CHAPITRE VINGT-HUIT
Je sentis une douce chaleur sur mon visage, c'est cela qui me réveilla. J'ouvris un oeil, puis le second, avant de les refermer, oublie par la soudaine luminosité. Je me tournai pour me cacher de la lumière avant de frotter mes yeux et de les ouvrit. Cette fois, je n'étais plus éblouie.
Je me redressai, les mains sur un agréable matelas. Sur mon corps, se trouvait un drap blanc, tout comme l'était la tunique que je portais. J'observai rapidement ce qui m'entourait : c'était une chambre. Il y a avait des murs en pierre, une fenêtre à ma gauche avec des rideaux, et un meuble à ma droite. Je fronçai les sourcils avant de me lever.
Lorsque j'étais enfin debout, mes pieds touchèrent le sol en pierre froid. J'avais l'impression que mes pieds brûlaient contre le sol tellement ce dernier paraissait gelé.
Je fis quelque pas pour me rapprocher de la fenêtre. Une fois proche d'elle, j'observai l'extérieur. Il y avait un beau jardinage des arbres et des fleurs partout. On aurait dit un endroit tout droit sorti d'un rêve. Il n'avait pas l'air réel tant il était beau. Je pouvais voir des jeunes femmes cueillir des fruits, courir dans le jardin, se prélasser au soleil. C'était beau. Mais quel était cet endroit somptueux ?
Je me rappelai soudainement des événements qui s'étaient produits dans la nuit. Le dieu solaire était venu me chercher est m'avez emmené dans cet endroit : sur l'Olympe. J'étais désormais dans la demeure des dieux, dans une chambre, en train d'observer des nymphes s'amuser.
La porte de ma chambre s'ouvrit et je sursautai presque, me retournant pour voir qui venais me trouver. Je vis une femme s'approcher de moi, une pille de tissus entre les mains qu'elle posa sur le lit, avant de venir vers moi. Elle était belle, vraiment très belle.
Vêtue d'une magnifique tunique bleue claire, cette dernière était accessoirisé d'une fine ceinture noire avec un épi de blé en or dessus. Au niveau des épaules, elle avait également des petits épis de blé en or. Ses cheveux bruns étaient recouverts d'une voile bleu sombres légèrement transparent. Sa peau, légèrement plus clair que ses cheveux foncés, était parfaitement mise en valeur par sa tunique. Ses yeux bruns me regardèrent, et ses fines lèvres me sourirent. J'avais l'impression de voir du feu dans ses yeux. Ses mains attrapèrent les miennes et les serrèrent.
« T'es-tu assez reposé, ma chérie ? » Demanda-t-elle en penchant légèrement la tête sur le côté avec un sourire.
Incapable de parler, je hochai simplement la tête. Elle était légèrement plus grande que moi. Les détails étaient subtils, mais je me rendis enfin compte que j'étais face à Hestia, la déesse du foyer.
« Je t'ai apporté de quoi te vêtir. Je ne savais pas ce que tu préférais, alors j'en ai pris plusieurs. »
Ses mains vinrent se poser sur mes joues. Elle les caressa quelques secondes avant de passer ses mains dans mes cheveux.
« Tu as de très beaux cheveux blonds... C'est rare pour une déesse. La plupart d'entre nous avons les cheveux bruns. Il n'y a qu'Apollon et Arès qui ont les cheveux clairs. On peut t'ajouter à la liste, maintenant. » Me dit-elle avec un grand sourire.
Elle s'écarta de moi avant de se tourner vers mon lit pour attraper une des tuniques.
« Celle-là devrait être à ta taille. Et si elle est trop grande, je te mettrai une ceinture. »
Avec détachement, je commença à retirer ma tunique. Cela me semblait lunaire, je n'avais pas l'impression d'être éveillé. C'était comme si je dormais encore, ou comme si je somnolais. J'attrapai la tunique qu'elle me tendait, l'échangeant contre ma robe de chambre, avant de l'enfiler.
