dans le salon, et je fais les chambres. On va bien la retrouver ! »

Mais les heures passèrent, et les recherches restèrent vaines. Chloé désespérait, tandis que son père essayait de lui remonter le moral comme il pouvait. Quant à Jeffrey, il jouait avec la chatte. Le dîner fut très calme, beaucoup trop calme. Frank avait beau essayé d'expliquer à sa fille que ce n'était pas très grave, qu'il pourrait essayer de casser la boite pour l'ouvrir, elle s'obstinait, refusant catégoriquement qu'on touche à la boîte si ce n'est avec la fameuse clé.  Le lendemain matin, Chloé s'était levée tôt pour chercher dans toute la maison, insultant la chatte de la famille dès qu'elle la voyait. La tristesse l'emporta très vite sur la colère, et elle abandonna, larmes aux yeux, s'écroulant dans le fauteuil près de la cheminée. Elle regarda les dernières braises de la nuit s'éteindre doucement. Une faible chaleur émanait encore du foyer. Son père la trouva recroquevillée ainsi, déprimée.

« Allez viens Chloé, on va déjeuner, et on va aller en ville finir les préparatifs de Noël. »

L'adolescente n'eut pas de réaction, puis elle finit malgré tout par se lever, et suivre son paternel jusqu'à la cuisine. La journée fut longue et morbide, Jeffrey avait beau faire le  pitre, Chloé ne démordait pas de sa mauvaise humeur. Elle ne se laissa pas éblouir par les décorations de la ville, ne fit pas attention aux enfants s'émerveillant devant les restes de neige de la semaine dernière, la chaleur, l'attente et la joie qui se mêlaient dans les rues de la ville ne lui firent aucun effet. Malheureusement, ce n'était pas habituel. Une fois de retour à la maison, la jeune fille reprit sa position sur le canapé, le regard dans le vide, peu envieuse d'aider son père et son frère à mettre les dernières décorations sur le sapin qui trônait dans le salon. Aux yeux de la jeune fille, il ne serait jamais un vrai sapin de Noël, pas sans l'ange que sa mère avait fait de ses mains il y a des années de cela,  avant qu'elle ne les quitte brutalement. C'était la seule chose qui permettait à Chloé d'avoir la sensation que  sa mère était toujours présente avec eux pour les fêtes, la seule chose qui la rattachait encore un peu aux noëls passés. Sans l'ange, il ne pouvait y avoir de noël heureux, sans l'ange noël ne signifiait rien.

Un bruit la tira de ses sombres pensées. Derrière la table de la salle à manger, Barbara jouait. Chloé roula des yeux, avant d'entendre de petits bruits provenant du jouet du chat « cling, cling, cling ». Agacée, elle se redressa et s'avança vers l'animal avec la ferme intention de lui retirer son nouvel amusement. S'agenouillant, elle glissa les doigts sous le tapis qui formait une bosse, dû à l'énervement du petit félin. Ce dernier ne quittait pas sa main des yeux, les pupilles dilatées comme des boules de bowling, les oreilles légèrement en arrière, prêt à sauter à tout moment. L'adolescente attrapa l'objet, et son regard se stoppa en découvrant la fameuse clé. Son cœur retomba lourdement dans sa poitrine, et elle fut tellement soulagée de retrouver la clé égarée, qu'elle attrapa Barbara dans ses bras. La chatte fut peu ravie de ce nouvel élan d'affection, évitant comme elle pouvait les lèvres de Chloé qui se collaient contre son front poilu, la poussant à l'aide de ses pattes pour qu'elle lui rende la liberté. Un miaulement agacé s'extirpa de la gueule du félin, que Chloé finit par relâcher. L'adolescente s'empressa de se rendre dans sa chambre, sortit la boite en bois de sous son lit, et l'ouvrit avec impatience. L'ange était toujours là, à l'abri de la poussière et des mites, intact. Elle descendit dans le salon, et à l'aide d'une chaise se hissa pour poser la petite statue sur le haut du sapin. En redescendant, elle aperçut son père qui lui souriait tendrement. Chloé ne put s'empêcher de lui rendre son sourire, et lança joyeusement :

« C'est bon, on peut fêter Noël comme il se doit. »

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