Chapitre 11 : Un miroir de givre...
Cette nuit là, Wyatt ne dormit pas, hanté par le souvenir d'un petit ange aux lèvres tremblotantes.
Tyna, préoccupée, ne chercha pas à l'apaiser, s'asseyant à ses côtés sans oser engager la conversation.
Dès que les rayons du soleil se mirent à miroiter sur les vitres embuées, le jeune homme sauta sur ses pieds, l'esprit vif et le corps trépignant d'impatience.
-Je vais chercher le gamin. –Annonça-t-il avant de se précipiter à l'étage.
Une fois douché et vêtu d'un gilet aux longues manches grisâtres, Wyatt se précipita vers la porte d'entrée avant d'être arrêté par Tyna.
-Attends...! Tiens. -Lui dit-elle avant de lui donner un sachet en plastique transparent contenant de la nourriture. Dès que tu le retrouves, essaye de le faire venir jusqu'ici, nous appellerons ensuite Lucas.
-Très bien...et après ?
-Lucas est flic, nous trouverons bien une solution.
Il hocha la tête et, pris d'une impulsion soudaine, embrassa le front de la jeune femme avant de partir la seconde d'après.
Il avait un enfant à sauver.
Wyatt jurait pour la quatrième fois : c'était la troisième fois qu'il faisait le tour de cette maudite ville et aucun signe du petit garçon.
Cependant, le jeune homme n'en démordait pas : il ne partira pas sans lui.
Il écuma donc toutes les rues, ruelles, passages étroits et routes abandonnées, les arpentant de long en large en n'oubliant aucun endroit.
Frissonnant malgré tout, Wyatt se mit à tousser, clignant des yeux en espérant chasser le début d'une migraine qui commençait à lui marteler le crâne.
Les quartiers déserts l'aidaient pour sa recherche, le calme lui donnant du courage.
Soudain, des éclats de voix se firent entendre, virulentes et agressives.
Fronçant ses sourcils, Wyatt s'approcha à pas de loups, et ce qu'il vit le laissa sans voix.
Le gamin était courbé face au sol, le corps secoué de sanglots silencieux.
Un homme l'insultait avec violence, l'acculant contre un mur.
-Espèce d'incapable ! Je t'avais dit de me ramener vingt-huit euros pour cette après-midi et tu oses me donner une pièce de deux ? Tu sais ce qui t'attend ? Hein ? Imbécile ! J'aurais dû te faire adopter dès que j'ai su que tu étais autiste ! Tu ne me sers à rien ! –Hurla-t-il, les yeux brillant de rage.
Une fureur sans nom rugit dans son sang : Wyatt courut vers l'homme et le plaqua au sol, lui bourrant le corps de coups à l'estomac avant de lui cracher au visage.
Incapable de se défendre, l'homme gémit.
Bien, très bien : il saura ce que ça fait d'être sans défense.
Wyatt continua de le battre jusqu'à ce que la tête de l'homme parte sur le côté, et qu'il demeure inconscient.
Il avait rendu justice à une innocence perdue.
Un gémissement d'angoisse résonna à ses oreilles et, lâchant le corps flasque de l'homme, le jeune sans-abri se retourna vers l'enfant.
Tétanisé, celui-ci le regardait avec ses grands yeux dilatés par la peur, pleurant doucement.
Le cœur de Wyatt se brisa.
S'accroupissant pour être le moins menaçant aux yeux du petit gamin.
-Tout va bien, il ne te fera plus jamais de mal...Tu es en sécurité. –Chuchota-t-il d'une voix douce et apaisante.
La lueur apeurée qui brillait dans ses yeux ne faiblit pas.
-Chut...Chut, tout va bien, tu vas bien. Il ne te fera plus peur, je te le promets. Chut, petit, je suis là...
Voir le petit aussi terrifié le fit pleurer.
Ne sachant quoi faire pour l'apaiser, Wyatt se mit à fredonner une mélodie d'une voix aussi douce que possible dans l'espoir que cela fonctionne.
Au bout de quelques minutes, les pleurs de l'enfant se turent, sans que les tremblements ne cessent.
C'était une mini victoire.
Il tenta alors une approche. Remarquant que l'enfant ne portait qu'un vieux T-Shirt à manches courtes, trop usé pour lui, Wyatt enleva son gilet, le lui donnant pour le recouvrir.
Aussitôt, une rafale de vent glacé s'abattit sur lui, le faisant tousser.
Le gamin l'observa, se cachant derrière le gilet, beaucoup trop grand pour son petit corps frêle.
