Episode 8: Fugitifs

 En effet, arrivés au camp, tout le monde semblait ravi d'accueillir un nouveau membre.

Quand Léna raconta ce qu'il s'était passé, elle surprit le regard de Ginny sur elle. Un regard entendu qui lui faisait comprendre qu'elle avait bon goût en matière de sauveur. Léna devait effectivement le reconnaître, et sourit discrètement à son amie.

Mathieu dormit un peu en retrait, de façon à ne pas laisser sa marque apparente. Ou pour pouvoir fuir plus aisément... Léna, quant à elle, était bien décidée à l'aider en retour. Après tout, s'il avait voulu les tuer, il l'aurait déjà fait, se dit-elle pour se rassurer. Néanmoins, elle ne se sentait pas en sécurité. Si son clone l'avait retrouvée, d'autres pourraient tout aussi bien être dans les parages...

Dès  l'aube, chacun se dépêcha pour partir, ils ne devaient pas traîner. Ginny était du même avis que Léna, d'autant plus qu'ils étaient désormais proches de Denver, par conséquent d'autres clones devaient rôder non loin.

La petite troupe commençait maintenant à être à l'étroit dans le véhicule. Léna était encore au volant, accompagnée cette fois par Mathieu, et Arthur était à l'arrière, entouré d'Ava et Ginny. Peu de temps après avoir repris les sentiers, Ava demanda d'un air suspect :

- Mathieu, qu'est ce que t'as au cou ?

Léna se raidit. Mathieu lui répondit calmement, non sans hésiter.

- C'est rien, ça doit être une égratignure.

L'atmosphère changea soudainement. Le regard d'Ava lançait des éclairs alors que Ginny commençait à sortir son couteau. Léna avait les mains crispées sur le volant, mais restait à l'affût. Alors, ce qui devait arriver, arriva : Ava bondit sur Mathieu en criant:

- C'est un clone !

Léna tourna le volant, dérapa, freina, et se détacha pour se retourner vers ses amis. Tous furent secoués par son coup de maître, en conséquence de quoi Mathieu n'avait pas encore était touché.

- Bordel, Léna ! Tu le savais ?! hurla Ginny en se levant rapidement pour coincer son couteau sous la gorge de Mathieu.

- Non, Ginny, ne fais pas ça ! dit l'intéressée en braquant son pistolet dans sa direction.

Tous avaient sorti leur arme, alors que Mathieu n'avait pas réagi. Ses mains agrippaient son jean pour retenir ses tremblements. C'est Arthur qui brisa le silence :

- Comment t'as pu faire ça, Léna ?

Sa voix était brisée.

- Tu le savais et tu ne l'as même pas tué ?

- Ils sont tous dangereux! lança Ava.

- C'est même toi qui nous dit d'être plus prudents, et tu nous ramènes un clone ?! s'énerva Ginny.

Léna était coupable, elle le savait. Elle baissa son pistolet, et ses yeux suivirent son geste.

- Il m'a sauvé la vie... dit-elle dans un souffle, comme une petite fille qui avoue sa bêtise.

- Mais c'est pas une raison suffisante! argumenta Ava d'une voix tremblant de fureur.

- Il aurait déjà pu tous nous tuer, mais il ne l'a pas fait, tenta une nouvelle fois Léna.

Elle aurait voulu que Mathieu lui donne un coup de main pour ne pas se faire tuer, mais il avait fermé les yeux. D'extérieur, il semblait serein, voire prêt a accueillir la mort. Or Léna voyait ses mains blanchir avec le temps qui s'écoulait, ses bras se hérisser ou encore sa respiration s'accélérer.

- Pourquoi ? demanda soudainement Arthur.

Personne ne savait si cette question était adressée à Léna pour son manque de responsabilité, ou à Mathieu pour n'avoir encore tué personne. Ce dernier crut bon de se justifier :

- Je ne veux de mal à personne... commença-t-il doucement.

- Tu es un clone! Tu es programmé pour nous tuer ! cracha Ginny en resserrant son étreinte.

- Ginny, je t'en prie ! Tu m'as dit qu'il y avait des scientifiques, ils pourront l'aider ! supplia Léna.

- Qui te dit qu'ils ne le tueront pas directement, dit-elle froidement.

