Pour sa défense, il n'avait pas imaginé une seconde se retrouver dans cette position, la bouche de Gabriel sur son slip et ses mains sur son cul encore moins.
Gabriel accueillit cependant son exclamation avec un ricanement. Soudain, Tian sentit son corps basculer, son cerveau brouillé par l'excitation l'empêchant d'anticiper quoi que ce soit et son corps frappa les coussins. Entre ses cuisses, Gabriel était là, plus imposant qu'il ne l'avait jamais été, le regard dur et envoyant tout le sang de son cerveau au sud. S'il en restait ailleurs. Hypnotisé, il regarda les longs doigts le dépouiller de son pantalon, puis de son sous-vêtement et sa queue se dressa fièrement au milieu de son corps. Le souffle court à l'idée de ce que Gabriel pouvait faire à partir de là, Tian tenta de ne pas prêter attention aux battements de son cœur. Qu'il tambourine plus tard tout ce qu'il voulait, celui-là, ce n'était pas le moment ! Pour l'heure, il voulait seulement se concentrer sur la sensation de cette main qui entourait son sexe, le faisant jurer tout bas quand la pression n'attendait que ce soulagement. Quand il se dit que ce n'était pas plus mal ainsi, surtout après une pleine journée de travail où il courait en permanence et qu'une douche aurait été la bienvenue, Gabriel baissa de nouveau son visage contre son aine, sa bouche embrassant l'intérieur de sa cuisse. Sa langue remonta jusqu'à son entrejambe, à la base de son sexe, son trajet rythmé par la main qui glissait sur son membre, pressant, branlant, serrant jusqu'à son gland à chaque passage dans un mouvement plus assuré que Tian ne l'aurait imaginé. De quoi confirmer qu'en effet, Gabriel n'avait rien oublié d'un rapport. Il sursauta presque quand une main ferme attrapa ses poignets, l'empêchant de s'en mêler, et les bloqua au-dessus de sa tête contre l'accoudoir. La bouche n'était plus contre ses bourses, le regard miel plongé dans le sien, et la façon dont les doigts alternaient entre sa queue et ses testicules l'éjectait déjà au bord du précipice.
Gabriel n'avait pas besoin de posséder un sexe digne d'un porno, ni même dans la moyenne, pour l'amener là où il le voulait, visiblement. Lui qui n'était pas friand des rapports de domination s'était vu immédiatement s'abandonner à ces mains plus expertes qu'il ne l'avait imaginé. Quand la bouche de Gabriel réclama la sienne, ce fut pour que sa langue l'emporte dans un torrent brûlant, son corps désireux de lutter contre la restriction, même faible. Il se sentit pulser, le plaisir frappant dans un éclair bref, la main se resserrant juste lorsqu'il en avait besoin pour jouir et son grondement fut avalé par la bouche qui le possédait. Gabriel ne le lâcha pas immédiatement, comme s'il voulait le vider de son âme par la queue. Peut-être qu'avec sa bouche, il l'aurait fait et cette pensée lui arracha un dernier tressaillement. La prise sur son sexe s'évanouit. Celle sur ses poignets persista quelques secondes de plus, puis la fraîcheur de la pièce remplaça la chaleur de la grande paume de Gabriel.
Sans un mot, celui-ci se leva. Tian eut tout juste le temps de lancer une main en avant pour le retenir, et d'attraper la première chose qui se présentait dans sa position. Le caleçon, évidemment et il se demanda si la gêne était contagieuse. Cependant, son attention fut attirée par la forme qui fut plaquée sous le tissu tiré.
Gabriel bandait. Il en était certain. Quand il releva les yeux, les ténèbres dans le regard de l'homme ne le dissuadèrent de rien. Il tira un peu plus, se désintéressant du sperme qui séchait sur son ventre et son tee-shirt noir.
— Tian.
Il faudrait qu'on lui explique pourquoi l'avertissement dans la voix de Gabriel le faisait frémir ainsi. Des réminiscences d'excitation, probablement.
— Pourquoi ? souffla-t-il. J'ai déjà tout vu, Gabriel.
— Voir n'a rien à voir avec...
