Le soldat avait à peine re-verrouillé la porte et entraîné Oliver et Rhett au milieu du couloir qu'une alarme dissonante se mit à résonner dans le corridor.

- Putain, mais c'est... C'est quoi, ça? balbutia Rhett.

Oliver tourna la tête vers le soldat, qui aurait peut-être une réponse, mais celui-ci semblait aussi déboussolé que lui. Alors, les hauts-parleurs se mirent à crachoter, par-dessus le signal d'alerte:

"Ceci est un signal d'alerte. Le complexe est attaqué. Veuillez vous rendre immédiatement à vos postes de combat. Je répète..."

Rhett tressaillit et Oliver croisa son regard. Maintenant. C'était le moment. Il serra les poings et frappa le garde en pleine figure, de toutes ses forces. Son adversaire tomba à la renverse, au moment-même où Rhett lui envoyait également un crochet. A eux deux, profitant de l'effet de surprise, ils parvinrent à assommer le garde en quelques instants. Oliver récupéra son fusil, alors que Rhett lui faisait signe:

- Bouge! Il faut qu'on ouvre le gaz, plus loin!

- Hein? Qu'est-ce que tu racontes? s'écria Oliver en resserrant sa prise sur le fusil.

- Tu veux une bonne explosion, oui, ou merde? Fais-moi confiance: suis-moi!

Rhett partit en courant, s'éloignant encore de là où se trouvait le reste de leurs amis. N'auraient-ils pas dû les délivrer d'abord?

- Si on fait sauter des branchements que j'ai repérés hier, tous les verrous devraient être HS, rétorqua Rhett. Ça, ça pourrait vraiment nous être utile...

Effectivement. Oliver avait l'impression que ce genre de situation n'était pas celle où il était en mesure de prendre des initiatives... Il se dépêcha d'emboîter le pas à Rhett.

Dans le couloir, l'alarme et les lumières rouges étaient toujours là, mais ils ne croisèrent aucun garde. Sans doute étaient-ils occupés ailleurs...

- Par ici! lui cria le botaniste en poussant une porte, après plusieurs bifurcations.

Oliver s'engouffra à sa suite. Il se trouvait dans une salle, vide à l'exception de deux radiateurs à gaz et d'un panneau électrique.

- Il faut qu'on crée une explosion assez importante... Oliver, ouvre le gaz! s'écria son ami. T'en fais pas pour une possible intoxication, on va se tailler dans quelques minutes!

Oliver se précipita vers les radiateurs pour tourner la molette qui permettait de libérer le gaz. Rhett, lui, se pencha sur le panneau électrique et entreprit de trafiquer les fils. Quelques minutes plus tard, il déclarait:

- OK, Oliver, maintenant, ça va disjoncter...

Le hacker ne vit pas exactement ce qu'il faisait, mais un instant plus tard, les néons s'éteignirent en crépitant. Désormais, la pièce était plongée dans une étrange semi-obscurité... Il vit Rhett se relever, et sortir son briquet et le cocktail molotov improvisé de sous son sweat.

- Bon, mec, il va falloir faire vite, et de leur côté, les autres doivent être libres eux aussi, a priori. On va sortir, je balance le cocktail, et là on court très vite, termina-t-il.

- D'accord, acquiesça Oliver. Je suis prêt.

Rhett poussa Oliver devant lui, puis ils sortirent de la pièce.

- Vas-y, prends un peu d'avance, lui conseilla le botaniste, et le jeune homme s'éloigna d'une dizaine de mètres.

De là où il se trouvait, il vit Rhett allumer la mèche, puis jeter le cocktail molotov de toutes ses forces dans la pièce... Puis le botaniste piqua un sprint, courant droit vers Oliver:

- Merde, recule plus, ça va vraiment péter, bon sang, RECULE!

Abasourdi, Oliver parvint à esquisser quelques pas en arrière, alors que Rhett courait droit vers lui, le plus vite qu'il pouvait. Le bras du botaniste le percuta en pleine poitrine, le projetant au sol, alors que Rhett lui-même se roulait en boule derrière un recoin du mur. Une micro-seconde avant qu'une explosion titanesque ne secoue le bâtiment. Incrédule, Oliver se tourna vers Rhett:

- Mais c'est quoi, ça?!

Le botaniste se borna à lui répondre, en le remettant sur pied et en le poussant dans la direction de leur cellule:

- On dégage, maintenant, s'il te plaît!!

Une deuxième explosion retentit, plus lointaine.

- On va chercher les autres, et hasta la vista, parce que je ne sais pas ce qu'il y a dans ces locaux, mais visiblement, ils ont en réserve des produits extrêmement explosifs...

Oliver n'insista pas. Il n'en avait tout simplement pas le temps. Et à quoi cela lui aurait-il servi de  savoir ce que Rhett avait fait, au juste?

