Hebdocriture du 7 août | La fin
Salutations!
Est venu le temps de l'Hebdocriture.
"Le sujet de cette semaine:
"Narrez le contexte ou ce que représente l'image jointe. Inspirez-vous de la photographie pour créer un texte, mais vous n'êtes pas obligés de la décrire, ni même de l'inclure. Vous êtes libres d'utiliser le temps, le point de vue et le genre que vous souhaitez. »
Et voici la description avec laquelle j'ai travaillé grâce à Izanix. :)
"L'image est assez monotone. Il s'agit d'un dessin assez "simple" (dans le sens où l'artiste ne s'encombre pas de détails inutiles comme des plis de vêtements par exemple) L'arrière-plan est le sol gris. Nous avons une vue de haut, en diagonale par rapport aux sujets observés. Les principaux êtres représentés sont des tatous (les animaux avec une carapace et une longue queue qui peuvent former une boule afin de se protéger des dangers). Leur peau est lisse et blanche, mais un blanc terne. Leur carapace ont l'air dures et sont représentées par une couche grise carrelée (le gris est évidemment plus foncé que la peau terne, mais plus il est plus clair que le sol), telles des capes solidifiées, ainsi que leur queue. Ils marchent tous dans la même direction, à une allure constante je pense. Ils portent une cravate nouée de couleur noire et ils tiennent des sacs rectangulaires à bout de bras ou portent des sacoches de même forme. Certains ont des montres ou des téléphones. L'un d'entre eux regarde l'heure, les autres nous ne savons pas. Au milieu d'eux se trouve un humain à terre, inerte, comme s'il était tombé sans se relever. Il porte un pantalon noir, un pull blanc, mais pas de chaussure. Ses cheveux sont gris clairs, comme les carapaces des tatous autour de lui. Mais dans cette image, il y a une couleur, le rouge. Ce sont pleins de pics rouges plantés dans les carapaces des tatous qui avancent. Il y en a aussi au sol, cassés. L'humain en a également plein plantés dans son corps, dans son dos, l'arrière de ses jambes et de ses bras. Sa tête est face au sol, mais elle est dirigée vers le point d'arrivée des tatous tandis que ses jambes sont dirigées vers leur point de départ."
Je vous joins une chanson, vous comprendrez pourquoi en lisant. :)
J'ai aussi ajouté la photo donné au chapitre afin que vous puissiez voir d'où part mon travail.
Bonne lecture!
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La fin
Tout a commencé de manière insidieuse. Un jour, l'homme a maîtrisé la vapeur, comprenant comment l'utiliser pour faire fonctionner des pistons activant des engrenages, puis ensuite, plus ou moins dans l'ordre, ils ont harnaché les rivières, vidé le sang de la terre afin d'en faire du carburant, compris comment utiliser la fission nucléaire.
Encore et toujours, il fallait plus de pouvoir, plus d'énergie.
Est apparu le Temps compté, celui qui vaut de l'argent, et l'Argent est vite devenu le maître du monde.
Depuis combien de temps l'Argent domine-t-il? Il ne le sait pas. Et désormais, il s'en fout. Probablement depuis le début, depuis qu'on a commencé à donner une valeur aux choses, aux services, au temps.
Lorsqu'on a réussi à réduire l'espace-temps, ils auraient dû comprendre que s'ils n'arrêtaient pas, ils finiraient par se perdre.
Mais non. Sans doute qu'il était déjà trop tard.
Les gens, désormais, étaient devenu le produit. Celui qu'on achetait à coup de vidéos, d'applications ou de jeux gratuits, celui qu'on vendait aux compagnies afin qu'elles fassent des profits, toujours plus de profits.
Pour que l'Argent grandisse, croisse et devienne la seule véritable valeur.
Les bips, les dings, les "tuit-tuit-tuit" étaient devenus les seuls sons qu'on entendait, il n'y avait plus un mot, plus une parole.
mère: Le repas est prêt.
