Chapitre 38




     Alia enfila un pull pris à la va vite et quitta la pièce, laissant Harold seul. Elle se rendait compte du crime qu'Harold avait commis cinq ans plus tôt. Elle le connaissait, mais les sanglants détails que le jeune homme lui avait confiés la déstabilisaient. Elle souhaitait s'isoler quelques instants, afin de réfléchir à la situation. Elle s'assit dans le canapé, caressant la tête de Leiko tout en se posant des dizaines de questions. Alia Brown, avocate renommée du royaume-Uni était amoureuse d'un des pires criminels de ce même pays. Elle ne pouvait réveiller plus ironique comme situation. Que pouvait-elle faire ? Oublier cet acte horrible et faire comme si rien ne s'était passé ? Ou bien écouter son cœur et aimer Harold comme jamais elle n'avait aimé quelqu'un auparavant ?

     Elle était perdue. Complètement perdue dans ses choix. Elle avait pensé être capable d'encaisser la description du méfait, mais il n'en était rien. Elle parvenait presque à voir les grands yeux verts de la petite fille, suppliants Harold de l'épargner. Elle pleura, afin de libérer le poids accablant des mots de l'ancien condamné. Elle aurait tant aimé oublier ce qu'il venait de lui dire, mais elle n'y parvenait pas. Elle allait devoir vivre avec – tout comme Harold – jusqu'à la fin de ses jours. Après tout, le brun ne lui avait pas raconté tout cela parce qu'il souhaitait, mais bel et bien parce qu'elle le lui avait demandé.

— Il faut que j'aille au travail.

     Alia s'extirpa de ses pensées et posa son regard – légèrement apeuré – sur le visage du brun. Elle contempla le visage fermé qui lui faisait face. Il était redevenu le Harold froid qu'elle avait connu lors de sa première journée au centre pénitentiaire de Belmarsh. Son regard s'accrocha aux pupilles bleutées, telles deux petits océans, du jeune homme. Elle se leva, attirée par ce regard si envoûtant, si particulier, si beau. Elle s'arrêta à un mètre de lui, le dévisageant, tout en espérant qu'il s'avancerait et la prendrait dans ses bras.

— Je suis désolé.

     Ce fut les seuls mots qu'il prononça avant de quitter l'appartement, plantant Alia. La porte se referma, et les larmes de la jeune femme redoublèrent. Que voulait-il dire par je suis désolé ? Que tout était fini ? Qu'il ne voulait plus d'elle ? Elle s'effondra sur le canapé, effrayant le petit chiot qui avait assisté à toute la scène. Elle voulait crier au monde qu'elle aimait Harold, mais elle ne le faisait car elle n'était même pas sûre que ses sentiments soient réciproques.

     Elle passa sa journée ainsi : pleurer, crier, se calmer. Pleurer, crier, se calmer. Elle ne se sentait pas mieux, mais elle avait extériorisé ses émotions, et cela lui faisait du bien. Elle avait longtemps pensé que l'amour n'existait pas, puis elle avait rencontré Harold qui était devenu important en si peu de temps. Mais à cet instant, elle ignorait s'il voulait encore d'elle. Il devait regretter de lui avoir conté son crime. Elle ferma les yeux, épuisée. Elle souhaitait dormir.


     Harold longea les rues éclairées par les nombreuses décorations de Noël, fête qu'il n'avait jamais célébrée, soit-disant passant. Le réveillon approchait à grands pas, encore deux semaines et le père Noël apporterait des cadeaux aux enfants sages. Quelle légende stupide ! Enfin, peut-être pas. Il n'avait jamais été sage, et n'avait jamais eu le droit à un quelconque cadeau. Peut-être existait-il finalement. Toujours est-il que pendant la longue semaine qui venait de passer, il n'avait cessé de penser à Alia. Il avait envie de la revoir, de la serrer contre et de lui murmurer de belles paroles au creux de l'oreille. Mais comment pouvait-il s'y prendre pour oser retourner la voir ? Elle devait le voir comme un monstre, à présent. Et cette pensée peina gravement le brun. Il se demandait ce qu'elle faisait à chaque instant. Était-elle avec un autre homme ? Non, ce n'était pas ce genre de femmes. Était-elle en train de pleurer ? Non plus. Pourquoi pleurerait-elle pour un homme comme lui ?

