Chapitre 15
Harold porta ses mains au niveau de ses tempes. Une douleur lancinante avait envahi son crâne depuis plusieurs minutes, depuis qu'il s'était réveillé, dans cette cellule aussi sombre qu'une nuit sans lune. Il se souvenait qu'Andropov lui avait demandé de le suivre, et qu'ensuite, quelque chose l'avait frappé de plein fouet à l'arrière de la tête. Il s'était écroulé et s'était ensuite réveillé sur le sol mouillé des cellules d'isolement. Il connaissait bien ces dernières, pour y avoir séjourné plus d'un an s'il comptabilisait ses nombreux séjours.
Il s'assit sur le lit en fer, lui aussi humide. Son crâne le brûlait atrocement, mais sa seule préoccupation à ce moment était de retrouver Alia. Cette dernière risquait gros s'il ne revenait pas rapidement auprès d'elle. Harold connaissait les penchants pervers d'Andropov, et cela le lui plaisait pas d'imaginer Alia seule, entre ses mains.
Heureusement pour lui, il connaissait cette cellule comme sa poche, il savait exactement où se situait la porte et comment l'ouvrir. C'était un ancien détenu qui le lui avait appris lors de son premier séjour en isolement. Un simple coup au niveau de la poignée, et la porte s'ouvrait. Mais pour le moment, il préférait se tenir tranquille. Un gardien, armé bien entendu, devait surveiller le couloir. Il ne valait mieux pas sortir à ce moment. Se prendre une balle était bien la dernière chose dont il avait besoin en ce moment.
Il attendit, assis sur son lit, que le temps passe. Il guettait le moindre bruit qui se produisait à l'extérieur de sa cellule. Le gardien était toujours présent, il le savait. Il n'avait pas l'air de vouloir partir, ce qui agaça Harold. Ce dernier repensa au meurtre d'Adam Tanat qu'il avait commis quelques heures plus tôt. Il en eut le sourire. Après tout, combien de détenus mouraient en prison, sous les balles ou les coups des gardiens. Il pouvait bien venger ces hommes morts entre les murs du centre pénitentiaire de Belmarsh.
Ses pensées se bousculèrent dans son esprit. Il repensait sans cesse au visage d'Alia. Il hantait son esprit. Elle était son exact opposé, mais il ne pouvait réfréner son incommensurable attirance pour cette femme aux yeux remplis d'étoiles et à la peau aussi douce que les plumes d'un oisillon. Elle faisait accélérer son cœur comme personne ne l'avait fait auparavant. Pourtant, il ne pouvait s'empêcher de ne pas vouloir de cette relation. Il était un criminel dangereux, et ça, personne ne le changerait. Il était né pour être un délinquant, et il le payerait toute sa vie, en restant incarcéré derrière les barreaux de la prison dans laquelle il se trouvait depuis déjà cinq ans.
Malgré l'obscurité, Harold se leva avant de se coller à la porte gelée qui maintenait sa cellule close. Il pouvait entendre le gardien marcher. Décidément, ne cesserait-il jamais son tour de garde ? Il soupira et donna un coup de poing empli de rage contre la porte. Le bruit se répercuta dans l'ensemble du couloir, résonnant jusqu'à la cellule où Alia dormait. L'un comme l'autre ignoraient qu'ils se trouvaient à quelques mètres à peine l'un de l'autre. Chacun d'eux voulait retrouver l'autre, mais la tâche risquait de devenir compliquée avec les gardiens qui tournaient dans le couloir comme des poissons rouges dans un aquarium. Idiots, voilà ce qu'ils étaient. Harold en était convaincu.
Il posa ses mains - dont l'état ne cessait de se dégrader de jour en jour – contre la paroi de métal qui le séparait de son amie. Il tenait à elle comme à personne d'autre. Elle lui avait prouvé qu'il pouvait lui faire confiance, qu'il n'avait pas besoin de cacher sa véritable nature avec elle. C'est ce qu'il aimait chez cette femme qui occupait ses pensées depuis qu'il l'avait rencontrée.
— Lawford ? murmura une voix grave qui appartenait à un homme.
Le concerné colla son oreille droite contre la porte, écoutant comme un animal en chasse. Il ne reconnaissait pas la voix du gardien qui s'adressait à lui, peut-être était-il nouveau. Ou bien il travaillait dans une autre section que celle où Harold était enfermé.
