VII

Le soleil brillait et les oiseaux chantaient déjà lorsque je me suis réveillé le lendemain, avec les vertiges et le mal de tête en moins.
Comme si je revivais.

J'ai directement pensé à la proposition de Jungkook et au fait que je n'y avais toujours pas répondu.

En attrapant mon téléphone,
j'ai vu qu'il était déjà onze heures passées.
J'ai fini par me lever, devinant que Yoongi devait rattraper ses dernières nuits blanches puisque je n'avais aucun message.

Avec le ménage, midi est rapidement arrivé.
J'avais lancé une playlist qui résonnait dans tout l'appartement pour moins y penser, poêle et margarine en mains face à ma plaque de cuisson.
Mais alors que Shawn Mendes s'apprêtait à lancer le refrain, une notification Messenger l'a entrecoupé.
Affamé, je me suis dit que je regarderai plus tard, que ça devait être Yoongi,
mais j'ai fini par m'en approcher lorsque cinq sonneries ont retenti à la suite.


Hwasa vous a ajouté à Les évadés

Hwasa
Coucou toi !

Whee In
On a pas pu s'en empêcher
tu nous manquais

Hoseok
T'as décuvé depuis ?

Whee In
Hum pas sûr

Hwasa
Dit celle qui était la plus torchée

Whee In
Omg faut qu'on lui raconte comment on a presque finis dans le canal en repartant

Hwasa
Oh putain oui !

Whee In
JIMINNN
VIENS

J'ai ri, un peu surpris,
et j'ai réfléchi une bonne minute à ce que j'allais pouvoir répondre.

J'suis rassuré de voir que j'étais pas le plus torché mais
Vous venez d'interrompre mon omelette
J'devrais vous en vouloir

Hwasa
Tu "devrais" 🙄 ça en dit long

Hoseok
T'étais quand même à un verre près
de dépasser Wheein !
On remettra ça

Whee In
Je savais pas quoi me faire à bouffer
Merci pour l'idée !

Hwasa
Sinon, on est désolés pour le retard
mais on était sûrement tous dans le
même état que toi hier

Hoseok
Sauf moi

Hwasa
Évidemment

T'inquiète,
j'ai bossé toute la journée

Ai-je dit comme si je n'y avais même pas pensé.

Hoseok
Respect

Whee In
En parlant de ça, faudrait qu'on
vienne goûter tes cappuccinos !

Hwasa
Pour une fois que t'as une bonne idée !

Quand vous voulez !


Je me suis demandé si Jungkook leur en avait parlé, mais en me souvenant des paroles de Hwasa à la soirée, sur le fait qu'il ne parlait pas beaucoup,
j'en ai conclu que c'était peu probable.

J'ai fini par délaisser mon téléphone pour continuer ce que je faisais, et une dizaine de minutes après, mon repas était prêt.
Yoongi s'est manifesté, m'a envoyé un message, et a une énième fois accepté d'être mon psy, même à moitié réveillé.

Yoongi

Ils sont géniaux, hyper compréhensifs
et ils font tout pour me mettre à l'aise mais 
mais j'peux pas m'empêcher de me sentir
à part, un peu comme s'ils avaient tout
vécu ensemble t'sais

Laisse le temps faire, Jimin
C'est le début, vous vous connaissez à peine
ils se connaissent sûrement depuis des années,
c'est normal pour l'instant
N'importe qui se sentirait pareil dans ton cas
Mais comme d'hab chez toi c'est décuplé

J'ai peur d'être rejeté
qu'ils se rendent compte que
bah
jsuis pas si génial en fait

Pour l'instant y'a que toi qui le dit

Hum

Laisse leur le temps
et laisse toi le temps aussi
Ok ?

Moui

J'veux plus de conviction

Moi comprendre toi maitre Yoda

Fier de toi je suis


Alors, une dizaine de minutes après, après avoir plus ou moins géré mon stress,
j'ai sélectionné le nom de Jungkook dans mes contacts.
Et après une bonne vingtaine de minutes à hésiter, c'est comme ça que je me suis retrouvé la boule au ventre et la tête dans mon armoire.
J'avais décidé d'accepter, par moi même, sans l'avis de Yoongi, et sans trop réfléchir.
Ce qui s'annonçait comme étant un dur combat contre moi même, mais une étape à passer.
Une demie heure après, j'étais prêt.
J'ai soupiré en me regardant une seizième fois dans le miroir et en ajustant l'une de mes boucles d'oreilles, puis j'ai passé cinq bonnes minutes de plus à me demander si j'avais trop de bagues, ou bien pas assez, avant d'attraper mon téléphone et de voir que je devais le rejoindre devant le Starbucks.

