XIV- Evelyn
MILA:
Ils s'étaient installés dans une des tentes mise en place par la coalition formée entre les Etats-Unis et le Mexique lorsqu'ils virent les premiers réfugiés arriver. Mila et Adam auraient aimé faire quelque chose, mais les militaires prirent immédiatement tout en main. Enfin.... Jusqu'à ce que le nombre de fuyards aux yeux hagards ne devienne trop important. Ne pouvant plus le gérer de manière ordonnée, les réfugiés se retrouvaient à errer dans le camp... Mila tentait de les réconforter, mais elle n'avait rien à leur donner, à part ses paroles de réconfort. Elle comprit très vite qu'ils avaient traversé l'enfer, et Adam blêmissait à mesure que les détails de l'invasion se faisaient plus précis. Car oui, il s'agissait bien d'une invasion...
A la fin de l'après-midi, alors qu'elle tentait de guider le flot de réfugiés, Mila se retrouva face à une jeune fille aux yeux perdus, plantée au milieu du flot humain, alors que tous les autres la dépassaient pour trouver une place où s'installer. Elle, ne bougeait pas, le regard fixé sur le vide. Ses cheveux blonds étaient attachés en une queue de cheval à moitié défaite et son jean noir déchiré, mais elle ne semblait pas blessée... Juste... Sous le choc. Mila se dirigea vers elle:
- Hé, je peux t'aider?
La jeune fille la regarda sans sembler la voir. Mila s'approcha d'elle et la prit par le bras:
- Viens avec moi, tu peux venir avec mon copain et moi. Comment tu t'appelles? Moi, c'est Mila.
Semblant s'arracher à sa torpeur, la fille resserra sa prise sur son sac à dos et dit, tandis que Mila l'amenait près des sièges installés devant la tente:
- E.... Evelyn. Je m'appelle... Evelyn.
Adam apparut alors et prit la main de la jeune fille dans la sienne:
- Enchanté, Evelyn. Moi, c'est Adam. Tu sais où est ta famille? Elle est dans le camp?
- Je... balbutia Evelyn. Je ne crois pas. Je viens de San Francisco. Je me suis enfuie avec un groupe que je ne connaissais pas. Ma famille... Je ne sais pas où elle est.
Le cœur de Mila se brisa.
- Tu peux rester avec nous, si tu veux, proposa-t-elle.
- Merci, c'est gentil, je...
Elle se mit à trembler convulsivement.
- Hé, ça va pas? demanda Adam. Tu es blessée? Tu veux manger quelque chose?
- Je... balbutia faiblement Evelyn.
- Adam, elle va s'évanouir! prévint Mila, juste à temps pour que celui-ci retienne la jeune fille, qui perdait connaissance.
- Qu'est-ce qu'on doit faire? paniqua l'intéressé en allongeant Evelyn sur le sol, le plus doucement possible.
- Attends, je regarde dans ses affaires! Peut-être qu'elle est malade et qu'il lui manque des médicaments...
- Elle respire, vérifia Adam. Elle est peut-être juste fatiguée... Je dois avoir quelque chose à manger pour quand elle se réveillera... Son pouls est faible, mais sinon, ça va...
Mila venait juste de trouver les papiers d'identité d'Evelyn dans son porte-feuille, lorsqu'elle se figea. La photo était bien celle de la jeune fille, aucun doute là-dessus. Mais le nom, lui n'était pas celui d'Evelyn. Sur la carte était inscrit le nom Kynvael Darkbloom.
- Adam, murmura-t-elle. Cette fille ne s'appelle pas Evelyn. Elle nous a donné un faux nom.
- Quoi? s'écria Adam.
Au même instant, Evelyn, ou plutôt Kynvael, ouvrit les yeux:
- S'il vous plait.. murmura-t-elle d'une voix faible. Est-ce que vous auriez de ce qu'Arthur a vendu à mon frère, par ici? J'aimerais en avoir...
Mila et Adam se regardèrent, ébahis.
- De quoi tu parles? demanda Mila, perdue, oubliant pour le moment l'histoire des papiers d'identité.
