Petit pas.
Les douces enjambées d'Amélie martelaient le sol en bois de la scène du grand théâtre dans lequel elle répétait son ballet. Elle s'élançait avec telle grâce, tourbillonait sur elle-même, se déchaînait, puis finalement, s'apaisait.
Lorsqu'elle sentit que le moment fût pour elle de prendre une pause, elle s'assit au bord de la large scène et s'emparait de sa fidèle gourde qu'elle avait préalablement remplie d'eau. Elle en bû une grande gorgée.
Alors ses pensées derivèrent un instant sur la journée qu'elle avait passé, deux jours auparavant, en compagnie de Mycroft Holmes. Elle n'avait pas eu de nouvelles depuis et se demandait bien si elle devait en donner. Bien sûr, ils avaient échangé leur numéro de téléphone avant qu'elle ne retrouve son appartement. Mais elle se posait un tas de questions, tellement, qu'elle n'osait bientôt plus le faire.
Un bruit de porte la fit sortir de sa rêverie. Bientôt, la silhouette de son père se dessinait à travers les sièges du théâtre. Un léger soupire s'échappait de ses lèvres lorsqu'elle réalisait qu'elle devrait bientôt redoubler d'efforts pour avoir son entière satisfaction.
"Tu devrais t'entraîner une petite demi-heure de plus."
Amélie l'observait du coin de l'oeil alors qu'elle se redressait pour se remettre au travail.
"Une demi-heure de plus, ou une demi-heure de trop ?"
Sa question était ironique. Elle savait qu'elle n'avait, depuis un long moment déjà, plus son mot à dire dans les décisions qui concernaient ses ballets, y compris ses répétitions.
Son père ne relevait pas, à son grand étonnement. Mais elle s'en fichait, après tout, c'est dans le silence qu'elle y trouvait la sécurité.
Lorsqu'Amélie sortit du théâtre, le vent frais vint lui caresser ses bras dénudés, lui arrachant un petit frisson. Elle aurait pu mettre une veste, mais elle n'était qu'à quelques minutes à pied, et elle avait réellement besoin de sentir ce vent frais sur son corps. Elle venait de passer les 3 heures les plus compliquées de ses répétitions, aussi bien physiquement que mentalement. Son père pouvait vraiment être un poids dans son esprit quand il le voulait.
Elle soupirait d'agacement et pressait le pas pour atteindre son appartement le plus vite possible. Une bonne nuit de repos ne pouvait lui faire que du bien.
De son bureau situé dans un grand bâtiment au milieu de la capitale, Mycroft observait la jeune femme faire son chemin à travers les rues londoniennes. Il avait un accès complet aux caméras de surveillance de la ville, et ce soir, était un de ces soirs où la curiosité lui était plus présente dans son esprit que son travail. La faible lumière des lampadaires éclairait le doux visage de la jeune femme. Elle semblait exténuée.
De son sac de sport qu'elle portait en bandoulière sur son épaule, il en déduit qu'elle devait sortir d'une de ses répétitions. Il ne l'avait pas vue depuis deux jours, et n'avait pas vraiment penser à lui envoyer de message afin de prendre quelques nouvelles. Il n'était pas vraiment du genre à prendre des nouvelles. Il devait avouer néanmoins qu'il lui manquait un petit quelque chose. Il se promit de lui envoyer un message d'ici demain matin.
Lorsqu'Amélie atteint finalement son appartement, elle laissa s'échapper un long soupir de soulagement. Elle se défit de ses chaussures qu'elle jugeait trop lourdes à porter depuis que ses pieds lui brûlaient d'effort. Elle les jeta nonchalamment et se précipita à sa salle de bain. Au plus vite elle serait coucher, au mieux ce serait pour elle et sa santé mentale.
Elle ne mit pas longtemps pour s'endormir ce soir-là. La fatigue l'emportait sur son esprit.
Elle fût réveiller aux aurores par le cri strident de son téléphone portable qui devait sonner depuis au moins une bonne dizaine de minutes déjà. Elle se résigna à tendre son bras, non sans mal, et prit son téléphone dans sa main. Son esprit encore embué des songes de la nuit, elle parvint à décrocher en appuyant un peu partout sur l'écran.
"Mais enfin que fais-tu ? Tu devrais déjà être là depuis une bonne demi-heure !"
La voix impatiente de son père se fit entendre dans toute la pièce. Il était vraiment contrarié. Sans un mot, elle mit fin à l'appel et entrepris de se lever. À quoi bon discuter ? Elle savait que peu importe ce qu'elle lui dirait, rien ne lui ferait changer ses idées.
Elle en avait ras-le-bol. Tout ça. Cette tournée, cette pression. Ses heures de sommeil envolées. Bon sang, elle priait si fort que quelqu'un la sorte de ce cercle infernal.
La main sur la poignée de la salle de bain, elle s'arrêta net lorsqu'elle entendit la sonnette de son appartement retentir. Elle cru rêver pendant quelques instants. Puis elle fût vraiment en colère. Osait-il même venir jusqu'à son appartement pour l'y traîner de force ?
Elle se dirigea vers sa porte d'entrée d'un pas décidé et l'ouvrit sans même prendre le temps de jeter un coup d'oeil à l'oeillet.
"Bon sang tu ne peux pas juste me laisser respirer ?!"
Elle avait hurler cette phrase avec une telle rage que la résonnance se fit bien plus forte qu'elle ne s'y était attendu. Si ses voisins n'étaient pas encore réveillés, ils devaient probablement l'être maintenant.
