XII- Le complexe Avalon
AVA
À Los Angeles, le serveur du bar ne posa aucune question lorsqu'une jeune femme aux yeux bleus s'installa devant lui et commença à noyer sa détresse dans l'alcool.
A Chicago, un étudiant croyait bien avoir trouvé une nouvelle petite amie lorsqu'elle disparut avec un éclat de rire amer.
A Dallas, une femme dans un bus entendit une fille étrange lui murmurer: "quels sont les mots qui vous hantent? Moi, c'est "jamais plus"".
Enfin, deux ans plus tard, le portable d'AvaDiazBêta, qui ne comprenait qu'un numéro, sonna.
- AvaDiazBêta. Le moment approche. Veuillez nous rejoindre au complexe extérieur d'Anchorage. Rendez-vous sur l'île Montague, au coeur du complexe Avalon.
Le nouveau complexe, sur l'île en face d'Anchorage, était encore plus gigantesque que celui qu'Ava avait connu.
Le complexe Avalon. Quasiment invisible de la surface, mais labyrinthique et d'une ampleur impossible à soupçonner. Il avait été construit durant les deux dernières années, pour servir à un but qu'Ava n'avait jamais été autorisée à connaître.
Avalon. Ava avait beaucoup lu, ces deux dernières années, et elle connaissait un peu cette légende. La contrée de la jeunesse éternelle, où le roi Arthur avait été emmené à sa mort...
Désormais, celui-ci comprenait une multitude de sous-sols, si vastes que, lorsqu'elle les traversa, Ava manqua se perdre.
Des sous-sols blancs. La couleur de l'oubli. La couleur du néant.
La couleur de la douleur. Il semblait à Ava que son âme était noyée dans cette lumière insoutenable.
Heureusement, un soldat l'accueillit à son arrivée, et cela la tira de ses pensées. Elle ne le connaissait pas, mais à vrai dire, elle n'avait pas vraiment connu les soldats, mis à part le soldat Fox.
Il lui parla à peine, et la mena dans une salle qui lui rappela une salle d'attente dans un hôpital.
Quelques personnes de son âge s'y trouvaient, mais elle n'osa pas leur parler. C'est en les détaillant le plus discrètement possible, comme elle en avait pris l'habitude durant les deux années où elle avait vécu en solitaire qu'elle remarqua le compte à rebours sur leur nuque, un ensemble de chiffres mouvants. Un décompte. Un bref instant, elle se demanda ce que cela pouvait bien signifier.
En cherchant une place où s'asseoir, elle se heurta à un autre clone. Un instant, elle eut peur de l'avoir mis en colère... Elle connaissait si peu les réactions des Versions Alpha... Mais, contre toute attente, il l'aida à garder son équilibre, avant de lui demander, de l'air le plus sérieux du monde, ses yeux bleus rivés dans les siens, comme s'il se préoccuppait vraiment d'elle:
- Désolé... ça va?
- Oui, dit AvaDiazBêta. Oui, ça va.
Elle n'aurait jamais pensé que les Versions Alpha s'excuseraient...
- Bon, je dois y aller, conclut-il en passant sa main dans ses courts cheveux bruns.
Et là-dessus, il était parti.
Ava s'assit et se mit à attendre.
Et attendre.
Et attendre.
Puis, une personne entra dans la salle, et le cœur d'Ava s'arrêta brièvement de battre.
Luca. C'était Luca, avec son sourire et ses tâches de rousseur... Elle se leva, sans même réfléchir.
- Luca! s'écria-t-elle.
Il se retourna vers elle en fronçant les sourcils:
- Je suis le soldat LucaGallieniAlpha, lâcha-t-il. A qui ai-je l'honneur?
Ce n'était pas lui. C'était un autre clone. Il ressemblait à Luca, s'appelait Luca, mais ce n'était pas lui. C'était quelqu'un d'autre. Luca était mort.
Ava l'avait tué elle-même.
- AvaDiazBêta, murmura Ava. Excusez-moi. Je me suis trompée de personne.
Hochant la tête, il se détourna, et Ava le regarda disparaître à l'angle du couloir.
Troublée, elle ferma les yeux pour retrouver son calme. C'était une autre version de Luca. Dans son cou, elle avait vu un compte à rebours. Mais pourquoi donc en créer une nouvelle? Pourquoi un compte à rebours?
Alors, elle entendit les voix, de l'autre côté de la cloison contre laquelle elle était appuyée:
- AvaDiazBêta vous attend, monsieur. Vous avez de la chance qu'il reste encore quelque versions Bêta en vie. Ils feront des Traqueurs de choix.
- En effet. Néanmoins, je suis bien plus satisfait des Versions Alpha. Ils ont bien moins tendance à prendre des initiatives. A vrai dire, je ne peux jamais faire entièrement confiance à une Version Bêta. Mais je sais comment le monde va réagir. Même s'ils ne sont pas aussi fiables, nous aurons besoin des Traqueurs.
- Je comprends.
La porte s'ouvrit, et un gradé, celui qui parlait quelques instants auparavant, fit signe à Ava:
- AvaDiazBêta. Suivez-nous, s'il vous plait.
Lorsqu'ils furent tous deux assis face à face dans le bureau, il reprit:
- J'ai besoin que vous accomplissiez quelque chose.
- Je ferai ce qu'il faut, promit Ava.
Elle avait appris depuis longtemps qu'il valait mieux faire profil bas. En face d'elle, l'homme sortit un dossier, pourvu d'une photo en guise de couverture. Un visage, qu'Ava reconnut instantanément. Elle le voyait à chaque fois qu'elle se contemplait dans le miroir.
- J'ai besoin que vous assassiniez cette personne, et preniez sa place, en attendant les ordres suivants. Vous allez vous faire passer pour la véritable Ava Diaz.
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