Pastabox 4 - Pseudo-Révisions
Pastabox 4 — Pseudo-Révisions
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- Dis-moi que je suis super intelligente, ordonna Amalia alors que l'on révisait ensemble notre contrôle de latin du lendemain.
Je restais perplexe face à son ordre, elle n'avait rien fait pour me prouver qu'elle l'était en général. Que dalle. Pour elle, réviser se résumait à ouvrir son cahier, lire le titre et dire ce qu'on savait sur le sujet. Et vu qu'elle savait que dalle sur le sujet, les révisions se terminaient souvent prématurément. Point.
Une personne intelligente saurait réviser intelligemment et la connaissant désormais, je n'avais pas vraiment l'impression que c'était le cas. Était-ce la flemmardise et son manque d'effort, ou juste une perte totale de concentration et de foi durant les cours ?
- T'es super bête, répliquai-je en décochant un sourire au coin.
Alors que je m'attendais à un coup dans les côtes de sa part, elle éclata de rire.
- T'es tellement moche quand tu fais tes sourires au coin, on dirait un mec constipé, lança-t-elle avant de m'imiter.
Si elle cherchait à paraître constipée, elle le faisait mal : son sourire au coin était vraiment pas mal, lui donnant un air enjoué et rebelle. Goal.
- Tais-toi, on révise, lâchai-je avant de replonger mon nez dans mon livre.
Passer toute sa semaine avec Amalia, c'était comme faire des montagnes russes, quelque fois tout allait bien mais du jour au lendemain, elle devenait tarée avec ses idées farfelues. Mais je l'appréciais comme elle était et notre carrosse était un super endroit pour se rencontrer.
Cependant en dehors du carrosse, c'était un peu plus compliqué, Myriane me collait pour aller à des soirées où je ne connaissais personne et Amalia avait sa pièce de théâtre à bosser avec sa troupe. Tous les deux dans des filières différentes, nous nous parlions presque jamais sauf en latin ou lorsqu'on se croisait dans les couloirs, ce qui était assez rare car nos cours n'étaient pas dans les mêmes bâtiments.
Je récitai les déclinaisons pour évite de les oublier et bossai la prononciation de chaque mot à voix basse. Amalia soupira à côté de moi, ouvrit son bouquin et se mit à reproduire ma méthode de révision.
Puis elle ré éclata de rire.
Je me tournai vers elle et fronçai les sourcils. Qu'est-ce qui pouvait être si drôle ? Mes yeux se posèrent sur la page ouverte et fixèrent l'appareil génital masculin crayonné. « Une bite ! ». Trop enfantin. Je sortis ma gomme et la lui tendis.
- Sois plus fun Charles, c'est le livre de Jocelin, on pourrait ajouter deux trucs pour pimenter le dessin, proposa-t-elle avec un sourire effrayant.
Quand elle me trouvait coincé, la chinoise m'appelait Charles ce qui avait le don de m'énerver mais pour la frustrer je faisais comme si de rien n'était.
Elle sortit alors un crayon et écrivit le long du dessin 5 cm et griffonna dessus un préservatif trop grand.
Elle était fière de son œuvre, me la montrant chaque minute et en ajoutant des effets d'ombre qui me firent peur.
- Et voilà le boulot, maintenant Jojo' sera content, assura-elle en fermant son bouquin et en se penchant vers le mien avec son crayon encore dans la main.
- Si tu dessines la même chose dessus, je te défonce, menaçai-je en lui lançant un regard froid.
- Charles le relou, Charles le coincé, Charles le relou, Charles le coincé, chantonna-t-elle sachant que je détestais ça.
Mes oreilles rougirent de fureur et un air pincé ravagea mon visage.
- T'es trop mignon quand t'es énervé... lança-t-elle en tirant mon oreille et en plaquant ses lèvres sur ma joue pour me dérouter.
Amalia, perdue dans son délire, rit à gorge déployée et eut du mal à s'arrêter. Pendant ce temps, je la regardai rire exténué. Elle me fatiguait.
La chinoise se releva ensuite, ouvrit la porte du carrosse et m'invita à sortir.
- Amalia, où tu vas encore ? questionnai-je en soupirant.
Elle décocha son magnifique sourire au coin.
- J'ai envie d'un piercing, lâcha-t-elle de but en blanc en accentuant son sourire.
Super, maintenant on allait percer Amalia Yan à 19 heures, et une nouvelle activité tout à fait normale...
