17. Colleen - Le charme de la séduction

« N'ouvre pas les yeux, on y est presque. Attends encore quelques secondes... Voilà... Ça y est on est arrivés tu peux regarder ! »

Les mains de Mickaël quittèrent le visage de Colleen en même temps qu'une vague de froid enserrait sa poitrine. La rupture brutale de ce contact empreint d'amour et de tendresse lui fit l'effet d'une douche glacée et malgré elle, l'hybride posa ses doigts sur le bras nu de l'homme qui se tenait à ses côtés pour le rétablir. Le manque qui lui broyait l'estomac se calma instantanément et les battements de son cœur reprirent un rythme normal. Après plus d'une demi-heure à marcher dans les rues d'Hajourdan les yeux fermés, elle s'était accoutumée aux ondes magiques que Mickaël émettait pour la détendre.

Comme une droguée...

N'ayant aucune idée de l'endroit où elle se trouvait, Colleen ouvrit les yeux.

Elle en resta sans voix.

Au milieu des ruines de la vieille ville, dans un bâtiment que la fille-colombe devinait aussi décrépi que les autres, l'énigmatique homme-corbeau avait construit un véritable coin de paradis. Ils se trouvaient dans une large chambre au milieu de laquelle trônait un modeste lit en bois surmonté de paille, de plumes et de coussins à l'apparence moelleuse. Sur chacun des murs en pierre étaient suspendus des supports d'acier : certains supportant des bougies à moitié consumées à la lumière envoûtante, d'autres des fleurs cueillies depuis peu. Leur odeur embaumait tout l'espace, ce qui achevait de donner une touche romantique au décor.

« C'est toi qui a fait tout ça ? demanda Colleen en refermant la porte derrière elle d'un coup de pied.

— Pas tout à fait, souffla Mickaël en se tournant vers elle. D'ailleurs, on dirait que la décoratrice est en retard.

— Tant pis pour elle... »

La fille ailée plongea l'ambre de son regard dans celui gris pâle de son interlocuteur. Avec nonchalance, elle passa ses doigts dans les lacets qui retenait son bustier et commença à les dénouer. Une lueur fiévreuse s'alluma dans les yeux de celui qui lui faisait face et elle se mordit l'intérieur de la joue pour ne pas sourire. En un mois, elle avait appris à dominer son corps aussi bien de jour que de nuit et elle maîtrisait désormais à la perfection ses atouts féminins et leur effet sur ceux et celles qui l'entouraient.

Au lycée, elle avait usé de son charme pour se faire inviter à quelques soirées et alors que Maliah semblait se retirer de plus en plus de la société et passait la plupart de son temps enfermée à la bibliothèque avec Eytan, elle en avait profité. Loin du regard inquisiteur et de la curiosité maladive de sa soi-disant amie, Colleen avait d'abord observé comment se comportaient les autres filles, puis elle s'était lancée.

Elle avait tout de suite préféré les garçons plus âgés, la plupart étudiants sur le continent, bien moins maladroits et empotés que leurs homologues lycéens. D'abord surprise par leur audace sous l'effet de l'alcool, l'adolescente s'était vite rendu compte que la plupart étaient inoffensifs et que leur fougue et leur agressivité cachaient un cruel manque de confiance en eux. Certains ne demandaient qu'un peu d'attention tandis qu'avec d'autres, elle avait dû se montrer plus ferme, mais contrairement à ce qu'elle avait craint, aucun n'était jamais allé trop loin sans son consentement.

Dans les bras de quelques amants de passage, elle avait découvert l'effet que ses formes et son corps faisait aux hommes, avait appris la patience et le plaisir des caresses et plus important encore, elle savait parfaitement se rendre désirable.

« Laisse-toi faire », susurra-t-elle alors que son haut de cuir glissait de quelques centimètres sur ses épaules et dévoilait le haut de ses seins nus.

D'une démarche souple et animale, elle contourna Mickaël non sans frôler son torse de sa poitrine et de ses lèvres, puis elle l'attira sur le lit d'une poigne ferme. Avec une lenteur exagérée, elle s'installa à califourchon sur son ventre et penchée vers son visage, l'embrassa. Les yeux fermés pour ne pas se laisser déconcentrer par l'intensité de son regard et pour éviter qu'il ne fût tenté d'user de ses pouvoirs, elle glissa ses doigts brûlants le long de chacun de ses bras et noua à ses poignets les lacets qu'elle avait enlevés de son bustier.

