Chapitre 26.
Puisque nous étions près de la maison des mecs vers 22h30, Aaron et moi avons décidé de faire un tour dans le parc à quelques minutes de là. Depuis toujours, j'aime beaucoup cet endroit. Il y a un grand lac et des sentiers éclairés par des lampadaires. C'est vraiment joli la nuit.
Voilà un quart d'heure que nous marchons ici. Cependant, la température s'est rafraîchie et je commence à avoir froid. Aaron le remarque et met sa veste sur mes épaules. Je le remercie faiblement alors qu'il enfonce ses mains dans ses poches.
_ Sinon... Ça va les cours ?, me demande-t-il.
_ Oui, ça va. J'ai pensé à travailler à côté des cours comme c'était prévu depuis cet été. Tu sais, pour payer ma part vis-à-vis du logement où je vis.
_ Oui. Qu'est-ce que tu aimerais faire ?
_ J'avais réfléchi à aller à la crèche de l'université ou à la bibliothèque. Je ne sais pas s'ils embauchent.
_ Faudrait que t'ailles voir.
_ Oui. Et toi ? Les cours ?
_ Ça va. Comme l'année dernière.
_ Cool alors.
_ Ouais.
Nous avançons silencieusement. À quelques mètres de nous, il y a une aire de jeux pour les petits. Plus loin encore, un petit garçon crie et pleure car son père ne veut pas le laisser jouer dans les jeux. L'homme n'a pas l'air très net. Il doit sûrement abusé sur la boisson et sur d'autres substances vu ses vêtements crasseux et ses yeux injectés de sang. Le bambin se met à hurler et à courir vers le parc. Son père, excédé, rattrape son fils et lui crie aussi dessus méchamment. Il lui assène ensuite une gifle d'une violence qui me glace le sang.
_ Hé !
Je m'apprête à intervenir entre cet homme violent et ce pauvre petit garçon mais Aaron passe son bras autour de ma taille pour m'empêcher d'y aller.
_ Arrête, Camille.
_ On ne peut pas rester là sans rien faire.
Je veux me dégager mais il m'encercle de ses deux bras désormais.
_ Laisse tomber. Ne t'en mêle pas. Le mec n'a pas l'air dans son état normal.
_ Il est en train de frapper son fils, Aaron !
_ Et c'est toi qu'il va frapper si tu y vas.
_ Je m'en fous. Ce petit n'a rien fait pour mériter ça !
_ Arrête de te débattre, Camille.
Le père attrape fermement le bras du petit et le tire avec lui plus loin dans le parc.
_ Mais pourquoi est-ce que tu fais ça, Aaron ? Laisse-moi y aller.
_ Non, parce que je ne veux pas qu'on te frappe. Tu n'iras pas.
Je tremble de rage. Envers Aaron mais surtout envers ce père irresponsable. Le drogué et son fils s'éloigne de plus en plus. Aaron relâche sa prise sur ma taille lorsqu'on ne les voit plus. Je me recule brusquement de lui.
_ Je te déteste.
_ Je me serai aussi détesté s'il t'était arrivé quelque chose.
_ Tu es injuste, dis-je faiblement.
_ Tu n'aurais rien pu faire. Aller viens, on rentre.
Il s'approche de moi pour me faire faire demi-tour et m'emmener vers la sortie. Je jette un dernier regard là où l'enfant et le père sont partis. Aaron passe sa main autour de ma taille mais je me défile. Il soupire. J'accélère rapidement le pas pour qu'il y ait une distance entre nous.
Je le déteste. Ce petit s'est fait frapper et il n'a pas voulu faire quelque chose. Ça m'énerve ! Même si je ne pouvais rien changer à ça, j'aurais préféré épargner ce pauvre petit garçon en recevant le coup à sa place. Mais Aaron ne m'a pas laissée faire. Pour lui, c'était trop dangereux pour moi. Je ne sais pas pourquoi il s'obtient à toujours vouloir me protéger. Il est presque pire qu'Isaac et Cole. J'ai bien dit presque.
Quand on sort du parc, je ralentis le pas, épuisée de marcher aussi vite, lui permettant de me rattraper par la même occasion. Le vent frais et le silence qu'il y a entre nous m'a calmée. Aaron marche à mes côtés sans parler. Il doit se douter que je lui en veux. Cette scène tourne en boucle dans ma tête. Comment peut-on frapper son propre enfant ? Je ne comprendrais jamais ces personnes.
_ Tu vas m'en vouloir encore longtemps ?
_ Oui.
_ Si tu attends des excuses, hé bien je ne m'excuserais pas pour t'avoir empêchée de te faire casser la gueule.
