Chapitre 1 : Couronnement

Je stresse. Mes mains se tordent sur le tissu qui recouvre mes genoux. La soie immaculée décorée de paillettes d'argent et d'or bruisse doucement lorsque je la prends entre mes doigts fébriles.

— Anais ? C'est pour bientôt, me lance Aedan en entrant dans la petite pièce.

Son costume bleu azur tranche avec ses jolis yeux verts. Ses cheveux bicolores, signe de sa puissance, sont savamment coiffés et lui donnent un air sérieux qu'il n'a jamais. Sauf aujourd'hui.

— J'ai peur, lui avoué-je d'une voix enrouée.

Il s'assit en souriant sur le banc de marbre à mes côtés.

— Anais, enfin ! Tu es prête. Ils ne vont pas te manger.

Je n'acquiesce pas. Rien qu'à l'idée de sortir de cette sorte de salle d'attente, mon estomac se révulse.

— Et si... Et si je n'y arrivais pas ? Tu y as pensé ? Et si je ne me souvenais plus des mots à prononcer devant ton père ? balbutié-je.

Il secoue la tête avec un doux sourire.

— Anais, tu vas assurer. Et puis, on te pardonnerait tout, dans cette magnifique robe ! ajoute-t-il comme une blague.

Je rougis violemment. Il prend ma main tendrement et la porte à ses lèvres. Mon regard se détourne.

— Si je t'embrasse, ça te donne assez de courage ? murmure-t-il tout contre mon oreille.

Son souffle effleure ma peau comme une caresse. Mes yeux se ferment à demi. Je tremble légèrement. L'effet qu'il a sur moi n'a pas diminué depuis deux mois de repos au Palais, après notre sauvetage chez les Écailles Noires. Aedan me fait toujours rater autant de battements de cœur...

— Peut-être... soufflé-je.

Il me semble qu'il sourit, puis ses lèvres se posent sur les miennes. Un flot de chaleur m'inonde. Mes sens s'affolent. Ma main serre la sienne. Ma respiration s'accélère brutalement.

Les lèvres du Draconide se détachent des miennes et descendent doucement dans mon cou. Je frissonne. Mes battements irréguliers cognent violemment dans mes oreilles. Aedan repousse quelques mèches brunes et dorées avant de reprendre ses baisers.

La température de la pièce me semble avoir augmenté de dix degrés. Enfin, au bout de quelques longues secondes délicieuses, Aedan se détache de moi, les yeux brillants.

— J'ai assez de courage pour deux jours, soufflé-je en reprenant ma respiration avec un sourire.

Les iris verts du fils de l'Ambassadeur me détaillent avec cette lueur indéfinissable si longtemps que je me remets à rougir. Aedan souffle.

— Tu sais, moi aussi j'ai apprécié.

Je baisse la tête, horriblement gênée. Il met fin à mon supplice en reprenant la parole d'une voix habituelle.

— Allez, place-toi derrière la porte. Dès qu'on t'annonce, tu entres. Et ne t'inquiète pas, tu seras parfaite !

Je souris légèrement. Moi, j'en doute encore, mais la confiance qu'il place en moi me donne tout de même le courage de me lever pour me placer face au battant de bois acajou. Je défroisse fébrilement ma robe immaculée. Les volutes brillantes scintillent comme sur une robe de princesse. Je l'ai trouvée magnifique dès que Suzy me l'a dévoilée. La Sorcière y a ajouté une touche personnelle que je devrai activer au moment opportun. Même si elle m'a décrit ses effets, j'ai encore une petite hésitation à l'idée de me mettre à briller comme une étoile devant tous ces gens.

— C'est un symbole, Anais. Tu es l'espoir de ce peuple, qui t'a attendue des années, et maintenant que tu es là devant eux, ils croient en toi. Tu vas avoir la pression, mais nous sommes là pour toi, d'accord ? avait déclaré calmement mon amie avec un sourire.

Je reviens à l'instant présent. Une boule de stress commence à reprendre forme dans ma gorge. Je triture la soie immaculée de nouveau sans pouvoir m'en empêcher.

— Sa Majesté Anais des Draconides !

Je sursaute. La voix forte provient de la pièce derrière la porte. Je la pousse en inspirant. Je redresse la tête en faisant un premier pas hors de la salle.

Le nombre de personnes présentes me frappe. À vue d'œil, ils doivent être plus d'une centaine, alors que je n'ai pour ainsi dire jamais vu de membres de la Cour au Palais.

J'avance d'un autre pas. Les regards me suivent avec curiosité. Je suis leur Reine perdue depuis des années, revenue miraculeusement en mettant fin aux agissements des Écailles Noires. Le secret de la participation du Régent à ces derniers est toujours d'actualité, il n'est pas question d'avouer cette « faute » au peuple. Le Régent a décidé de quitter ses fonctions et se repose dans ses appartements, voilà tout.

La température de mon corps a grimpé à une vitesse affolante. J'ai chaud. J'ai l'impression de me liquéfier.

Au fil de mes pas, ça ne fait qu'empirer mais je parviens à garder la tête haute et la démarche plus ou moins assurée. Au moins, je ne trébuche pas avant d'arriver devant l'Ambassadeur.

Lorsque je m'arrête, plus un son ne résonne dans la Salle du trône. Le tapis rouge qui m'a menée au bout de la haie d'honneur étouffe mes pas. Ma robe blanche bruisse en s'étendant autour de moi.

— Anais, commence l'Ambassadeur en me jetant un regard rassurant. Vous êtes revenue dans votre Royaume pour l'aider à se remettre d'heures sombres. À présent, il est temps pour vous de prendre votre place de Reine des Draconides afin de servir le peuple de toute votre volonté, de toute votre puissance et de tout votre pouvoir.

— Je jure de protéger mon peuple de toute ma volonté, de toute ma puissance et de tout mon pouvoir, maintenant et à jamais, répondé-je d'une voix claire. Je promets de le servir et de le défendre contre toute menace.

— Jurez-vous de toujours respecter les lois, de respecter le Conseil et d'écouter votre peuple ?

— Je le jure.

— Alors, proclame-t-il en se détournant, par les pouvoirs qui m'ont été conférés par votre mère la défunte Reine, je présente au peuple la Reine Anais la Courageuse !

Lorsqu'il lève la couronne royale au-dessus de ma tête, je la penche et ferme les yeux. Lorsque la coiffe a été déposée sur mes cheveux et que je sais qu'elle ne se détachera pas, je me relève et me tourne vers la foule. Mes yeux balaient du regard l'assemblée de Draconides, et je m'aperçois que beaucoup sourient.

— Vive la Reine ! s'écrie l'Ambassadeur.

— Vive la Reine ! reprend la foule en délire.

Des rubans colorés s'envolent par-dessus les têtes et un sourire s'étend sur mes lèvres. Alors, je saisis l'ample tissu de ma robe et me mets à tourner sur moi-même, de plus en plus vite. Les milliers de particules argentées se décollent de ma jupe et s'élèvent dans les airs. Lorsqu'elles heurtent le plafond avec un scintillement de lumière, elles retombent sur la foule et des exclamations ravies se font entendre.

Je m'arrête de tourner et admire l'effet produit. L'Ambassadeur me chuchote alors à l'oreille :

— Voilà un règne qui commence magnifiquement !












Bonjour ! Bienvenue sur ce tome 2 qui j'espère vous plaira autant que le premier ! Anais et Aedan sont (enfin !) revenus pour la suite de leurs aventures, et moi aussi. J'ai hâte de vous faire voyager dans les mystères de ce monde, au milieu des prophéties oubliées et des secrets révélés... 💫

Bonne lecture !



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