Mars - 4
Centième partie !
(référence à l'autodestruction et à des remarques racistes)
- Franchement, l'appartement de ton frère est super agréable. Je pense que je ne le remercierais jamais assez d'avoir accepté de m'accueillir pendant ces deux semaines de solitude. Parce que sinon, je pense que j'aurais demandé à la psy si je ne pouvais pas retourner à l'hôpital.
- L'hôpital ? Mais tu détestes cela.
- Bah, entre à choisir entre cet endroit drôlement glauque et ma vie, je préfère ma vie. Sinon, je ne sais vraiment pas ce qui serait advenu de moi. La solitude est vraiment ma pire ennemie, comme le vide. Mais la psy n'avait pas l'air très étonnée de ce que je lui ai raconté. Et elle m'a dit que je n'avais pas à culpabiliser de m'être à nouveau coupé, que ça arrivait. L'important, c'est que je ne continue pas.
- Et... est-ce le cas ? Si tu ne veux pas répondre, ce n'est pas grave.
- Ouais, c'est le cas. Je n'ai pas recommencé depuis chez toi. D'ailleurs, désolé de l'avoir fait dans ta douche.
- Tu n'as pas à t'excuser, voyons !
- Je sais, mais j'ai quand même envie de le faire. En tout cas, je voulais encore te dire merci pour l'opportunité que tu m'as offerte.
Je souris derrière le combiné téléphonique. Il s'agit de l'idée que j'avais eue lors du brunch chez mon frère, il y a une semaine. J'ai directement demandé à Callahan s'il pouvait accueillir le jeune homme durant le voyage de noces de son tuteur. Je lui ai rapidement expliqué la situation, tout en laissant le soin à Valentin de révéler ce qu'il souhaitait révéler. Cal' a immédiatement accepté, et il fut convenu que nous revenions le soir même avec les affaires du blond, afin qu'il s'installe. Il dort sur le canapé, qui peut se transformer en lit, et semble s'entendre à merveille avec son hôte. Je ne peux en être qu'heureux.
- C'est naturel, continué-je. D'ailleurs, je m'excuse de changer de sujet, mais as-tu eu une réponse de tes anciens amis, vis-à-vis de la Saint-Patrick ?
- Je suis en train de finaliser le message en même temps que je te parle. Est-ce que tu veux que je te le lise ?
- Bien entendu. Je pourrais même t'aider si tu le désires.
- C'est vrai que je suis en présence d'un génie littéraire.
Il éclate de rire et je sens une toute petite pointe de moquerie. Je passe outre et me prépare à l'écouter.
- Salut tout le monde ! Je sais que ça fait bien longtemps qu'on n'a pas discuté sur ce groupe - je suis d'ailleurs surpris que personne ne l'ait quitté. Mais je n'arrête pas de penser à vous tous, et savoir que Daisy vous voit me rend parfois quelque peu jaloux. Parce que pour tout vous avouer, vous me manquez. Bien entendu, j'ai des amis dans mon école, mais ce n'est pas pareil, parce que personne ne peut vous remplacer. Vous me connaissez depuis si longtemps que j'ai arrêté de compter, et j'aimerais beaucoup savoir ce que vous devenez, comment vous menez vos vies, ce genre de choses ! Je vous raconterais également par quoi je suis passé, même si ce n'est pas très très gai. Enfin bref, tout ce pavé pour dire que j'aimerais beaucoup profiter de la Saint-Patrick pour vous revoir. Je comptais, avec quelques autres personnes, sortir dans un bar, dans la banlieue de Belfast. Est-ce que ça vous intéresse qu'on se revoie durant cette fête verte ?
Une pause. Il a sans doute fini de me lire son message.
- Qu'est-ce que t'en penses ? Je rajoute une phrase pour conclure d'une meilleure manière, ou j'envoie tel quel ? J'ai vraiment peur de faire une gaffe, si tu savais.
- Je pense que tu peux l'envoyer de cette manière. Je serais pour ma part heureux de recevoir un message pareil, si j'étais eux.
- Oui, mais toi, tu es biaisé. Tu es amoureux de moi, ce n'est pas très juste.
Je rougis derrière l'écran de mon téléphone portable, et racle ma gorge de gène. Je ne sais plus quoi dire, et mon interlocuteur le remarque immédiatement.
- Tu sais que c'est trop mignon quand tu agis comme ça ? Franchement, ça me fait encore plus craquer.
- Arrête, ou je risque de me transformer en guimauve coulante.
- Ça ne fait rien, je te recueillerais dans un pot de confiture et je te transporterais partout avec moi. Tu seras mon copain confiture !
