VII- Ailleurs
Elle se réveilla... ailleurs.
Elle n'en revenait pas. Comment cela se faisait-il qu'elle ne se soit pas réveillée quand on l'avait transportée dans cette nouvelle salle, où elle était assise sur un imposant fauteuil?
Pourquoi Luca ne l'avait-il pas réveillée?
Et d'ailleurs, où était-il? Elle ne le voyait nulle part dans la pièce avec elle...
"AvaDiazBêta."
La voix des hauts-parleurs.
"Veuillez vous préparer et vous habiller avec les vêtements que vous trouverez dans l'armoire sur votre droite. Soyez prête dans une demi-heure. Nous viendrons vous chercher."
Elle se leva.
A droite, l'armoire.
A gauche, une porte, qu'elle ouvrit à moitié. Elle y découvrit une minuscule cabine de douche. Sans hésiter, elle fit couler l'eau et ôta ses vêtements qui lui rappelaient trop l'horreur de la journée, l'électrise, la mort de Scott...
Elle ne tarda pas: elle n'avait qu'une demi-heure. S'enveloppant dans une serviette, elle alla ouvrir le placard qui contenait apparemment les vêtements. Elle faillit s'étrangler devant la diversité de ce qu'elle découvrit: loin des vêtements noirs qu'elle avait portés jusque là, elle avait sous les yeux une variété d'habits impressionnante, de toutes les couleurs et de toutes les formes, des mini-shorts de sport aux robes de soirée chatoyantes.
Elle mourait d'envie d'effleurer chacun des tissus, mais elle n'en avait pas le temps. Elle attrapa donc un jean et l'enfila, puis revêtit un t-shirt noir et un blouson marron, qui lui semblait plutôt commun. Elle ne tenait absolument pas à se faire remarquer, et d'après les connaissances dont elle disposait, ces habits étaient relativement passe-partout.
En revanche, elle choisit avec soin ses chaussures. Si elle devait courir, hors de question que ce soit avec de ridicules talons aiguilles. Elle opta donc pour une paire de baskets montantes qui lui paraissaient assez légères tout en restant confortables.
Lorsque les hommes en blanc vinrent la chercher, Ava venait juste de terminer de se préparer.
Elle voulut demander où était Luca, mais elle n'en eut pas le temps. On l'emmena rejoindre un groupe de clones qui devait comprendre la moitié d'entre eux, soit une demi-douzaine.
Mais Luca n'en faisait pas partie.
Au détour des couloirs, elle le chercha du regard, en vain. Elle n'osa questionner personne, d'autant plus qu'elle devait marcher vite pour suivre l'allure. Le garçon devant elle portait une veste d'un vert si pétant qu'elle en aurait presque eu mal aux yeux.
Finalement, ils parvinrent à un parking souterrain où était garé un petit van. Un de leurs guides s'installa au volant et leur indiqua de monter, puis ajouta, alors qu'ils s'installaient:
- Nous allons vous laisser en ville. Nous récupèrerons ceux qui ont réussi ce test à la fin de la journée, au même endroit que là où nous allons vous laisser.
Le van démarra.
- Attention, poursuivit le conducteur, vous ne devez pas oublier que vous ne devez pas attirer l'attention. Ne dites pas que vous êtes des clones, où votre épreuve serait... achevée. Dans le mauvais sens du terme. Des soldats sont déjà sur place et vous surveilleront, à bonne distance. Vous n'aurez pas droit à l'erreur. Suis-je bien clair?
Tous les clones acquiescèrent en silence.
Ava se demanda une dernière fois où était Luca. Puis elle se résolut à se concentrer sur sa mission.
Lorsque le van finit par la déposer dans le centre-ville, elle ne se sentit pas étourdie par le nombre de voitures, et de passants.
D'humains. Elle se sentait à sa place. Mais plus forte.
Elle n'était pas humaine, et là était sa force.
Sortant de la voiture, son cerveau enregistra les moindres détails, jusqu'au soldat Fox, habillé en civil, qui disparaissait à l'angle d'une rue.
Elle rejoignit le trottoir.Les passants l'évitèrent avant de poursuivre leur chemin. Spontanément, elle décida d'interpeller l'un d'entre eux:
- Excusez-moi... Bonjour...
- Bonjour...
C'était une femme enveloppée dans un épais châle noir.
- Je crois qu'il y a un jardin public par ici, non? C'est en tout cas ce que l'on m'a dit...