-Tu vois ? Tout va bien...Je ne permettrai pas qu'il t'arrive quoi que ce soit, petit gars.
Puis, il se souvient du sachet qui était posé à quelques mètres de lui.
Il se leva pour aller le chercher avant de revenir vers lui, sortant le sandwich de son emballage.
-Tu as faim, petit gars ?
Les yeux de l'enfant se posèrent sur le sandwich et il se mit à déglutir.
Depuis quand n'avait-il pas manger ?
Bon sang, ce môme avait la peau sur les os !
-Tiens, c'est pour toi. -Lui dit-il en lui tendant la nourriture.
Une petite main pâle et tremblotante hésita à quelques centimètres de la main de Wyatt.
Retenant son souffle, le jeune homme ne bougea pas, se figeant sur place.
Puis, aussi rapide que l'éclair, la main de l'enfant attrapa le sandwich pour le coller contre sa poitrine.
Wyatt fut ému par ce geste et se promit de faire tout ce qui était en son pouvoir pour sortir le petit garçon de cet état.
Pour ne pas le perturber, le jeune irlandais se recula, lui laissant l'espace nécessaire pour se sentir à l'aise.
Des larmes de reconnaissance coulèrent le long des joues creuses et ternes du petit garçon lorsque ses dents croquèrent le pain et Wyatt dut se retenir de ne pas sangloter à son tour.
Il tâchait de se rendre invisible aux yeux de l'enfant afin de l'observer sans risquer de provoquer la moindre gène.
Lorsqu'il eut finit de manger, un événement sortit le petit garçon de sa transe : l'homme se mit à gémir, reprenant conscience.
Wyatt sauta aussitôt sur ses pieds, lui cachant la vue avant de lui porter un coup bien placé qui le mit KO une seconde fois.
-Tout va bien, petit gars, tout va bien...
Une toux l'interrompit brusquement et, se maudissant d'être aussi malade, Wyatt fit de son mieux pour convaincre le petit de rentrer chez Tyna, là où il serait au chaud.
En sécurité.
-Tu sais quoi, petit ? Je connais un endroit super où tu pourrais prendre un bon bain chaud... Ça te dirait de venir avec moi là-bas ? -Lui demanda-t-il d'une voix douce.
Le gamin le regarda, plus calme que tout à l'heure et se mordit la lèvre.
-Tu aimes les petits chats ? J'ai un gentil chaton, Lucky, doux avec de jolis yeux bleus...Tu pourras le caresser.
Les yeux de l'enfant se mirent à briller.
-Tu viens avec moi, petit gars ? -S'enquit-t-il en lui tendant la main.
Le petit garçon tendit une main tremblotante et la posa sur la sienne, hésitant à lui faire confiance.
Les doigts de Wyatt se renfermèrent doucement autour de son poignet fragile, soulevant son corps avec délicatesse.
Les jambes de l'enfant se dérobèrent sous lui, et le jeune irlandais le rattrapa aisément, le portant avec douceur.
-Tout va bien, petit. Je suis là...Tout va bien. –Murmura-t-il en lui frottant doucement le dos de la main.
Il se mit à marcher, sentant la petite tête de l'enfant contre son épaule tandis qu'il progressait lentement en direction du foyer chaleureux de son amie féministe.
L'homme brutal devait être le père du petit, et Wyatt se promit de lui faire payer chaque larme versée.
Chaque coup porté à son innocence.
Wyatt vit la porte d'entrée et soupira de soulagement : le froid commençait à lui mordre la chair, la fatigue, la faim, lui obstruant la vue.
L'enfant dans ses bras était silencieux, le préoccupant plus que n'importe quel symptôme.
Il était sûrement traumatisé et Wyatt ne savait pas quelles horreurs le petit avait pu vivre.
Il ouvrit la porte, appréciant la chaleur qui lui fouettait le visage.
-Tyna ! –Appela-t-il en se rendant dans le salon.
Le môme se mit à frissonner, apeuré, dans un milieu qu'il ne connaissait pas.
Il le posa avec délicatesse sur le canapé, s'abaissant à sa hauteur.
-Tout va bien, petit gars. Tu te rappelles du petit chat ? -Fit-il en regardant Lucky l'approcher.
Son petit compagnon miaula, se frottant contre le corps de l'enfant.
Un sourire illumina le visage du petit et Wyatt l'observa caresser l'animal avec douceur, comme s'il craignait de lui faire mal.
-Tu l'as trouvé ? Qu'est-ce que...Oh mon dieu. -Fit Tyna dans son dos.