« Tu étais plus bavarde lorsque tu n'étais qu'Agria. » Me dit-elle en ajustant ma tunique. « Elle te va à ravir. Je vais quand même t'ajouter une ceinture, et après, je m'occuperais de tes cheveux. »
Alors, je me retrouvai avec une ceinture en cuir noir. Je baissai la tête pour regarder le vêtement que je portais. Elle était plus longue d'un côté que de l'autre, laissant entrevoir le haut de ma cuisse droite. Elle m'invita à m'installer sur mon lit et, rapidement, je la sentis toucher à mes cheveux.
« Tu dois être parfaite pour rencontrer Héra au trône d'or. » Dit-elle tout en continuant d'attacher mes cheveux.
Lorsqu'elle eut terminé, elle se mit face à moi et hoche légèrement la tête.
« Vraiment très jolie. N'oublie pas de mettre tes sandales. »
Je sentis mes joues rougir, et je tentai de la remercier, mais sans succès. J'étais comme bouge bée. C'était comme si je n'étais pas là. Comme si je n'étais que spectatrice de ce qu'il se passait. Toujours assises, je pris les sandales au pied de mon lit et les mis. Les sangles marron des chaussures montaient jusqu'à mes chevilles.
« Si j'étais toi, je récupérerais ma langue avant de me présenter à elle. »
« Pou...Pourquoi ? » Parvins-je finalement à marmonner.
« Elle a horreur des femmes qui ne font pas la conversation avec elle. » Répondit-elle, un sourire en coin.
Je fis un léger sourire, avant de me relever. Je m'inclinai devant elle et, avec courage, parvint enfin à parler le plus convenablement possible.
« Merci, déesse du foyer. » Parvins-je simplement à dire.
« Redresse-toi, allons visiter le jardin. »
Je m'exécutai et, ainsi, nous sortirent toutes les deux de ma chambre. Elle attrapa mon bras et me fit un sourire.
« Tu ne crains rien, ici. »
« Je n'ai pas peur. »
Les couloirs étaient grands et hauts, tout semblait demeurer. Nous croisâmes plusieurs nymphes qui s'inclinèrent à chaque fois qu'elles nous croisaient.
« Tu auras bientôt une nymphe qui s'occupera de toi nuit et jour. C'est Héra Reine qui décidera laquelle prendra soin de toi. »
« J'ai le droit d'avoir des nymphes ? »
Hestia ricana légèrement.
« Une ou deux, tout au plus. »
« C'est moi qui devrais être une servante. Je ne suis pas une déesse... »
« Tu n'es peut-être qu'une déesse mineure, tu es la fille de deux dieux olympiens et tu es promise à un dieu olympien. Tu es ici chez toi comme nous tous. Tu verras, tout le monde sera au petit soin pour Agria, déesse de l'Histoire, fille d'Athéna aux yeux de chouette. »
Nous fîmes quelques pas de plus dans le long couloir avant d'arriver devant une porte ouverte qui donnait sur le grand et magnifique jardin que j'observais quelques minutes avant.
« Essaie de ne pas te perdre. » Me fit Hestia avec un léger sourire malicieux.
Je sentis Hestia lâcher mon bras avant de s'éloigner. Je l'observa partir, incapable de lui demander de rester avec moi. Je me retrouvais désormais seule, ici, dans ce jardin immense.
Je finis par faire un pas, puis un deuxième, m'avançant lentement dans le jardin. Devant moi, courraient des dizaines de nymphes, s'amusant ensemble, tandis que d'autres étaient assises à discuter ou a savourer des fruits et du vin. J'observai simplement, toujours spectatrice. Devais-je aller vers elle et leur parler ? Devais-je rester ici, toute seuls ? Devrais-je trouver le palais seule ?
Je m'avançai un peu plus dans le jardin, certaines nymphes levèrent le nez vers moi et ne firent rien. D'autres m'ignoraient totalement. Je sentais leurs regards sur moi, je pouvais même entendre des murmures et des chuchotements autour de moi. Probablement, qu'elles ne savaient pas qui j'étais. Probablement que personne ne me connaissais.
Alors, je me décidai à marcher dans le jardin, m'approchant des arbres. Tout était beau, ici. L'herbe au sol était d'un vert éclatant, les arbres étaient grands et gros, remplies de branches et de feuilles. Les fleurs au sol fleurissaient comme jamais elles ne le feraient chez les Hommes.