Je lâche un rire, rapidement suivi par mon vis-à-vis. Je me place d'une manière plus agréable sur mon lit, et fixe le ciel bleu au-dessus de moi. Les nuages ne sont pas présents dans mon champ de vision - ce qui n'est pas le cas pour le ciel de Belfast, très menaçant aujourd'hui - et j'en suis plus que ravi.
- Au fait, reprend Valentin, je voulais aussi te poser une question. C'est peut-être un peu intrusif, et je m'en excuse. Bien sûr, t'es pas obligé de répondre, et je ne me vexerais pas. C'est juste que ça me tourne un peu dans la tête depuis quelques jours, et tout.
- Je suis tout ouïe. Quelle est donc cette question ?
- Est-ce que tu vas toujours voir ta psy ?
- Oui. Et je lui ai parlé de notre discussion chez mon frère. Pour m'aider à comprendre ce qui m'a pris, et comment éviter que cela se reproduise. Je ne suis pas capable d'effacer le passé, malheureusement, mais elle m'aide à améliorer l'avenir.
- Ça t'a aidé, de lui parler de tout ça ?
- Oui. Parce qu'elle est extérieure à la situation. Je lui ai plus ou moins rapporté tes paroles, et elle a pu en faire ses propres conclusions.
- Bien ! Je suis content, si ça t'aide ! C'est tout ce que je voulais savoir. Et je te devance en te disant que je t'ai posé cette question parce que je m'inquiète pour toi. Depuis que la vérité sur ta famille a été révélée, tu t'en prends des vertes et des pas mûres, et j'ai pas envie que tu flanches à cause de tout ça. Si tu as trouvé quelqu'un qui t'écoute, un moyen de te sentir mieux et à ta place, c'est l'essentiel.
- Tu t'inquiétais ?
- Bien entendu ! Mec, c'est flippant de te retrouver dans une pièce noire en train de pleurer tout ton soûl. Parce que la dernière fois que c'est arrivé, tu t'es fait du mal. Et puis, je trouve que c'est normal de s'inquiéter pour les personnes qu'on aime.
- Dans ce cas, repris-je, accepteras-tu que je m'inquiète lorsque tu seras à l'autre bout de la planète, dans ton uniforme de soldat ?
Je pense que la question le prend de cours, mais je n'ai pas pu m'empêcher de la poser. Elle me brûle la langue depuis que j'ai entendu ce verbe. Inquiéter.
- Ouais, tu pourras. Bon, ne te détruis pas non plus la santé et la vie à cause de moi, mais c'est vrai que je ne vais pas faire le métier le plus sécurisant de la terre. L'inquiétude, c'est un peu dans le packaging de la famille de soldat.
- Me déclareras-tu comme ta famille ?
- Ouais. Parce que c'est ce que tu es. Ma famille.
Mon cœur démarre dans ma poitrine et je sens mes joues rougir sous la réplique. Je suis tellement en paix lorsqu'il me dit ce genre de chose. Comme si nous étions indestructibles et que rien ne pouvait nous changer, nous séparer ou nous tuer.
- Eliot ? T'es toujours là ?
- Oui. Je réfléchissais simplement sur ce que tu viens de me dire.
- Alors je te laisse réfléchir. Je comptais faire un peu de violon, et profiter que ton frère est au travail. Et je suis désolé, mais j'ai besoin d'être libre de mes mouvements, donc je ne peux pas garder mes écouteurs.
- Ne t'en excuse pas. Je souhaite un bon moment dans la musique.
- Merci !
Il raccroche sur ce remerciement et je fixe mon téléphone comme un imbécile, si bien que je sursaute lorsque j'entends la voix de mon père transpercer les murs de la maison. On m'appelle dans le salon, et je me dépêche de rejoindre mes parents, tout en branchant mon téléphone, afin qu'il récupère de cette heure passée à discuter avec mon petit-ami.
- Que se passe-t-il ? Avez-vous besoin de mon aide ?
- Exactement, sourit ma mère. Nous organisons notre cérémonie de renouvellement de vœux, et nous aimerions que tu donnes ton avis sur différentes choses.
Ils ont investi la table basse du salon, sur laquelle diverses choses sont posées ; des feuilles avec des noms et prénoms, d'autres avec des propositions de menus. Je ne vois rien en rapport avec les fleurs, ce qui me surprend, de la part de mes parents fleuristes.
- Nous sommes en train de faire la liste des invités.
