Chapitre 11 : Double face

 Je suis sous le choc. Je ne comprends pas ce qu'elle vient de me dire. Comment-a-t-elle pu tuer Sandra alors même que la liste indique qu'elle s'est suicidée. Je regarde Cathy espérant qu'elle m'en dise plus. Qu'elle me dise plus que ces trois mots. Je sens mes sourcils se froncer de plus en plus et mon visage se durcir plus j'attends la suite.

— Je... Quand je suis arrivé Dylan tournait autour de Sandra... Il l'a trouvée mignonne, comme toutes les filles qu'il convoite avant de les jeter quand il a eu ce qu'il veut je suppose... Mais cette fois ce n'est pas la faute de Dylan. Hannah m'a... elle m'a convaincue que si je voulais Dylan il fallait que Sandra ne soit plus autour de lui... alors...

— Alors t'as fait en sorte qu'elle dégage au point de la pousser au suicide.

Ma voix est glaciale, mais elle me dégoûte. Je me bats depuis plusieurs semaines contre des personnes comme elle.

— Je l'ai filmée comme Hannah l'a fait pour moi. Dylan ne l'a pas violée, enfin... ils ont couché ensemble, mais Sandra était consentante d'après Hannah. Juste après ça il l'a laissé tomber en se moquant d'elle comme il l'a fait pour moi. Et après ça je n'ai pas arrêté de la menacer, de lui dire que Dylan était à moi et que si elle faisait quoi que se soit la vidéo serait postée en ligne. Hannah a voulu pousser le vice encore plus loin en lui faisant croire que Dylan voulait s'excuser auprès d'elle et elle l'a humilié. Je n'étais pas là et je ne sais pas ce qu'elle a fait exactement. Tout ce que je sais c'est que Sandra n'a plus jamais été la même et elle s'est suicidée quelques semaines plus tard.

Je ne lui réponds pas. Je suis bien trop en colère contre elle. Je me lève du lit. Je ne la regarde pas. Je l'entends pleurer, mais je reste de marbre. J'arrive devant la porte de sa chambre et l'ouvre.

— Tu as raison. Tu l'as tuée.

Et je quitte sa maison. Je prends la voiture garée devant le garage et démarre à toute vitesse. Je me laisse guider par la colère. Et j'arrive là ou tout a commencé. Là où je n'aurais jamais dû embrasser Cathy. Le jour commence à se lever. C'est magnifique. Je prends la veste dans mon coffre parce que bordel j'ai encore et toujours froid. Je remonte la fermeture jusqu'à mon menton et enfourne mes mains dans mes poches. Je repère un arbre légèrement penché vers l'arrière et décide de m'y reposer pour réfléchir. Mon téléphone sonne. Je sais que c'est elle, elle est la seule à avoir mon numéro. Je ne réponds pas. Je n'ai pas envie de lui parler pour l'instant.

Pourquoi me suis-je attaché à elle ? Je vis depuis des milliers d'années sur cette terre, Je me suis toujours imposé la règle de ne jamais m'approcher de trop près des humains. Pourtant on peut dire que Cathy et moi sommes très proches l'un de l'autre au point de partager le même lit. Je me demande pourquoi Cathy m'a autant chamboulé. C'était censé être une cliente de plus à faire passer de l'autre côté et il a fallu que je joue à l'adolescent amoureux. Quel con je fais. Je l'ai vue sous son plus beau jour. Je l'ai idéalisée. Je ferme les yeux en espérant peut-être que toute cette histoire ne soit en réalité qu'un foutu rêve.

Une idée me vient subitement. Et si je partais ? Après tout Cathy va vieillir pendant que moi je vais rester intact. Ça ne sera pas la première fois ni la dernière que je quitte une ville ou même un pays. Je pourrais retourner en France ou en Chine. Je pourrais m'envoler dès maintenant et m'installer dans le sud de la France histoire d'avoir un peu de chaleur. Je glisse le long de l'arbre et m'assoie dans l'herbe encore mouillée par la rosée.

Sans m'en rendre compte je m'assoupis. Ou plutôt je m'endors car en me réveillant le soleil brille si fort que je n'arrive pas à ouvrir les yeux. Je cligne plusieurs fois des yeux et les plisse un maximum mais rien à faire ça me fait tout aussi mal. Je comprends alors que ce n'est pas le soleil. Les anges, ils sont là-devant moi et ne bougent pas. Ainsi ils me font peur. J'ai encore plus froid que d'habitude et j'ai l'impression que je vais mourir une seconde fois.

— Tu t'es attachée à cette petite humaine n'est-ce pas ?

Le ton de sa voix m'étonne. Il n'est pas du tout autoritaire ou froid, c'est un mélange de compassion et de tristesse.

— Je suis désolé.

— Ne t'excuse pas. Nous ne t'avons jamais empêché d'avoir des rapports avec les humains. C'était à toi de savoir ce qui était bon ou pas pour toi.

