Saison 7 - Épisode 11 : L'erreur de Harry

  — Attends, tu es en train de me dire que tu t'es arrêté sur le chemin juste parce qu'une écharde est rentré dans ta main ? 

  — Ça piquait fort, je vous dit ! grognait Iridessa, en larme après avoir réalisé sa défaite. 

  — Et dire que j'avais parié sur ta mort, souffla Clochette. On pouvait pas rêver mieux pour toi. 

  — Lumina et moi, on a affronté un monstre spectrale. Il était effrayant mais pas si puissant que ça. Son point faible, c'était juste les rayons de soleils. 

  Vidia se mordit la lèvre en voyant à quel point son équipe avait du brasser ciel et terre pour combattre le monstre de pierre tandis que les autres s'en étaient sortis plutôt bien. 

  — C'est pas grave, Iri. Tu réussira dans quatre ans, continua Rosélia en lui pinçant la joue.

  — C'est pas drôle ! s'exclama la fée des Lumières. J'te déteste !

  Chloé arriva dans la chambre d'Iridessa avec une pommade pour soin urgent et la posa délicatement sur sa table de chevet avant de repartir.

  — Vraiment bizarre, celle-là, murmura Rosélia. 

  — Laisse-là, renchérit Clochette, tu vois bien qu'elle est en mode reconquête.

  — Comme si on allait laisser cette dégénérée se rapprocher d'Iridessa après toutes les atrocités qu'elle lui a fait subir. Harry en a même perdu un morceau d'aile, je ne sais pas si vous vous en rappelez.

  Toute la bande acquiesça avec de grandes exclamations. Elles passèrent encore deux bonnes heures dans la chambre d'hôpital avec Iridessa en buvant du thé à la camomille ou encore en dégustant des rayons de miels fraîchement offerts par les infirmières. 

  De l'autre côté du couloir qui donnait sur la chambre d'Iridessa, elles ne se doutaient pas que Harry empruntait l'une de ces chambres et qu'au bord de sa fenêtre, Zarina l'observait avec un regard presque larmoyant. 

  — Alors, champion, enfin réveillé ?

  Harry se redressa sur le dossier du lit et cligna trois fois des yeux avant de tâter du regard la provenance de la voix bien que sa vue sonnait encore trouble.

  — Zarina ? 

  Sa voix était tellement engourdi que la fée se mit à rire derrière la fenêtre, manquant presque de glisser du cadre.

  — Pourquoi tu ne viens pas t'asseoir ? 

  — Je ne sais pas, je n'aurai pas très envie que mes gestes soient mal interprétés. C'est que les gens sont bêtes mais se font étrangement vite des idées, par ici.

  Harry se releva et sentit ses mollets le brûler de l'intérieur. Lorsqu'il bougea le bras pour ouvrir le robinet, ses muscles se mirent à contracter de manière instinctive et ses os commencèrent à faire un bruit de craquèlement. 

  — Aïe ! marmonna Harry. 

  — Ça te fait encore mal, n'est-ce pas ? 

  — Une vraie torture. 

  — Il n'y a que les guerriers qui sortent victorieux d'une grande bataille avec une collection de blessures et crois-moi, ça vaut largement mieux qu'un lâche en bon état. 

  — Qu'est-ce que tu insinues ? 

  — Rien de particulier. Je voulais juste que tu saches que je suis fière de toi et de ce que tu as fais durant la première épreuve. 

  Harry écarquilla les yeux. L'énergie qu'il peinait à avoir s'insuffla en lui sans même qu'il ne se débarbouille le visage avec le robinet en face de lui.

  — Alors, tu... tu étais là ?

  — Je sais bien que les gens de cette vallée ne m'apprécient pas, mais je ne pouvais quand même pas louper ta première épreuve.

  — Wow... euh... merci... c'est gentil de ta part.

  — Arrête de me regarder comme ça, je vais finir par croire que tu es amoureux de moi, souriait Zarina en passant à travers la fenêtre. 

  — Pour tout te dire, j'ai beaucoup pensé à toi lorsque j'étais face à ce monstre de pierre...

  Zarina écouta attentivement sans dire un mot. 

  — Quand Vidia s'est éloignée pour attirer son attention et faire diversion, c'est ta voix que j'entendais lorsque je tentais d'utiliser l'énergie de mon talent naturel. Je me suis rappelé de tous les conseils que tu m'as donné...

  — Tant mieux, dans ce cas. J'imagine que ça de moi une bonne professeure. 

  — On peut dire ça, oui... balbutia Harry en ricanant nerveusement.

