CONJONCTION: Episode 11: Le remède
ELEANOR
Les premières personnes qu'elle vit à Kourou furent Zaïa et Katherine, qui les attendaient près de la piste d'atterrissage et lui tombèrent quasi-littéralement dans les bras. Les deux femmes guidèrent le petit groupe jusqu'à JC, qui supervisait les derniers réglages apportés à la capsule étincelante qui contiendrait la météorite.
- Bon, lâcha JC sans même prendre la peine de les saluer. Mes scientifiques ont planché sur le problème depuis que vous me l'avez soumis, et il semblerait que nous ayions réussi à greffer sur cette capsule des réacteurs assez puissants pour lui permettre de traverser l'atmosphère et se perdre dans l'espace, sans être détournée par une attraction quelconque.
- Et il y a tout intérêt, déclara son père.
Eleanor ne put s'empêcher des'étonner de la manière abrupte dont les choses arrivaient sur le tapis. Mais bon, il n'y avait pas un instant à perdre, alors elle pouvait également comprendre que les politesses soient en cet instant superflues...
- Donnez-moi la météorite, dit JC. Je vais déjà la placer dans le satellite.
Là-dessus, la dirigeante de la France tendit la main vers le sac que tenait toujours le père d'Eleanor. Celui-ci eut un mouvement de recul, et JC soupira:
- Qu'y a-t-il? Vous ne me faites toujours pas confiance après tout ce temps? Même si Zaïa Falconer vous dit que vous pouvez me croire?
- Tu peux faire confiance à JC, Oliver, acquiesça l'intéressée.
- Ce n'est pas ça... rétorqua-t-il. Pas du tout. C'est juste qu'a un instant, j'ai eu peur de laisser une nouvelle personne toucher la météorite. Vous pourriez être contaminée, JC. Qui sait?
Eleanor entendit bien que son ton était sincère.
- Personne, répliquaJC, et cela m'est bien égal. Si nous n'avons pas le remède, tôt ou tard, nous serons tous morts. Et si nous le recevons, le problème ne se pose plus. Bref, je sais fort bien ce à quoi je m'expose. Donnez-moi cette météorite.
Malgré ses réticences, son père tendit le sac à JC, et cette dernière saisit la météorite pour la placer dans le caisson intérieur du satellite. Puis elle fit signe aux quelques ingénieurs se tenant en retrait de s'approcher:
- Très bien, déclara-t-elle. Vous pouvez sceller ceci, à présent.
Là-dessus, elle se tourna vers Eleanor, Cynthia, Angelo, Katherine et Zaïa, pour s'exclamer:
- Une bonne chose de faite! Il n'y a plus qu'à procéder au lancement. Mes hommes vont le préparer, et nous attendrons le signal d'Ava pour faire partir cette capsule!
JC sourit, un sourire ravi, comme si elle trouvait la situation très amusante. Ou alors, comme si elle avait tellement confiance en les parents d'Eleanor et leurs amis que l'idée qu'ils puissent échouer lui paraissait inimaginable.
La jeune fille, elle,aurait bien aimé être aussi sûre d'elle. Mais elle avait peur. Parce que le monde semblait courir à sa perte. Et parce qu'elle même n'avait pas réagi aux radiations comme Jakob et son père. Mais pourquoi? Cette question la terrifiait. Peut-être plus que la fin du monde, parce qu'elle pouvait bien signifier la fin de ce qu'elle-même avait toujours cru être... Mais déjà, son père la forçait à le regarder:
- Je sais ce que tu penses, Eleanor. Et c'est inutile de te torturer pour ça.
- N'empêche que je ne comprends pas... commença la jeune fille.
- Tu es... comme ta mère. Je... n'ai jamais vraiment compris pourquoi HG avait fait perdre la raison à Lou et pas à elle, mais... elle y a résisté. Comme toi, tu t'es défendue contre ce qui nous a attaqués dans la grotte.
- Et puis, ajouta Jakob avec une ébauche de sourire, tu nous a sauvé la vie. Tu m'as sauvé la vie. Pourquoi te poser de telles questions?
Ses yeux noisette scintillaient. Pour la première fois de savie, Eleanor se sentit stupide. Pour avoir posé la question. Et apprécier autant ce jeune homme.
AVA
Dehors.
Elle était dehors.
Ce n'était plus un plafond au-dessus de sa tête, mais le ciel.
Tandis qu'elle marchait aux côtés du garde, elle calculait les mouvements qu'elle allait faire.