J'attrape cette liste en question qu'elle me tend, et laisse mes yeux se poser dessus. Mes grands-parents maternels feront apparemment le déplacement depuis le Japon, ce qui me ravit, puisque je ne l'ai pas vu depuis mes huit ans. Mon grand-père paternel. Quelques amis de mes parents, principalement rencontrés à la boutique. Je n'aperçois pas le nom de Walter, mais bien celui de Valentin. Lola, ainsi que Daisy sont également de la partie. Je souris lorsque je découvre tout cela, puisque mes parents pensent à moi.
- En fait, nous avons une question pour toi, Eliot. Une question très importante.
- Est-ce qu'elle concerne Walter ?
- Non, nous savons que cela mettrait mal à l'aise Valentin si nous l'invitons. De plus, nous n'aimons pas beaucoup son comportement vis-à-vis de lui, d'après ce que tu nous as raconté. Non, nous voulons te parler de ta demi-sœur, Asuka.
Je sursaute à l'entente de ce prénom. Bien entendu, je continue à discuter avec elle par messages, et nous nous sommes appelés une fois depuis mon retour de Paris. Mais qu'elle revienne au milieu d'une discussion familiale, de plus par l'intermédiaire de ma mère, c'est absolument surprenant.
- Es-tu sûre Maman ? C'est pourtant à cause d'elle que tu es allée au Japon, réfléchir sur votre couple. Elle est le déclencheur de toute cette histoire. L'inviter au dénouement heureux serait quelque peu paradoxal.
- C'est moi qui suis à l'initiative de cette idée, reprend ma mère. J'ai envie de la rencontrer, puisqu'elle est tout de même ma nièce par alliance, si je ne me trompe pas. Elle semble importante pour tout le reste de cette famille, et je fais partie de cette famille. Mais je préfère tout de même vous demander si cela ne te dérange pas qu'elle vienne.
- Qu'en a dit Callahan ?
- Il est d'accord et semblait plutôt enthousiaste à l'idée.
Je souris, peu surpris de l'attitude de mon grand frère. J'ai cru comprendre qu'ils avaient beaucoup parlé, début février, lorsque j'étais à Paris.
- Alors je suis également d'accord. Je serais heureux qu'elle vienne, si ça ne vous dérange pas.
Pendant tout l'échange, mon père reste silencieux. Je me tourne vers lui, et il ne semble pas oser prononcer la moindre parole. Je suis presque certain qu'il n'est pas ravi de cette invitation, même si cela semble faire plaisir à sa femme.
- Mais qu'allez-vous dire à vos parents respectifs ?
- Qu'elle est votre cousine, intervient Papa. Il est hors de question qu'ils apprennent la vérité. Mon père risque la crise cardiaque, parce qu'il est fragile du cœur. Quant aux parents de ta mère, ils refuseront catégoriquement que nous renouvelions nos vœux dans de pareilles conditions. Ils estimeront que j'ai déshonoré leur fille.
- Bien. Alors je serais prudent.
Je rends la feuille à ma mère, et continue à observer toutes les informations réunies pour cette cérémonie. Mes parents ont loué une salle dans la banlieue de Belfast - la ville est très chère, d'après ce que je sais - et la fête se tiendra le vingt-quatre mars. Je la note dans un coin de ma tête, à défaut d'avoir mon téléphone sous la main.
- Et les fleurs ? Ne me dites pas que vous allez demander à une autre entreprise de s'en occuper ?
- Eh bien, si. Il s'agit d'une toute petite boite, qui vient de se créer. C'est Digitaline.
- Mais... pourquoi ? Je peux aider à faire les bouquets, et Callahan est un fleuriste confirmé désormais ! Pourquoi ne pas lui faire confiance ?
- Détrompe-toi Eliot. Nous lui faisons confiance. Digitaline, c'est le nom provisoire de la petite entreprise de ton frère. Si tu veux l'aider, il faut que tu en discutes directement avec lui.
Les deux se moquent de moi, un sourire malicieux aux lèvres. J'adore les voir dans cet état-là, et non dans ce silence gênant de tout à l'heure, lorsque nous évoquions ma demi-sœur.
- Si tu savais comme je suis fière de lui, reprend ma mère, les yeux vers le plafond. Mon petit garçon devient un véritable homme, qui prend son indépendance. Parfois, je le revois lorsqu'il était tout bébé et qu'il était si calme dans son couffin.
Il suçait même son pouce !
- Et moi, maman ? Comment étais-je ?
Son visage blêmit et je lève un sourcil incompréhensif.
- Elle ne te le dira pas parce qu'elle tient beaucoup à toi, mais tu étais un vrai petit diable quand tu étais bébé. En plus, tu n'arrêtais pas de tomber malade, si bien que nous passions notre temps à l'hôpital à s'inquiéter pour toi, avec un petit garçon de un an qui ne comprenait pas ce qui se passait autour de lui. Certes, tu ne pouvais rien faire contre ça, mais le comportement ne suivait pas. Sais-tu que tu as mordu un médecin qui voulait t'examiner, lorsque tu as eu un an et demi ?
