Prémisse - Comment je me suis mis dans la merde
Je suis pratiquement sûr d'avoir fermé la porte à clé pourtant je ne peux m'empêcher de me lever jusqu'à la fenêtre et regarder sa voiture vrombir. Il fallait qu'elle parte. Je devais en être sûr avant de tenter quoi que ce soit.
J'avais eu de la chance jusqu'à maintenant. C'est qu'elle tambourinait avec passion, l'autre gamine. Sans parler de ses simulations d'orgasmes qui transperçaient les murs de la chambre avec sa voix d'un suraigu à couper le souffle.
Je remercie le Seigneur que mon enfant ne puisse pas réagir à ça et marchander quelque chose sous le prisme de ce malentendu. Mis à part hurler quand il avait faim ou pleurer lorsqu'on s'absentait un peu trop de son champ de vision – et quand je dis « on », je parle surtout de moi – ce bébé d'à peine deux ans ne savait rien dire d'autre que « veux pas ».
Mon coeur sursauta dans ma poitrine en entendant l'armoire s'ouvrir d'un grand CLACK. C'est que j'avais perdu mon attention sur elle en surveillant le parking du rez-de-chaussée. Je pousse tout de même un soupir de soulagement bien qu'elle me regarde avec son air malicieux.
— On ne pourra plus se cacher très longtemps. Elle le saura tôt ou tard, Monsieur Corne.
Je me rend compte à quel point cette nana est cinglée au moment où je me tourne pour bien vérifier que j'avais enlevé la clé de son verrou. Ses yeux injectés de sang me faisaient peur malgré son haleine parfumé à la fraise. Ne me demandez pas comment je le sais, on va encore me faire passer pour le méchant de l'histoire.
— Je ne vois pas comment ça pourrait être pire, Cassie, lui répondis-je avec un soupir désespéré. Tu as rendu ma vie encore plus minable qu'elle ne l'était déjà.
— Vous croyez que c'est le moment de me jeter le chapeau ? Je vous rappelle que je n'ai absolument rien à faire au premier étage de votre maison, seule à seul avec vous dans une chambre, la porte fermée.
Et dit comme ça, je sais déjà que je suis bon à envoyer au casse-pipe. Elle n'avait pas tort, cette pétasse écervelée.
— Si seulement tu avais cette même jugeote pour apprendre tes leçons et passer tes examens, je suis sûr que tes parents n'auraient pas eu besoin de faire appel pour la énième fois afin que tu passes en Terminale.
Et j'ai l'infime conviction qu'ils la laissent passer en classe supérieure – même si au vu de ses résultats au bac de français, je m'y serai opposé en temps normal. Mais cette fois-ci était différente. J'allais enfin pouvoir être libre. Me libérer de cette scoliose sans queue ni tête – qu'elle m'avait affublé – m'était bien trop alléchante pour que je la garde une année de plus dans ma classe.
De toute façon, ma décision avait déjà été prise : il est hors de question que je retrouve sa classe l'an prochain dans mes cours.
Ils sont tous fous à lier et m'ont fait vivre un véritable enfer. Je parle comme si j'allais pouvoir soupirer alors que toutes les preuves se braquent contre moi si on arrive à les sortir de leurs contextes, et croyez-moi qu'ils vont y arriver. Un adulte en pleine possession de ses moyens dans une position indélicate face à une pimbêche immature de dix-sept ans – même pas capable de se préparer pour les épreuves anticipées du baccalauréat. Mon procès s'annonçait sucré.
Je ne me suis jamais autant senti dans la merde. Les gens y verraient facilement un crocodile attaquer discrètement un troupeau de mangouste. Ce qu'ils ne savaient pas, c'était que le crocodile en question n'avait pas de dents et que les mangoustes étaient en réalité des braconniers armés jusqu'aux dents, munis d'arcs et flèches aiguisées. Prêts à faire de ma peau un véritable sujet de contrebande illégale dans lequel tous les risques semblaient valoir le coup de la chandelle.
Pour comprendre ma situation assez délicate, il faut faire un saut dans le temps. Où tout s'est joué sur une maudite décision. Une décision que j'aurai bien faite de décliner en sachant ce qui m'attendais de l'autre côté de la rive.
Je n'étais pas du genre à changer mon fusil d'épaule malgré l'adversité. Non, je me contentais de la baisser au contrebas de mon bras relaché et faire demi-tour, bredouille. Mais dans ce genre de situation où le demi-tour n'existe pas, il est urgent de faire preuve d'intelligence pour tourner sa veste et manipuler les gens qui nous entoure.
Pardonnez-moi, je suis certain que vous comprendrez.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top