Hier soir encore, elle insistait pour qu'on bosse dur après les cours pour avoir de bonnes notes et un meilleur taux de chances pour la mention au bac.
Qu'est-ce que je vous disais ! Du jour au lendemain elle pouvait devenir folle !
***
Ce fut un pur massacre de voir Amalia se faire percer la lèvre inférieure par une aiguille. J'avais essayé de la faire renoncer à son projet pris sur un coup de tête et elle m'avait regardé bizarrement. Maintenant, bien sûr, à ses yeux, c'était moi l'anomalie.
- Et voilà championne, ça fait un super effet, si ça s'infecte tu me le dis demain ou après-demain ok ? T'enlève surtout pas le piercing et ça te fera 40 euros. Dit-il avant de lui montrer les tarifs.
Elle haussa un sourcil, mécontente et ses yeux s'assombrirent.
- Le perceur d'à côté m'a dit 30 euros Olaf, tu pourrais me faire un prix ou sinon ça va mal se passer pour les bouches à oreilles avec moi, négocia-t-elle.
Le perceur soupira et lui accorda 30 euros le labret. Elle sourit de toutes ses dents en quittant la boutique et se mordit légèrement la lèvre.
- Tu es sûre que tes parents ne te gronderont pas pour le piercing ? interrogeai-je en retenant mon souffle face à son « je m'en foutisme » légendaire.
Elle soupira.
- Ils vont être furieux, mais le résultat est cool, remarqua-t-elle en touchant l'anneau.
- Si tu le dis, dis-je en lui faisant une grimace.
Le résultat était super cool. Mais je n'osais pas l'avouer, de peur de nourrir sa confiance en son côté trop farfelu dans ce genre de situation.
- Oh arrête de faire le rabat-joie, regarde les lumières c'est super beau ! s'écria Amalia en marchant à reculons.
- Joli cœur, j'espère que tu ne comptes pas sur moi pour te rattraper si tu trébuches, ironisai-je en penchant la tête.
- Prends une photo Charlie ! Regarde, ça pourrait faire un super bokeh de fond avec moi au centre. Je la mettrai en photo de profil Facebook. Tiens, annonça-t-elle en me passant son iPhone.
J'ouvris l'appareil photo et pris deux trois clichés. Elle soupira quand elle vit que certaines étaient floues et me demanda d'en reprendre. Je fis l'effort de cadrer et de tenir le portable fermement mais mon talent de photographe n'était pas au rendez-vous. Elle prit des photos de moi en cachette que je lui demandai de supprimer sur-le-champ.
Nous passâmes deux heures de plus ensemble à manger des pastabox sur le quai du canal en rigolant à des anecdotes de nos vies de tous les jours. C'était une soirée agréable, réconfortante et reposante.
Ma mère me gronda en voyant l'heure et je dus lui expliquer que j'avais été très concentré à réviser dehors. Je repensai parfois au piercing. Amalia avait du culot et je ne serais même pas étonné si elle arrivait à me convaincre de me tatouer un truc sur le bras un jour. Elle était amie qui boostait.
La chinoise était différente de Myriane et ça me faisait du bien. Pas de relation étouffante, pas de sourires forcés, pas de disputes inutiles. Juste du temps à passer ensemble. Parfois, je me demandais si Amalia avait réellement l'attention de devenir mon ami. Si sa bande de potes ne lui suffisait vraiment pas. Mais j'avais déjà sa réponse en tête.
Il n'y a pas besoin de se contenir en amitié. Chacun a le droit de faire de nouvelles rencontres sans oublier les anciennes. Chacun a le droit d'évoluer à partir de là. Parce qu'on est humain et qu'en tant qu'adolescent, il n'y a pas de mal à aimer faire la connaissance des gens.
Sa nouvelle photo de profil Facebook fit le buzz, 590 likes et 210 commentaires. Elle m'avait identifié dessus, et du jour au lendemain, je reçus 46 invitations d'amis.
Quelques jours plus tard, j'eus 9 au contrôle de latin, et comme d'habitude Amalia n'hésita pas à ajouter un « 1 » devant en me faisant son éternel sourire au coin. Et grâce à elle, pour la première fois depuis longtemps, je me sentis vivre à pleins poumons.
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NDA: Merci pour tous les vues, et c'est dingue parce que j'adore écrire cette histoire genre vraiment.
24/12/15: Légère correction
02/05/16: Nouvelle correction
06/07/17 : Réécriture
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