Episode 7: Mathieu

Léna courait bien plus vite qu'elle ne l'aurait cru possible. Malgré ça, elle les entendait toujours se battre, encore trop près d'elle. Puis plus rien, plus un bruit. Sans s'arrêter pour autant, elle tourna la tête, mais ne vit rien. C'est en tournant de nouveau la tête devant elle, que Léna tomba nez à nez avec son clone.

- Oh... Euh... Vous savez, on est pas obligés de ... commença Léna, haletante et tremblante.

Mais son clone la saisit à la gorge, des deux mains, l'empêchant de finir sa phrase. Léna en eut le souffle coupé. De par l'étranglement qui allait la tuer, mais aussi par la force qu'avait sa copie assassine. Une force telle, que ses pieds quittèrent le sol. Elle se débattit. Elle aurait voulu crier, mais pas un son ne sortit de sa gorge. A ce moment, son clone prit une balle dans le bras, la forçant à relâcher son étreinte. Son assaillant propulsa Léna en direction du coup de feu donné par... L'inconnu. Elle le percuta, et ils tombèrent au sol. Elle se retourna et se mit à quatre pattes en toussotant : elle respirait ! Elle n'était pas encore morte !

- Ça va ? lui chuchota l'homme

Il l'aida à se redresser, puis tous deux firent face au clone. Léna chancela en découvrant la marque sur la nuque de son sauveur. La marque des clones. Mais... Comment était-ce possible?Comment un clone pouvait-il aider un humain? A moins que celui-là ait confondu? Ce qui paraissait impossible puisque l'autre avait la force caractéristique des clones et pas elle.

D'un coup, d'un seul, son allié providentiel se jeta sur le clone, coupant les pensées de Léna. Elle aurait voulu l'aider mais restait paralysée. Perdue, elle se recula doucement sans quitter des yeux les deux personnes se battant.

Un spectacle saisissant, devait-elle admettre. L'homme... esquivait les coups les uns après les autres. Il était musclé, ses bras sculptés et les manches de son tee-shirt noir serraient ses biceps. Son jean kaki laissait supposer qu'il était en guerre aussi... Cette couleur mettait également son teint mat et chaud en valeur.

Enfin, le clone de Léna  sortit un petit couteau et commença à s'en servir pour repousser le jeune homme qui l'empêchait de tuer sa proie. Il fut touché à plusieurs reprises, lui arrachant un gémissement à chaque coup reçu. Mais ce qui ne tue pas, rend plus fort. En effet, chaque égratignure lui donnait plus de détermination.

Enfin, le clone de Léna se tourna vers elle avec une telle rapidité qu'elle éjecta l'homme  et le projeta par terre. Énervée, elle se jeta sur Léna, qui ne l'avait pas vue venir aussi vite. L'effet de surprise lui ôta l'équilibre. Néanmoins, la jeune femme lui asséna un violent coup de genou dans le ventre, lui permettant de dégainer son pistolet, situé au bas de son dos, coincé par sa ceinture. Elle le posa sur la poitrine de son sosie et tira. Un seul coup de feu suffit pour que le clone tombe à terre et que la marque de sa nuque se fige.

Le jeune homme poussa d'un coup de pied le mort puis tendit sa main en direction de Léna pour l'aider à se relever. Main qu'elle accepta, prudente, ce qui le fit sourire, creusant une fossette sur sa joue droite.

- Pourquoi ? réussit-elle enfin à articuler, la bouche pâteuse.

L'homme, ou plutôt le clone, puisque c'en était un, l'interrogea du regard pour l'inciter à être un peu plus précise.

- Pourquoi m'avoir aidée? Et... comment m'as tu trouvée?

Elle aurait souhaité avoir dit ça d'un ton dur et sec, mais cela sonnait plus comme quelqu'un d'effrayé, voire reconnaissant...

- Tu avais l'air dans le pétrin alors... commença-t-il sans se départir de son sourire.

Léna fronça les sourcils, elle ne le croyait pas du tout.

- C'est la marque qui me contredit n'est ce pas? ajouta-t-il tristement. Mais je te remercie de ne pas m'avoir déjà tué.

A ces mots, il tourna les talons.

