trois : YouTube
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-Ça ?
-Une fourchette. Et un couteau. L'autre, je ne sais pas.
-Une cuillère.
-Une cuillère, répéta Julian, hochant la tête. Merci.
-Pas de quoi, répondit Amel en déposant une assiette devant l'allemand, ainsi qu'à sa place sur la table.
Quand elle vivait avec Belinda, les deux filles ne mangeaient jamais ensemble, parce qu'elles vivaient à des rythmes différents, et ne s'alimentaient absolument pas de la même façon. Belinda pouvait décider de se faire un dîner à 22h uniquement composé de cookies et d'un pot de glace, par exemple, chose qu'Amel n'avait jamais vraiment comprise. Elle avait grandi en mangeant des repas « normaux » à des heures précises. Et c'était aussi le cas de Julian, ce qui les avait menés, un vendredi soir, à manger la salade composée qu'avaient préparé les deux nouveaux colocataires un peu plus tôt.
-Est-ce que tu te souviens comment ça s'appelle ? elle montra un morceau de concombre, et Julian fronça le nez.
Comme avoir une conversation était encore très compliqué pour les deux, ils avaient passé toute la préparation du repas à traduire tous les ingrédients en français. Amel ne parlait absolument pas allemand, mais elle se souvenait que Julian avait eu du mal à retenir celui-ci un peu plus tôt, ce qui lui indiquait que c'était très différent en allemand.
-Gurcombre, il déclara, secouant la tête. Non. J'ai mélangé français et allemand.
Amel rit.
-Concombre. Le début, c'est « con », c'est facile à retenir, je suis sûre que tu sais ce que ça veut dire.
-C'est le même mot qu'en allemand, mais...prononciation différent.
-Différente.
-Différente, il répéta, comme à chaque fois que quelqu'un le corrigeait.
-Tu t'en sors plutôt très bien pour le moment. Tu arrives à comprendre le coach, aux entraînements ?
-Oui, et, Kevin m'aide.
-C'est cool qu'il soit là pour t'aider. Même si je suppose que tout le monde essaie de t'aider.
Julian hocha la tête, et pendant quelques minutes, seul le bruit de leurs couverts se faisait entendre. Finalement, l'allemand prit la parole :
-Tu...ton travail, c'est quoi ? il demanda, et elle sourit.
-J'ai cru que tu ne poserais jamais la question.
Julian sourit, haussant les épaules.
-Je suis youtubeuse. Tu as le droit de rigoler autant que tu veux, de dire que ce n'est pas un métier, vas-y, je suis prête.
-Youtubeuse, il répéta, c'est cool ! C'est quoi, ton...nom ? Je ne sais pas le mot en français.
-CarAMEL, elle répondit, levant les yeux au ciel à son propre jeu de mot, et Julian rit, le mot étant encore une fois le même dans sa langue natale.
-Je irais voir tes vidéos, promit-il.
-Merci, t'es pas obligé de faire ça, elle répondit, essayant de passer en revue les dernières vidéos qu'elle avait mise en ligne pour savoir si oui ou non, elle avait parlé de lui.
Elle plissa le nez. Mmh, elle avait parlé du mercato dans une de ses vidéos de la semaine dernière. Et elle avait probablement dit à quel point elle était heureuse de voir Julian Draxler signer au PSG. Mais avec un peu de chance, il ne regarderait pas cette vidéo.
Elle n'eut pas le temps de réfléchir plus longtemps que l'allemand se leva pour débarrasser, et elle le suivit.
-Je vais faire la vaisselle, t'inquiète, elle lui lança, et il secoua la tête.
-Je peux faire, il répondit, j'ai l'habitude.
-Je ne vais pas te laisser la vaisselle lors de ton premier soir dans l'appartement, Julian.
-On fait un programme, il proposa. Un le midi, un le soir.
-Très bien. Donc, tu fais le soir ?
