Chapitre 1 - Marie
Marie avait réellement débuté sa vie d'adulte le jour où elle avait quitté le nid familial pour venir étudier à la capitale. Paris. La ville la plus intense qu'elle connaisse. Une ville qui vous prend aux tripes.
Marie se rappèlerait toujours de ses premières balades le long de la Seine, du sentiment d'indépendance et de fierté qu'elle avait éprouvés quand elle marchait à vive allure sur les quais parisiens. Et pourtant, le poids de la solitude et l'angoisse de l'échec venaient perturber le tout. Paris ne fait pas de cadeau à la médiocrité.
La colocation avait été un non-choix. Compte tenu des prix astronomiques des loyers parisiens et de ses faibles revenus, Marie n'avait pas eu d'autres alternatives que de partager un appartement avec un compagnon de fortune.
En dépit de cette fatalité, elle en avait retiré du positif. Elle s'était faite une très bonne amie du nom d'Eulalie, sa première coloc' qu'elle côtoya pendant 3 ans... jusqu'à ce que cette dernière reparte vivre à l'étranger. D'origine congolaise, Eulalie était partie rejoindre sa famille au pays pour les aider dans leur business local. Il était alors difficile de garder contact, chacune ayant repris une vie complètement différente.
Marie avait accusé le coup de ce départ... Avec qui allait-elle faire du lèche-vitrine dans le 8ème arrondissement le samedi après-midi? Ou s'enivrer bar après bar, rue de la Soif, le soir venu? Ou aller courir le long du Jardin du Luxembourg le dimanche matin? Ce jour-là Marie avait perdu une colocataire mais elle avait aussi perdue une amie et une confidente.
Marie avait donc dû rechercher un nouveau colocataire pour partager son 40m2 rue sterpes dans le 12ème arrondissement. C'est à cette occasion qu'elle avait rencontré Judith, une jeune femme tout en rondeur, de prime abord très sympathique. Judith s'était malheureusement révélée avoir des tendances psychotiques. Plus les semaines passaient et plus sa vraie personnalité s'était révélée. Marie s'était vite retrouvée mal à l'aise avec Judith vivant sous le même toit.
Judith avait fait de Marie son objet de fixation, on aurait dit qu'elle vivait par procuration à travers ses faits et gestes. Combien de fois Judith avait dormi dans le lit de Marie ou essayé ses fringues quand Marie n'était pas à l'appartement? Combien de fois elle l'avait espionnée et suivie dans Paris lorsque Marie faisait son shopping?
Judith avait d'ailleurs remarqué que Marie avait pris ses distances petit à petit. Judith avait beau chercher une explication à ce détachement, mais elle n'en trouvait pas. Elle qui s'estimait être une coloc' exemplaire. N'était-ce pas grâce à elle que l'ex de Marie, ce flambeur infidèle d'Alexandre, avait été tabassé inopinément le mois dernier? En réalité, c'était elle qui avait en secret manigancé cette revanche.
Tout cela nous amène à aujourd'hui, en cette soirée fatidique du 11 avril. Marie ne le savait pas encore, mais elle allait mourir dans quelques heures.
En ce soir de printemps, Marie et Judith discutaient tranquillement, blotties dans le canapé IKEA du salon avec un verre de bon vin à la main en guise d'apéro. Marie avait pris sur elle pour essayer de renouer des liens avec sa coloc'. Vers 20 heures, Judith, déjà éméchée, cracha le morceau à propos d'Alexandre, révélant ainsi avoir commandité sa mise à tabac "pour lui apprendre les bonnes manières" précisa-t'elle. Sur le coup, Marie resta assise, en faisant la moue, n'en croyant pas un mot. Judith devait forcément la charrier. Qui ferait une chose pareille?
Judith lui expliqua alors en détails ce qui s'était passé, en appuyant sur le fait qu'elle l'avait fait pour elle, pour sa chère Marie, car elle savait bien que Marie avait souffert de sa relation avec Alexandre. Relation vouée à l'échec selon Judith. Elle le lui avait dit depuis le début de toute façon. Alexandre n'était pas assez bien pour Marie. Heureusement que Marie pouvait compter sur Judith pour prendre soin d'elle et lui rendre justice.
Comprenant que ce n'était pas une mauvaise blague, Marie se leva d'un bond du canapé. Son verre de vin valdingua dans la précipitation et se déversa sur le tapis du salon. Ceci dit, personne ne le remarqua. Marie était hors d'elle, criant et vomissant sa colère en face d'une Judith qui ne comprenait pas ce qu'elle avait bien pu faire de mal. L'une devenait rouge de rage quand l'autre était devenue blanche d'effroi.
La dispute se termina avec Marie exigeant que Judith quitte définitivement l'appartement, sur-le-champ, en veillant à bien laisser ses clés derrière elle. Marie ne tolérait plus sa présence, ne serait-ce qu'une minute supplémentaire. Jusqu'où la folie de Judith pouvait-elle aller ? Marie avait peur, très peur... A peine Judith sortie de l'appartement avec toutes ses affaires, Marie claqua la porte et ferma à clé. Ses mains tremblaient, son souffle était haletant et sa tête tournait... Trop d'émotions, trop de cris, trop de vin...
Dans la foulée Marie se fît couler un bain bien chaud et bien moussant, avec des bougies allumées dans toute la pièce et du Morcheeba en musique d'ambiance. Elle avait besoin de se calmer et d'analyser la situation. Dans quelle merde s'était-elle fourrée?!
Toutes ses pensées défilaient dans sa tête lorsqu'un énorme vacarme la réveilla en sursaut. Il lui avait fallu bien 30 secondes avant de comprendre que c'était Judith qui était revenue dans l'appartement, qui s'était introduite dans la salle de bain, en débitant des menaces à tout va.
Marie avait comme l'impression, le temps d'un instant, d'avoir été projetée de son propre corps. Comme si elle regardait la scène d'un œil extérieur: la salle de bain remplie de la vapeur du bain brûlant, la luminosité dangereusement obscure des bougies et Judith qui criait et gesticulait dans tous les sens.
Marie reprît ses esprits lorsqu'elle vît ce que Judith avait dans ses mains, lorsqu'elle comprît ce que Judith s'apprêtait à lancer dans son bain. Un sèche-cheveux. Allumé.
Aussi embrouillé que son cerveau était, Marie savait que l'eau et l'électricité ne constituent pas un binôme gagnant. Et c'est à ce moment-là que tout s'accéléra. Le plouf du sèche-cheveux dans l'eau, la douleur fulgurante de l'électrocution, et le noir des ténèbres.
Et voilà. Marie est morte en cette soirée du 11 avril 2016, à 21:06.
>> Petit mot aux lecteurs <<
Vous venez de faire connaissance avec un des personnages principaux. Que pensez-vous de Marie? D'après vous qu'est ce qui va se passer après?
Vos réactions et vos commentaires me sont précieux, ils vont m'aider à affiner l'histoire! Merci d'avance!
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top