- Attends ! Où vas-tu ? s'inquiéta-t-elle.

Le jeune homme semblait surpris par cet appel, et se retourna doucement. Elle croisa son regard: ses yeux étaient bleus océan, et Léna s'y serait volontiers noyée. Lui, semblait secoué par la curiosité qu'il lisait sur son visage. Un peu de peur aussi, certes, mais pas de haine. Alors il revint vers elle :

- Quelle était ton autre question ? demanda-t-il gentiment.

- Comment tu m'as trouvée ? Et ne me dis pas que c'était par hasard, répondit-elle avec plus de légèreté.

- Mince ! Il va falloir que je trouve autre chose, rit-il.

- Et pourquoi pas la vérité ? tenta Léna dont l'esprit était rempli d'un tourbillon de questions.

- C'est une longue histoire...

Elle le supplia du regard. Si seulement elle pouvait connaître de nouvelles informations sur... Tout ce qui qui était en train de se produire!

- La curiosité est un vilain défaut, dit-il en souriant, dévoilant de nouveau sa petite fossette. 

Léna rougit, instantanément. Parce qu'il avait raison? Ou parce qu'il était tout simplement vraiment craquant ? Elle savait qu'elle aurait dû le tuer, ou le laisser partir, ou encore courir dès qu'elle en avait eu l'occasion. Mais elle n'avait rien fait. Ginny serait probablement folle de rage contre son manque de prudence.

- S'il te plaît, dit-elle.

Quelle répartie minable, pensa-t-elle... Néanmoins, cela sembla suffire au jeune homme qui s'avança.

- J'ai été dans une escouade, commença-t-il. On était partis pour retrouver nos originaux. Comme tu dois le savoir, un clone en est attiré. Le tuer le rend plus fort, et théoriquement on se sent libéré. Seulement, en arrivant au village où ils se trouvaient, je n'ai... pas tué le mien.

Il marqua une pause, s'adossa contre un arbre, et détourna son regard de celui de Léna. De honte, peut-être ?

- Lui allait me tuer, alors je l'ai assommé et planqué. Dehors, c'était un massacre... 

Son ton était devenu mélancolique. 

- Je n'ai rien pu faire pour les autres, les humains, ton espèce. 

Il releva enfin la tête et planta ses yeux dans ceux de Léna.

- J'ai fui. Je ne sais pas ce qui cloche chez moi, mais vous tuer ne fait pas partie de mes pulsions. En fuyant ce carnage, j'ai rencontré une famille qui tentait de s'en sortir. J'ai voulu les aider, mais tout ce que j'ai obtenu a été des injures et des coups de feu. Par conséquent, j'ai décidé d'aller vivre reclus des autres.

- Je suis désolée... lâcha Léna.

- Voir que tu n'as pas essayé de me descendre m'a surpris, sourit-il. Et donc pour répondre à ta question, je vivais ma petite vie de solitaire jusqu'à tout à l'heure, quand je l'ai vue, il désigna le cadavre inerte à coté d'eux. Je l'ai suivie et je suis tombé sur toi. Après j'avais deux choix : l'aider à te tuer, ou t'aider à la tuer. Compte tenu que tu allais mourir, j'ai eu pitié, dit-il en riant. La suite, tu la connais.

- Merci, dit-elle dans un souffle.

- Maintenant que tout est bon, je vais retourner à mes occupations, finit-il par dire. J'ai tué ton clone, tu ne crains donc plus rien.

- Quoi ? s'étrangla Léna. Mais attends, ça fait combien de temps que tu vis seul?

- Euh.. à peu près un mois, répondit-il décontenancé par sa question.

- Alors je ne sais pas si je devrais être surprise par le fait que j'ai découvert votre existence il y a seulement trois jours, où par le fait que tu crois que les clones tuent seulement leur original, dit-elle abasourdie.

- Eh bien... je suppose qu'on s'affole tous quand il nous reste plus que quelques jours de compte à rebours.

- Initialement, il est a combien ? s'enquit Léna.

- Deux mois... Donc pour l'instant, nous, première expérimentation, il nous reste quatre jours.

A première vue, dans quatre jours peut-être que tout serait fini, espéra Léna. Puis elle prit conscience que son sauveur allait mourir dans peu de temps...

