CONFIDENCES DES OMBRES
La porte s'entrouvrit, révélant une présence à la fois troublante et déchirante. Un jeune garçon, à peine dix ans, fit son entrée, son apparence presque cadavérique était saisissante. Ses traits pâles contrastaient avec le noir corbeau de ses sourcils et de ses pupilles, créant un contraste à la fois fascinant et dérangeant. Le petit être semblait emprisonné dans des vêtements d'hôpital beaucoup trop grands pour lui, accentuant sa frêle silhouette.
"Bonsoir," murmura-t-il à peine. "Puis-je ?"
Les lumières du couloir avaient ébloui mes yeux, mais il semblait comprendre mon inconfort visuel, car il se dirigea vers l'interrupteur et éclaira la pièce. Le spectacle qui se dévoila me permit de mieux distinguer son visage.
Ses yeux étaient expressifs malgré leur petite taille, et un bonnet de laine vert était posé sur sa tête, cachant peut-être une chevelure absente. Ses doigts tenaient un étrange appareil de fer, relié à un fil suspendu à sa chemise, qui semblait être relié à son cœur.
Fasciné et troublé à la fois, je répondis à son invitation pour qu'il s'installe sur le lit voisin. Son aura énigmatique et son air mélancolique avaient capté mon attention, même si sa jeunesse était entachée par la maladie.
Le jeune garçon s'appelait Hayan Byeol, et son sourire timide était empreint d'une sagesse bien au-delà de son âge. Métis et coréen, il partageait son passé et son espoir, tout en confiant que son cancer était une punition divine pour ses erreurs passées. Son optimisme contrastait fortement avec la gravité de sa maladie.
Nous discutâmes longuement, échangeant nos histoires, nos peurs et nos rêves. Son rire, malgré les circonstances, apporta une lueur d'espoir dans la chambre plongée dans l'obscurité.
Il avait révélé écrire un journal, intitulé "Pyjama et pages étoilées", dans lequel il exprimait ses pensées et ses aspirations. Ce nom m'interpella, et il expliqua avec une pointe d'humour que ses vêtements d'hôpital ressemblaient davantage à un pyjama. Sa détermination à garder espoir malgré tout touchait mon cœur.
Au fur et à mesure de notre conversation, j'en appris davantage sur ce garçon attachant. Il m'expliqua qu'il avait entendu parler de moi à travers Mr. Sheffield, le directeur de l'hôpital, qui parlait souvent de Joon et de moi. La reconnaissance et l'admiration dans les yeux de ce jeune garçon me surprirent, créant un lien improbable entre nous.
Nous discutâmes jusqu'au petit matin, partageant nos rires et nos histoires. Lorsque la fatigue eut finalement raison de lui, il s'endormit paisiblement sur le lit voisin.
Alors que je sombrais dans le sommeil, la porte s'ouvrit à nouveau, laissant entrer Jemima. Son sourire radieux éclairait la pièce, illuminant même Byeol qui dormait paisiblement.
"Byeol, c'est donc là que tu étais caché, petite étoile ?", dit-elle avec douceur avant de se tourner vers moi. Son regard bienveillant me transmettait un sentiment de réconfort.
Elle m'appela par mon prénom, ce qui me fit sourire. Son air fatigué témoignait de sa dévotion envers son travail, et elle s'occupa de ma perfusion avec compétence et délicatesse. Chaque geste qu'elle faisait était suivi par mon regard, incapable de détourner les yeux.
Jemima était belle, tant à l'extérieur qu'à l'intérieur. Lorsqu'elle eut fini son examen, elle m'informa qu'un psychologue me rendrait visite plus tard dans la matinée. Le mot "psychologue" me fit soupirer, mais elle réussit à apaiser mes inquiétudes avec son sourire réconfortant.
Elle quitta la chambre, emportant avec elle son parfum qui flottait dans l'air. Le monde semblait un peu plus lumineux à chaque fois qu'elle passait.
Mon esprit s'enfonça dans la réflexion tandis que la journée se poursuivait, ponctuée par les rencontres et les discussions qui m'avaient lié à Byeol et à Jemima. Mais alors que la nuit tombait à nouveau, un sentiment de lourdeur s'empara de moi.
