"Allons-y." marmonna Emma en enfonçant ses mains dans ses poches.

"On peut attendre encore un peu..." proposa Ruby en entourant les épaules d'Emma de son bras.

Elle se dégagea. Elle n'avait pas besoin qu'on la réconforte, elle s'en foutait.

"Il ne viendra pas, c'est bon." répondit-elle en secouant la tête.

Elle souffla et commença à avancer parmi les stands de nourriture ou de jeux, se frayant un passage parmi les nombreux adolescents qui se pressaient aux attractions.

Killian n'était pas venu. Cela faisait presque 30 minutes qu'ils l'attendaient, et il n'avait pas daigné répondre aux messages qu'elle lui avait envoyé, alors il pouvait bien aller se faire foutre. Il ne l'empêcherait pas de s'amuser.

Les bras croisés sur sa poitrine, elle marchait une dizaine de mètres devant ses amis. Elle savait à quelle attraction ils voulaient aller. Elle ne la ferait pas avec eux, elle se contenterait de les regarder, comme chaque fois que les forains s'installaient sur la place du port.

Elle aurait mieux fait de rester au foyer tout compte fait. Elle risquait de se faire prendre en remontant par la fenêtre de la chambre, pour rien. Il n'était même pas venu, sans la prévenir.

"Toujours pas tentée?" demanda August en s'avançant vers la file d'attente.

Elle refusa d'un signe de tête, les regardant s'éloigner en riant.

Elle patientait depuis déjà 15 minutes -qui lui avaient parues des heures d'ailleurs- lorsque son téléphone vibra.

Elle vit le nom de Killian s'afficher, et elle renvoya l'appel en serrant la mâchoire.

Mais il insista à plusieurs reprises, et elle finit par répondre, portant le téléphone à son oreille.

"Quoi?" cracha-t-elle.

"Bonsoir à toi aussi." ricana-t-il ensuite.

Elle ferma les yeux et dut prendre sur elle pour ne pas l'insulter et lui raccrocher au nez.

"Tu aurais pu prévenir au moins." persifla-t-elle froidement.

Il lâcha un nouveau rire et cela l'énerva encore plus.

"Et ne pas entendre Emma Swan énervée? Mh non merci."

"Ferme la." rétorqua-t-elle.

Elle se retourna et fit quelques pas, tentant de retrouver son calme.

"J'aime la veste en cuir rouge. Ça te va bien." lança-t-il

Quoi? Elle fit volte face, le cherchant du regard parmi la foule.

"Tu es où?"

Elle l'entendit rire à nouveau, puis il raccrocha.
Il devait plaisanter.

"Je suis là." entendit-elle dans son dos.

Elle souffla doucement et se tourna vers lui, sans pour autant le regarder.

"Je suis désolé, j'ai eu un empêchement et j'ai pas pu faire autrement. Mais je suis là maintenant."

Elle releva les yeux vers lui et elle put voir qu'il était sincèrement désolé.
Pourquoi ne pouvait-elle pas lui en vouloir?

Il lui sourit et après quelques secondes, et le lui rendit, avant de se mettre à marcher dans les allées de la foire.

Elle sourit à nouveau en voyant son regard émerveillé. Il ressemblait à un enfant. Elle lui signala qu'elle allait chercher à manger et il la suivit jusqu'au stand.

Les barbes-a-papa et elle, c'était une véritable histoire d'amour. Elle en raffolait. Killian voulut lui payer mais elle refusa.
Elle n'avait pas besoin de lui après tout.

Ensuite, ils marchèrent à nouveau parlant de tout et de rien, jusqu'à ce qu'il lui attrape la main et se mette à courir vers la grande roue.

"Hors de question que je monte là dedans!" s'exclama-t-elle.

"S'il te plaît! Ça ne fait pas peur!"

"Oh c'est vrai pardon, c'est pas comme si on allait être à 100 mètres du sol!"

Il haussa un sourcil désapprobateur et ce fut lorsqu'elle voulut croiser les bras pour montrer son refus qu'elle remarqua qu'il lui tenait toujours la main.

Troublée, elle ne la retira pourtant pas.

"D'accord peut-être pas 100 mètres. Mais tout de même!" bredouilla-t-elle, ses joues s'empourprant.

Il murmura qu'elle n'avait pas le choix et malgré le fait qu'elle tirait de toutes ses forces pour aller à l'opposé de l'attraction, il l'emmena avec lui sans difficulté. Il paya leur tour, riant chaque fois qu'Emma lui crachait qu'elle allait se venger, puis ils montèrent dans la cabine, l'un en face de l'autre.

"Oh mon dieu..." couina-t-elle lorsque leur cabine se décolla du sol.

Il se moqua d'elle, elle le fusilla du regard, et il leva les bras au dessus de sa tête en signe de reddition.

"J'arrête."

Il lui sourit avant d'attraper un bout de sa barbe-à-papa et de le manger. Emma, bien trop effrayée par la roue qui avança lentement, ne s'en préoccupa pas.