  Il ne savait pas ce qui lui prenait, mais lorsqu'il regardait Zarina un coup de chaud l'émitoufflait sans prévenir. À force d'essayer de rompre ce maléfice, Harry se convenu à ne pas la regarder dans le yeux. 

  — Harry, regarde-moi...

  — C'est pas vrai...

  Il commença à tourner l'angle de son cou lorsqu'une pression s'exerça sur sa mâchoire. Zarina l'attrapa par cette mâchoire et creusa ses doigts dans ses joues. Son visage s'approchait lentement du sien. 

  — Par la deuxième étoile, qu'est-ce que tu fais ?

  — Tu es vraiment épatant, Harry... Cela faisait bien longtemps que je n'avais pas vu une fée dans ton genre... Un homme dans ton genre...

  — Je ne suis pas sûr de comprendre. 

  — Tu as tellement de potentiel, je ne peux te laisser le gâcher à un simple Tournoi des Fées et encore moins au service de la vallée...

  — Mais ce sont tous mes amis. Je suis très bien, ici, moi.

  — Écoute, Harry, tu es très loin du compte... Je sais que tu étais un humain, par le passé et que pour toi, le pays Imaginaire ressemble à une utopie inébranlable à laquelle personne n'aimerai s'extraire... Mais je t'assure que c'est faux. Le Pays Imaginaire est loin d'être le paradis et beaucoup des gens qui vivent dans cette vallée ne sont que des tas de chaires mal-intentionnées. 

  Elle s'était laissée enivrer par ses propos, si bien que le timbre de sa voix devint légèrement plus grave. Harry l'avait compris mais savait très bien qu'il ne devait pas se montrer hostile. 

  — Qu'est-ce que tu attends de moi ? 

  — Viens avec moi, Harry... viens dans mon monde, le vrai... Celui où tu ne t'ennuiera jamais et où tout est possible ! 

  — Comment ça ? demanda le garçon qui attrapa la jeune fille par les épaules. 

  — Je sais pertinemment que tu n'es plus amoureux de Noa, que tu restes dans la vallée uniquement parce que tu te dis qu'il n'y a pas mieux ailleurs, mais c'est faux... ou l'énergie du talent naturel, par exemple, ces dindes n'ont jamais su le maîtriser, du moins pour un grand nombre ! Un talent naturel qui pourrait de permettre de te libérer du système étatique qui te lie à la poussière de fée et plus particulièrement au noyau de la Reine. 

  — Zarina, là tu t'aventures sur un terrain miné... Je ne laisserai personne critiquer mon histoire d'amour avec Noa...

  — Tu le sais au fond de toi que j'ai raison. Tu commences à t'ennuyer avec elle. 

  — Tu n'as aucune preuve de ce que tu racontes... 

  — Oh, crois-moi que si. Je ressens tes émotions, Harry. Et celles que j'ai perçu lors de notre première rencontre étaient loin d'appartenir à un homme fou amoureux de sa femme... 

  — Ah oui ? ajouta Harry d'un ton sarcastique. À quoi mes émotions t'ont fait penser, dans ce cas ?

  Zarina prit une légère pose avant de répondre. Harry avait beau reculer, Zarina trouvait toujours le moyen de s'avancer un peu plus. À partir du moment où leurs pieds s'entrechoquèrent et que le garçon se trouva dos au mur, la jeune fille posa se mit à caresser son torse en lui susurrant des mots à en faire frissonner ses nerfs. 

  — J'ai vu un garçon qui découvrait le sentiment du véritable coup de foudre...

  — Pitié... tremblait Harry. Pitié, Zarina... ne dis pas ça !

  Il avait beau secouer de la tête dans tout les sens afin de chercher désespérément une sortie, elle se collait bientôt à moi si bien que leurs corps ne faisait qu'un. Il pouvait sentir son parfum sauvage et elle sentait son coeur cogner contre sa poitrine. 

  — J'adore quand tu perds tes moyens, on dirait vraiment un petit novice. Je trouve que ça a son charme, lui fit-elle en décochant un clin d'oeil.

  — Tu es encore loin du compte... très loin du...

  — Et si Noa faisait subitement irruption dans la pièce, là maintenant, tout de suite... Qu'est-ce qu'elle en penserait, à ton avis ? Qu'on est meilleurs amis pour la vie ? Elle est peut-être jeune, mais j'espère pour toi qu'elle est loin d'être bête...

  — Il n'y a rien a supposer. On est juste amis, oui !

  — Tu me considères comme une amie, malgré tout ce que les gens peuvent penser de moi ? Oh, Harry, je trouve ça tellement chou...

  Sa respiration se hacha lorsqu'il la vit approcher sa joue. Il se cogna la tête contre le mur avant de retenir ses larmes. Zarina se mit à ricaner une dernière fois puis posa un bisou sur sa joue.