- Pardon ?
- Il voulait vérifier si tu avais des ganglions, et à un moment, sa main est passée devant ton visage. Comme tu avais sans doute l'impression qu'il voulait te faire du mal, tu as sauté sur sa main et tu l'as mordu. Mais dans un sens, nous avons beaucoup apprécié ce geste.
- Au risque de me répéter, repris-je, pardon ?
- Il t'a insulté, il nous a insultés également, et il a fait de nombreuses remarques racistes, décrétant que pour lui, les enfants asiatiques sont très calmes, et que cela n'est pas le cas pour toi seulement parce que nous ne sommes pas dans notre pays d'origine. Nous ne sommes plus jamais allés dans cet hôpital, et nous avons déconseillé ce médecin à nos connaissances. Une fois dans la voiture, nous avons décrété, avec ta mère, que tu avais bien fait de le mordre, finalement.
Les deux rient, mais j'essaie d'imaginer leur réaction lors de cet épisode de leur vie. Cela ne m'étonnerait pas que ce soit la première fois qu'ils entendent une remarque telle que celle-ci. Il suffit de voir ma propre vie et tout ce que j'ai déjà pu entendre, à seulement dix-sept ans.
- Je suis désolé de changer aussi brutalement de sujet, mais est-ce que ça vous dirait une soirée film, ce soir ? On se commande des pizzas, et on s'installe confortablement sur le canapé, propose ma mère, en souriant. Je pense que nous avons assez travaillé, et de toute manière, les fleurs, les invités et ce que nous allons manger m'assomment plus qu'autre chose.
Nous acquiesçons tous en cœur et je glisse vers ma chambre, afin de me changer. Je suis toujours enthousiaste lorsque nous nous retrouvons de cette manière, en famille.
***
Ce n'est qu'à la veille de la Saint-Patrick, le seize mars, que Valentin reçoit une réponse de ses anciens amis. Nous sommes dehors, sur le toit, lorsqu'il commence à réceptionner une abondance de messages. Je les lis en même temps que lui.
De Harold : Je tiens à dire, à mon propre nom, que je suis très heureux d'avoir de tes nouvelles. Mis à part pour ton anniversaire ou la nouvelle année, nous n'avions plus de contacts. Nous entendons quelquefois parler de toi lorsque nous voyons Daisy, mais cela ne vaut pas le véritable contact avec toi. Je serais heureux de te rejoindre dans ce pub. De plus, je suis en possession de mon permis de conduire et j'ai une voiture à ma disposition. Je pourrais jouer le rôle de chauffeur pour tout le monde, plus encore car je n'apprécie pas beaucoup l'alcool.
- Tu risques de bien t'entendre avec lui, me glisse Valentin. Il a toujours bien parlé, il est poli et très bien éduqué. Un toi, en hétéro avec les cheveux longs.
Je ris à la comparaison, avant de passer au message suivant.
De Kit-Kat : Je rejoins mon cher et tendre dans ce qu'il a dit : tu me manques, espèce d'arc-en-ciel ! Je t'avoue que j'ai jamais pris la peine de venir vers toi, parce qu'avec l'histoire de tes parents et tout... c'est cool que ça soit toi qui fasses le premier pas, parce que sans ça, je me serais enfermée dans mon idée et on ne s'en serait pas sortis, je pense. Je s'rais là, surtout si Harold nous conduit. Ça va être trop biiiiiiiien !
- Meilleure amie de Daisy, un véritable rayon de soleil. Je pense que tu t'en doutes, mais elle sort avec Harold, depuis l'été de notre year 11. Ils vont tellement bien ensemble, tu ne peux pas imaginer.
De Sheridan : j'viens. C'est pas galère, avec Harold. J'peux ramener Sybil avec moi ? Elle est chouette, je te promets.
Le message est incroyablement court, mais cela ne semble pas surprendre Valentin. Il en sourit même.
- C'est bizarre, hein, mais avec lui, tu risques aussi de bien t'entendre. Son passe-temps favori, dans la vie, c'est fumer sur le toit de quelque chose, tout en regardant les nuages passer. Un jour, on l'a retrouvé sur le toit d'une voiture, il avait été trempé par la pluie. Et devine quoi, cet imbécile s'était endormi comme un caillou ! Et puis, d'ailleurs, il est loin d'être bête. Il a un QI de je sais plus combien, il explose tout le monde en cours. Et c'est lui qui sort avec la sœur de Curtis. Ça ne te dérange pas de la revoir ?