J'ai claqué la porte d'entrée, mon trousseau de clés en main. En sentant que mon estomac ne faisait que se serrer un peu plus, j'ai profondément inspiré.

Le soleil tapait un peu moins fort que la veille,
et lorsque je me suis retrouvé dans le métro, j'ai retenu mon envie de partir en courant.
J'avais peur de me ridiculiser.
En fait, j'avais toujours eu peur de me ridiculiser dans tout ce que je faisais,
puisqu'on n'avait fait que m'humilier durant des années.

Je me répétais inlassablement que tout allait bien se passer en m'avançant vers le Starbucks fermé,
rassuré de voir que j'étais le premier arrivé.
Je me suis adossé à la porte en verre, les bras nerveusement croisés et le regard agité.
Je n'avais aucune idée de par quelle rue il allait arriver, alors j'ai décidé de baisser la tête vers mon téléphone pour avoir l'air le plus décontracté possible.
Mon pouce balayait inlassablement chaque fil d'actualité lorsqu'il est apparu.

« Salut. »

J'ai relevé la tête,
nos regards se sont croisés.
Il n'avait rien de différent par rapport à la veille,
toujours cet éternel sourire enchanteur et ces boucles d'oreilles.

« Salut ! »
Ai-je souri.

Le grand écran de son téléphone tenait dans sa main.

« On y va ?

— Je te suis. »

Alors je l'ai suivi pour traverser,
mais le feu était rouge.
Il a passé une main sur sa nuque.

« Désolé pour le retard, j'ai croisé un ancien prof qui m'apprécie un peu trop. »

Le feu est passé au vert.

« T'en fais pas, ça fait pas si longtemps que je suis là. »

Même un aveugle aurait pu voir que j'étais malade d'angoisse.

« Faudrait que je passe chez moi avant, ça te gêne ? »

Il a ri au vu du regard que je lui ai lancé malgré moi.

« Me regarde pas comme ça ! J'ai l'impression d'avoir tué ton chat ! »

Un rire m'a échappé.

« Désolé.

— T'excuse pas, attends moi en bas si tu veux. »

J'ai hoché la tête,
puis j'ai enchainé avec le premier truc qui m'est venu à l'esprit.

« Et, t'es en fac de quoi ?

— Socio. »

Ça lui allait bien.

« C'est comment ?

— Passionnant, a-t-il lancé, l'air rêveur,
mais, je vais arrêter pour l'instant.

— Oh, pourquoi ?

— J'ai beaucoup de projets, et j'ai dû faire un choix. »

En voyant que je ne le quittais pas des yeux, il a continué, le sourire aux lèvres.

« J'veux voyager.
Partir du jour au lendemain, tout claquer pour un sac à dos à peine rempli, rencontrer des gens, des âmes, des cultures.
J'trouve pas que la vie ait un sens quand tu restes dans ton p'tit appartement à attendre que le temps passe. Quand tu prends le même métro crade tous les matins et que t'espères que tout va te tomber dans la main. »

J'ai de nouveau regardé face à moi.

« Je suis d'accord avec toi, mais.. Enfin.. C'est facile à dire.

— Pourquoi ? »
A-t-il lancé, comme s'il savait déjà la réponse que j'allais donner.

« Tu peux pas tout quitter du jour au lendemain sans réfléchir ! Ton boulot, ton appart, tout ce que t'as construit, ai-je répondu en riant légèrement tant ça me paraissait logique,
ça ressemble juste à un scénario de film cliché.

— Qu'est-ce qui t'en empêche ?

— Bah... J'en sais rien, la morale je suppose, l'idéal de société, et c'est cool de vouloir s'en éloigner ! Mais ça se réfléchit un minimum. »

Soudain, il s'est arrêté sur le pas d'un petit immeuble et est monté sur la marche, un trousseau de clés à la main.

« Et si t'arrêtais de réfléchir ? »
A-t-il lâché, un sourcil levé, le sourire malicieux et la main posée sur la porte qu'il venait d'ouvrir.








« Alors, tu montes où tu restes là ? »

Je l'ai regardé un instant,
sans bouger,
et j'ai fini par le rejoindre,
le sourire aux lèvres.

Il habitait au deuxième étage,
dans un petit immeuble de chambres étudiantes, juste un peu plus proche du centre ville que mon appartement mais dans une rue toute aussi calme.

Lorsque nous sommes entrés,
il s'est avancé pour poser ses clés sur son bureau mal rangé. J'ai fermé la porte derrière moi avant de faire un pas.