  — Tiens, un bisou magique. Ça devrait te remonter le moral. 

  Harry passa une main sur sa joue puis referma le poing, comme pour essuyer et broyer le geste de Zarina. Il avait davantage l'air d'un enfant capricieux que d'un homme tourmenté. 

  — Même quand tu t'énerves, tu es trop mignon... Je me demande vraiment ce que je vais bien pouvoir faire de toi. 

  — C'est simple : rien d'ambigue ! Tu m'as aidé à maîtriser mon talent naturel, je t'en remercie, mais ça s'arrête là ! 

  — Peut-être, mais n'oublie pas que c'est toi qui a ouvert les hostilités. Et je suis quasiment certaines que tu meurs d'envie de les finir...

  Elle se dirigea vers la fenêtre par laquelle elle s'était introduite dans la chambre puis salua Harry une dernière fois avec un bisou volant avant de disparaître dans le ciel. 

  Il attendit cinq minutes pour se confirmer qu'elle était parti pour de bon avant de s'agripper au bord de sa fenêtre et admirer le panorama du coucher de soleil, un air pensif.

  — Zarina, qu'est-ce que tu voulais dire par découvrir ton monde, au juste ?

***

  Nyx, la capitaine de l'unité des Fées Éclaireuses, détestait patrouiller avec son unité une fois la nuit tombée. Bon nombre de ses collègues disaient que la fraîcheur du crépuscule avait ses bienfaits apaisants. Pour la cheftaine de cette équipe, la nuit signifiait surtout une couverture en moins en sachant que la poussière de fée se démarquait davantage avec l'obscurité et indiquait le moindre sillage de leurs déplacements. Et même si l'effet fluorescent ne durait qu'un laps de temps, c'était assez pour être synonyme de proie facile, toujours selon elle.

  — Qu'est-ce qu'on a dans le périmètre ? demanda-t-elle de son timbre autoritaire et morose.

  — Deux bateaux font le tour d'île, madame ! s'écria Mixa, l'une de ses subalternes à la tendance hyper active. J'en vois un à midi et l'autre à huit !

  — Bon travail ! Je veux qu'on se scinde en deux groupe. Je prend en traquenard celui de douze heure avec Mixa, Lestor et Mike tandis que l'autre groupe composé de Brexit, Oxford et Gwen prennent en chasse le second à huit heure. Est-ce que c'est clair ?

  L'autre trio se mit à hocher machinalement de la tête sans émettre aucun signe de contradiction. Ils avaient l'habitude de suivre les instructions de leur chef sans jamais remettre en cause ses méthodes qui s'étaient avérées efficaces avec le temps. 

  — Te mets pas la pression, Oxford, hein... On parle de deux vulgaires canoës, pas du Jolly Rodger, lui souffla Gwen.  

  — Ça va, Gwen, lâche-le ! gronda Brexit. Tu vois bien que le petit est déjà sur pression là, regarde comment il est fébrile. 

  Oxford, le petit nouveau de l'unité, n'osait pas répondre et continua de fixer sa capitaine du regard comme si les deux autres n'existaient pas. Il fallait dire qu'il n'avait que l'indifférence comme forme de répartie.

  — Même s'il s'agit de ce que l'on pense, il vous est formellement interdit d'attaquer en premier. N'oubliez pas que nous sommes avant tout en dehors de la vallée pour un travail d'investigation. Il est inutile de nous faire une guérilla inutile dans laquelle vos amis pleureraient plus tard sur vos tombes une fois la mission échouée !

  Oxford avala difficilement sa salive et se mordit les lèvres comme pour s'empêcher de la contester. Cependant, la pression était trop forte pour la nouvelle fée Éclaireuse qui se décida à émettre des hypothèses. 

  — En parlant de ça, madame, s'ils essayent de nous tuer, est-ce qu'on a le droit de se défendre ?

  — Si vous êtes obligés d'en venir au combat, ça veut tout simplement dire que vous avez grillé votre couverture et que vous avez échoué à la mission. Il n'y a pas d'autre alternative. 

  Il serra tellement son poing que ses ongles se creusèrent dans sa paume à l'en faire rougir de frustration. 

  — Mais si le pire devait arriver ? 

  — Dans ton cas précis, fuir serait ta meilleure option, Oxford. Tu es encore trop hésitant quant à donner tes coups le premier. Et puis ça serait bête de mourir alors que tu viens tout juste d'arriver dans la vallée... Qu'est-ce que tu en penses ? 

  — Je n'ai... aucune objection... avala Oxford d'un ton sec pendant qu'il regardait le sol. 