"Le passé" était le diagnostic que Sheffield m'avait attribué. Une fois de plus, le sentiment de culpabilité, de chagrin et de désespoir m'avala tout entier. Mon esprit était en guerre contre moi-même, et la présence de Jemima était la seule lueur d'espoir qui m'empêchait de sombrer totalement.
Et ainsi, les jours passèrent, chaque rencontre avec Byeol et chaque interaction avec Jemima me rapprochant lentement de la réalité que je tentais d'éviter. Mon combat pour surmonter le poids du passé et ma rencontre avec ces deux êtres exceptionnels m'avaient enfin conduit sur la voie de la guérison.
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Le médecin l'avait dit, le psy l'avait confirmé : "dépressif". Le mot résonnait dans ma tête comme une sentence implacable. Tout ce que je ressentais, tout ce que je vivais, réduit à un simple mot. "Dépression". Je sortis du bureau du psy, la tête encombrée par cette étiquette qui ne faisait que creuser davantage le fossé entre moi et le reste du monde.
Marchant dans les couloirs de l'hôpital, mes pas étaient lourds, tout comme le fardeau que je portais. Je me dirigeais vers le bureau de Sheffield, mon "père" de cœur. L'homme qui avait pris soin de moi depuis sept ans, qui m'avait ouvert son foyer et son cœur.
En entrant dans son bureau, son regard trahissait une profonde inquiétude mêlée de frustration. Les mots qu'il prononça s'écrasaient comme des poings sur ma conscience, me rappelant mes erreurs passées et le poids que je portais.
"Je vais prendre l'air," avait été ma simple déclaration ce matin-là, avant mon départ pour la colline. Sheffield et Lara, sa femme, m'avaient accueilli dans leur foyer alors que je me retrouvais seul. Mais maintenant, Sheffield était à la fois mon "père" et le directeur de l'hôpital où j'étais interné.
Il criait presque, désespéré de me faire sortir de ma torpeur. "Jusqu'à quand vas-tu vivre dans le passé ?" me demandait-il, presque en supplie. Il exprimait son impuissance face à mon isolement, à ma souffrance.
Les larmes menaçaient mes yeux alors qu'il parlait de ma mère, de mes frères. J'avais toujours pensé qu'ils préféraient me voir comme j'étais, vivant dans l'ombre de ma douleur, mais les mots de Sheffield m'ébranlaient. "Tu as même voulu te ôter la vie !" Ses paroles résonnaient durement, comme une vérité inévitable.
Il quitta son siège pour faire les cent pas, et son visage passait de la fureur à la tristesse. Il parlait du vide qui ne se comble pas, des souvenirs indélébiles, des personnes qu'on ne peut remplacer. Il avait raison, et cela ne faisait que renforcer la culpabilité qui m'étouffait.
Acceptant ma sentence, je baissais les yeux, incapable de soutenir son regard. Il décida que je devais retourner dans ma chambre assignée. Je m'y rendis, perdu dans un labyrinthe de pensées et d'émotions. Épuisé, je m'assis dans le couloir, laissant mes pensées errer.
Soudain, des cris et des courses folles résonnèrent dans le couloir. Trois garçons surgirent, leur énergie et leur insouciance semblaient étrangement déplacées dans cet environnement. Je levai la tête pour voir une scène qui semblait échapper à toute logique.
"Hope !!! Je te jure que si je t'attraperai si je te tue" criait l'un des garçons. "Vu comment tu es tout petit, c'est pas gagné" répondit un autre en riant.
Ils semblaient libres, pleins de vie. Je me demandais ce qu'ils faisaient ici, dans cet hôpital. Soudain, l'un d'eux, à côté de moi, s'effondra. Mon instinct me poussait à m'éloigner de cette confusion, mais une part de moi voulait comprendre.
"Qu'est-ce que..." commençai-je, hésitant.
À ma droite, une silhouette s'assit, épuisée. Je ne pouvais pas voir son visage, ses cheveux en bataille lui cachant la moitié du visage.
De l'autre côté, les trois garçons s'étaient arrêtés, leur énergie dissipée. Hope, l'un d'eux, était étendu inconscient sur le sol et cela ne semblait perturber personne.
Je ne savais pas si je devais intervenir ou simplement rester spectateur de leur étrange ballet.
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