— Je n'aurais pas du. Je fais justice pour elle, mais je devrais faire justice envers elle.

— Niklaus nous t'avions prévenu. Avant de donner des leçons il faut connaître toute la vérité.

Je me sens comme un enfant qui se fait remonter les bretelles par sa mère. Il n'y a toujours pas de colère en eux. Leur voix me donne l'impression que c'est moi qui ait pris une leçon cette fois.

— J'ai causé la mort d'une fille alors qu'elle n'était pas sur ma liste. Comment est-ce possible ?

— Être la mort ce n'est pas seulement faire entrer les âmes dans l'autre monde, c'est aussi pouvoir prendre les âmes qui selon toi ne méritent pas de vivre ou d'entrer de l'autre côté.

— Mais c'est la première fois que ça arrive.

— Car c'est la première fois que tu tisses des liens avec des humains. C'est la première fois depuis ta mort que tu peux t'apercevoir de comment sont réellement les Hommes sur cette terre.

— Ils ne sont pas tous mauvais... Cathy... Cathy a fait une seule erreur et pourtant...

— Et pourtant tu te sens incapable de vraiment lui en vouloir, car toi-même tu viens de pousser quelqu'un au suicide. Reprends-toi Niklaus et continue ton travail comme tu l'as toujours fait.

Je n'ai pas le temps de répondre, la lumière s'affaiblit petit à petit et je retrouve un semblant de regard normal. Je me redresse doucement et décide de remonter dans ma voiture. Avant de démarrer je jette un coup d'œil à mon téléphone et je m'aperçois que Cathy m'a appelé une dizaine de fois en laissant des tonnes de messages. Je réfléchis quelques secondes, le soleil se lève et je ne sais pas si je dois me rendre chez Cathy ou non. Après tout, les anges ont raison, moi aussi j'ai tué quelqu'un. Je démarre la voiture, mais cette fois je roule doucement. Je me demande ce que je vais bien pouvoir dire à Cathy. Les routes sont vides alors malgré la limitation de vitesse j'arrive assez rapidement chez elle.

Ses parents quittent la maison au moment au j'arrive devant son allée. Je pousse légèrement la porte et la laisse s'ouvrir sans un bruit. Cathy doit sûrement encore dormir avec ce qu'il s'est passé. La porte de sa chambre est entrouverte. J'entre sans faire de bruit et je vois Cathy sur son lit. Les couvertures n'ont pas bougé depuis mon départ. Je m'approche d'elle doucement. Ses cheveux lui cachent le visage. Elle est en pyjama, elle semble avoir transpiré, mais elle paraît gelée. J'enlève ses cheveux qui tombent sur son front pour prendre sa température. C'est bizarre son corps est vraiment froid.

— Cathy ?

Elle ne bouge pas d'un cil. Je la secoue légèrement. Toujours rien. Puis je le sens ou plus tôt je ne le sens plus. Son pouls, son cœur, je ne perçois rien.

— Cathy !

Je la secoue brusquement. Je la place bien allongée sur son lit. Des médicaments trônent sur son bureau avec un grand verre d'eau vide. La boite de médicaments est aussi vide. J'appuie sur sa poitrine plusieurs fois, mais je sais que je dois l'emmener à l'hôpital. Je la prends dans mes bras et m'envole par la fenêtre.

J'atterris devant les portes de l'hôpital et j'y entre en hurlant à l'aide. Une infirmière s'approche de moi avec un brancard et je dépose Cathy dessus. Des médecins déboulent de je ne sais où et emmènent Cathy. J'essaye de les suivre tout en expliquant ce qu'il s'est passé, mais je me fais arrêter devant la porte des urgences. L'infirmière me demande de me calmer et d'expliquer de nouveau ce qu'il s'est passé. Je lui indique les médicaments qu'elle a prit et lui dit aussi que je ne sais pas depuis combien de temps elle était comme ça. Même si j'en ai une vague idée. L'infirmière me laisse dans la salle d'attente après avoir eu les informations nécessaires.

La scène tourne en boucle dans ma tête. Je ne comprends pas, Cathy ne devait pas mourir aujourd'hui. Sa mort est prévue dans quelques jours. Elle ne devrait donc pas mourir. On me demande si je peux joindre les parents de Cathy, mais je réponds que je n'ai pas leurs coordonnées. L'infirmière repart pour s'occuper de trouver les numéros et pouvoir les appeler.