Comme des automates, les enfants se déplacent, le nez encore vissé à l'écran et se mettent à table pour manger.
Tous pareil, afin d'optimiser la croissance. Deux parents, deux enfants, et honte à vous si vous en aviez deux du même sexe biologique. Heureusement, on pouvait le savoir à temps, à l'aide d'une application gratuite et il était possible, pour la modique somme de 10 000 $ ou trois cents heures de publicité et une petite centaine de sondages, d'obtenir un avortement.
père: Très bon souper. Qu'est-ce que c'est?
Le clic-clic des claviers virtuels et le cliquetis de la coutellerie sur les couverts sont les seuls sons audibles dans la pièce. Ah, et peut-être un bourdonnement sourd de beet-box provenant du casque d'écoute super Soundscape à haut déploiement de l'adolescente.
mère: Des ramens au faux poulet thaî de Biofarm. Je l'ai gagné en remplissant un sondage sur mes habitudes d'hygiène.
Ils ne regardent même pas leur assiette. Et heureusement, car la bouillie beige grisâtre ne donnerait même pas l'eau à la bouche au chien le plus enthousiaste. Du moins, s'il restait des représentant de la race canine ailleurs que dans les musées sur la biologie.
père: Comment a été votre journée à l'école aujourd'hui?
fille: Comme d'habitude. On a fait des sondages sur la vie étudiante et j'ai reçu la meilleure note pour ma présentation Instaschool.
Aussitôt, des icônes de coeur et de pouce en l'air apparaissent sur l'écran de fille. mère va chercher le résultat de fille sur son profil Instaschool et le partage sur tout ses réseaux, ce qui lui renvoie des coeurs et des pouces en l'air de tous ses contacts.
grand-mère: Félicitations fille, c'est génial!
fille envoie un coeur, et grand-mère partage le résultat de fille via le poste de mère.
Lui, il regarde son écran, comme tout le monde, où est diffusé l'image du continent de plastique de l'océan Pacifique. À chaque cinq minutes, une publicité de voyage vient interrompre sa contemplation. Il ne sait pas quoi penser, se sent piégé, exclu. Il n'a pas de nom, seulement un numéro - 078-935-7264 - et son rôle - fils - le rebute. Dans son casque audio spatial ultra confort, l'orage et la pluie envahissent son espace sonore, entrecoupé de publicité et d'invite de sondage qu'il refuse à tout coup.
Sur son écran personnel, le continent de plastique inaugure son tout premier hôtel de luxe où les visiteurs pourront profiter de l'expérience post-apocalyptique dans un environnement sécurisé. À la boutique de souvenir, on vend des t-shirt "I love Apocalyptic-City", "I've seen the End".
I've seen the end... j'ai vu la fin.
Il voit la fin.
Décrochant les yeux de son écran, il voit son bol de bouillie beige grisâtre, regarde père, mère et fille, assis dans leur fauteuil à roulette ZeroGravity, leurs peau blanche, sans éclat. Il prend conscience qu'il ne les connaît pas, qu'ils ne le connaissent pas.
Pris de haut-le-coeur, il se lève, sa tablette fait un bruit strident lorsqu'elle heurte le sol. Cela n'interrompt même pas le "repas" des autres, absorbés qu'ils sont dans leur monde virtuel. mère est en Thaïlande, père participe à un match de football, fille à un concert.
Galvanisé par le bruit de l'écran fracassé, hypnotisé par les fragments de verre qui jonche le sol, il arrache son casque et le jette par terre.
Mais l'appareil, conçu différemment n'éclate pas de manière aussi satisfaisante.
Alors Max - il a toujours voulu s'appeler Max! pas fils! - se penche, le ramasse entre ses mains malhabile à force de ne faire que des sports virtuelles et tenir de la coutellerie et agrippe les deux extrémités. Il tire, tire encore, et finalement...
CRAC!