La jeune fille secoua la tête et se mit à pleurer:
- Que je suis bête! Je ne suis plus à San Francisco... Personne n'a de came, ici... Et puis, je n'en ai pris qu'une fois...
Mila venait de comprendre et regarda Adam avec horreur. D'un regard, celui-ci lui intima de ne rien dire, pour le moment.
- De toute façon, j'en ai fini avec cette saloperie, déclara l'adolescente.
Son regard et son ton se faisaient de plus en plus assurés, comme si elle reprenait peu à peu ses esprits après son évanouissement.
- Est-ce que je pourrais avoir mon carnet pour dessiner, s'il vous plait? Il est dans mon sac.
Sans réfléchir, Mila fouilla dans le sac et trouva un grand cahier noir qu'elle tendit à la jeune fille. Cette dernière sortit un stylo de son sac et commença à griffonner. Adam, lui, se pencha vers elle:
- Kynvael...
La fille sursauta.
- C'est bien comme ça que tu t'appelles, non?
Cachée derrière ses longs cheveux blonds, Kynvael murmura:
- Oui... Mais je préfère Evelyn... Je ne veux plus être Kynvael...
Des larmes emplirent à nouveau ses yeux.
- Hé, dit Mila, tu peux changer en gardant ton nom, tu sais...
Kynvael essuya ses joues du bout de ses doigts, puis fit la moue:
- Je ne sais pas... Je ne sais plus rien, en fait... Ce qui s'est passé...
- On se sent tous comme toi, ne t'en fais pas.
Kynvael hocha la tête et se remit à dessiner en silence, son crayon traçant des lignes sur le papier, des lignes qui se muaient en ombres...
- On a un troisième sac de couchage... dit Adam.
- D'accord, merci beaucoup, vous êtes vraiment gentils...
La nuit tomba, et tous trois se couchèrent et éteignirent leurs lampes. Seuls subsistaient quelques bruits aux alentours, venant du camp, mais Mila les trouvait rassurants. Ils n'étaient pas seuls, et elle finit par s'endormir.
Adam la réveilla au milieu de la nuit:
- Mila!
- Qu'est-ce qui se passe?
Était-ce une nouvelle attaque?
- C'est Kynvael... Son sac n'est plus là... Mila, je crois qu'elle est partie!
Mila se redressa:
- Attends, on doit la retrouver!
- Je ne sais pas si elle veut vraiment qu'on la retrouve... Elle a dû partir, vers le Mexique. Tu as vu comme elle voulait partir.
- Oui, mais à son âge... Qui sait ce qui peut lui arriver? Adam, réponds-moi: pourquoi tout ça n'est pas encore réglé? L'Etat et toute son organisation, l'armée, je ne sais quoi d'autre, auraient dû mettre fin à tout ça aussitôt!
Adam la prit doucement dans ses bras:
- Je ne sais pas, avoua-t-il. Mais je suis certain qu'ils sont en train de régler tout ça. Ne t'inquiète pas. On est vivants, et en sécurité. On va s'en sortir, c'est promis...
AVA
La véritable Ava Diaz ne s'attendait pas à ce qu'elle l'attende à l'intérieur de la maison dans la banlieue de Jackson.
Lorsqu'AvaDiazBêta posa un couteau sur sa gorge, elle se débattit violemment, et AvaDiazBêta se sentit soudainement monstrueuse pour ce qu'elle allait faire.
- Je sais que ça ne veut sans doute rien dire, ni pour toi, ni pour moi, mais je suis désolée, murmura-t-elle.
Là-dessus, elle ferma les yeux et pressa son couteau sur la gorge d'Ava.
Lorsque le corps se fut écroulé à terre, elle s'autorisa à rouvrir les yeux. Elle se haïssait pour ce qu'elle venait de faire. Mais elle avait peur, peur de ce que ses créateurs pouvaient bien lui faire subir si elle avait le malheur d'échouer.
Elle ouvrit la bouche, et dit, de sa voix la plus assurée, décidée à se convaincre elle-même.
Elle avait tant voulu être humaine!
- Je suis Ava. Je m'appelle Ava Diaz.
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