J'attends des heures qui me paraissent des journées. Les parents de Cathy arrivent une trentaine de minutes après le coup de fil de l'hôpital. Je n'imagine pas la peur et la douleur que doit ressentir la mère de Cathy. Elle m'aperçoit dans la salle d'attente et elle vient me prendre dans ses bras en pleurant. Elle me supplie de lui dire ce qu'il s'est passé et je me lance une énième fois dans les explications les plus douloureuses de toute ma vie. Le père de Cathy vient se joindre à nous et m'écoute parler. Je passe sous silence le fait que je me suis disputé avec quelques heures avant ce qu'elle a fait. Je leur dis qu'après la journée qu'on a passé je suis rentré chez moi prendre des affaires et qu'en revenant au petit matin pour m'assurer que Cathy allait bien et que je l'ai trouvée comme ça sur son lit.

Après les explications on s'installe sur les chaises dans la salle d'attente. Quelques minutes plus tard un médecin vient nous voir. Cathy a subit un lavage d'estomac et elle va s'en sortir. J'avais beau le savoir je suis soulagé. Ses parents demandent à la voir et je dis que je préfère attendre dans la salle d'attente et la voir après eux.

Quelques minutes après les parents de Cathy reviennent.

— Elle demande à te voir.

Sa mère me sert une nouvelle fois dans ses bras, puis je me dirige vers la chambre de Cathy. Cet endroit me donne la chair de poule j'y vois des âmes à chaque coin de mur, sûrement des personnes que je vais devoir revoir ce soir. Je pousse légèrement la porte sans frapper, après tout elle a demandé à me voir alors je suis le bienvenu.

— Cathy ?

La pièce est toute blanche comme dans tous les hôpitaux du monde. Je vois Cathy sur le lit, elle se redresse un peu mais baisse le regard quand elle croise mes yeux.

— Qu'est-ce que tu as dis à tes parents ?

— Que la mort de ma grand-mère et celle d'Hannah m'ont un peu chamboulée et que je ne savais plus où j'en étais.

Je ne réponds pas et je viens m'asseoir sur le bord du lit.

— Écoute Cathy, je suis désolé de t'avoir laissé tomber dans le moment où tu avais sans doute le plus souvent besoin de moi. Mais j'ai mal pris le fait que tu es attendu aussi longtemps avant de m'en parler après tout ce qu'on a pu vivre tous les deux. C'est pour ça que je suis parti.

— Alex... Je suis vraiment désolé, mais j'avais déjà du mal à me l'avouer à moi-même alors te le dire c'était encore plus dur pour moi.

Je respire profondément, après tout comme je l'ai dit aux anges, elle n'a commis qu'une seule erreur. Je me lève et je viens la prendre dans mes bras. Elle me rend mon étreinte.

— J'ai aussi quelque chose à te dire. Et ça risque d'être difficile à entendre et impossible à croire.

— Vas-y, il peut rien arriver de pire que tout ce qu'il se passe en ce moment.

— Je ne sais pas par où commencer. Un jour tu m'as demandé des explications sur ce que je faisais la nuit ou sur mon passé avec mes parents. La vérité Cathy c'est que je m'appelle Niklaus et j'ai plusieurs milliers d'années tellement que j'ai arrêté de compter. Je suis mort Cathy... Depuis très longtemps et maintenant je contrôle la mort... Cathy si j'ai convaincu Meredith de vous parler de son cancer c'est parce que je savais qu'elle allait mourir.

Je tourne un regard vers Cathy. Elle semble perplexe puis d'un seul coup elle explose de rire.

— Je ne savais pas que tu pouvais faire de l'humour, mais t'es allé chercher loin là.

— Je ne rigole pas Cathy et comme j'ai conscience que ça va être dur à croire il va falloir que je te montre.

Les électrodes qui contrôlaient les battements de son cœur il y a quelques minutes sont débranchés. Je les prends, enlève mon tee-shirt et les place sur ma poitrine. Comme prévu on entend un bip qui signale que mon cœur a cessé de battre. Pour la convaincre encore plus, j'attrape un scalpel et m'ouvre le bras. Aucun sang ne sort, comme prévu. Cathy pousse un cri et se redresse brusquement. Je m'approche d'elle précipitamment et pose ma main sur sa bouche pour l'empêcher d'alerter tous l'hôpital. Son regard me signifie qu'elle est totalement terrorisée. J'enlève ma main m'assurant qu'elle ne criera plus.

— Je sais c'est flippant, mais je suis toujours moi-même. Tu veux peut-être que je te laisse seule pour réfléchir à ce que je viens de dire ? Je vais aller chercher de quoi manger de mieux que ce que l'hôpital peut offrir.

Elle ne répond pas. Elle secoue la tête pour me dire oui et je sors de la chambre. Mon corps entier tremble. Je n'arrive pas à croire que je viens de lui révéler mon identité. J'arrive à trouver un distributeur dans le couloir derrière la chambre de Cathy. Je lui prends sa barre chocolatée préférée et un soda. Je fais demi-tour espérant que Cathy se soit calmée et me préparant à affronter tout un tas de question. Ma surprise est des plus grandes lorsque quand j'entre dans la pièce et que je trouve son lit vide. Ses vêtements ont disparu, et elle aussi.

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