"Tu sais, tu perds toute crédibilité là." lâcha-t-il

"Comment ça?" elle parvint à demander, bloquant son regard sur ses yeux bleus.

C'était moins impressionnant que de regarder le sol s'éloigner. Bien que la facilité qu'elle avait à se noyer dans ses perles bleus était presque aussi effrayante.

"Tu agis toujours comme si tu avais peur de rien."

Elle ressentit comme une décharge électrique lui parcourir tout le corps, et elle se contenta de hausser les épaules.

Ses lèvres s'allongèrent en un faible sourire et elle ne put s'empêcher de les regarder. Elle semblait si douces...

Puis elle secoua la tête.

Qu'est ce qui lui prenait bon sang?

"Dis moi que c'est bientôt fini..." grogna-t-elle.

Ça venait à peine de commencer, elle le savait, elle voulait simplement changer de sujet. Elle n'aimait pas parler d'elle.

"Tu devrais regarder ça Swan." souffla-t-il, son visage tourné vers le vide.

"Tu m'as fait monté là dedans, c'est déjà assez non?"

Il sourit, et après quelques instants elle finit par suivre son regard.

L'océan paressait immense d'ici, et la lune se reflétait sur l'eau. Quant à Storybrooke, bordée par d'immenses forêts, semblait encore plus minuscule et insignifiante. Eux deux semblaient encore plus minuscules et insignifiants.

Elle ne pensait même pas à la hauteur. Elle était simplement émerveillée par les lumières de la ville d'un côté et par l'océan de l'autre.

"Le bateau de mon père est dans le port. Je vais essayer de le trouver parmi les autres."

Il se redressa, se penchant vers le bord pour tenter d'apercevoir la marina.

"Là." indiqua-t-il en pointant du doigt un endroit.

Il fallait vraiment qu'elle s'approche autant du vide?
Elle prit une grande inspiration.
C'était la première fois qu'il lui parlait de quelque chose de personnel, elle n'allait pas gâché ça à cause d'un stupide vertige.

Elle s'approcha de lui, suivant du regard l'endroit qu'il pointait.

"C'est lequel?" demanda-t-elle.

Il y en avait beaucoup et ils se ressemblaient presque tous, à l'exception de deux ou trois bateaux de collection. La marina n'était pas éclairée à cette heure.

"Celui qui ressemble à un bateau pirate."

Pourquoi était-elle étonnée? C'était le seul bateau qui sortait du lot et elle était certaine de ne l'avoir jamais vu avant aujourd'hui. Les autres étaient pour la plupart des bateaux de pêche.

Elle sentit son regard sur elle, et elle fut incapable de bouger, presque tétanisée.

Puis il posa sa main dans le bas de son dos -non sans lui arracher une vague de frissons- et effectua une faible pression, juste assez pour la faire hurler, et elle se rassit au fond de son siège, les mains sur le cœur.

"Espèce de crétin!" rit-elle doucement en entendant son fou rire.

Eh bien, on ne pouvait pas être en colère contre lui dans ces cas-là...

Après quelques temps où elle était bercée par le balancement de la cabine et par la douce mélodie du rire de Killian, il sa calma, sans que son si beau sourire ne le quitte pour autant.

"Ton père est passionnée de choses anciennes, non?" s'enquit-elle.

Son regard changea et elle comprit immédiatement.

"Oh... Désolée..."

L'ambiance n'était pas devenue pesante pour autant. Il lui adressa un faible sourire puis haussa les épaules. Son regard était triste mais pas comme d'habitude. Il n'y avait pas cette lueur qui le faisait paraître différent.

"J'avais dix ans quand il est mort."

Elle se sentait touchée qu'il se livre. Mais pourtant, elle était certaine qu'il ne cachait pas que ça, qu'il y avait autre chose qui semblait lui ôter tout espoir. Quelque chose qui le détruisait.

"La douleur ne disparaît pas. Mais j'imagine qu'on s'habitue à l'absence des gens." lâcha-t-elle

Il fronça les sourcils, et la fameuse lueur se fraya un chemin dans son regard sombre.

"Quand les gens n'ont jamais été là oui. Mais pas quand tu les as connu. Pas quand tu les as aimé."

Que pouvait-elle en savoir? Elle n'avait jamais aimé personne et personne ne l'avait jamais aimée.

"Oui tu as probablement raison." murmura-t-elle.

Il passa une main dans ses cheveux, puis il se pencha légèrement vers elle.

"Tu n'as pas reçu beaucoup d'amour dans ta vie, je me trompe?" souffla-t-il.

Elle baissa la tête pour cacher ses yeux qui se remplirent de larmes. 

"Pas beaucoup, non." elle répondit dans un souffle.

L'instant d'après, il se trouvait à côté d'elle et d'un geste un peu maladroit, il lui prit la main, liant leurs doigts ensemble, ce qui fit accélérer le coeur de la jeune femme.

Aucun des deux n'osa parler, mais ils n'étaient pas mal à l'aise pour autant.

A vrai dire, Emma ne s'était pas sentie aussi bien depuis très longtemps.
C'était comme si tout était à sa place. Comme si elle était à sa place.