— Qui êtes-vous ? répondit Harold décontenancé.
— Tu ne me connais pas, je m'appelle Henri, Henri Baldwin, se présenta l'homme qui se trouvait derrière la large porte en fer, je travaille à la laverie en temps normal. J'ai été appelé ici en renfort, bien que je ne visse pas ce qu'il y a à contrôler.
— D'accord, mais pourquoi me parles-tu dans ce cas ?
— J'ai vu ce que Andropov a dû faire pour te conduire ici, je ne suis pas en accord avec ses méthodes de travail. Mais, moi aussi, j'ai un trousseau de clés, et ça, il ne le sait pas. Je suis venu te proposer un marché.
— Très bien, dis-moi tout.
Harold n'en croyait pas ses oreilles. L'espoir venait de renaître dans son cœur. Il allait peut-être sortir de son isolement. Cela n'avait certes pas duré longtemps, mais c'était largement suffisant pour le faire commencer à douter. Il avait pensé qu'il ne reverrait plus la lumière naturelle du jour qui se lève, mais surtout, que jamais plus il ne pourrait scruter le doux visage d'Alia. Harold était pressé de savoir en quoi consistait le marché que lui proposait Henri.
— Je ne suis pas un gars très costaud, vois-tu, ce qui fait que les gardiens profitent de ce point faible pour se moquer de moi. Je ne peux pas me défendre seul, commença-t-il une pointe de honte dans la voix.
Harold fut étonné d'apprendre cela. Le son de la voix du jeune homme était pourtant grave et semblait dénoncer un homme brutal et viril. Mais d'après les paroles d'Henri, il n'en était rien.
— Mais je connais ta réputation. Je sais que tu étais boxeur avant que tu ne sois incarcéré ici. Je sais que tu pourras me protéger des autres, car je n'en peux vraiment de cette peur qui me ronge le ventre depuis que je travaille ici, termina-t-il.
— Oh. Je vois. Si je comprends bien, si j'accepte de te protéger des autres matons, tu me fais sortir d'ici ? récapitula Harold avec un sourire rempli d'espoir rendant son visage plus lumineux que jamais. Alors fais-moi sortir. J'accepte ta proposition.
Harold n'y crut pas, jusqu'à ce qu'il entende un clic, signalant que la porte était ouverte. Il hésita quelques instants. Peut-être que tout ça n'était qu'un énième piège de la part d'Andropov. Ce dernier aimait torturer, autant mentalement que physiquement les prisonniers, c'est pour cela qu'il était respecté de tous.
Finalement, Harold fit un pas en avant, tira la porte vers lui, et se retrouva face à un homme au visage éclairé par une lampe torche. Il le salua d'un bref mouvement de tête. Il préférait inspecter le gardien chétif qui se tenait face à lui afin de s'assurer que ce dernier ne cachait pas une arme ou autre chose susceptible de pouvoir le blesser.
— Merci, remercia Harold froidement. Tu n'aurais pas vu une jeune femme, toi qui vois tout ? Elle se nomme Alia Brown, elle est avocate.
— Non, je ne vois pas. J'ignore de qui tu parles, mais je peux essayer de me renseigner auprès de quelques gardiens, répondit le petit blond.
Henri faisait deux têtes de moins qu'Harold, ses bras et ses jambes étaient aussi fins que des baguettes, tandis qu'Harold était aussi musclé qu'un bœuf. Ses cheveux étaient blonds très clairs, presque blancs. Ceux d'Harold étaient bruns. Seuls leurs yeux possédaient le même trait commun. Leur couleur, bleue claire. Ils étaient aussi opposés l'un à l'autre que l'étaient le jour et la nuit, ou encore le Yin et le Yang.
— Il faut que je la retrouve, murmura le brun en baissant les yeux vers la lampe que tenait Henri.
— Je comprends. C'est ta petite-amie, il est normal que tu...
— Quoi ? Non, Alia n'est qu'une amie, du moins je crois. Peut-être ne me considère-t-elle pas de la même façon, mais de mon côté, c'est ainsi.
Le regard d'Harold se perdit dans la contemplation du faisceau de lumière qui s'échappait de la lampe torche. Une amie ? Il en ignorait la véritable définition, jamais il n'avait eu d'amis. De plus, s'il avait réellement connu la signification de ce mot, il en aurait probablement choisi un autre, plus fort et plus vrai, pour désigner Alia.
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