Hebdocriture du 24 juillet | Consolidation
Coucou!
J'ai eu une idée qui me sortait pas de la tête pour le thème de la semaine.
Ce thème est:
Narrez la rencontre de votre personnage avec l'un de ses amis / connaissances qu'il ne connaît que par le biais d'internet. Vous êtes libres de parler de vous et de réelles personnes tout comme vous pouvez les imaginer, voire un mixte des deux. Vous devrez nécessairement écrire à la première personne et au présent. Vous avez le choix du genre et de la longueur, comme toujours.
Petite précision à propos de la prononciation:
Vous rencontrerez brièvement un certain Aodhan... Son prénom est d'origine irlandaise et se prononce exactement comme le prénom Hayden.
Puisqu'on parle à nouveau d'Emma et Vivek qu'on retrouve dans Encore cinq Minutes!, j'ai ajouté une chanson au texte, I Will Not Bow de Breaking Benjamin. Le texte n'est probablement pas entièrement similaire à la personnalité de V, mais le "I will not bow, I will not break" me le ramènent toujours à l'esprit.
Bonne lecture!
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Consolidation
C'est le moment. Nous quittons Vancouver.
Des monarques font la fiesta dans mon ventre tandis que je suis assise dans un fauteuil ultra-luxueux et que le jet privé super Archange lance ses moteurs à fond et se propulse sur la piste. Ce moment est celui que j'aime le plus. Celui où la science et la technologie nous arrachent du sol et où j'ai l'impression que tout est possible.
Et c'est toujours pareil, que je soies aux commandes d'un bimoteur à hélices ou que je soies passagère dans un titan des airs comme celui-ci.
Il n'y a pas d'autres mots pour le dire, j'adore voler.
Un sourire presque fou illumine mon visage tandis que toutes les caractéristiques techniques, toutes les lois de la physique et toutes les équations scientifiques nous permettant de nous arracher au sol défilent dans ma tête. J'ai envie de défaire ma ceinture et d'embrasser l'appareil, de me glisser dans le poste de pilotage et d'observer le pilote et son copilote au travail.
C'est un peu trop tôt, je ne suis encore qu'une invité, un outil à leurs yeux. Certes, Aodhan est mon ami, et sans doute même que Laric m'affectionne un peu, à la manière d'une petite soeur détestable ou encore d'une créature curieuse, comme une nouvelle espèce d'insecte fraîchement découverte, mais je ne crois pas qu'on s'attende à ce que je manque à ce point de retenue.
Lorsque le voyant lumineux accompagné du "ding" connu à travers toute la planète retenti, je me libère de ma ceinture et me tortille sur mon siège, dévorée d'une envie quasi incontrôlable de passer dans le poste de pilotage.
— Je crois que Duncan sera très heureux de discuter avec quelqu'un d'aussi passionné que lui, commente simplement Aodhan.
Son accent irlandais ajoute une douceur irrésistible à ses mots. J'hésite encore deux secondes puis abandonne toute réserve. Je n'aurai peut-être pas cette chance deux fois et j'ai tout intérêt à la saisir.
🪶 🪶 🪶
Un peu plus de 3900 kilomètres plus loin et environ 5 heures plus tard, les monarques qui faisait la fiesta dans mon ventre ont muté en reines alexandra. Les papillons ont organisé un mushpit sans que je ne m'en aperçoive et ça trash solide sur du power metal là dedans. Nous arrivons bientôt à New York et j'ai beau avoir passé le vol à parler aéronautique avec Duncan, un aspect de ce voyage ne quitte pas mon esprit.
Depuis notre conversation de la semaine dernière où Vivek m'a fait remarquer que nous allions nous rencontrer sous peu, j'ai essayé de ne pas trop y penser, mais plus on approche, plus j'obsède.
Parce que je dois l'avouer, depuis qu'il a souligné ce fait comme étant quelque chose de spécial, un événement unique, je n'ai pas vraiment arrêté d'y réfléchir de mon côté aussi.
Bientôt, probablement dans moins de deux heures, V et moi allons nous rencontrer pour vrai!