Au loin, j'aperçus un laurier. Je m'approchai de lui pour observer. Il sentit extrêmement fort, comme si j'étais entré dans un champ rempli de laurier. J'aurais aimé être assez grande pour pouvoir en cueillir une branche. Néanmoins, je me mis sur la pointe des pieds et parvins à frôler certaines feuilles, mais je ne parvins pas à en attraper une. Si je parvenais à le faire, les feuilles seraient déchirées.
Je songeai à escalader l'arbre pour tenter d'en attraper une, mais je supposais que ce n'était pas une attitude à avoir pour quelqu'un de mon rang.
Quelqu'un de mon rang. C'était étrange. Dans la hiérarchie des Hommes, j'avais eu l'un des plus hauts qu'une femme ne puisse avoir, et pourtant, cela ne m'avait jamais paru étrange. Mais là, maintenant que j'avais appris ma divinité, je ressentais une sensation étrange dans le corps. Comme si tout cela n'était pas réel, comme si je ne le méritais pas. Je n'étais plus une princesse. J'étais une déesse, maintenant.
Je repensai rapidement au prince Alexios. Mon beau prince...
Tant pis pour mon rang, je veux avoir une feuille dans la main et pouvoir la sentir.
Je sautai alors et attrapai trois feuilles de laurier. Mes pieds à nouveau sur le sol, j'ouvris ma main et vis les trois belles feuilles au creux de cette dernière. Je souris. J'étais heureuse. Je les regardais longuement avant de les approcher de mon nez et de les sentir.
« Tu aimes leur parfum ? » Fit une voix que je reconnus instantanément.
Je me tournai et l'observai.
« Apollon... » murmurais-je simplement.
Désormais dos au laurier, je pouvais voir que toutes les nymphes présente nous regardait. Je me mords la lèvre : tout le monde m'avait vue sauter.
« Tu aurais pu venir me trouver, et me demander de t'en offrir. »
Il me regardait avec ses beaux yeux bleus. Je déviai le regard, intimidé.
« Je... Je ne savais où te trouver, dieu solaire... »
Je sentis ses doigts venir se mettre sous mon menton pour relever mon visage vers le sien. Par tous les dieux, il était divin, comme ça. Avec sa couronne de laurier dans ses cheveux d'or, son regard attendrissant et son sourire en coin.
« J'ai un présent pour toi, douce Agria. »
Sa main, qui ne me touchait pas, me présenta une couronne de laurier. Comme la sienne. Elle était belle, et sentait divinement bon. Ce n'était rien comparé aux différentes couronnes de laurier que j'avais pu porter chez les Hommes.
Il la posa délicatement sur ma tête, avant d'attraper mes deux mains.
« Tu es vraiment magnifique. »
J'étais intimidé par lui, mais je n'étais pas dupe. Il me charmait. Je savais parfaitement ce qu'il tentait de faire.
« Cela fait longtemps que tu es seule ici ? »
« Quelques minutes seulement. Je ne savais pas où aller, j'ai été attiré par le laurier. »
Ses doigts s'entrelacèrent entre les miens. Je pouvais entendre des murmures et des chuchotements venant de ma droite : les Nymphes nous regardaient toujours, et parlaient de nous deux.
« Ne fais pas attention à elles. Elles ne savent pas encore qui tu es. Lorsque Héra et Zeus Père te verront, on annoncera officiellement nos fiançailles. »
Voilà, il avait enfin avoué. Il ne lui avait pas répondu pendant la bataille d'il y a quelques semaines, et voilà qu'il assumait enfin cette partie de l'histoire.
« Apollon musagète... Je... Je ne peux pas faire cela... »
« Parce que tu t'es donné à mon défunt fils ? »
Mon coeur loupa un battement : avais-je vraiment cru qu'il ne le saurait jamais ? Il avait probablement dû me voir donner mon corps à son fils.
« Je... Je suis désolé... »
Il ne répondit rien. Il me regarda simplement quelques instants avant de détourner le regard.