_ Je ne te demande pas des excuses. Je m'en fous de ça.
_ Alors qu'est-ce qu'il y a ?
_ C'est ce garçon, Aaron, avoué-je en me tournant vers lui. Je suis mal pour lui. Est-ce que tu crois qu'il se fait frapper tous les jours ? À t-il au moins une mère pour le réconforter ? Ce pauvre enfant ne mérite pas de vivre ainsi.
_ Mais c'est comme ça. Tu ne peux pas changer la vie des gens. Ce garçon avait peut-être fait une connerie avant que son père ne le gifle. Tu ne sais pas. Peut-être que l'homme s'est calmé et est parti acheter un nouveau jouet à son fils pour s'excuser. On ne saura jamais. Ce n'est peut-être pas un mauvais père.
Il pose ses mains sur mes avant-bras comme il l'a fait l'autre jour.
_ Ne te tracasse pas pour ça. Tu trouveras toujours pire que toi dans la vie. C'est pourquoi tu ne dois penser qu'à toi. Si tu te mets à te lamenter sur le malheur des autres, tu ne seras jamais heureuse.
Je hoche simplement la tête. Le contact de ses doigts sur mon bras m'électrifie. Ma peau me brûle. C'est lui qui me fait cet effet là, comme à chaque fois. Je recule alors d'un pas pour garder une distance raisonnable entre nous.
Ses yeux me scrutent longuement. Ils sont pesants. Je baisse le regard de gêne. Mon portable indique qu'il est 22 heures 55.
_ Je vais être en retard, jmarmonné-je.
_ Y'a moyen qu'on arrive chez Isaac à l'heure. Si on se dépêche.
Il se met en route en me disant de le suivre. J'obtempère. Nous passons par des rues que je ne connaissais pas encore. Tout est calme ici. Seules quelques voitures roulent encore sur la route.
Au final, nous arrivons cinq minutes en retard. Aaron me raccompagne jusqu'à l'entrée de la maison. À peine ai-je le temps d'ouvrir la bouche que la porte s'ouvre. Comme si ce n'était pas déjà évident, c'est Isaac qui vient voir ce qu'il se passe. Enfin, il vient surtout faire chier son monde vu la sale tête qu'il fait. J'avance vers lui pour lui faire un bisou, histoire d'être gentille et de faire la faux-cul, mais il m'en empêche.
_ Il est 23 heures 05, Camille, dit-il froidement.
_ Je sais.
_ Tu devais rentrer à 23 heures.
_ C'est pas pour 5 minutes en plus. Je suis saine et sauve c'est bon tu peux arrêter de faire ton rabat-joie maintenant.
_ HEUREUSEMENT que tu es saine et sauve. Rentre maintenant.
Il toise Aaron qui lui rend ce regard glacial.
_ Laisse-moi le temps de dire au revoir et merci, d'abord.
_ Non. Tu es déjà en retard, si tu restes dehors encore plus longtemps tu vas être malade.
_ Ton argument n'est pas du tout logique. Je vais très bien.
Mon frère se tourne vers moi pour riposter mais Aaron parle avant lui.
_ C'est bon, Camille. Rentre, il a raison.
_ Non ! J'ai le droit de te dire merci, merde.
_ Ecoute les grands, me conseille Isaac.
_ Prends pas trop la confiance toi, m'énervé-je en le contournant pour rejoindre Aaron.
Je m'approche de celui-ci et dépose mes lèvres au coin des siennes.
_ Merci pour tout, murmuré-je à son oreille.
Il esquisse un sourire.
_ De rien. Ça m'a fait plaisir. On se revoit bientôt.
_ Oui.
Je lui adresse un sourire timide avant de faire volte face. Puis je me rappelle que j'ai sa veste alors je la retire et la lui rends.
_ Tu aurais pu la garder, me dit-il.
_ Non. Tu vas attraper froid si tu rentres en t-shirt.
Il soupire, vaincu, puis l'enfile. Isaac se racle la gorge derrière nous ce qui lui vaut un regard noir de ma part.
_ Vous avez fini là ? Rentre maintenant, m'ordonne mon frère.
Je fais un rapide signe de la main à Aaron avant de rentrer.
_ Je te rejoins après.
_ Pourquoi ?
_ Parce que.
_ Pourquoi ?
_ Je dois parler avec ton cher Aaron.
_ Pourquoi ?
Je vais forcer jusqu'à ce qu'il me dise ce qu'il veut à Aaron.
_ Ne fais pas chier et rentre.
_ Pourquoi ?
Il grogne en fermant la porte à mon nez. Enculé.
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