Prendre le revolver attaché à la ceinture du garde. L'assommer avec la crosse. Courir jusqu'à l'hélicoptère de combat le plus proche. Monter à bord. Démarrer.
De là où elle était, elle voyait parfaitement sa cible, le canon gigantesque installé sur le toit du complexe. Elle savait exactement ce qu'elle avait à faire.
D'abord, prendre le revolver...
- Nous y sommes presque, dit son guide en lui souriant fugacement. Juste après ce tournant, nous arriverons aux hangars et aux zones d'atterrissage et de décollage. Nous avons de la chance, c'est l'heure creuse, si je puis dire.
Ava se sentit presque coupable de devoir l'assommer. Mais si elle ne le faisait pas, ils n'auraient aucune chance de survivre.
Aucun d'entre eux. En agissant ainsi, elle tentait de lui sauver la vie.
Personne dans les parages. Personne ne la verrait.
Quelques hélicoptères étaient posés sur la zone de décollage, solitaires. Personne en vue. Parfait.
- Le Falcon du président est dans cet entrepôt, là-b...
Le garde avait à peine levé la main pour lui indiquer une direction qu'Ava bondissait. L'arme était déjà dans sa main. Avant même qu'il ait pu comprendre ce qui lui arrivait, Ava abattait la crosse du revolver sur sa tempe, et il s'écroula.
Elle pivota et se mit à courir, droit vers les hélicoptères. Une chance qu'Oliver lui ait appris comment en piloter un, ces dernières années. Le premier était verrouillé, mais ce n'était pas le cas du second.
Elle se rua à l'intérieur, s' assit sur le siège du pilote et posa ses mains sur les commandes. Elle l'avait déjà fait avec Oliver. Elle n'avait aucune raison de paniquer. Pourtant, elle ressentit un exaltant soulagement lorsque le moteur démarra et que les pales commencèrent à hisser l'hélicoptère dans l'air. Elle récupéra le micro dans sa poche et l'activa:
- Oliver, dit-elle. Oliver, tu m'entends?
- Oui! Est-ce que ça... commença-t-il.
- Je suis dans l'hélico, le coupa-t-elle.
- Combien de munitions?
Elle jeta un coup d'œil à l'écran:
- Assez pour envoyer ce canon en Enfer.
Déjà, son hélicoptère se rapprochait du bâtiment sur le toit duquel était posée sa cible. Un canon. Mais beaucoup, beaucoup plus gros. Il devait faire quasiment la taille d'un bus à double étage. Seulement, où devait-elle viser pour être sûre de le mettre hors d'état de marche?
- Ce canon n'a pas toujours été là, dit Oliver. Il a été rajouté. Trouve les fixations, je suis certain que c'est le maillon faible. S'il tombe du toit, il sera hors d'usage, car même s'il n'est pas brisé par la chute, le fixer à nouveau prendra un certain temps.
- Entendu.
Ava posa ses mains sur les commandes permettant de faire feu avec un calme terrifiant. Elle n'avait absolument plus peur, maintenant qu'elle savait ce qu'elle avait à faire. Et ce qu'elle avait à sa disposition. Des missiles. Elle avait des missiles.
Elle tira.
Et tira.
Deux fois, trois fois, visant la base du canon, là où il était retenu au bâtiment.
Elle devait faire vite, car bientôt, elle ne bénéficierait plus de l'effet de surprise, et les militaires de la base tenteraient de la stopper.
Des explosions secouèrent le canon, produisant un vacarme impressionnant.
- Continue, dit Oliver. Continue.
Elle continua. Elle tira. Encore et encore.
Les ferrailles retenant le canon gémirent, ployèrent, se brisèrent.
L'arme vacilla un instant au bord du toit, et le temps se figea.
Puis elle tomba, pour se fracasser sur les pistes d'atterrissage en contrebas.
- Ça y est, chuchota Ava.
- Alors, ne reste pas là, supplia Oliver. Prends le large.
Une voix hurla dans le casque qu'Ava avait posé sur le siège passager:
"Posez-vous! Posez-vous ou nous faisons feu!"
D'autres hélicoptères de combat venaient sur elle.
- Impossible, conclut-elle. Désolée, Oliver. Je t'aime.
Elle pressa le bouton pour éteindre le micro et dirigea l'hélicoptère vers le toit en dessous d'elle, où les débris du canon se calcinaient toujours.
"POSEZ-VOUS! "
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top