- Il est toujours vivant, que je sache, déclara Léna.

Ses trois camarades restèrent sans voix. Elle marquait un point. Apparemment, elle était peut-être stupide, mais ses actes n'étaient pas irréfléchis. Et Ginny comprit à son tour que la curiosité des scientifiques l'emporterait sur la cruauté et la vengeance de certains. Alors, d'un coup sec, elle remit son couteau dans son étui.

Mathieu prit alors une grande respiration, il avait beau savoir que sa fin était proche, l'admettre restait une chose difficile. Léna expira doucement, comme si elle était restée en apnée pendant cette confrontation. Quant aux autres, ni Ava ni Arthur ne semblait en accord avec Ginny:

- OK, lâcha simplement cette dernière.

- Quoi ? firent les deux autres en cœur.

- Il pourrait nous être utile, leur lança-t-elle.

Arthur s'apprêtait à répondre, mais le regard de Ginny lui en ôta l'envie. Ava toisa alors Léna. Elle cherchait quelque chose dans son regard, qui puisse la rassurer, voire comprendre ses actes. Alors c'est ce que fit Léna : elle sourit, légèrement, accompagné d'un regard qui en disait long sur ses idées. Ava eut l'air de comprendre...

Tout le monde était sur la défensive mais chacun avait rangé son arme. Alors, une fois la troupe à peu près convaincue, Léna redémarra de véhicule.

Ils étaient parvenus à une dizaine de kilomètres de Denver lorsque le Land Rover parvint à la fin du plein et s'immobilisa en cahotant.

- Bon, déclara Léna en ouvrant la portière. On a plus qu'à finir à pied, alors.

En se retournant, elle croisa le regard d'Ava, qui lâcha :

- J'espère qu'il reste plus grand chose à parcourir, sinon Arthur n'y arrivera jamais.

L'intéressé protesta faiblement, mais il avait l'air au bout du rouleau.

- Et moi, je fais comment ? demanda Ginny en indiquant sa jambe bandée.

- Je vais te porter, déclara Mathieu en détachant sa ceinture de sécurité.

Il bondit hors de la voiture et entreprit d'aider Ginny à monter sur son dos. Cette dernière se laissa aider, clone ou pas clone.  Ava réajusta nerveusement son sac à dos avant de se tourner vers Arthur, dont le visage était pâle comme la mort. Son état inquiétait vraiment Léna.

- Ça va aller, dit-il en s'appuyant sur Ava.

- On laisse tout le matériel dans la voiture ? s'étonna Léna.

- Si on se charge, on n'y arrivera jamais, répliqua Mathieu. On ne peut pas faire autrement. Léna si quelque chose, un clone, ou autre, nous attaque, tire OK ?

- Oui, approuva Ava, parce que nous, on est occupés par Arthur et Ginny, on pourra pas.

- OK, murmura Léna en sortant son pistolet d'une main tremblante.

- En route, déclara Mathieu en prenant la tête du groupe.

Ginny grimaçait à chaque fois qu'il trébuchait sur une branche morte ou n'autre relief. Le cœur de Léna se serra : la rousse devait vraiment souffrir. Au bout de quelques minutes, elle entendit Ava chuchoter, derrière elle :

- Non, Arthur. Tiens bon. On y est presque !

Elle se retourna, et découvrit Arthur, à deux doigts de s'évanouir. Ava secoua la tête et lui fit signe :

- Léna, viens m'aider !

Jamais son amie n'avait semblé si angoissée. Léna courut lui venir en aide, pour soutenir Arthur. Ils n'avaient pas fait trois pas que des coups de feu retentirent, derrière eux. Léna se figea, alarmée :

- Qu'est ce que c'est?

Mathieu se retourna, une expression horrifiée sur le visage.

- OK, maintenant tout le monde m'écoute, ordonna Ava d'une voix pressante. Mathieu, Léna, Ginny, vous partez devant, tous les trois.

- Quoi ? s'exclama Léna, choquée. Hors de question! Je ne ...

- Vous partez, la coupa Ava, les résistants ne doivent pas être loin. Bougez-vous, allez les chercher! On va continuer à avancer, Arthur et moi.

- Comment veux-tu qu'on vous abandonne ? lâcha Ginny.

