Poursuivis

Il n'y avait vraiment plus personne sur les routes. Juste, quelques carcasses de voitures de temps à autres, abandonnées. Oliver préférait ne pas imaginer ce qui s'était passé lorsque son regard se posait sur ces squelettes carbonisés qu'il apercevait au-travers des vitres du van.

- On ne s'arrête plus, décréta Katherine. On roule jusqu'à la frontière sans s'arrêter, bon, d'accord, à part pour le ravitaillement et les pauses wc... Au fait, tu sais conduire?

- J'ai conduit avec un ami cet été...

- Bon, c'est chouette. Comme ça, on pourra conduire à tour de rôle et on perdra moins de temps.

Oliver opina et se pencha pour allumer la radio: peut-être donnerait-elle des informations... Mais tout ce qu'il put entendre fut un bourdonnement sourd.

- C'est comme ça depuis quelques heures, dit Katherine. Aucune station ne fonctionne. Je crois que la situation empire...

Oliver se mordit la lèvre:

- Et merde.

- Comme tu dis.

Il jeta un coup d'œil à son pistolet, posé dans la boîte à gants. C'était une vision perturbante. Quelques jours auparavant, c'était son portable ou un bon bouquin qui aurait été à cette place...

Katherine avisa alors un panneau, sur la route devant eux:

- Ah, une zone de contrôles...

- Tu crois qu'il y a encore des policiers pour vérifier si on ne transporte rien d'illicite?

- Non, je pense juste que les barrages de police, c'est l'endroit rêvé pour tendre une embuscade... Garde ton flingue à portée de main, si tu veux mon avis. Moi, je continue à conduire.

Oliver attrapa l'arme et enleva le cran de sécurité. N'empêche, il se voyait très mal tirer à travers la vitre de son propre véhicule.

- Bon, ça va, la voie est libre, articula Katherine lorsqu'ils parvinrent en vue du barrage.

En effet, aucune voiture ne stationnait sur la voie, et il n'y avait pas âme qui vive.

- On se tire de ce coin pourri, et on met les gaz.

- Ça  me va, acquiesça Oliver.

Katherine dirigea précautionneusement le van entre les plots de béton armé, et lorsque, finalement, ils furent sortis des chicanes, il poussa un soupir de soulagement. La jeune femme dirigea leur voiture vers la sortie... Mais c'est alors qu'un coup de feu retentit. Suivi d'un impact sur la tôle du toit de leur voiture.

- Katherine, cria Oliver, c'est ton clone? Tu le vois?

Il tourna la tête de tous côtés pour tenter de repérer leur agresseur, en vain. Le visage de l'intéressée était déformé par l'angoisse:

- Non, je le vois pas!

Katherine essayait de prendre de la vitesse, c'est alors qu'ils entendirent un bruit terrifiant, sur leur toit, et la tôle s'inclina. Quelque chose avait atterri sur leur toit!

- Putain! hurla Oliver. C'est ton clone!

- Ouais, dit Katherine d'une voix blanche. J'imagine bien. Accroche-toi.

Là-dessus, elle appuya de toutes ses forces sur la pédale de frein, et l'engin pila si brusquement que la ceinture de sécurité d'Oliver se bloqua, lui coupant momentanément le souffle. 

Sur le toit, le clone perdit prise, et roula vers l'avant. Katherine enchaîna sur des virages en épingle, et la créature finit par se laisser tomber au sol, droit devant eux, tentant de dégainer un deuxième pistolet. Elle avait dû perdre le premier dans sa chute... Une nouvelle fois, Oliver fut frappé par la ressemblance des clones avec leurs modèles. S'il avait dû dire quelle était la vraie Katherine...

Il n'eut pas le temps de réfléchir plus. La conductrice enclencha l'accélérateur. La voiture fila droit sur le clone décontenancé. Et l'autre version de Katherine disparut sous la voiture, dans un bruit d'os brisés, et... 

Oliver sentit le corps écrasé par les roues. Il retint un haut-le-cœur. Jamais, jamais de sa vie il ne pourrait oublier ça. Katherine continua tout droit, sur la route, vers leur destination.

- Oliver, murmura-t-elle sans le regarder, va falloir t'endurcir. Je crois qu'on n'est qu'au début de l'horreur. Mais au moins, on peut être sûrs que mon clone ne nous posera plus de problèmes.

Oliver respira profondément et hocha la tête.


Ils roulèrent durant toute la nuit, se relayant au volant. A la mi-journée suivante, ils trouvèrent une fontaine qui leur permit de se ravitailler en eau.

- Je ne sais pas si elle est vraiment propre, dit Katherine, mais c'est toujours mieux que rien.

Et ils se remirent en route.

Oliver conduisait lorsque vint la fin de l'après-midi. Katherine regardait le paysage défiler par la fenêtre, et il envisageait de lui passer le volant, car il lui semblait qu'il commençait à s'endormir...

Alors, une forme sombre émergea du bas-côté. Instinctivement, Oliver appuya sur la pédale de frein, tandis qu'une fille brune portant un sac à dos courait se placer face à eux sur la route. Tout ce qu'Oliver put voir de son visage fut l'expression farouche gravée sur ses traits. Puis, il vit le pistolet qu'elle levait.

- Kat, attention! cria-t-il en se baissant.

La balle percuta le pare-brise juste entre eux deux, laissant un impact auréolé de fissures évoquant de délicates toiles d'araignée.

- STOP! hurla la fille de toute la force de ses poumons. Descendez de votre voiture!

Oliver enregistra alors une foule de détails, en quelques secondes. A quel point cette fille, ou plutôt, jeune femme, était belle, malgré ses cheveux en bataille et la crasse maculant ses vêtements. Ses yeux, jurant qu'elle n'hésiterait pas à tirer à nouveau. Et son t-shirt, arborant le mot TARGET. Des mots avaient été rajoutés à la main, en dessous: "vas-y, tire, enfoiré!!". Il fallait le reconnaître, cette fille ne manquait pas de cran...

Katherine le secoua:

- Allez, on fait ce qu'elle dit... ça craint, elle peut nous descendre quand elle veut, elle a fait exprès de viser à côté...

- Ouais... OK, dit Oliver, son regard rivé sur la jeune femme qui leur faisait clairement signe de se dépêcher.

Il descendit, ses mains en évidence, imitant l'attitude de Katherine.

- Vous êtes quoi, vous? demanda la nouvelle venue.

Katherine lui tourna le dos, exposant sa nuque:

- Humains, comme toi.

- OK. Et lui?

- Pareil, dit Oliver en faisant comme Katherine.

- Bon.

L'expression de l'inconnue s'était légèrement radoucie. Elle était vraiment très belle.

- Merci d'avoir légèrement ruiné le pare-brise, déclara finalement Katherine, pince-sans-rire.

- De rien. Vous allez où comme ça?

- La frontière, dit Oliver, tandis que les yeux de la jeune femme se rivaient dans les siens.

- Moi aussi.

Oliver et Katherine échangèrent un regard. Katherine soupira:

- OK, viens avec nous. Mais n'abîme plus la bagnole, c'est bien compris?

- Ouais, dit la fille.

Déjà, elle ouvrait la portière arrière de la voiture.

- Hé, lui lança le jeune homme. Je m'appelle Oliver. Et toi?

- Laura. Laura Carter.

- Bon, les jeunes, dépêchez-vous, leur rappela Katherine. Y a pas de temps à perdre.

- C'est vrai, marmonna Oliver. La fin du monde.

Laura referma sa portière en riant.

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