     Il s'arrêta devant la vitrine d'une bijouterie. Il avait envie d'acheter un cadeau à la jeune femme qui lui avait volé son cœur. Car il ne pouvait le nier, il aimait Alia plus qu'il n'avait jamais aimé quelqu'un, et ce n'était pas difficile, car jamais il n'avait aimé auparavant. Il pénétra dans la boutique, analysant chaque bijou du regard. Des bagues, des colliers, des montres, tout cela était bien beau, mais ne correspondait pas à Alia. Apercevant une vendeuse du coin de l'œil, il s'avança vers elle, afin de demander conseil. Elle était plutôt jolie, même si ce n'était pas le genre de femmes qu'Harold appréciait. Elle possédait de longs cheveux roux, impeccablement lisses, tirés en queue de cheval. Ainsi que des yeux en amandes, marron. Quelques petites tâches de rousseur avait pris possession de son petit nez. Il lui lança un sourire charmeur.

— En quoi puis-je vous aider ? demanda-t-elle un peu trop joyeuse pour que cela paraisse naturel.

— Je cherche un bijou, pour une femme, déclara le brun en fixant les prunelles de la jeune femme.

— Quel genre de bijoux aime-t-elle ? poursuivit-elle toujours avec un sourire sonnant faux.

— Je l'ignore.

     Harold se sentit bête. Il était incapable de dire ce qu'Alia aimait ou non, puisqu'elle ne portait aucun bijou à la prison. La vendeuse haussa un sourcil, avant de reluquer le brun de haut en bas.

— Comment est cette femme ? Physiquement et mentalement.

     Belle. Incroyablement belle, pensa Harold. Et très gentille.

— Elle est brune, plutôt petite, de magnifiques yeux noisette. Et elle aime aider les gens, elle aime faire ressortir le bon côté des personnes qu'elle rencontre. Elle a le cœur sur la main, révéla Harold les yeux perdus dans la contemplation du visage d'Alia qui avait envahi son esprit.

— Et visiblement, votre cœur est également dans sa main.

     La remarque de la rouquine ne manqua pas de faire rougir Harold. Cela se voyait donc tant qu'il aimait cette femme ? Il sourit, ne sachant pas quoi faire d'autre.

— Je pense avoir ce qu'il vous faut, déclara-t-elle tout en s'éloignant vers une vitrine.

     Il la rejoignit, scrutant chaque bijou avec attention. Elle en sortit un. Il s'agissait d'un sublime bracelet en argent. Elle le passa à son bras afin de montrer l'effet qu'il faisait une fois porté. Le fin métal s'enroulait autour du poignet, tel un serpent. Seul un cœur serti d'une pierre bleutée était présente sur bracelet épuré, à l'extrémité qui montait vers la main de la jeune femme. Harold sourit, Alia ne pourrait qu'aimer ce bracelet, il en était certain.

— Je le prends.

     Il ignorait combien coûtait ce bijou, mais il s'en fichait, il voulait qu'Alia comprenne qu'il l'aime, sans qu'il n'eût à lui dire oralement. Il marcha jusqu'à la caisse, où il régla ce qu'il devait. L'ensemble de ses pourboires, économisés pendant deux semaines, s'envolèrent pour ce bijou, mais il ne le regretta pas. La rouquine emballa le bracelet dans un joli petit paquet d'une couleur similaire à celle de la pierre. Il quitta la boutique, prenant la direction de son appartement. Il se rendrait chez Alia lorsqu'il en aurait le courage, car pour le moment, il préférait la laisser seule. Elle avait besoin de réfléchir, et il pouvait le comprendre.

     Il entra dans son petit studio, le visage lumineux. Il déposa le cadeau - qu'il offrirait bientôt à Alia - sur la table de la cuisine, avant d'attraper de quoi faire une salade composée. Il avait faim et comptait bien se rassasier rapidement.

     Une fois son repas terminé, il alla se coucher, ses pensées toujours tournées vers Alia. Bientôt, elle serait sienne.

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