Le son du casque qui se brise est satisfaisant, ça lui donne l'impression d'avoir entendu, pour la toute première fois de sa vie, un coup de tonnerre.
La sueur perle sur son front, mouille ses aisselles, Il n'a jamais fait autant d'efforts, ne s'est jamais tenu debout aussi longtemps.
Heureusement pour lui, la dopamine vient booster ses muscles atrophiés, l'exalte. Dans un geste d'au revoir, il arrache la montre connecté qu'il porte constamment et d'un geste déterminé, se dirige vers la fenêtre de la pièce à vivre.
Ouvrir le volet est forçant, mais il réussit à briser le mécanisme de sécurité et pour la première fois depuis longtemps, le vent fouette son visage. Il éternue, les larmes lui montent aux yeux.
Pris d'une intuition soudaine, il sort son téléphone intelligent de sa poche et tend le bras à travers l'ouverture. Lorsqu'il ouvre les doigts, la montre reste un moment collée à sa paume moite mais il secoue le bras et bientôt, les appareils sont tellement loin en-dessous qu'il ne peut plus les voir.
Le vent qui s'engouffre par la fenêtre modifie la pression à l'intérieur, fait tousser père, mère et fille, mais il n'en a cure. Il tourne sur lui-même et se dirige vers la sortie de leur appartement.
Dans l'ascenseur, personne ne remarque qu'il est debout, qu'il n'a ni montre connectée, ni casque, ni écran. Ils sont tous trop absorbés, occupé à produire, à consommer, à être consommé.
Lorsqu'il sort dans l'air vicié de ce monde exténué, les graviers lui déchire la plante des pieds. Mais il n'en fait aucun cas. Il avance, admire le monde gris de ses yeux myopes d'avoir trop fixé d'écran depuis sa naissance.
Max progresse lentement, le coeur léger, le souffle court. Des numéros, des produits le bousculent, sans même reconnaître qu'il existe. Il n'est plus connecté, il n'est plus, point.
Sur Instaschool, on pleure le suicide de 078-935-7264, fille ou plutôt 078-935-7263 reçoit des tonnes de coeur, de câlins virtuelles, de mains tendues. Elle suppose qu'elle devrait être triste, mais fils était tellement bizarre! Il n'affichait jamais rien de sa propre initiative sur les réseaux sociaux, ne participait pas en classe et n'offrait jamais de coeur, de pouce en l'air à qui que ce soit. Il ne faisait rien, pas même de pouce en bas ou de visage en colère.
De leur côté, mère et père sont révoltés. fils leur a causé d'énormes dettes et son suicide leur apporte, certes, de la sollicitude de la communauté, mais bien peu de moyen de refaire leur finance. Les enfants coûtent cher, ce n'est pas un luxe donné à tout le monde de se reproduire.
Soudain, père partage à mère un sondage sur le deuil et l'impact du suicide sur les familles et mère lui répond avec un coeur rose. Ils s'en sortiront, en regardant davantage de publicité et en mettant plus d'heures dans leur travail. Et puis, il leur reste fille, il ne faut pas l'oublier.
En bas, Max est épuisé. Il n'a pas mangé le Ramens au faux poulet de Biofarm et n'a jamais fait autant d'exercice physique de sa vie. Étourdi, égaré et à bout de souffle, il décide de s'étendre au sol. Les passants l'ignorent, l'enjambent ou le contournent, parfois même marchent dessus sans le voir.
C'est la fin, il voit à peine le ciel entre les gratte-ciels de la nation.
Lorsque la pluie se met à tomber, mouillant son visage, imbibant ses vêtements, il ferment les yeux et ouvrent la bouche. L'eau goûte le sel, la cendre et la poussière, mais l'humidité sur sa langue lui fait du bien.
La pluie s'intensifie, le froid envahi ses membres.
Et pour la première fois, le tonnerre gronde dans ses oreilles, fait vibrer le béton autour de lui.
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