« Colleen, qu'est-ce que tu...

— Recule », lui intima cette dernière en lui désignant le haut du lit.

Malgré elle, elle ne put s'empêcher de soulever les paupières pour observer sa réaction. Le visage de Mickaël s'illumina d'une moue amusée quand il comprit où elle voulait en venir.

« Je vais t'attacher les mains sur le cadre, comme ça tu ne pourras pas les poser sur moi et te servir de tes pouvoirs pour m'amadouer. Il faut qu'on discute toi et moi et cette fois, je ne veux pas te laisser détourner mon attention vers des besoins plus... primitifs.

— Parce que tu crois que j'ai besoin de ça ? rigola Mickaël. Tu es assise sur moi, tu ne penses pas que ça me suffit amplement ? Et puis, je n'ai pas besoin de mes pouvoirs pour te faire faire ce que je veux, tu sais très bien que je t'ai... »

La porte de la pièce s'ouvrit en grand dans un vacarme qui avala ses derniers mots. Il ne fallut pas plus d'une seconde à la nouvelle venue pour analyser la situation et se mettre à hurler.

« Comme oses-tu me faire ça Micka ? Non seulement tu l'emmènes ici, mais en plus tu la laisses te... te... »

Sans ménagement, l'homme aux yeux gris repoussa Colleen qui faillit en tomber du lit. De sa main encore libre, il dénoua les lacets de ses poignets et les lui rendit. En croisant son regard, la fille-colombe n'aurait su dire s'il était déçu ou simplement en colère qu'elle l'eût mis dans cette posture embarrassante.

« C'est ça, rhabille-toi, marmonna la rouquine à l'entrée.

— Amandine ! »

Mickaël avait prononcé son prénom avec tant de férocité que cette dernière se ratatina. Malgré elle, Colleen ressentit un élan de sympathie à son égard. Après deux ans d'exclusivité, la fille-panthère devait partager les faveurs de son amant avec une autre et si au début elle avait fait mine de ne pas en être affectée, il était clair que la jalousie la rongeait.

Pourtant, il fallait reconnaître qu'elle faisait des efforts pour le cacher. Chacune de leurs rencontres s'était mieux passée que la précédente et si Amandine ne les avait pas trouvés tous les deux sur un lit qu'elle avait sans doute déjà partagé avec Mickaël, Colleen ne douta pas sur le fait qu'elle aurait su se contenir.

« Asseyons-nous, proposa l'homme en se radoucissant. Nous avons du pain sur la planche, ce n'est pas le moment de nous disputer. »

Aussitôt, il redevint le centre de l'attention et le regard blessé de l'une et compatissant de l'autre se posèrent sur lui avec intensité. Tel un prédateur à l'aura magnétique, il les attirait dans ses filets avec une facilité déconcertante et lorsqu'il prit place sur un bord du lit, le dos appuyé contre le cadre en bois collé au mur, les deux jeunes filles s'installèrent face à lui. Incapable de résister et n'en ressentant nullement l'envie, l'hybride ailée saisit la main que leur associé lui tendait tandis qu'Amandine attrapait l'autre sans un mot.

« Comme prévu, les choses se sont tassées en ville et les derniers rebondissements dramatiques ne sont maintenant plus que des faits divers presque oubliés. Nous allons donc pouvoir passer à la suite de mon plan sans éveiller les soupçons et cette fois, c'est vous qui allez en être les principales actrices. Vous vous sentez prêtes ? »

Une vague de chaleur qui partait de son contact avec la paume de Mickaël remonta le long du bras gauche de Colleen. Avec une douceur indescriptible, elle vint se loger contre son cœur et une confiance surnaturelle la submergea. Toute trace de peur et d'incertitude s'évaporèrent de son esprit et en synchronisation parfaite avec la rouquine sur sa droite, elle hocha la tête en signe d'assentiment.

Je vais enfin découvrir ce qu'il attend de moi, songea-t-elle sans aucune appréhension.

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