« Nous devons te présenter devant mon père. Héra déteste le retard. »
Etait-il en colère contre moi ? Je ne le savais pas. Peut-être était-il juste déçu. Je n'osai pas lui demander, je me contentai de prendre le bras qu'il m'offrait et de le suivre jusqu'au palais. Ainsi, sous le regard des dizaines de nymphes présentes dans le jardin, nous marchâmes quelques minutes en silence. Même si j'étais peiné par le fait que le dieu solaire pouvait être vexé par mon comportement, je profitai de cette balade. J'observai un peu partout, et me forçai à encrer tout ce que je voyais dans mon esprit. L'espace, les arbres, les fruits, les fleurs, les nymphes, tout était parfaitement encré dans mon esprit. Tout semblait être comme dans un rêve. La réalité ne pouvait pas être celle que je vivais.
« Hermès est encore en train de séduire une nymphe, regarde-la glousser comme une idiote. » Fit Apollon, un sourire moqueur.
Je dirigeai mon regard vers ma gauche et vis effectivement Hermès avec une jeune nymphe, à plusieurs pieds de nous. Nous nous arrêtâmes pour observer la scène. J'entendis le dieu à mes côtés rire. Même si rire était aussi divin que lui.
« J'en connais un qui va encore passer une excellente nuit. » Ajouta-t-il avant de baisser le regard vers moi. « Il paraît que tu as décliné ses avances. Il était furieux. »
Je ne sus pas quoi répondre. Je baissai simplement les yeux.
« Athéna aux yeux de chouettes m'a dit que j'avais bien fait de décliner. » Parvins-je finalement à dire.
« Bien sûr que tu as bien fait. C'était la chose à faire. Après tout, tu m'as juré fidélité lorsque je t'ai purgé. »
Je me mordis la lèvre inférieure. Il remettait une seconde fois ce sujet dans la discussion.
« Je... Je ne savais pas ce que je faisais... »
Il ne répondit pas. Il détourna le regard et nous nous remîmes à marcher. Je sentis son bras se rapprocher de son corps, le dos de ma main était pratiquement collé à son corps. Ce geste avait eu le don de me faire légèrement basculer vers lui. J'étais presque collé à côté de lui, à sa droite, et nous continuâmes de marcher.
« C'est exactement ce qu'il m'a dit. « Père, je ne savais pas ce que nous faisions. Je m'en veux père, mais j'avais besoin de la sentir près de moi. Agria est la seule femme que j'aimerais de toute ma vie. » »
Je relevai le visage vers lui avant de le baisser presque tout de suite après.
« Je ne vous en veux pas, à tous les deux. Tu as trahi le fait de rester vierge, mais tu as comblé mon fils préféré. »
« J'avais cru... » Commençais-je, d'une voix hésitante. « J'avais cru que tu m'avais abandonné, dieu solaire. Tu avais toujours été avec moi depuis mon arrivé en Phtie... Tu m'avais toujours guidé et le prince et moins n'avions plus de nouvelle de toi... Nous nous sentions seuls... »
« Vous étiez surtout amoureux. Et je ne peux pas vous en vouloir. Ce n'est pas de votre faute. »
« Vas-tu me punir ? J'ai failli à mon devoir de prêtresse. »
Il ne répondit pas tout de suite. C'était comme s'il réfléchissait à ce qu'il allait me répondre. Je me contentai de regarder mes pieds avancer l'un devant l'autre. Après un certain moment de silence, je compris que je n'aurais aucune réponse à cela. La conversation s'arrêta là.
Lorsque je relevai la tête, je vis un grand palais. C'était si grand que je m'arrêtai pour l'observer. C'était semblable à un temple que les Hommes dirigeaient en l'honneur des dieux, mais en beaucoup plus grand et en beaucoup plus haut. C'était immense, jamais je n'avais vu un lieu aussi grand. Le bout était si haut dans le ciel qu'il brillait autant que le soleil.
« C'est beau, n'est-ce pas ? » Fit Apollon.
« C'est... magnifique... » Répondis-je alors.
Je continuai de contempler encore un moment l'édifice devant moi, avant que je ne sois forcé de reprendre la marche. Rapidement, nous entrâmes à l'intérieur par de grandes portes gardés par des gardes, lances et boucliers à la main. L'intérieur était tout aussi somptueux que l'extérieur. Les piliers sur les côtés étaient grands, les murs de pierres étaient si beaux, tout avait l'air totalement irréel.