Ce n'est que lorsqu'elle releva les yeux qu'elle fit face à un grand jeune homme aux cheveux bouclés qui l'observait, incertain. Amélie fronça les sourcils. Ils restèrent à s'observer un bon moment avant qu'un cliquetis ne les sorte de leur contemplation.
"Tout va bien, dear ?"
C'était la vieille dame de l'appartement d'en face. Amélie ne put contenir l'énième soupir de sa journée. Elle sourit à la vieille dame, se voulant rassurante au possible. Elle n'y était pour rien, après tout.
"Ne vous inquiétez pas Madame Brooke, tout est sous contrôle."
La vieille dame hocha finalement la tête et s'engouffra dans son appartement. Amélie perdit aussitôt son sourire rassurant et observa le jeune homme d'un air méfiant.
"Je peux savoir ce que vous faites devant chez moi ?"
Le jeune homme l'observa toujours, un sourcil relevé.
"Je peux savoir pourquoi vous êtes toujours en pyjama ?"
La jeune femme laissa échapper un rire jaune et leva les bras en l'air en signe d'exaspération.
"Alors c'est mon père qui vous envoie ? Eh bien dites lui de me foutre la paix, autrement je prend le premier vol en direction de Strasbourg et je le plante ici avec son putain de ballet !"
Alors qu'elle refermait la porte au nez du jeune homme, il l'arrêta en calant son pied dans l'entrebâillement.
"À moins que je n'ai une nièce dont Mycroft ne m'ait jamais parlé, non je ne suis pas un envoyé de votre père."
Au nom de Mycroft, Amélie ré-ouvrit la porte à l'inconnu.
"Sherlock Holmes."
Il lui tendit une main par courtoisie. La jeune femme l'observa un instant, mais ne la serra pas.
"Vous avez un sacré caractère, si je peux me permettre. Aussi vous devriez vous préparer, et rapidement, Mycroft déteste attendre. Oh et vous devriez annuler votre répétition aujourd'hui, de toute façon vous n'aviez aucune envie de vous y rendre ! Ne me remerciez pas."
Tout en déblatérant son petit speech, il entreprit un tour rapide de l'appartement puis se dirigea vers la chambre de la jeune Amélie qui l'observait, l'air ahurie. Sherlock ouvrit son armoire et lui tendit un ensemble qu'elle récéptionna au vol.
"Ça fera l'affaire. Il fit un léger signe de la main et se dirigea vers la porte d'entrée de l'appartement. Je vous attends en bas. Cinq minutes."
Et il s'en alla en claquant la porte derrière lui. Amélie se perdit dans ses pensées face à ce curieux spectacle. Aussi elle mit un moment avant de réaliser tout ce qu'il venait de se passer et lorsqu'elle se dirigea à sa salle de bain pour se préparer, les cinq minutes étaient largement dépassées.
Elle descendit les marches de son immeuble tranquillement tandis que Sherlock l'attendait, adossé à une berline noire similaire à celle de Mycroft. Probablement était-ce la même. Il lui fit un geste de la main lui désignant une montre invisible à son poignet auquel Amélie ne répondit qu'en tirant la langue, amusée.
"Vous n'avez pas mis la tenue choisit." Sherlock constata.
Amélie l'observa un court instant avant de rire doucement.
"Et puis quoi encore, elle leva son regard dans les airs. Mycroft se fiche pas mal de mon apparence, de toute manière."
À ces mots elle se remémorat le soir de leur rencontre. Elle avait les yeux si gonflés de larmes et ses joues si rosées par le froid. Si Mycroft avait dû y prêter attention, alors il ne l'aurait même pas regarder.
Le trajet se fit en silence. Amélie ne chercha pas à poser plus de questions et Sherlock restait river sur son écran de téléphone. Elle observait la ville qui défilait sous ses yeux. Elle pensa un instant à la colère dans laquelle son père devait se trouver, elle fit une moue, puis décida qu'il valait mieux ne pas y penser pour l'instant.
Lorsque la berline s'arrêta finalement, elle se rendit compte qu'ils venaient d'entrer dans une propriété. Une grande maison, élégante, trônait là au beau milieu d'un énorme jardin. Tout avait l'air si parfait. Alors qu'elle se prit à sa réflexion, la portière s'ouvrit devant elle, la sortant de ses songes. Elle se dit un instant que Sherlock n'était pas aussi arrogant et prétentieux qu'elle ne le pensait, puis elle leva son regard pour rencontrer celui du chauffeur. Sherlock lui, avait déjà rejoint le porche de la maison, les yeux toujours rivés sur son téléphone.
Elle soupira. Évidemment.
Amélie se demanda un instant si elle n'aurait pas mieux fait de se rendre à sa répétition. Après tout, elle ne connaissait pas Sherlock et il aurait très bien pu lui mentir pour qu'elle le suive sans encombre. Maintenant qu'elle y pensait, elle avait été bien bête de le suivre à l'aveuglette.
Elle se résigna à sortir de la voiture lorsque le chauffeur lui adressa un regard impatient. Des centaines de questions se bousculaient dans son esprit, tant et si bien qu'elle pensait pour un moment sentir une migraine montée. Ce n'est que lorsqu'elle passa le pas de la porte d'entrée, qu'elle aperçu son cher Mycroft, que son coeur se réchauffa.
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