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Dernier chapitre !

So take a chance and don't ever look back ~

Les larmes se sont stoppées aussi rapidement et silencieusement qu'elles sont apparues. Il a reniflé, s'est passé les mains sous les yeux, les a sortit noir de khôl, a pouffé et a tourné la tête vers Jeongin qui a détourné le regard pour se reconcentrer sur la route.

« Je suis- » commence Bam mais la main de Jeongin s'est posée sur sa bouche en une fraction de seconde, apeuré de ce qu'il pourrait dire.

Le cœur battant, il risque un regard sur la personne assise à côté de lui. C'est marrant comme mot, "personne". Une personne c'est un être humain. Lorsqu'on dit une personne on ne sait pas si l'on parle d'un homme ou d'une femme. On ne sait rien de cet humain, et à raison puisqu'il ou elle n'est "personne". Bam n'est personne, Jeongin n'est personne, et ils sont tous deux des personnes. Jeongin ne sait pas qui est la personne qui se cache derrière Bam et ses mystères. Pourtant, et c'est là que réside tout le paradoxe : Jeongin a l'impression de connaître Bam. Il a l'impression de connaître sa personne.

« Ne t'avise pas de dire que tu es désolé, murmure-t-il en décollant sa main et en la laissant tomber sur le genou de Bam pour le serrer doucement.

- Je ne le dirai pas si tu ne veux pas. »

Sous-entendu : ça ne m'empêchera pas de le penser.

Jeongin soupire et la main de Bam se dépose sur la sienne. Par automatisme il retourne sa paume pour entrelacer leurs doigts.

« Je veux rentrer, chuchote Bam en tournant la tête vers la fenêtre.

- Je te ramène chez toi. »

Leurs mains se lâchent et Jeongin active le clignotement.

Le reste du trajet se fait en silence. Lorsque la situation ne requiert pas ses deux mains, Jeongin à les doigts serrés autour de ceux de Bam, comme si rompre le contact, c'était rompre un contrat.

Depuis le début, leur relation a été presque exclusivement physique ; jusqu'à cette fichue soirée et la discussion du lendemain. Depuis, il ne sait plus. Alors il se raccroche à son contact, comme si c'était la dernière preuve que le désir qu'il ressentait au début est encore là, comme si le sexe primait encore sur les sentiments (ironique lorsqu'on sait qu'ils n'ont jamais dépassé le stade de quelques baisers appuyés et autres mains baladeuses).

La voiture s'arrête, Jeongin a les yeux rivés sur le trottoir devant eux et les doigts serrés autour de ceux de Bam.

« Jeongin...

- Hum ?

- Si je voulais te voir, commence Bam doucement. C'est parce que tu me manquais. »

Une vive douleur se propage dans son corps : il s'est mordu la langue.

« J'en ai marre de me faire passer pour quelqu'un que je ne suis pas, bredouille-t-il (elle ?). Bam c'est mon alter ego, c'est un personnage. »

Évidemment qu'il le savait. Depuis le début, il le savait. La personne avec qui il a passé ses nuits n'existe pas.

La main de Bam se resserre autour des doigts de Jeongin qui, eux, se sont distendus.

« Je ne suis pas comme ça dans la vraie vie. »

La vraie vie ? Mais qu'est-ce que c'est la vraie vie ?

« Sauf que toi tu ne joues pas, tu es qui tu es. »

Mais qui suis-je, Bam ?

« Et moi si je suis tombée amoureuse de ta vraie personnalité. »

Un nuage de coton s'abat sur ses oreilles. Dans la nuit noire, tout lui parait blanc, ouaté et silencieux.

Amoureuse ?

Son cœur bat si fort, si fort, si fort : il a peur qu'il ne s'échappe de sa poitrine pour s'envoler dans le ciel. Et à côté, Bam continue de parler, de plus en plus vite, serrant sa main de plus en plus fort.

« Toi tu n'aimes qu'une version édulcorée de moi, dit-il (ou elle plutôt). Une version qui ne me ressemble pas, que j'ai inventé pour qu'on m'aime. Et ce n'est pas moi ! »

Éclat de voix qui fait redescendre Jeongin sur Terre. Impulsion qui lui fait lâcher le trottoir des yeux pour se tourner vers Bam qui le regarde, les yeux brillants de larmes et les lèvres tremblantes.

« Alors dis-moi, dit-il simplement. Qui es-tu ?

- Je... »

Mais Jeongin ne lui laisse pas le temps de dire quoi que ce soit et sort de la voiture. La portière claque derrière lui et il fait le tour du véhicule pour venir ouvrir la portière passager.

« Rentrons à l'intérieur, dit-il en tendant la main vers Bam. S'il faut qu'on ait cette discussion je ne veux pas qu'elle ait lieu dans une voiture. »

Bam prend sa main, Jeongin verrouille la voiture et ils entrent dans l'immeuble. En silence, Bam ouvre sa porte et l'entraîne vers le salon. Ils s'assoient sur le canapé et se contemplent un instant, pas vraiment sûr de ce qu'ils veulent dire. Si Jeongin avait été plus calme, il en aurait peut-être profité pour regarder l'intérieur de l'appartement de Bam (qu'il n'avait jamais vu jusqu'alors). On en apprend beaucoup sur la personnalité de quelqu'un en regardant son environnement de vie. Il aurait ainsi vu la table de dessin dans un coin, il aurait vu la pile de vaisselle sale dans l'évier, il aurait vu les miettes sur la table et les vêtements déposés aléatoirement, çà et là.

"Qui es-tu ?"

La question flotte dans l'espace entre eux. Qui sont-ils au final ? Deux inconnus ? Deux amis ? Deux amants ? Un inconnu et son amant ?