Le gamin se mit à tressaillir, levant de grands yeux effrayés vers elle.
-Tu te rappelles de la gentille dame dont je t'ai parlé ? Je te présente Tyna, petit gars.
-Coucou, petit ange. -Fit-elle d'une voix douce en s'abaissant à son tour. Je suis heureuse de te voir, en sécurité.
Sa voix apaisante et empreint de gentillesse ne le décrispa pas, même si les tressaillements de ses épaules se firent plus espacés.
-Peux-tu me dire comment tu t'appelles ?
L'enfant ne répondit pas, comme Wyatt l'avait prédit.
-On va faire un truc, d'accord ? Je vais te préparer un bon chocolat chaud et tu pourras prendre un bain. Ça te va, petit ange ?
-Il aime la musique. -Intervient le jeune homme d'un ton brusque en se souvenant de ce détail.
-C'est vrai, petit ange ? Moi aussi, j'aime beaucoup la musique. Ça te dit d'en écouter avec Wyatt le temps que je te fasse ton chocolat chaud ?
Le petit la regarda calmement, un intérêt manifeste brillant dans ses yeux.
Tyna se leva, dévoilant un carton dont le haut avait été déchiré.
-C'est ma collection de CD. –Expliqua-t-elle en lui souriant gentiment. Choisis ce que tu veux, petit ange.
Elle partit en direction de la cuisine, le laissant avec le gamin qui s'était redressé afin de mieux voir l'intérieur du carton.
Wyatt savait que la jeune femme était en train d'appeler son frère mais, feignant de ne pas avoir compris afin de duper la vigilance de l'enfant, le jeune sans-abri s'assit à ses côtés, heureux de voir que le petit ne tremblait plus.
Il le vit prendre différents disques dans ses mains, les étudiant avec curiosité.
-Beethoven, c'est un très bon choix. –Commenta-t-il en le regardant observer le CD. Tu veux que je le mette, petit gars ?
Ses grands yeux innocents le contemplèrent calmement, puis, l'enfant lui tendit le disque.
Wyatt le prit, avant de l'insérer dans le lecteur de CD, attendant de voir la réaction du petit.
Dès que les premières notes résonnèrent dans la pièce, une expression joyeuse apparut sur les traits délicats de son visage, l'apaisant aussitôt.
Il resta plusieurs minutes à fixer le petit garçon dont un sourire ornait le visage, jusqu'à ce que Tyna revienne avec une tasse fumante dans les mains.
L'enfant but à petites gorgées, fixant Lucky qui s'était étendu à ses pieds.
La jeune femme se posta à côté de Wyatt, chuchotant de sorte que le petit n'entende pas la conversation.
-Lucas n'habite qu'à quelques pâtés de maison...Il sera là dans dix minutes, grand maximum.
-Le gamin est autiste. J'ai vu un homme le secouer parce qu'il n'avait pas ramené l'argent nécessaire. Ce salopard l'a mis à la rue en le forçant à lui rendre chaque pièce que les passants lui donnaient. Parce qu'il n'était pas comme les autres.
-Je m'en doutais. -Fit Tyna la mine sombre. Où est-il ?
-Je l'ai assommé, il ne risque pas d'aller bien loin.
Et si ce monstre tentait d'approcher son petit gars, rien n'empêchera Wyatt de lui refaire définitivement le portrait.
Pas même la présence de la police avec lui.
La sonnette se mit à retentir, les figeant tous les trois.
Tyna s'empressa d'ouvrir à Lucas, qui apparut, le front barré d'un pli soucieux.
Dès qu'il vit le petit, sa mine s'adoucit aussitôt. Il s'approchait doucement de lui.
-Salut, mon grand. Je m'appelle Lucas, je suis un policier. Dis-moi mon garçon, peux-tu me dire où sont tes parents ?
L'enfant ne bougea pas.
-Il ne parlera pas. -Intervient Wyatt en secouant la tête.
-On verra si les services sociaux arrivent à le mettre en confiance...Merci Wyatt, je m'en charge désormais. Tu viens bonhomme ?
Voyant que le môme n'esquissait aucun mouvement, Lucas le souleva, hochant la tête en direction du jeune homme.
Les larmes perlèrent aux coins des yeux de Wyatt lorsqu'il vit le petit corps tétanisé de son petit gars partir avec le frère de Tyna.
Il n'oubliera jamais son sourire.
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Presque 2 000 mots pour ce chap !
Comment trouvez vous ce nouveau personnage ? Réactions ?
XOXO
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