Ils se rapprochaient de leurs anciennes cellules lorsqu'ils entendirent des bruits de pas, d'une dizaine de personnes, à peu près... Le jeune homme sentit son cœur se serrer, mais il vit alors Laura émerger du tournant:

- Vous avez réussi, s'écria-t-elle en se jetant dans les bras d'Oliver pour le serrer contre elle.

Derrière elle apparurent Katherine, Lou, Violet, ainsi que d'autres jeunes gens. Ils avaient réussi à libérer les autres captifs! Laura passa ses mains derrière sa nuque et l'embrassa, et malgré tout, l'endroit où ils se trouvaient, l'urgence de la situation, Oliver perdit un peu la notion du temps et du lieu... Mais, lorsque sa main se posa sur l'épaule de la jeune femme, il se figea:

- Laura... Tu saignes? demanda-t-il en reculant, et en contemplant sa main couverte de sang.

- T'inquiète, c'est rien, dit l'intéressée. Un éclat de verre. On a dû régler son compte à un garde en allant chercher les autres...

- OK, maintenant, partons en vitesse, rappela Katherine. J'ai regardé les plans. En fait on n'est pas du tout en sous-sol, mais au tout dernier étage. Il faut qu'on réussisse à descendre et à sortir... Suivez-moi, je crois que j'ai compris par où il faut passer...

Le petit groupe suivit Katherine alors qu'elle faisait demi-tour et se précipitait vers les escaliers. Les alarmes résonnaient toujours.

- L'escalier doit être là-bas... dit Katherine en parvenant à un tournant. Oh putain, les gars, on peut dire que vous avez pas fait votre travail à moitié...

Oliver la rejoignit et découvrit alors une scène chaotique: dans la salle, des décombres jonchaient lesol, le faux-plafond s'était effondré et des câbles crépitaient encore à terre... Et près d'un mur du fond... Non, ce n'était pas possible...

- Mais, s'exclama Violet, qui a foutu des explosifs ici?

- Et pourquoi? ajouta Rhett.

- On s'en fout, trancha, Lou, la priorité, c'est de nous barrer d'ici, je vous rappelle...

- C'est vrai, dit Laura. Je vois les escaliers d'ici, il suffit de traverser ce bordel et on y sera...

Elle avisa la structure en piteux état et ajouta:

- Mais dépêchons-nous. D'ici peu, le bâtiment pourrait bien s'effondrer sur notre tête...

Elle entreprit d'enjamber les décombres, les autre sur ses talons.

- Allez, go, trancha Katherine en aggrippant le bras d'Oliver.

Mais ils avaient à peine fait quelques pas que ce dernier avisa un corps, sous les décombres, près, très près des bombes qui avaient été posées là.

- Kat, regarde! s'exclama-t-il en le lui indiquant.

- Bordel, mais c'est qui, ça?

Les deux se précipitèrent vers le corps et entreprirent de le dégager des décombres. Brune, les yeux clos, vêtue de noir, la fille respirait difficilement.

- Elle est vivante... murmura Oliver. Tu crois qu'elle a mis les bombes? Et puis, comment est-elle arrivée ici?

Katherine jeta un coup d'oeil derrière la nuque de la fille inconsciente:

- Pas de marque. C'est une humaine. On ne peut pas la laisser ici...

Elle haussa la voix:

- Rhett! Viens nous aider!

Oliver entreprit de dégager un peu plus le corps de la jeune femme, avec précaution. Une oreillette était passée à son oreille, et il l'enleva avec précaution, mais un branchement avait dû sauter, car l'appareil crépita, puis une voix féminine, un peu voilée par des effets larsen, lança, "Ava, non!". 

Oliver sursauta et laissa tomber l'oreillette, qui s'éteignit définitivement. Entre-temps, Rhett était venu les aider, et ils avaient fini de dégager la fille.

- Je crois que son nom, c'est Ava, dit doucement Oliver, pensif.

- Magnifique, Oliver, dit Rhett, on saura comment l'appeler quand elle se réveillera... Pour l'instant, est-ce qu'on peut se dépêcher de sortir d'ici?

- Oui, oui, bien sûr!

- Alors aide-moi à la porter...

Oliver s'exécuta, tandis que Katherine ouvrait la marche, courant expliquer aux autres comment ils venaient de retrouver cette fille, évanouie...

Le temps n'était pas aux interrogations, alors ils ne s'attardèrent pas et entreprirent de descendre tous les étages.

- On y est presque! dit Katherine.

Laura jeta un coup d'œil à Oliver, et celui-ci la rassura du regard. Qu'elle ne s'inquiète pas pour lui. Il allait bien. 

La fille évanouie, elle, en revanche... Oliver venait juste de voir son dos, les brûlures qui le parcouraient... Elle était sérieusement blessée. Il lui faudrait des soins. Il espéra qu'ils sortiraient vite de cet endroit qui semblait un véritable labyrinthe, un véritable piège. 

Parce que même s'il ne connaissait pas cette fille, il ne voulait pas la laisser mourir.