« Je ne sais pas qui je suis, dit alors Bam dans un murmure. Je suis trop de choses à la fois pour... Pour pouvoir te donner une réponse. »

Jeongin ne dit rien. Il a coincé ses mains sous ses cuisses pour les empêcher de trembler.

« Le jour je... Je suis une simple étudiante en architecture, articule Bam difficilement. Je suis trop timide pour me faire des amis, je passe ma vie seule à écouter de la musique. Rien à voir avec Bam, n'est-ce pas ? »

Jeongin ne dit rien, il fixe le livre ouvert et retourné sur la table. Il y a une fine couche de poussière sur la couverture. Depuis quand est-il là ? Seul, ouvert, sans personne qui n'a envie de le continuer à le lire.

« Jeongin, l'appelle Bam et il relève la tête. Est-ce que tu m'aimes ?

- Oui. »

Il n'a même pas réfléchi.

« Non, tu aimes Bam. Et Bam c'est pas moi. »

Devant lui, elle s'est remise à pleurer, et lui reste figé, sans rien dire. Il fait chaud soudain, mais ses doigts sont gelés.

« Fais quelque chose, dit Bam tout bas. Insulte-moi, barre-toi, embrasse-moi, j'en sais rien. Mais reste pas planté là, sans rien dire, s'il te plaît Jeongin... »

Alors il fait ce qu'elle lui a dit, il fait quelque chose.

« Pourquoi Bam ?

- Hein ?

- Pourquoi t'as choisi Bam comme nom ?

- Parce que la nuit, tout est différent. Si je veux être un homme qui embrasse n'importe quelle meuf en boite, je peux, si je veux être une femme qui couche avec le premier inconnu, je peux aussi.

- Si tu veux draguer un gamin d'à peine 18 ans, tu peux aussi du coup ?

- T'es pas un gamin Jeongin.

- T'es pas juste une fille qui fait des études d'architecture et qui est trop timide pour se faire des amis. »

Avec un soupir il se rapproche d'elle sur le canapé et, sans savoir qui fait le premier pas, leurs bras se referment autour du corps de l'autre. Bam a laissé tomber sa tête dans son cou, la joue de Jeongin est collée à son crâne, il peut sentir son cœur battre contre lui. Son cœur à lui est lourd, lourd du poids de la révélation.

Il a eu le temps de réfléchir cette semaine. Il a retourné le problème dans sa tête des millions de fois, il s'est perdu dans ses propres pérégrinations mentales et il en est veut à une conclusion. Le souffle de Bam dans son cou le n'est qu'une raison de plus de prendre cette décision.

« Je m'en fous que tu sois une personne complètement différente à chaque fois, murmure-t-il et il dépose délicatement ses mains sur ses épaules pour l'écarter de lui et planter son regard dans le sien. Ça reste une partie de toi.

Les yeux de Bam s'ouvrent un peu plus et ses pupilles se dilatent alors qu'il écarte les mèches de cheveux noir corbeau de ses yeux.

« Peut-être que c'est Bam que j'aime, mais Bam fait partie de qui tu es. Et tant pis si je ne connais pas encore toutes les facettes de toi, tant pis si je ne connais pas encore l'étudiante en architecture trop timide pour se faire des amis. Il y a plein de choses sur moi que tu ne connais pas non plus, dit-il en riant légèrement. »

Avec douceur, il vient encadrer son visage de ses mains et rapprocher son visage du sien.

« Je suis allé chercher la traduction de la musique, dit-il en souriant. You had the power, you've yet to have your finest hour, chantonne-t-il. Tu avais le pouvoir, tu mérites d'atteindre ton apogée, c'est ça ? (Bam hoche la tête silencieusement.) Et bien toi aussi, tu le mérites. »

Encore une fois, personne ne sait qui a fait le premier pas, personne ne sait qui a réduit la distance entre eux en premier, mais leurs lèvres se sont rencontrées avec plus de douceur que jamais. Elles se sont caressées gentiment, chastement. Oserait-on dire amoureusement ?

Les mains nichées dans le cou de Jeongin, Bam s'est rapprochée encore un peu, jusqu'à ce que ses jambes passent de chaque côté de son corps. Leurs torses sont plaqués l'un contre l'autre, Jeongin a posé sa main sur sa cuisse et l'autre dans le bas de son dos.

C'est doux, c'est si doux.

« Je crois vraiment que je t'aime, Jeongin, murmure Bam lorsqu'ils se séparent pour respirer.

- Moi aussi, répond simplement Jeongin et il ne l'a jamais pensé aussi fort. Moi aussi je t'aime. »

Il aime comment ils se comprennent en un regard, il aime comment ils dansent, il aime comment son ventre se retourne à chaque fois qu'il la voit (qu'importe l'identité qu'iel aborde), il aime son sourire. Il l'aime tout court et il s'en fout si c'est trop tôt, s'il ne la connaît pas vraiment, si tout le monde va le traiter de fou. Fou, il l'est.

"On est tous fous, Jeongin."

Il sourit et son cœur s'emballe.

« Audrey. »

Ce n'était qu'un murmure, un murmure contre ses lèvres, mais Jeongin l'a entendu résonner dans tout son corps.

« C'est mon nom.

- Pas très coréen, souffle Jeongin en réponse.

- Mon père est anglais. »

Il sourit et l'embrasse de nouveau, la laissant le faire basculer sur le dos pour s'allonger sur lui et glisser ses lèvres dans son cou.

« Merci, » dit-il dans un souffle.

Elle se redresse, assise sur son bassin et l'interroge du regard.

« Merci de me faire confiance. »

Il pose ses mains sur ses hanches, elle se penche pour l'embrasser, souriant et pleurant en même temps. Et leur baiser à le goût d'un arc-en-ciel après la tempête.

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