« Sommes-nous réellement sur le mont Olympe ? »
« Le mont est si haut qu'il est caché par les nuages, c'est pour ça que vous ne nous voyez pas lorsque vous êtes plus bas. » M'informa le dieu solaire alors que nous continuons de marcher.
Je regardais tout autour de moi, c'était encore plus beau que les extérieurs que j'avais pu voir. Ce que j'avais sous les yeux était indescriptible tant j'étais émerveillé par tout ce que je voyais. Il y avait tant de choses à voir que j'étais incapable de tout regarder.
« Apollon ! » Cria une voix féminine.
Cette voix me fit sortir de ma rêverie. Je dirigeai mon regard vers l'endroit où j'avais entendu la voix, et je vis une femme approcher, juste en face de là où nous étions. Je me permis de sourire en la reconnaissant.
« Ca fait des heures que je vous cherche, tous les deux ! » Fit-elle en mettant les poings sur ses hanches. « Où étiez-vous ? »
« Dans les jardins. On a fait une petite promenade avant de venir ici. »
« Tu crois que c'est le moment de faire une promenade ? »
« C'est toujours le moment de faire une promenade. »
La déesse regarda son frère jumeau avec exaspération, avant de diriger le regard vers moi. Elle m'observa un moment avant de hocher la tête.
« Tu es parfaite pour rencontrer Héra. » Dit-elle en s'approchant de moi.
Sans que je ne puisse faire quoi que ce soit, elle m'attrapa l'autre bras et avança. Apollon dut détendre son bras pour me laisser partir. Je me retournai vers lui et me fis un petit sourire.
« J'espère que mon frère n'a pas commencé à te dire de belles paroles. Si Arès et Athéna apprennent qu'il essaie de te séduire, Apollon va passer un sale moment. »
« Non... Non... Il m'a simplement trouvé seule dans les jardins et m'a accompagné jusqu'ici. » Expliquais-je alors. « Tout est si beau et grand ici que je me suis arrêté plusieurs pour regarder les alentours. »
« Oui, c'est vrai que c'est plutôt beau, par ici. Et tu n'as vu qu'une petite partie. Je te ferais visiter, si tu le souhaites. Et je te présenterais à mes nymphes. Je pourrais même t'apprendre à chasser ou ce genre de chose. Tu vas voir, on s'amuse bien, ici. »
Je fis un petit sourire. J'étais toujours aussi intimidé par la situation.
« Que dois-je faire lorsque je serais face à Zeus et Héra ? » Demandais-je.
« Je vais t'accompagner jusqu'à eux. Tu t'inclines face à eux lorsque l'on aura terminé de te présenter. Tu t'adresses à eux comme si tu t'adressais à un roi. Tu les laisses parler en premier, tu ne bouges ou parles uniquement s'ils t'en donnent l'autorisation. Lorsqu'il te congédie, incline-toi à nouveau et va te mettre derrière ton père et ta mère. C'est leur réputation qui est en jeu, ne l'oublie pas. » M'expliqua-t-elle alors que nous nous approchions d'une grande porte.
Je hochai lentement la tête tout en me répétant les différentes informations dans ma tête, comme pour ne rien oublier.
« Ils vont probablement te taquiner. Ne fais aucune remarque, laisse les faire. Ils vont probablement te tester, et vont voir si tu te mets en colère ou non. Héra aime beaucoup lorsqu'elle monopolise l'attention. N'hésite pas à lui lancer des sourires, et à t'incliner devant elle si elle te fait un compliment. Si elle se lève, alors ton supplice sera bientôt fini. Elle va t'inspecter un petit moment. C'est elle qui aura le dernier mot. Et n'oublie pas une seule chose : tes parents seront là, ne leur fait pas honte. » Ajouta-t-elle alors que les portes dorés juste devant nous s'ouvraient.
La boule au ventre, Artémis me força à avancer pour rentrer dans la salle. Cette dernière semblait totalement démesurée. On aurait dit une salle de trône classique, mais avec la capacité d'accueil et la taille d'un grand temple. La déesse de la chasse me lâcha mon bras et me chuchota un « bonne chance » avant de s'éclipser pour rejoindre les autres divinités. Je sentis un main dans mon dos se mettre.