Jungkook était bordélique.
J'avais l'impression d'être entré dans la chambre d'un ado de dix-sept ans.
Le mur contre lequel était son lit était rempli de photos et de souvenirs sur la majeure partie, éclairés par une guirlande de lumière.

Deux fenêtres illuminaient la pièce,
( dont celle qui menait au balcon )
une plante mourait sous l'une d'elles,
son bureau était surchargé par son ordinateur portable encore allumé et ses classeurs.
Sa guitare était adossée à un clic-clac et par terre trônait une cage ouverte, avec un lapin blanc,
aux côtés d'une paire de basket et d'un sac à dos ouvert.

« Voilà voilà... »
A-t-il lancé face à moi, les lèvres pincées,
semblant soudain anxieux de ce que j'en pensais.

Au même moment, quelque chose est tombé derrière lui.
Il a tourné la tête,
puis m'a regardé,
et a tenté de sourire, gêné, honteux et un peu trop crispé.

J'ai fini par rire,
et ses traits se sont détendus avant qu'il ne se mette à rire, lui aussi.

« J'en ai pour deux minutes. »
A-t-il dit en se penchant vers son ordinateur.

C'est là que je me suis timidement approché du seul mur que je n'avais pas encore détaillé.

Une grande carte du monde y était accrochée,
agrémentée d'une dizaine de punaises,
rouges et bleues,
avec une majorité de bleues.

Un mini polaroïd rectangulaire était suspendu sous chaque punaise bleue.

Quatre d'entre elles étaient plantées sur des pays proches comme le Japon, la Chine où la Thaïlande.
Chaque photo illustrait un moment précis et dégageait sa propre énergie,
avec, chaque fois, les énormes sourires de Whee In, Hwasa, Jungkook et Hoseok.

Une autre était plantée sur les États-Unis,
avec une photo de Jungkook se faisant écraser les deux joues par les lèvres de Hwasa et Whee In.
C'était la plus éloignée de la Corée.

Une punaise rouge était sur la France,
une autre sur l'Italie,
une troisième était plantée sur l'Egypte,
et la dernière sur le Canada.
La majorité de punaise bleue traduisait son côté réaliste.

J'ai souri,
attendri mais les lèvres serrées de ne jamais avoir connu si grand sentiment de liberté.

Et soudain, alors que j'avais toujours cherché la stabilité, je me suis surpris à rêver d'aventure, d'amitié et de marshmallows grillés.

C'est son lapin qui m'a sorti de ma rêverie en sortant de sa cage. En le voyant à mes pieds, je n'ai pas pu m'empêcher de le porter.

« Bonjour toi. »
Ai-je sorti doucement, pour ne pas trop montrer mon côté gaga excessif, mais j'ai bêtement souri en voyant ses oreilles bouger.

La seconde d'après, j'ai remarqué que Jungkook me regardait.

« Quoi ?
Ai-je lancé, anxieux.

— C'est.. la première fois depuis longtemps qu'il se laisse faire aussi facilement. Il a griffé Hwasa plus d'une fois.

— C'est quoi son nom ?

— Cooky. »

J'ai pouffé.

« C'est mignon. »

Un léger sourire s'est dessiné sur ses lèvres.
Trop léger par rapport au précédent,
trop éphémère,
et il a vite changé de sujet.

« J'ai fini, on y va ? »

J'ai acquiescé, légèrement troublé.
Il a rabattu l'écran de son ordinateur et a attrapé ses clés, sans un regard.
J'ai posé Cooky, et nous sommes sortis.












Une fois dehors, son aura lumineuse s'était ravivée.
J'ai fini par me dire que j'analysais peut-être un peu trop, que je me prenais la tête pour rien, alors j'ai décidé de positiver.

« Alors, tu m'emmènes ou ?
Ai-je lancé, enjoué, pendant que nous traversions.

— Ah, j'ai attisé ta curiosité ?

— On dirait. »

Il a souri,
puis a souri,
et... A souri.

« T'as pas l'intention de me dire où on va ?

— Non.

— J'en étais sûr. »

Son rire a résonné.

« Donc, tu me demandes de te suivre sans me dire où on va alors qu'on se connaît à peine, que je sais même pas quel âge t'as, qu'on s'est vus que trois fois..

— J'ai vingt ans. »

J'ai voulu répliquer, mais rien n'est sorti.

« Tu me connais un peu mieux maintenant. »

Il m'a lancé un sourire victorieux.

« T'as toujours réponse à tout ?

— Toujours. »

Il a tourné dans une rue un peu plus étroite.