En personne...
En chair et en os.
Je n'ai jamais fait ça.
Laisser entrer dans ma vie physique quelqu'un de ma vie en ligne ne m'a jamais traversé l'esprit. Pas que je ne soies pas à l'aise avec les gens, c'est juste que je n'en ressentais pas le besoin, j'étais bien avec mon entourage, je ne croyais pas nécessaire d'y ajouter d'autres personnes.
Mais désormais, dans ce nouvel univers qui m'attend, Vivek est mon point de repère, mon encrage et je réalise que j'ai besoin que cette relation virtuelle n'en soit plus une.
Je me souviens parfaitement du moment où notre relation professionnelle est devenue une relation d'amitié. Il avait déjà fait quelques ouvertures auxquelles je n'avais pas répondues, reconnaissant, d'instinct, que si je lui ouvrait une porte, je ne pourrais plus jamais revenir en arrière. Je n'étais pas prête à accorder mon amitié à quelqu'un.
Puis un soir, tandis que Damon, Sam et Jamie étaient en voyage en Écosse et que je me sentais sur le bord du désespoir, j'ai osé.
Les images de mes mains décharnées, tremblantes à cause de la douleur causée par cette étrange maladie qui me ronge depuis toujours occupées à taper au clavier me revienne tandis que je ressors du cockpit pour regagner mon siège. Je dois avoir un drôle d'air, car Aodhan fait un mouvement vers moi, alarmé, mais Laric l'interrompt. Sans leur accorder plus d'attention, je m'assois et boucle ma ceinture.
TB (02:21): V? T'es là?
V (02:22): Toujours, Mini Fée.
Deux petites phrases sur notre ligne de communication professionnelle. Six mots que j'avais fixé, à moitié groggy, me haïssant de ne pas avoir su résister à la douleur, d'avoir osé prendre les détestables comprimés de CBD prescrits par mon médecin.
Je me souviens avoir pris un bon cinq minutes pour me décider à envoyer l'invitation à joindre un canal privé et personnel que j'avais créé juste pour nous.
Ça lui avait pris trois minutes à briser le code que j'avais utilisé et à me rejoindre.
V (02:32): Que se passe-t-il Tink? C'est pas dans tes habitudes de faire autant d'erreurs de débutants.
TB (02:34): Je sais. Je ne suis pas au meilleur de ma forme. Je te promet que le prochain sera plus complexe.
Le système me disait qu'il était en ligne, mais pendant les plus longues minutes de ma vie, il n'y eut rien. Je commençais à regretter de l'avoir contacté lorsque son message est arrivé:
V (02:38): Tu m'inquiètes. Ce n'est pas dans tes habitudes d'initier des contacts sans raison.
TB (02:39): Je ne veux pas t'embêter. J'aimerais que tu m'écoutes. Si c'est impossible, je comprendrai.
V (02:40): Raconte, je suis là.
C'est ce que j'ai fait. Du moins, en partie. Je me suis toujours gardé un jardin secret aux dimensions de l'océan Pacifique, incapable de me confier à propos de mes problèmes de santé, redoutant qu'on me juge, qu'on me prenne en pitié. Jamais je n'aurais imaginé qu'il puisse faire la même chose de son côté. Sauf que maintenant que j'y repense, je crois que c'est probablement à cause de cette distance que nous nous sommes efforcé de maintenir que nous avons développé une si puissante amitié.
TB (12:43): On est en approche. Tu le sais sûrement car tu sais toujours tout, mais j'avais besoin de le verbaliser.
V (12:44): T'es pas supposée éteindre ton cell, Minus? Il me semblait que ça fonctionnait comme ça dans les avions.
TB (12:45): Je l'éteins dans deux minutes. Je... V! Je pense que j'suis nerveuse.
V (12:46): Ahah, moi aussi! Mais je t'assure, pas besoin de t'inquiéter, ici aussi c'est chez toi.