« Bon courage, tu vas en avoir besoin. » Me murmura Apollon en suivant sa jumelle.
Je n'avais même pas remarqué qu'il nous suivait tant j'avais été concentrée sur ce que me disait Artémis. Je les regardai s'éloigner avant de reporter mon attention sur l'ensemble de l'assemblée. Elle était sur les côtés, et semblait me suggérer un passage pour rejoindre le trône à plusieurs pieds de moi.
Tremblante, je commençai à mettre un pied devant l'autre, avançai ainsi vers le roi et la reine des dieux. Les divinités autour de moi me regardaient. Certains avaient un regard dur, d'autres semblaient plus bienveillant. J'étais capable de reconnaître certains dieux et déesses.
Je reconnus certaines divinités simplement par le fait que je les avais déjà vu, comme Hestia, Héphaistos ou encore Aphrodite. D'autres, de par les attribues qu'ils portaient, comme Poséidon au trident ou encore Dyonisos grâce aux feuilles de raisins qu'il avait dans les cheveux. Mais pour la plupart des divinités, je n'avais aucune idée de quels étaient leurs noms et leurs fonctions.
Mon regard se passa sur Arès qui me fixait. Intimidée, je déviai le regard pour le poser sur Athéna. Je n'avais pas eu encore de vraie rencontre avec elle en tant que mère et fille, et j'appréhendais le moment. Je la vis néanmoins me faire un léger sourire que je lui rendis.
Plus rapidement que je ne l'aurais souhaité, je me retrouvai à plusieurs pieds de Zeus et de Héra. Je me mordis la lèvre, et entendis enfin une voix.
« Voici Agria, déesse de l'Histoire, fille du dieu de la guerre Arès et de la déesse stratégie Athéna, fille des guerriers, fléau des hommes et princesse de Corinthe. »
Je vis l'homme qui venait de parler me regarder. Alors, je m'inclinai devant mon nouveau roi et ma nouvelle reine.
« Père des dieux et des hommes. Déesse au trône d'or. Merci de m'accueillir chez vous. C'est un honneur de me présenter devant vous. »
Je relevai la tête tout en me redressant, comme pour observer leur réaction. Zeus Père était similaire à la première impression que j'avais eue de lui, il y a de cela quelques jour.s Quand à Héra, c'était la première fois que je la voyais, et elle était tout aussi éblouissante que je l'avais imaginé. Elle avait une longue chevelure brune bouclé sur laquelle reposait une couronne d'or. Vêtue d'une tunique blanche et d'un châle sur les épaules bleu, elle me regardait simplement. J'attendais leur réaction, mais il ne se passait rien. J'avais peur d'avoir fait quelque chose de travers. Je tentai de tourner légèrement la tête vers Artémis. Je vis cette dernière du coin de l'oeil me sourire.
« J'ai vu tes exploits. » Fit la voix de la reine des dieux.
Elle me fit presque frissonner. C'était une voix autoritaire et ferme. C'était une voix que l'on tenait lorsque l'on était un positon de force. Lorsque l'on était certain de ce que l'on faisait.
« Je dois dire que je suis impression qu'une jeune fille comme toi sache faire la guerre. Tu tiens de tes parents. »
« Merci, déesse Héra. »
Pendant un court instant, je crus voir un sourire passer sur le visage de la reine, mais je n'en étais pas certaine.
« Tu n'as pas changé depuis notre première rencontre, Agria. » Fis la voix du roi des dieux. « En fait, si. Tu as bien changé. Tu n'es pas en colère contre moi. Et tu es lavé. »
J'entendis autour de moi quelques rires, tandis que les deux divinités face à moi me sourire. Je choisis de faire un petit sourire. Il me testait, comme l'avait suggéré Artémis. Et je ne comptais pas me mettre en colère contre eux.
« Je ne me rappelais pas que tu étais si petite. Tu n'es encore qu'une enfant. » Remarqua Zeus en se grattant la barbe.
« Quel âge as-tu ? » Me demanda la reine en se levant de son trône.
