Chapitre 6

Une goutte de sueur coulait sur le front du jeune spaghetti.
La boîte dans laquelle il était se trouvait dans un petit coin de la cuisine, en compagnie d'autres aliments et conserves de toutes sortes.
Mais l'humain présent dans la pièce, qui préparait visiblement le repas, se dirigeait droit sur eux ! Qui allait être sa cible ?
Égoïstement, Patrick espérait que les farfalles soient les malheureuses. En effet, il avait toujours trouvé que ces papillons manquaient de couleur...
L'humain approchait, pas après pas. D'âge moyen, obèse et avec un chien dans les pattes, il n'avançait pas vite.
Dans la boîte, tout le monde retenait son souffle. Patrick entendait quelques spaghettis se faire leurs adieux.

-Je serais bien content de ne plus te voir, face de rat !
-Et moi dont ! J'espère que tu vas souffrir !

Patrick laissa couler une petite larme. Sensible, il trouvait les adieux émouvants.

L'humain était maintenant tout proche des aliments. Il allait faire son choix d'une seconde à l'autre. Patrick était trop stressé, il ne pouvait pas assister à la scène.
Ses yeux se fermèrent.

Des images lui vinrent alors. Ses parents. Ces pâtes qui l'avait adopté, qui avaient pris soin de lui comme s'il était leur propre enfant. Ces deux vieilles spaghettis lui avaient tant appris sur la vie.
Malheureusement, il ne les avait pas beaucoup connu. Les pauvres étaient décédés lorsque Patrick était jeune. Il rependait à eux de temps en temps, et espérait qu'ils étaient heureux là où ils étaient. Dans le paradis des pâtes.

Il pensa aussi à Patricia, son amie de longue date. Ils avaient tous les deux le même âge et se connaissaient depuis toujours. Pourtant, ils n'avaient pas toujours été aussi proches. Il y a longtemps, ils se détestaient. Patrick, étant jeune, n'aimait pas les filles et voulait rester qu'avec les garçons. La jolie brune, elle, avait certainement des vues sur Patrick et ne supportait pas qu'ils ne passent pas de temps ensemble. La jeune pâte se dit alors qu'elle devait se démarquer pour qu'il la remarque. Elle apprit alors la contorsion. Patricia devint la seule pâte du paquet à savoir se plier dans tous les sens sans se casser. Ce don épata toutes les pâtes, dont Patrick, qui commença dés lors à s'intéresser à elle. Depuis, ils partagèrent énormément de bons souvenirs. Patrick y repensait. Elle était là pour lui lorsque ses parents décédèrent, tout comme il était là pour elle lorsqu'elle perdit un doigt en se pliant un peu trop.

Trouvant le temps long, Patrick se décida à ouvrir les yeux. Un sourire se dessina sur son visage. Son paquet était encore complet, l'humain ne les avait pas touché ! Il senti que tout le monde relâchait la pression.
Mais alors, qu'avait choisi l'humain ?
Patrick regarda autour de lui et trouva enfin la grosse main poilue de l'homme. Elle tenait une conserve de thon.

-Il a prit Hervé, raconta un voisin de Patrick avec des sanglots dans la voix. Je l'aimais bien. Nous discutions, parfois, pour passer le temps. Nous étions tous les deux du même signe astrologique. Poisson. C'était un chic type. Il ne pêchait jamais, bien qu'il mordait souvent à l'hameçon. Paix à son âme...

Patrick réalisa que même s'il était soulagé de ne pas avoir été pioché, l'un d'entre eux n'avait pas cette chance.

-Au revoir, fiston... dit une autre boîte de thon qui était aux côtés d'Hervé.

Pendant tout le temps où l'humain restait dans la cuisine pour terminer la préparation de son repas, Patrick et ses compagnons restèrent très calmes, afin d'honorer la mémoire d'Hervé.

***

Assise dans le noir, occupée à compter ses défauts, au fin fond du couloir, accrochée à un atome d'espoir, Renée fulminait. Sa grosse erreur professionnelle lui coûtait cher et pourrait réellement poser problèmes aux tagliatelles et au monde entier. Si les spaghettis se rebellaient contre les humains comme elles prévoient de le faire, ça sera une véritable catastrophe. Mais ça, elle ne pouvait pas le dire à son supérieur.
En ayant abusé de son pouvoir, Renée la tagliatelle a été enfermée en prison pour une durée non définie. Son chef estimait que de cette façon elle ne fera plus de bêtise et pourra réfléchir à ce qu'elle a fait.

« 24 heures. Voilà 24 heures que je suis piégée ici et que je n'ai encore rien pu dévoiler. Ça ne peut pas durer, je dois trouver une solution pour sortir d'ici. Ou au moins pour parler au chef. »

Cependant, Renée ne pouvait pas faire grand chose. Sa cellule était complètement vide, il n'y avait pas fenêtre et ne côtoyait personne, à part un garde qui lui apportait de la nourriture deux fois par jour. La tagliatelle avait peur de devoir patienter longtemps...

***

L'humain était parti. Les pâtes pouvaient à nouveau parler entre elles. Tout le monde était encore sous le choc de la scène qu'elles venaient de vivre. Certaines pleuraient, bien que ce ne fut qu'un thon qui ai été sacrifié.
Une pâte réconfortait toutes les spaghettis en larmes, une à une. Puis, lorsqu'elle eu fini sa tournée, elle prit la parole.

-Voyez dans quel état nous mettent ces gestes des humains ! Et c'est quotidien ! Cela ne peut plus durer, nous devons rapidement organiser notre rébellion !

La plupart des gens hochaient la tête.

-Il a raison. Plus nous attendons, plus il y aura de morts. N'attendons plus.

- Cette nuit, nous profiterons du sommeil des humains pour commencer notre grève. Les amis, la fête va bientôt débuter !

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