Ce message reste affiché sur mon écran tandis que je passe l'appareil en mode avion. Ce n'est pas le moment de ruiner les manoeuvres d'atterrissage! Ce sont quelques mots étrangement réconfortants qui viennent apaiser le sourire crispé qui déformait mon visage depuis la réalisation de ma nervosité.
Le jet atterri et nous sortons directement sur le tarmac. Une main invisible s'est occupé de la part administrative de mon passage du Canada aux États-Unis. La machine de la Tour a déjà fait son oeuvre. Après un bref salut et en deux battements d'ailes qui m'envoie les effluves uniques de l'eau cristalline s'écoulant entre les rochers d'un sommet enneigé mêlé aux arômes d'un gâteau à la fleur d'oranger léger comme un nuage, Aodhan et Laric sont partis.
Toutefois, je ne suis pas seule. Une camionnette grise est garée non loin, les vitres ouvertes et il est là, au volant, m'adressant un sourire timide.
Ça y est, mon coeur vient de s'arrêter, ces sûr! Prenant sur moi, je m'accroche à mon sac de portable et je m'avance, tentant de ne pas mourir.
V est là! Il est venu m'accueillir. Il n'a pas l'air nerveux au premier coup d'oeil, le chanceux! Mais j'ai tôt fait de remarquer ses doigts qui tripotent le volant et je comprends qu'il doit être aussi intimidé que moi.
Sauf que lui, il n'est pas blanc comme un linge, alors c'est plus difficile à remarquer. Pour ma part, je parie que je suis rouge comme un coquelicot.
Ce sont certainement les cinquante mètres les plus longs de ma vie. Duncan et le reste de l'équipage me laissent tranquille, ils chargent les bagages dans d'autres véhicules, leur discrétion exemplaire. Je parie qu'on les a informé que c'était un moment spécial pour Vivek et moi et qu'à moins qu'il ne soit question de vie ou de mort, il fallait nous laisser en profiter.
Ça y est, la camionnette est là, seule une portière nous séparent. Mon ami Vampire a les plus beaux yeux du monde, d'un chaud brun pailleté d'ambre, ils adoucissent son visage aux traits altiers. Émerveillée par sa peau cuivrée, je me dis que c'est certainement à cause de gars comme lui que des auteurs inventent des vampires qui brillent au soleil. Pendant la dernière semaine, je me suis amusée à fouiller les forums et les fandoms afin de découvrir toutes les conneries qu'on disait en ligne sur les Vampires. Car évidemment, leur origine fait parti des mystères qui n'ont pas été brisés. C'est top secret et la majorité des Vampires n'ont pas la moindre idée du processus qui les transforment.
— Est-ce qu'on t'a déjà dit que t'étais pas obligée de porter des portes de grange en guise de verre fumés, me taquine-t-il dès que je suis à portée de voix.
— Personne n'aime mon look frères Wright. C'est super vintage!
Je retire néanmoins mes lunettes avant d'ouvrir sa portière pour mieux lui coller un bisou sur la joue. Je le vois écarquiller les yeux de surprise, mais je m'en fous, si je ne fais pas quelque chose, je vais exploser de joie!
Je fais de mon mieux pour ne pas trop le toucher, me rappelant sa confidence de l'autre jour mais il glisse un bras autour de moi pour me retenir le temps de m'embrasser la joue à son tour.
— Allez, fais le tour, on a un bon bout de chemin à faire.
Ce n'est qu'en déposant mon sac de portable à l'arrière que je remarque le fauteuil roulant. Je l'avais presque oublié. C'est un beau modèle, facilement escamotable, mais néanmoins solide. J'ai envie de blaguer, mais je vois à la manière dont il fixe devant lui que ce n'est pas le moment. Il a probablement encore peur que je le juge, que ma façon d'être avec lui change parce qu'il est handicapé physique. Mais non, ça n'arrivera pas.