- Et... commença-t-elle, tu veux rester seul pour ça ? s'inquiéta Léna.

- Vaut-il mieux vivre en monstre, ou mourir en homme bien ? dit-il en la défiant du regard.

- Tu sais, tu devrais venir avec nous, proposa Léna. Avec un petit groupe, on tente de rejoindre l'ambassade. Il devrait y avoir des scientifiques là-bas, ils pourraient t'aider.

Elle venait de déballer tout ça, d'une traite, comme si le temps lui manquait soudain et qu'il pourrait mourir maintenant, sous ses yeux. Quant à lui, il parut étonné et touché.

- Merci, mais je ne peux pas. Peut être qu'à l'approche de la mort je pourrais devenir violent. Et se serait dommage de te tuer alors que je viens de te sauver la vie! dit-il en plaisantant.

Il semblait constamment utiliser l'humour lorsque le moment devenait critique. Un trait de caractère qui ravissait et exaspérait Léna.

- Au fait, pour que tu puisses me bénir comme un dieu pour l'éternité, je m'appelle Mathieu, dit-il en passant sa main dans ses cheveux.

Un acte totalement humain, songea-t-elle.

- Pour que tu te souviennes que tu as sauvé une vie, moi c'est Léna, sourit cette dernière.

A cet instant, la voix d'Ava retentit :

- Léna ??! cria-t-elle, Léna ? T'es où, bon sang ?!

- Ici ! s'écria cette dernière.

Avant que Mathieu ait pu se sauver, Ava apparut en courant. Elle semblait... Inquiète. C'est seulement en voyant son amie saine et sauve qu'elle se radoucit. Puis elle croisa le visage du jeune homme et dégaina sa dague.

- Non, arrête ! Mais qu'est-ce qui te prend? s'interposa Léna entre Mathieu et Ava qui allait lui sauter dessus.

- On a entendu des coups de feu depuis la voiture. Alors je suis... Oh bordel ! Qu'est-ce que c'est que ça ?! s'exclama Ava en apercevant le cadavre du clone.

- Sans lui, je serais morte, déclara Léna en désignant son nouvel ami. Ava, je te présente Mathieu.

Ava le dévisagea. Était-ce de la méfiance dans son regard gris, ou avait-elle vu la marque?

- Enchanté, annonça-t-il.

Lui aussi était sur la défensive. Léna, quant à elle, sourit, le plus détendue possible pour ne rien révéler à Ava. Son amie tenait à Arthur, donc cela ne faisait aucun doute qu'elle tuerait Mathieu sur le champ, si elle savait qu'il appartenait à la même famille que ceux qui avaient assassiné sa sœur.

- "Très bien, on y va, déclara Ava en tournant les talons.

Puis elle ajouta :

- Tu es le bienvenu parmi nous, Mathieu.

Léna le regarda, il semblait hésiter. Alors elle en profita pour lui prendre le bras et le faire avancer pour suivre Ava. Il se laissa faire, non sans froncer les sourcils puis lui chuchota :

- Ce n'est pas une bonne idée...

- Fais en sorte de ne pas te retourner, suggéra-t-elle.

- J'ai pas spécialement envie de mourir plus tôt, la taquina-t-il.

Elle lui sourit, ne sachant quoi répondre. Elle connaissait les risques, mais s'il y avait un espoir qu'il soit sauvé, il fallait essayer. Elle lui devait bien ça.

- D'ailleurs Ava, tu foutais quoi pour prendre autant de temps à venir? lança Léna, sceptique.

- Euh ... Rien. Enfin non, pas rien, sinon je serais venue plus vite... hésita-t-elle.

- Mais encore ? tenta de nouveau Léna.

- Je... discutais avec... Arthur. Et...

Léna pouffa. Son amie avait le béguin pour lui, ça crevait les yeux!

- Léna ! se reprit cette dernière, menaçante. On parlait de choses sérieuses! Je te vois venir à imaginer n'importe quoi !

A ces mots, Léna baissa les yeux le temps qu'Ava retourne la tête devant elle. Puis elle vit que Mathieu l'interrogeait du regard :

- Ça fera plaisir à Arthur de voir un mec, lui sourit-elle.

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