(THÉÂTRE) Une histoire de chaton

SCENE

Edmond, Lydie, Augustine

(Lydie et sa chaperonne, Augustine, rencontrent l'impertinent Edmond lors d'une promenade.)

LYDIE

Mais que voilà Edmond, Augustine, voyez !

Pour le saluer, arrêtons-nous un instant.

AUGUSTINE

Êtes-vous sûre de ne point vous tromper ?

LYDIE

Sûre et certaine, mais ne perdons plus de temps.

(A Edmond)

Edmond, très cher, quel plaisir de vous rencontrer !

EDMOND, à Lydie, en faisant une courbette

Lydie ! Quelle surprise de vous trouver là !

(A Augustine, un brin moqueur)

Et...madame Augustine... vous... resplendissez !

AUGUSTINE

Cessez donc vos flatteries, cela ne prend pas.

Mon grand âge avancé fait fi de tout cela,

Et je vous saurais gré d'être respectueux

Envers mademoiselle Lydie que...

LYDIE

                                                           Hola !

Ce cher Edmond n'est point si obséquieux !

Vous lui prêtez là de bien vilaines pensées

En détournant ainsi un gentil compliment,

D'autant plus qu'il est vrai que vous resplendissez.

EDMOND

Allons, ne restons pas sur ce vilain moment.

Profitons simplement de cette balade

Pour, chemin faisant, deviser tranquillement.

J'ai su que vous aviez été malade ?

LYDIE

Cela n'était point grave, heureusement.

AUGUSTINE

Une petite allergie à Apollon.

EDMOND

Apollon ?

LYDIE

                    Un chaton.

AUGUSTINE

                                          Une sale bête !

EDMOND

Est-il terrible ?

AUGUSTINE

                   Vous n'imaginez pas !

LYDIE

                                                             Non,

C'est juste un petit qui n'en fait qu'à sa tête.

AUGUSTINE

C'est un diablotin qui griffe mes coussins !

EDMOND

Diantre ! Je compatis à votre malheur.

Vous voilà semble-t-il en très grand tracassin

Car ce chat m'a tout l'air d'être une vraie terreur.

LYDIE, adressant un sourire entendu à Edmond

Ou n'a-t-il besoin que d'un peu de douceur ?

AUGUSTINE

Eh quoi ! De la douceur ?

LYDIE, en soupirant

                                          Et de sa liberté.

Il doit avoir envie de calmer ses ardeurs,

Car le pauvre est enfermé toute la journée,

Épié constamment, du matin jusqu'au soir,

Ne pouvant à loisir se faire câliner,

Enchaîné par des règles bien dérisoires.

(A Edmond)

Qu'en dîtes-vous ? Ce chat doit-il rester cloîtré ?

EDMOND

Il serait bien cruel de persévérer !

AUGUSTINE, finalement attendrie

Pauvre Apollon ! Que pourrions-nous faire

Pour adoucir la vie de cet infortuné !

Je ne sais guère...

LYDIE, amusée

                            Il faudrait le distraire !

EDMOND, avec un sourire entendu vers Lydie

Ma foi... j'ai avec les chats, un certain talent

Dont je peux à loisir vous faire profiter.

AUGUSTINE

Oh, quelle touchante attention, vraiment !

LYDIE

Et donc, Edmond, comment comptez-vous procéder ?

EDMOND

Il me faudra user d'une grande douceur

Pour ne point effaroucher cet animal.

LYDIE

Je vois déjà en vous un digne professeur.

EDMOND

Permettez que j'y mette un effort maximal.

AUGUSTINE

Et allez-vous mater ses envies de griffer ?

EDMOND

Je vais l'éduquer, je le promets madame.

Sous ma houlette, nul chat ne s'est rebiffé.

(A Lydie, tout bas)

Ni même jamais aucune de ces dames...

LYDIE, tout bas, à Edmond

Cessez vos fanfaronnades...

AUGUSTINE

                                        Que dîtes-vous ?

LYDIE

Que nous passons une belle promenade !

AUGUSTINE

Ah ! Comme cela est bien vrai, je l'avoue.

EDMOND, moqueur

Faute avouée...

AUGUSTINE

                        ... Eh quoi ?

LYDIE, à part

                                      Jolie pasquinade.

AUGUSTINE, à part

Se gausserait-il ?

LYDIE

                           Oh ! Nous voilà arrivés.

(A Edmond)

Je vous en prie, entrez. Apollon vous attend...

EDMOND, coulant un regard vers Augustine qui commence à bailler.

Allons donc éduquer ce chaton... (en baissant le ton) en privé.

LYDIE, à Edmond, tout bas.

Nul doute que cela va être excitant.

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