« Donc, c'est quoi le prochain ?
Ai-je dit, et j'ai senti son regard se poser sur moi tandis que je regardais en face.
La france, l'Egypte, L'italie ou le Canada ? »
Ai-je conclu en encrant mes yeux dans les siens,
un fin sourire joueur apparement contagieux au coin des lèvres.

Il a de nouveau regardé face à lui, le sourire grandissant.

« Aucun d'eux.
Ce sera sûrement Jeju. »

Jeju, ou Jeju-do, est une île sud-coréenne,
surnommée l'île aux milles-et-une merveilles,
grâce à sa mer turquoise, ses cascades et ses falaises.
Mais alors que j'allais rétorquer tandis que nous étions sortis de la rue étroite que nous venions de traverser, je me suis tu, la rétine éblouie par les explosions de couleurs vives qui nous entouraient.

Une légère musique entraînante résonnait de nul part, et nous étions au beau milieu d'un quartier que je n'avais jamais vu, où les trois quarts des vieux immeubles de banlieue étaient entièrement recouverts de dessins et de peintures immenses qui cohabitaient avec la nature ambiante reprenant ses droits.
Même le sol, à certains endroits, était recouvert d'œuvres.

En avançant, j'ai vu des personnes admirer ce mur où le lierre qui poussait naturellement représentait les cheveux d'une femme peinte et, juste à quelques mètres, cet homme lambda qui escaladait les échafaudages d'un immeuble jusqu'à son œuvre inachevée, un pinceau et un pot de peinture sous le bras.
Il peignait la voix lactée,
et son pinceau illuminait le mur délabré de milliers d'étoiles et d'explosions mauves et sombres.

« Tu viens ? »

C'est sa voix qui m'a sorti de ma rêverie.
Lorsque j'ai tourné la tête, je me suis rendu compte que je m'étais arrêté et qu'il était pratiquement au sommet d'un escalier en touches de piano, un sourire amusé sur les lèvres.

En baissant la tête, j'ai vu quelques carpes koï à mes pieds, si bien dessinées que j'avais presque pu les voir nager autour de moi.
Il a ri sous mon regard émerveillé lorsque je l'ai rejoint.

En haut, une autre rue jonchée d'appartements nous attendait.

« T'aimes l'astronomie ? A-t-il demandé.

— J'suis pas super calé,
mais ça m'a toujours attiré.

— J'te montrerais les étoiles, un jour. »

J'ai souri, curieux.
Un peu plus loin, j'ai remarqué une illusion d'optique peinte sur le mur d'un petit appartement, elle aussi si bien réalisée que j'ai dû tenter d'y passer ma main pour en être certain.

J'ai pressé le pas en voyant que Jungkook était plus loin devant moi.
Il s'est tourné, m'a regardé, les mains dans les poches en attendant que je le rejoigne pour tourner au coin de rue.

Je suis arrivé jusqu'à lui, prêt à lui poser des centaines de questions en m'extasiant sur tout ce que je venais d'entrevoir, mais je suis une nouvelle fois resté sans voix face à ce que je voyais.

Devant nous se tenait un immense mur en ardoise, recouvert des mots d'au moins plusieurs centaines de personnes.
Je m'en suis approché sous son regard curieux tandis que le mien passait par l'unicité de chaque écriture, comme si chacune d'elle réussissait à refléter la personne qu'était celle qui avait décidé d'y laisser sa trace.

" Aimer ", " Voir les chutes du Niagara ", " Être heureux " et " Épouser Kai des Exo " n'était qu'une infime partie de ce que j'avais pu y lire.

« Qu'est ce-que c'est ? »

Il s'est approché autant que moi, puis s'est baissé pour attraper l'une des craies qui traînaient au pied du mur.

« Les gens viennent ici pour écrire ce qu'ils veulent faire avant de mourir. »

Il a soufflé sur sa craie.

« J'étais curieux de voir ce que t'écrirais. »

Ses yeux se sont ancrés dans les miens un instant, avant qu'il ne trouve une place que les personnes précédentes avaient respectueusement laissée et qu'il ne se mette à écrire.

J'ai ramassé une craie blanche à mes pieds, avant de trouver un espace vide.
En le regardant à nouveau, j'ai vu le
Road
Trip
qu'il venait de laisser,
puis j'ai porté ma craie au mur, et n'ai eu qu'à réfléchir quelques secondes pour trouver ce que j'allais écrire.










Love myself














• ॐ •


Bad Liar  Imagine Dragons

[Il devrait y avoir un GIF ou une vidéo ici. Procédez à une mise à jour de l'application maintenant pour le voir.]

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