Saison 5 - Épisode 4 : L'Atelier des Bricoleurs
Iridessa n'avait pas dormi de la nuit. La jeune fée de dix-huit ans s'était cachée dans un tronc d'arbre, non loin de l'habitat des Gardiens de Poussières de Fée. Elle ne cessait de penser à ce qui s'était passé chez la mystérieuse fée nommée Chloé. Toutes les cinq minutes, elle jetait un œil à son bras, ces énormes taillades, qui avaient désormais bien cicatrisé, lui rappelait sans cesse que les doigts de Chloé s'y étaient filtrés, et par conséquent, cela lui remémora toute cette chaleur qui parcourut autrefois son corps. Iridessa frémit doucement, mais cela n'empêchait pas le tronc d'émettre quelques résonances.
En remarquant que son visage était bizarrement sale de poussière noir qui avait sans doute erré dans le tronc, Iridessa se résolut à quitter sa cachette. Une fois la tête hors du tronc, ses yeux n'assumèrent pas la subite lumière du jour et commençaient à picoter. Elle décida de voler à l'aveuglette jusqu'à chez elle, après tout, elle connaissait la Vallée des Fées comme sa poche. Inutile de perdre plus de temps.
***
Après quelques minutes de vols, les yeux de Iridessa s'habituèrent finalement au filtre du jour. Elle remarqua, avec fierté, que son orientation jusqu'à sa maison fut la bonne, mais, sur le chemin, une traînée de poussière de fée commençait à s'approcher de plus en plus. Elle semblait chanceler à droite puis à gauche dans le ciel bleu, sans savoir véritablement où se diriger.
Puis, en penchant fébrilement son visage effaré vers la lumière qui laissait une traînée de poussière dans son dos, Iridessa aperçut Clochette :
— Salut, Clochette, dit-elle d'un mouvement de bras très expressif.
— Bonjour, Iridessa, quelle belle journée, n'est-ce pas ?
— Oh que oui, mais pourquoi tu à l'air si heureuse ?
— Je viens tout juste de plaquer Terence ! s'exclama Clochette, d'un ton enjoué, comme si elle attendait depuis toujours que son amie lui pose enfin la question de son sourire si vivant.
— Mais pourquoi tu as fait ça ? C'est très difficile de rencontrer l'amour de sa vie, de nos jours... e-et puis, je ne vois pas ce qu'il y avait d'ambigüe entre vous, au moins, pas comme certains... balbutia Iridessa, en pensant fortement à son moment étrange avec Chloé.
— Il avait tenté de me violer ! Il est complètement instable, lui aussi ! Et je ne supporterai pas qu'il me transmette ses mauvaises ondes.
— Mais, Clochette, ce n'était pas en rapport avec l'Orgie qu'Ondine avait créé ? Ce n'est pas sa faute, il était hypnotisé !
— Je le sais bien, mais vois-tu, j'ai grandement besoin de faire une pause et de respirer un peu, avoua Clochette d'un timbre de voix tranquille. Toute cette histoire m'a secoué.
Face à ses réponses qui demeurait compréhensible, Iridessa ne trouva rien de mieux à faire que d'incliner son regard vers la terre, les deux fées planaient loin au-dessus du Refuge des Bricoleurs.
— Et sinon, de ton côté, tout se passe bien ? demanda Clochette afin d'orienter la discussion vers autre chose.
— M-moi, o-oui !!! Oui !
— Iridessa... tu t'es blessée ?!
Clochette s'approcha en sursaut à côté de son amie, passa une main sur son bras, qui commençait à cicatriser, et fronçait des sourcils dans un regard perdu d'inquiétude.
Iridessa ne put contenir sa respiration saccagée. Pendant un moment, elle se demanda pourquoi Noa n'avait pas remarqué et ne lui en avait pas fait la réflexion, elle aussi, mais se remémora qu'il faisait nuit lorsque leurs chemins s'étaient croisés.
— Qui t'as fait ça ?! s'énerva Clochette, d'une couleur rouge écarlate naissante sur son beau visage lisse.
— N-ne t'en fais pas pour ça, ce sont des Chardons Sauvages... murmura fébrilement Iridessa.
— Tu mens ! s'indigna Clochette. Iridessa, tu es tellement peureuse que tu te serais échappée à dix mille kilomètres à l'heure d'emblée si tu avais vu un Chardon Sauvage. Tu ne me dis pas la vérité !