  Nyx lança un regard à Brexit — le plus âgé du trio — pour lui faire comprendre de tenir en haleine le petit nouveau. Gwen, qui avait compris le regard de la cheftaine, s'étouffa dans son rire. 

  — Ça va aller, mon grand, ne t'en fais pas, se moquait la fée en lui tapotant l'épaule. Quand tu sauras mieux manier ta lance, tu pourras enfin prendre la parole et faire comme si tu en savais quelque chose. 

  — Va te faire, Gwen ! vociféra Oxford en la repoussant. Occupes-toi plutôt de ton make up raté !

  — Vaux mieux se rater le portrait que se louper pendant les entraînements. T'en penses quoi, gamin ? 

  — Ça suffit, vous deux ! gronda Brexit avant que Nyx ne le fasse. Vous allez nous faire repérer avec vos commérages inutiles. On aura le temps de se chamailler une fois que la mission sera terminée. Pour l'instant, restez concentrés !

  Ils ne cherchèrent même pas à répliquer, Oxford et Gwen acquiescèrent en se jetant un regard approbateur puis s'envolèrent à l'itinéraire indiqué par Mixa. 

  — Je ne veux pas paraître idiot mais c'est quoi qu'on cherche, exactement ? 

  — Ma parole, tu n'as absolument rien suivit de tout ce que la Capitaine Nyx disait, soupira Gwen. On cherche des preuves qui pourraient nous donner la piste sur un potentiel coupable...

  — Des canons, en l'occurence, continua Brexit. Même si nous savons déjà pertinemment de qu'il s'agit. 

  — Cette mission est complètement inutile, comme dit Brexit, on a déjà les coupables, alors pourquoi est-ce qu'on perd notre temps à les observer ?! s'énerva Oxford. On pourrait très bien lancer un assaut et régler le problème d'une traite. 

  — Tu crois que massacrer les pirates c'est comme chasser des mouches ? S'ils savent qu'on veut leurs faire la guerre, crois-moi, je ne donne même pas une semaine avant que toute la vallée ne soit rasée sous les artilleries... 

  Gwen pointa son index sur sa tempe pour montrer l'imbécilité de son partenaire. Elle regarda Brexit avant de lui glisser une petite phrase dans l'oreille. 

  — Il en est hors de question ! 

  — Mais pourquoi ?! Ça serait l'occasion pour notre cher petit nouveau de faire ses preuves ? 

  Oxford tendit l'oreille d'un air intéressé et à la fois paniqué. 

  — Faire mes preuves ? Comment ça ? 

  Brexit regarda le jeune garçon en secouant de la tête. 

  — Cette idiote voulait que tu ailles inspecter le bateau tout seul et que tu reviennes avec suffisamment d'information pour impressionner la patronne. 

  — Ça peut être pas mal comme idée ! Elle arrêterait peut-être de me prendre pour un incapable ! 

  Plus Brexit l'en dissuadait, plus Gwen tentait de l'influencer avec un sourire qui lui arrivait jusqu'aux oreilles. Ce sourire à la fois moqueur et hypocrite qui ne donnait aucune envie de confiance. Mais le petit Oxford ne semblait pas s'y méprendre pour autant.

  — Restez-là, tous les deux ! C'est l'heure pour moi d'enfin devenir un homme. 

  — Oui ! s'exclama Gwen. Tu as tout compris, Oxford ! C'est à toi de briller, cette nuit. 

  — Par la Deuxième Étoile, ne l'écoutes pas, s'il te plaît... 

  — Tu verras comment toutes les filles de la vallée parleront de toi : le brave stagiaire des Éclaireuses qui part seul récolter des informations au sein d'un canoë de pirates.

  C'était assez pour qu'Oxford quitte la cachette secrète trouvée par Brexit et tente de prendre seul le canoë. Le plus ancien des trois tenta de l'attraper au dernier moment tandis que Gwen se tordait de rire à en faire fuir les animaux sauvages des environs.

  — Espèce d'idiote... espèce de crétin ! gronda Brexit, qui ne savait plus à qui s'en prendre. Tu l'as envoyé directement dans la gueule du loup !

  Il posa un pied hors de la cachette et commença à réfléchir en fixant le ciel. 

  — Il est hors de question que tu te tournes les pouces, Gwen ! Tu viens avec moi chercher cet inconscient avant qu'il ne se fasse...

  — Ça va, ça va ! On va le retrouver, le petit Oxford... soupira Gwen qui changea directement de visage. 

  Les deux fées Éclaireuses piquèrent un sprint par-dessus les nuages à la recherche de leur collègue, leur poussière de fées comme deux étoiles filantes dans le ciel en sens inverse. 

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