Elle bluffait. Mais au fond d'elle, elle savait que c'était le moyen le plus sûr de glaner des informations sans paraître suspecte.
- Non, il n'y a pas de jardin public dans ce quartier de la ville, pourtant... à part si vous parlez du petit parc qui entoure la bibliothèque?
- C'est ça! s' exclama Ava, soulagée d'avoir enfin une destination en tête.
- Dans ce cas, c'est très proche d'ici, il vous suffira de prendre la troisième à gauche...
- Parfait! Vraiment, je vous remercie...
Ava suivit les instructions, désireuse de se rendre dans un endroit le plus calme possible, mais lorsqu'elle arriva au"parc", elle fut complètement désappointée: en effet, il ne s'agissait que d'un petit parvis devant la bibliothèque où deux arbres en pot procuraient un ombrage tout relatif.
Finalement, elle décida d'entrer dans la bibliothèque, ouverte à cette heure-ci. Le calme présent à l'intérieur la calma immédiatement, et après un signe de tête au bibliothécaire, elle parcourut les rayonnages du regard. Tant de livres, tant d'histoires différentes! De couleurs, de mots...
Très vite, le temps lui échappa, tandis qu'elle examinait un ouvrage, puis l'autre, avant de passer au suivant... Elle y serait restée plus longtemps encore si le bibliothécaire ne s'était pas approché d'elle pour lui glisser:
- Nous allons fermer, mademoiselle, il est seize heures.
Déjà! Elle n'avait même pas remarqué que le temps passait! Et elle n'avait même pas ressenti la faim, sans doute grâce à son entraînement...
- Vous pourrez revenir demain, si vous le désirez.
- J'espère pouvoir, soupira instinctivement Ava, avant de se rendre compte que c'était stupide.
Le lendemain, elle ne serait pas libre. Elle serait de retour parmi les hommes aux blouses blanches, scientifiques et autres docteurs...
- Au revoir, murmura-t-elle. Et merci.
En ressortant, elle avisa le soldat Fox, appuyé nonchalamment contre un mur, de l'autre côté de la rue. Non, elle ne vivait pas normalement. Elle passait toujours un test.
Elle avait bu un verre d'eau à une des fontaines de la bibliothèque, mais elle ne pouvait nier qu'elle commençait également à avoir faim. D'autant plus qu'un vendeur de sandwiches venait d'installer son chariot à l'angle de la rue.
Brusquement, elle eut une idée.
Elle trottina jusqu'au vendeur et lui lança:
- Bonjour! J'aimerais vous acheter un sandwich mais c'est mon ami là-bas qui a l'argent...
Là-dessus, elle indiqua le soldat Fox.
- Sauf que cet idiot refuse de me parler! Est-ce que vous pourriez voir avec lui directement?
Ava était consciente que son excuse était presque trop ridicule, mais le vendeur semblait s'ennuyer... D'ailleurs, l'humain accueillit sa demande avec une sorte de soulagement, comme elle l'escomptait.
- Oui, écoutez... Je comprends, c'est toujours compliqué ce genre d'affaires...
Tandis qu'il s'éloignait pour aller parler à Fox, Ava choisit de ne pas s'appesantir sur le genre d'"affaires" que le vendeur pouvait imaginer...
Finalement, celui-ci revint et s'exclama, en lui tendant un de ses produits:
- Vous savez, il n'a pas l'air si fâché...
- Ah? murmura Ava. Je vais aller voir ça avec lui, alors. Et encore merci!
Elle s'approcha du soldat Fox avec une certaine appréhension. Ce fut lui qui rompit le silence en premier:
- La journée est bientôt finie. Je pensais que tu te serais débrouillée à trouver de quoi manger par toi même...
- C'est ce que j'ai fait, déclara Ava. Non?
Le soldat Fox ne répondit pas à sa question. Au contraire, il lui lança:
- Le soleil se couchera bientôt. Il va être temps que tu retournes au point de rendez-vous.
- Et les autres? demanda Ava. Comment s'en sont-ils sortis?
Le soldat Fox sortit un talkie-walkie de la poche de son blouson:
- Quatre clones ont fait des... erreurs.
- Et...
Ava hésita, puis termina:
- Et Luca?
- Je ne sais pas.
Il avait répondu un peu vite. Elle eut brusquement très peur. Qu'il ne lui cache quelque chose.
Mais pourquoi ferait-il une telle chose? se dit-elle pour tenter de se calmer.
Il n'avait aucune raison de lui cacher quelque chose.
Il se fichait bien de ce qu'elle ressentait!
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