— Si, si, je t'assure ! C'est à cause d'une plante que je n'ai pas pu m'enfuir ! protestait difficilement Iridessa. Elle a expulsé un contenue qui m'a endormi et...
— Iridessa, tu peux me dire si quelque chose ne va pas.
— Tout va bien...
Un silence foudroya les deux fées. Iridessa commençait à hésiter : devait-elle dire ce qui s'était passé avec Chloé ?
Puisque Iridessa ne montrait aucun signe d'animation sur ses lèvres et sa gestuelle, Clochette lui tourna le dos et s'apprêtait à partir, mais soudainement :
— Euh, Clochette, attends ! s'exclama brutalement Iridessa.
— Qu'est-ce qui se passe, Iridessa ? Tu t'es enfin décidée à parler ?
— Euh... o-oui !
— Je le savais bien qu'il y'avait quelque chose, tu transpires comme une névrosée.
— Promets-moi de ne parler à PERSONNE de ce que je vais te dire, tu m'as bien entendu, Clochette ?!
Pour la première fois de sa vie, Clochette voyait Iridessa s'adresser à elle sous un ton menaçant, sa manie peureuse semblait s'être volatilisée. D'un signe de tête, la belle blonde approuva et toutes deux partirent en direction de la maison d'Iridessa.
***
Non loin de Clochette et Iridessa, juste en-dessous d'elles, à vrai dire, Noa s'entremêlait à la foule de Fée Bricoleuse. Les fées étaient tellement occupées à travailler qu'elles n'écoutaient même pas les requêtes de la Fée des Animaux. Les bruits de charrues et le brouhaha incessant des travailleurs n'arrangeaient pas les choses. À chaque recoin du refuge, Noa se trouvait inondée de bruits de marteaux, de perceuses ou de scies.
Quelques pas suffirent à Noa pour trouver un coin tranquille où des bruits ne troublaient pas son esprit. L'Atelier des Bricoleurs était situé au fin fond du refuge. Cette grande pièce, dénuée de murs, occupait des tables de part et d'autre. C'est ici que les Fées Bricoleuses prenaient le temps de peaufiner leurs inventions, mais c'était ici aussi que la Fée Marie donnait toutes les directives à suivre lors de constructions catégoriques.
Malgré la distance qui les séparaient, Noa pouvait entendre, sous les grognements très expressifs de la Fée Marie : « Magnez-vous un peu, les dix neufs paniers pour les Fées de l'Hiver ne vont pas se construire tous seuls ! Vous n'avez pas le temps de vous reposer sur vos lauriers... Lucinda, descend de ce laurier et mets-toi au travail !!! »
Nettement plus dérangée qu'elle ne l'était auparavant, Noa hésita quelque seconde avant de s'éclaircir la gorge, désormais juste derrière le dos de la grosse carcasse de la Fée Marie.
— Oh, bien le bonjour, Noa ! s'exclama-t-elle d'un ton agacé mais sarcastique. Qu'est-ce qu'une Fée des Animaux viendrait faire ici ?
— E-excusez-moi, Fée Marie, répondit timidement Noa, en croisant à peine le regard de la dame, je cherche Kyle, vous ne l'auriez pas vu, par hasard ?
— Kyle ?! s'étonna la Fée Marie avant d'exploser de rire. Kyle, AH, AH, AH, AH ! Il est parti depuis deux jours dans la Forêt de l'Hiver. Si ce petit fainéant ne ramène pas ses fesses au Refuge dans moins de vingt-quatre heures, je l'expulse définitivement !
— Hein, m-mais pourquoi ?
— « Pourquoi ? » Ah ! Tout simplement parce qu'il ne fait jamais son travail !!! Et cette fois-ci, cet idiot est venu nous annoncer qu'il partait voir une certaine Cristalline. D'après lui, elle serait la femme de sa vie ou une bêtise dans ce genre...
— Oh, nooonnn, râlait désespérément Noa avant de cogner son crâne contre l'une des tables situées à proximité. Je dois aller jusqu'à la Forêt de l'Hiver ?
— Bien sûr, ma petite ! répondit sèchement la quadragénaire avant de donner son dos à Noa. J'ai énormément de travail, je ne peux pas t'aider et j'en suis désolée...
— Je comprends, Fée Marie.
— Oh, une dernière chose, trancha la Fée Marie, dit à Kyle de ma part qu'il a intérêt à revenir très vite, sinon il aura affaire à moi !!!
— E-entendu... Fée Marie.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top