- Si on reste ensemble, on est morts tous les cinq, siffla Ava. Si vous y allez, certains d'entre nous ont une chance de s'en sortir. Compte sur tes doigts.

Un silence de plomb tomba sur le petit groupe, puis un nouveau bruit de tir retentit.

- Très bien, abdiqua Mathieu. Léna, viens.

- Non refusa-t-elle. Je ne pars pas sans eux.

Voyant que le jeune homme s'apprêtait à protester, elle secoua farouchement la tête et ajouta :

- Peut être que ça vous motivera à revenir plus vite, sourit Léna, parce que je ne changerai pas d'avis.

Mathieu écarquilla les yeux, et lui promit d'un regard lourd qu'il reviendrait très vite. Il l'avait sauvée une fois, il n'allait pas la laisser se faire tuer. Sur ce, il partit à grands pas à travers la forêt.

- Arthur, supplia Ava. Regarde-moi !

- Ça va, je suis pas encore mort, marmonna-t-il. Mais vu comment je me sens mal, ça devrait pas tarder...

- Je t'interdis de dire ça, tu m'entends ?! ragea l'amie de Léna. Tu vas mettre un pied devant l'autre et arriver jusqu'à ce foutu refuge de Denver ou ça va barder!

A elles deux, Léna et Ava parvinrent à avancer avec Arthur sur une centaine de mètres, mais elles durent alors à grimper une forte pente dans la forêt. Les coups de feu avaient cessé. Tous trois étaient parvenus à mi-pente lorsqu'une femme émergea des arbres. Léna fut la première à la repérer. Et lorsqu'elle peut distinguer son visage, elle hoqueta d'horreur.

- Ava, lâcha-t-elle.

- Quoi ? fit son amie, qui, les yeux baissés vers le sol, n'avait donc rien remarqué.

- Ava, merde, c'est ton clone !

Ava releva brusquement la tête, tandis que Léna cherchait son revolver à tâtons. Elle parvint à l'attraper, finalement, mais la panique la faisait trembler, il lui échappa et tomba au sol.

Au même instant, le clone frappa, et le long fouet qu'il tenait à la main s'enroula autour du bras d'Ava, qui tomba au sol.

Déséquilibré, Arthur tomba à son tour, entrainant Léna dans sa chute. Tous deux roulèrent un peu plus bas de la pente, tandis qu'au dessus d'eux, Ava tentait de se relever. Malheureusement, le clone tira violemment sur son fouet et la jeune femme retomba au sol en gémissant.

- Ava ! s'écria Arthur.

Léna cherchait toujours son arme, c'est alors qu'elle remarqua qu'Arthur l'avait ramassée et la pointait sur le clone, en tremblant.

Le cœur de Léna se serra : dans son état, comment pouvait-il viser juste? La détonation secoua la forêt silencieuse. Et le clone s'effondra, un trou béant au milieu du front.

- Merde, Arthur, lâcha Léna incrédule. T'es un putain de tireur d'élite !

A cet instant, un grand frisson secoua le jeune homme et son regard se voila tandis qu'il glissait au sol. Léna s'apprêtait à aller le secourir lorsque quelqu'un la plaqua violemment au sol. Elle poussa un cri, horrifié : elle avait oublié les autres clones ! Une main souleva ses cheveux avec rudesse, alors qu'elle essayait de se dégager, puis une voix masculine déclara :

- C'est bon, elle n'est pas un clone, chef !

Léna se releva en découvrant trois militaires, face à elle, armés chacun d'un imposant fusil d'assaut. D'autres étaient apparus au sommet de la pente, et aidaient Ava et Arthur a l'escalader.

- Très bien, déclara celui qui portait un brassard noir et semblait être leur chef. Tout le monde avec moi, on retourne tous à Denver, il est temps.

Un soldat poussa gentiment Léna en avant, et celle-ci se mit à escalader la butte. Arrivée au sommet, elle repéra quatre Jeep de l'armée, garées au bord de la départementale qui passait par là. Des militaires aidaient Ava et Arthur a s'installer à leur bord. Léna chercha Mathieu et Ginny du regard.

Lorsqu'elle les repéra enfin, son cœur s'emballa dans sa poitrine.

Ginny agitait ses bras devant un soldat, l'air désespéré, tandis que celui ci pointait le canon de son pistolet sur la tempe de Mathieu...


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