L'allemand hocha la tête, et Amel haussa les épaules avant de lui expliquer où étaient les éponges et le liquide-vaisselle avant de rejoindre sa chambre, où elle s'assit face à son bureau. Elle avait édité une vidéo ce matin, mais n'avait rien fait d'autre, étant donné qu'elle avait aidé Julian à s'installer. Mais maintenant qu'il savait qu'elle était youtubeuse-et que bizarrement, il ne s'était pas moqué-, elle allait pouvoir filmer même quand il était là.
-Amel ?
La française se tourna, trouvant un Julian l'air inquiet devant le seuil de sa chambre.
-Oui ? Tout va bien ? Tu as inondé la cuisine ? elle plaisanta, et il sourit.
-Non, j'ai terminé.
-Jule, à moins que tu sois un vampire, tu n'as pas besoin que je t'invite à entrer dans ma chambre, elle sourit, et Julian entra, ses yeux automatiquement attirés par le mur entièrement rempli de polaroids dans la chambre de la jeune femme.
-C'est beau.
-Merci. Tu sais quoi, il faut absolument qu'on ajoute une photo de nous deux dessus, elle lança avant de se lever pour récupérer son polaroid. Elle s'approcha de Julian et une fois sûre qu'ils étaient tous les deux dans le cadre-des années d'expériences étaient derrière elle-, elle prit la photo, qui sortit à peine une minute plus tard.
Elle attrapa un stylo sur son bureau avant de s'assurer que la photo était sèche, et de la poser pour écrire au dos.
« 20.01.17 : colocataires ».
-Tu l'accroches ? elle proposa à Julian, collant un morceau de patafix derrière.
Il acquiesça avant de prendre la photo et de la poser dans un endroit vide. Il recula pour regarder, et hocha la tête, satisfait.
-Qu'est-ce que tu voulais me dire ?
-Les gens de YouTube, ils connaissent ton adresse ? il demanda en se grattant l'arrière de la tête, et Amel fronça les sourcils.
-Non, bien sûr que non. Et je n'ai absolument pas dit sur ma chaîne que tu venais t'installer ici. Personne ne sait où tu vis, tu peux en être sûr.
-Merci, il répondit, soulagé. Je vais aller dormir.
-Bonne nuit, elle sourit. À quelle heure est-ce que tu pars, demain ?
-Huit heures. Tu seras réveillée ?
-Probablement pas, alors je te souhaite bonne chance maintenant. Je regarderais le match, elle sourit.
-Merci. Bonne nuit, Amel.
➿
➿
Amel augmenta le son de la télé en s'installant sur le canapé, son ordinateur sur les genoux.
Julian n'avait même pas passé vingt-quatre heures dans l'appartement, et pourtant, il lui semblait déjà vide sans sa présence. Elle avait tourné deux vidéos aujourd'hui, et profitait de ce match du Paris St Germain pour en monter une, même elle n'était que pour la semaine prochaine.
Elle sourit en voyant les joueurs faire leur entrée sur la pelouse. C'était la première fois qu'elle regardait un match du PSG depuis que Julian était son colocataire, et ça lui faisait vraiment bizarre. Elle se sentait plus proche d'eux, en quelque sorte, même si elle ne les avait jamais rencontrés en personne. Ils ne semblaient qu'à une portée de main. Et ils lui semblaient très humains, aussi.
Tout se passait bien jusqu'à ce qu'à la soixante-dixième, un Draxler qui semblait souffrir laissa sa place. Elle posa son ordi à côté d'elle, fronçant les sourcils. Elle n'avait pas vu ce qui s'était passé parce qu'elle était concentrée sur son montage, mais il n'avait vraiment pas l'air bien.
Elle soupira. Il ne méritait pas de se blesser maintenant, il venait à peine de commencer à jouer avec le PSG, et il était en train de faire ses preuves et accessoirement, de gagner sa place de titulaire. Et puis, même si l'allemand ne lui en avait pas parlé, elle avait bien remarqué que quelque chose le tracassait depuis le début. Elle n'avait aucune idée de ce que cela pouvait être, et n'avait pas prévu de lui poser la question, mais elle savait que c'était là.
Elle secoua la tête avant de reprendre son ordi sur ses genoux. Il irait bien. Et elle devait finir son montage.
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