- Absolument pas. Comme je te l'ai déjà dit, je l'appréciais beaucoup, lorsque nous étions encore amis. Je serais très content d'avoir de ses nouvelles.
- Super, alors il ne me manque plus que Coby et le compte sera bon.
Ce fameux Coby se manifeste, mais dans la conversation personnelle qu'il entretient avec Valentin. Conversation qui n'a pas été utilisée depuis plus de deux ans, ce qui est surprenant. Il m'avait pourtant dit que la dernière fois où il avait vu ses amis était lors de l'enterrement de ses parents. Le jeune homme ne serait pas venu ? Ou ils n'auraient tout simplement pas communiqué ensemble ?
Coby : Je préfère répondre ici pour éviter la tornade de drama sur l'autre groupe (que je pense quitter, d'ailleurs). Je sais pas pour qui te prend, parce que ça fait bien longtemps que t'as cessé d'être mon ami. Quand t'as arrêté de répondre à mes messages, qu'on ne te voyait plus du tout pendant les sorties avec Daisy, ou alors quand t'as brisé le cœur de mon meilleur pote alors qu'il voulait simplement te soutenir dans l'épreuve que tu vivais, et que t'as juste joué à l'égoïste. J'ai pas envie de connaitre la personne que t'es devenue, parce que je sais déjà qu'elle ne me plait pas. Je viendrais pas à cette petite réunion de l'hypocrisie, et je te prierais de bien vouloir m'oublier, dans tous les sens du terme.
Le message est criant de violence. J'attrape immédiatement la main de Valentin, mais celui-ci ne montre aucun signe de tristesse sur son visage. Il arbore une expression presque neutre, comme s'il était anesthésié contre ce genre de chose.
- Je m'en doutais, en fait. C'est moche à dire, mais je savais qu'il allait me répondre un truc pareil. Parce qu'il n'a jamais compris pourquoi j'ai arrêté de leur parler, après le décès de mes parents. Parce que je pense que si on lui parle de dépression, il va croire que je le faisais exprès, un truc comme ça. Et je sais très bien qu'il est proche de Curtis, au point où il préfère se détacher complètement de moi. Ce que je trouve bizarre quand même, c'est qu'il lui ait parlé de nous. C'était le mec le plus secret au monde sur sa vie amoureuse. Ah moins que...
Il écarquille les yeux et place sa main devant sa bouche, choqué.
- J'y crois pas ! Je suis sûr qu'ils... qu'ils sont ensemble ! Ça serait la seule raison pour que Curtis fasse son coming out, parce que même sa sœur n'est pas officiellement au courant. Oh bon sang de bois de petite cuillère, c'est... c'est vachement flippant en fait !
Contre toute attente, le blond se met à rire, comme si on lui avait raconté la blague la plus drôle au monde. Il essaie de parler en même temps, mais n'y parvient pas, ce qui lui fait redoubler son hilarité. Je suis pour ma part quelque peu surpris face à cette réaction.
- Punaise, c'est pas vrai ! Franchement, je leur souhaite de vivre une bonne histoire, mais je les aurais jamais cru compatibles à ce point. Et je prie pour que Curtis ne brise pas Coby petit à petit.
- Cela ne te dérange pas qu'il t'ait parlé de cette manière ? C'est assez violent, tout de même.
- Ouais, peut-être, mais pour être honnête avec toi, j'ai vécu pire. Et puis, il a raison. On est plus amis depuis un bout de temps. Notre relation ne reposait que sur de l'hypocrisie, et je suis assez content qu'il fasse preuve de franchise.
Il clique donc sur l'espace réservé à la réponse et commence à taper à toute vitesse, si bien que je n'ai pas le temps de lire au-dessus de son épaule. Il me donne son téléphone lorsque tout est fini, afin que je puisse prendre connaissance de son message.
Valentin : D'accord, c'est compris et ça sera fait. Mais je te laisse expliquer le pourquoi du comment aux autres, enfin, si tu as l'autorisation de la haute instance de le faire. J'espère que tout se passera comme tu veux dans ta vie.
Je souris au sarcasme utilisé, et décide de récompenser mon élève, en lui expliquant la teneur de mon geste. Lorsque mes lèvres se sont décollées de sa joue, je glisse.
- Il faudrait que je te donne des cours plus souvent, tu es particulièrement doué, quand tu t'y mets.
Ses mains effleurent mes joues, ses doigts rencontrent le bord de mes lèvres et je comprends ce qu'il essaie de faire. Avant de tout à fait m'embrasser, il murmure.
- Je sais, c'est parce que j'ai un très bon professeur.
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