Le début de la route se fait dans le silence. Il est évident que ni lui ni moi ne savons par où commencer. La conversation n'est pas aussi simple sans nos barricades habituelles. Je prend une gorgée du chai latte qu'il m'a apporté et contemple le paysage. Parmi les grattes-ciels de Manhattan qu'on aperçoit déjà au loin, la Tour de l'Archange s'élève, brillante, lumineuse. Bien sûr, il y a des photos partout, mais peu importe le média utilisé, personne ne réussira jamais à transmettre le tumulte d'émotions provoqué par sa présence. Cette Tour est à la fois terrifiante et rassurante. Elle représente la puissance des plus forts, nous renvoie à notre propre insignifiance.
— C'est beaucoup plus impressionnant vu de l'extérieur, dit Vivek d'une voix douce qui me fait tourner la tête vers lui.
Il garde la majorité de son attention sur la circulation, mais je comprends qu'il m'a surprise à fixer la Tour et que sa présence nous permettra d'ouvrir la communication entre nous.
— Une fois à l'intérieur, on arrive à oublier à quel point on est insignifiant, promis.
Il a toujours ce même don étrange de mettre des mots sur mes pensées. Les Vampires sont rarement télépathes, surtout lorsqu'ils sont aussi jeunes que lui, mais Vivek me connaît si bien que se pourrait en être perturbant. Enfin, pour quelqu'un qui vit à l'extérieur de nous deux.
— Je ne crois pas que ça m'arrivera, dis-je.
— Je ne suis pas d'accord. Ça fait longtemps que je te dis que ta place est ici, avec nous.
— Je sais. Ça fait quand même beaucoup.
Il n'ajoute rien, mais pendant que nous sommes immobilisés dans la circulation à l'approche du pont Queensboro, il prend un instant ma main dans la sienne et sa chaleur me réchauffe jusqu'au plus profond de l'âme. Par ce simple geste, j'ai l'impression que la glace est finalement brisée, que nous n'auront plus besoin d'écran pour nous protéger.
— Si tu veux, dit-il, il y a une chambre libre chez moi. Je te l'offre.
— Attention, tu risques de le regretter, je n'ai plus l'habitude d'habiter avec quelqu'un.
— C'est probablement toi qui va le regretter en premier, j'ai la réputation d'être indigeste.
— C'est un défi? demandé-je, taquine.
— Bien sûr. Et je te promet que tu vas le regretter!
Nous pouffons de rire, ça fait du bien. Et pendant que j'envoie un message à mon frère pour lui dire que ça va, je suis entre bonnes mains à New York, nous quittons Long Island et pénétrons enfin à Manhattan. Bientôt, les immeubles sont si hauts et si dense que la Tour est invisible. Puis nous arrivons à un stationnement sous-terrain où je me perds à admirer mon ami. Avec des gestes précis et habiles, il ramasse le fauteuil roulant qui est installé derrière, le déploie et effectue son transfert avec une économie de mouvement que je trouve magnifique. À ce moment précis, pendant que mes muscles crient pitié et que mon corps poursuit sa mission de sabotage, pendant que la fatigue accumulée des dernières semaines s'écrase sur mes épaules, je l'envie.
— Dois-je me méfier, demande-t-il en accrochant mon sac à son fauteuil.
— Quoi?!
J'en ai sorti des plus reluisantes, je l'avoue.
— Pendant quelques secondes, j'ai eu l'impression que tu envisageais de me dévorer ou quelque chose du genre.
— Non... dis-je, un sourire espiègle animant mon visage. Je me demandais juste ce qu'il m'en coûterait de te piquer ce fauteuil. Je suis crevée.
Il éclate de rire et se dirige vers l'ascenseur sans m'attendre.
— Soit bien sûr de ton coup, ma chérie, et surtout, arrange-toi pour que je n'aie pas accès au réseau, sinon, bonne chance pour déverrouiller l'ascenseur. Tu vas découvrir que c'est loin, l'appart, via les escaliers.
— C'est un défi? demandé-je.
— Pas aujourd'hui. N'oublie pas que tu es attendue au centre médical.
Je lui emboîte le pas en silence. D'autres défis m'attendent, bien sûr, mais tant que Vivek sera dans les parages, je sais que je n'aurai plus peur.
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