Il se tut, soupira, mais se laissa docilement attirer. Il y avait cependant une résilience étrange dans sa manière de bouger, quelque chose qui ne plaisait pas à Tian. Quelque chose qui ne ressemblait pas au Gabriel qu'il connaissait, ni au Gabriel qui venait de jouer avec son corps comme s'il le connaissait déjà par cœur.
Assis sur le canapé, Gabriel dardait son regard froid sur Tian, et ce dernier aurait presque pu croire que la soirée se finirait là, de cette façon. Cependant, les joues rougies, l'œil brillant, le coin de cette bouche qui frémissait, à peu près tous les signes étaient là pour que les choses se passent bien.
— Attends avant de t'enfuir, parce que ça fait trois putains de jours que je te cours après dans tout le Manoir, grommela Tian en appuyant son front contre une épaule.
Gabriel était plus large qu'il ne le paraissait.
— Et ce n'est pas parce que tu viens de me baiser...
— Branler.
— Peu importe comment t'appelles les détails. C'est pas pour autant que t'as le droit de te barrer maintenant.
— J'allais juste dans la...
— Tu te barrais.
Gabriel cessa la tentative de joute. Son épaule roula sous le front de Tian tandis qu'il croisait les bras.
— Ecoute, j'ai bien compris que tu as un problème avec...
Comment faisait-on pour ne pas dire de connerie à ce sujet ?
— ... ta taille, dit-il le plus doucement possible.
A peine un frémissement : cela ressemblait fortement à une réussite.
— Ça doit faire dix minutes qu'on sort ensemble, continua Tian. Quinze à tout péter, mais t'es des doigts d'or, j'ai aucune idée de l'heure qu'il est maintenant, ça pourrait tout aussi bien faire trois heures que je suis là.
Du coin de l'œil, il parvint à apercevoir ce rictus amusé qui naquit. Tourné dans sa direction, Gabriel l'écoutait.
— Si on tente de faire quelque chose, tu te doutes bien que je ne resterai pas les mains derrière la tête tout le temps, c'est loin d'être mon genre. J'aime m'occuper de mon partenaire, tu vois ?
Et des sexes, il en avait vu de toutes les couleurs, tailles, formes, courbes. C'était peut-être la première fois qu'il en voyait un comme celui-ci, mais ce n'était même pas comme si c'était un challenge à proprement parler.
— Ce sont de jolis mots, soupira Gabriel.
— Mais pas ceux que tu as entendus, n'est-ce pas ?
Comment pourrait-il en être autrement ? Il avait l'impression d'avoir devant lui la raison même de l'existence du Manoir. Rien à voir avec « Une création pour Aaron » dont il était abreuvé depuis plus de quatre ans. Il n'en avait jamais vraiment douté, mais n'avait pas réussi jusque-là à saisir la raison de l'acharnement de Gabriel à protéger tout ce qui était fragile, avec deux jambes, une jolie gueule et des morceaux de vie brisée. Passe encore la jolie gueule, quand il repensait à deux ou trois trop abîmés qui se terraient dans les ombres du Manoir, mais il y avait toujours eu quelque chose dans ce goût-là. Ce soir, il mettait le doigt dessus, bien que par accident.
Il sentit l'instant où Gabriel se tendait sous lui. Curieux de cette réaction soudaine, Tian se redressa et l'observa. Du bout des doigts, il lissa les mèches qui séchaient, un peu emmêlées.
— J'ai eu un partenaire, dit enfin Gabriel.
Ses mots étaient lents, choisis avec soin. Le mot « partenaire » sonnait ici avec une distance toute relative, et Tian comprenait bien que cela n'avait rien à voir avec un petit amusement de quelques jours. Une relation, donc. Longue, probablement.
— Ne me regarde pas comme ça. Il s'est passé exactement ce que tu pourrais imaginer.
— Des insultes ?
La bouche de Gabriel se pinça brièvement.
— Des sévices ? Est-ce qu'il te faisait du mal ?
Les traits de Gabriel se durcirent subtilement, l'alertant. La façon dont il avait pris soin de Maël lui revint comme une claque douloureuse quoi lui assènerait trop tard. Alors, avant de pouvoir s'en empêcher, il attrapa la mâchoire de cet homme qui tentait de créer un monde meilleur et écrasa sa bouche contre la sienne. Un petit son surpris glissa entre eux, mais bientôt les longs doigts glissèrent dans ses cheveux.
— Je suis désolé, souffla-t-il et Gabriel fronça les sourcils sans avoir le temps de prononcer un mot. Que tu sois tombé sur un connard, peut-être même deux ou trois, j'en sais rien, bon sang !
— Un seul, c'était suffisant.
Tian déglutit.
— Le dernier ? murmura-t-il.
— Le tout dernier.
— Je vois. Je comprends.
Sur ses mains, les doigts de Gabriel s'aventurèrent doucement. Le bout de son nez contre le sien était frais, contrastant avec la tiédeur de la pièce. Il pourrait dire qu'il était différent. Qu'il n'était pas de ceux qui agissaient ainsi. Le problème ? Il savait que les mots n'avaient pas de pouvoir dans ce genre de situation. Il fallait du temps et des preuves.
Du temps, Gabriel en avait probablement eu suffisamment. Il lui fallait les preuves que les choses pouvaient se faire. Tian déposa un baiser plus court, plus doux, sur les lèvres encore offertes.
— Démarrage en fanfare, hein ? tenta-t-il.
Il ne s'était jamais senti aussi maladroit, cependant le sourire amusé de Gabriel et ses sourcils se haussant le rassurèrent.
— Tu aurais pu faire bien pire.
— Sans déconner ?
— Tu aurais pu avoir un de ces affreux tickets de métro au-dessus de la queue.
Surpris, il oublia de respirer et cligna des yeux tandis que Gabriel continuait en se dégageant de ses doigts :
— Enfin, je le savais déjà, ce n'est pas comme si je n'avais pas déjà vu tout ton corps.
— J'ai comme une impression de déséquilibre, là.
— Mes règles, Tian.
Il se contenta de sourire. Si un autre homme avait joué à ce jeu-là, il l'aurait probablement envoyé paître. Pourtant, à cet instant, il n'y avait rien de plus naturel à ses oreilles. Il avait bien compris, depuis qu'il avait passé la porte, que Gabriel disséminait des ordres à tout va et gérait sa vie avec poigne sans éventualité que quelqu'un ne le suive. A présent, c'était compréhensible. Un besoin de maîtrise, le contrôle sur chaque chose, chaque personne, une façon de faire qui en était devenue naturelle. Dès que le rideau se baissait cependant, Gabriel devenait plus naturel, spontané, son langage se faisait châtié, ses gestes moins délicats. Qui d'autre que Tian et les proches de Gabriel connaissaient cette facette de lui ? Les garçons du Manoir le regardaient avec émerveillement chaque jour. Surtout Maël, depuis quelques jours qu'il vivait dans ce dortoir improvisé. A chaque fois qu'il voyait Gabriel, c'était comme si des étoiles brillaient dans ses yeux de biche. Il était trop jeune et avait besoin de modèles.
— J'aurais au moins vu tes jambes, soupira dramatiquement Tian. Je pourrai me branler dans mon lit en repensant à tes mollets. Rien de plus sexy. Des mollets.
Alors qu'il se levait, Gabriel lui lança une œillade taquine. Contre le tissu de son caleçon désespérément large, il n'y avait plus une once d'excitation qui pointait et Tian subit la morsure de la déception et de la frustration. Oh, pas longtemps, vraiment.
— Je dors en caleçon, Tian.
Respire. Au moins, il n'était pas à poil.
— Je vais mourir de frustration sur le trajet, t'es sérieux là ?
— Je n'ai jamais dit que tu rentrais chez toi.
— Je pourrais te toucher ? J'ai besoin de te toucher, j'en rêve depuis des...
Il s'interrompit, réalisant ce qui lui échappait, et tenta un rétropédalage en bafouillant. Trop tard. Gabriel laissa échapper un grand rire.
— Tu pourras, Tian. Laisse-moi au moins quelque temps pour m'y faire. Oh, et va te doucher. Tu en as encore partout.
Tian roula des yeux, oscillant entre le « oui maman » et le « oui maître » qui se battaient en duel dans ses pensées. Cependant, c'était un ordre qu'il voulait bien suivre. Surtout compte tenu de ce qui l'attendait ensuite.
Et puis cette soirée n'était pas si mal.
Inattendue, mais vraiment, vraiment pas si mauvaise.
Il sortait avec Gabriel Faure, bordel de merde !
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