« 16 ans, déesse Héra. » répondis-je en la regardant.
Il y eut un silence lorsqu'elle commença à descendre de l'estrade où était déposé son trône. L'instant où elle marchait jusqu'à moi sembla durer des heures. C'était comme si le temps s'était arrêté pour plusieurs longs instants.
Face à moi, la déesse me contempla, et je fis de même. Je pouvais voir les traits de son visage marqué par quelques rides aux coins des yeux et sur le front. Ses yeux bruns scrutaient mon visage. J'arrêtais presque de respirer, j'avais presque peur d'elle. Je ne savais ni quoi faire. Devais-je dire quelque chose ? Avais-je même le droit de bouger ?
Soudain, je la vis lever sa main droite. Cette dernière vint attraper une mèche de mes cheveux blonds. Elle joua lentement avec eux, tout en continuant de regarder mon visage. Le long de ses doigts fins, mes mèches s'enroulaient et se déroulaient.
« Tu es plutôt jolie, malgré ton nez. » Finit-elle par dire, lâchant mes cheveux.
Avant même que je puisse la remercier, elle se retourna, avant de se rediriger vers son trône.
« Cette déesse est notre petite-fille. Notre sang coule dans ses veines. » Fit Héra en s'asseyant. « Sa place est auprès de nous tous. »
Je ne savais pas réellement si cela voulait dire que ces présentations étaient terminées, mais je vis le roi des dieux me faire un sourire. Il me fit un petit hochement de tête que je pris comme une indication que je pouvais me retirer. Je leur fis à chacun un sourire avant de m'incliner devant eux et de me mettre derrière Arès et Athéna, comme me l'avait indiqué Artémis. Cette dernière se retourna légèrement et me fit un sourire que je lui rendis.
Le soir même, un banquet avait été organisé. De façon formelle, c'était un banquet en mon honneur. Mais en réalité, c'était plus une nouvelle occasion pour les dieux de boire jusqu'à s'écrouler d'ivresse. J'avais passé la plupart de mon temps ce soir-là avec les fils d'Arès, Deimos et Phobos. A vrai dire, c'était les seuls enfants d'Arès présents avec qui j'avais déjà eu l'occasion de discuter.
A un certain moment de la soirée, ils jugèrent que je pourrais me débrouiller seul. Alors, ils me laissèrent, en me disant que je n'aurais pas trop de mal à m'entendre avec les autres divinités. Un verre dans la main, mon regard parcourut toute la pièce pour recherche le regard d'une divinité seule ou que je connaissais déjà. Malheureusement pour moi, chacun était occupé à discuter.
J'avais envie de me retirer, de partir explorer le palais et ses alentours. Cependant, je ne savais pas si j'y étais autorisé. Alors, je restai là avec mon verre un court instant, avant de me diriger vers la porte ouverte. Personne ne m'observait, alors je jugeai que je pouvais partir.
Soudain, alors que je m'approchais de la porte, j'entendis un raclement de gorge derrière moi. Mon coeur sursauta, tout comme mon corps. Le coeur battant, je me retournai vers le raclement de gorge. C'était Athéna. Ma mère.
Désormais face à elle, je la regardais, incapable de dire quoi que ce soit. Elle était légèrement plus grande que moi, et également plus musclé. La seule chose que je fus capable de faire, ce fût de m'incliner devant elle. Son regard sévère me faisait peur, j'avais peur qu'elle ne me fasse la remarque, je ne devrais pas partir, surtout lorsque un banquet était organisé en mon honneur.
Mais elle ne me cria pas dessus. Au contraire, elle finit par me faire un sourire un coin.
« Nous avons des choses à nous dire, ma fille. Tu ne crois pas ? » Me dit-elle.
Sa voix était d'une extrême douceur. Cette simple phrase me donna presque des frissons, et je ressentis en moins quelque chose que je n'avais jamais ressenti avant. Ce n'était pas tant le fait de m'appelle « ma fille », ou de me parler gentiment qui me faisait sentir ainsi. C'était le fait qu'elle voulait discuter avec moi.
Lorsque je n'étais qu'Agria, la princesse de Corinthe, jamais ma mère ou mon père ne s'étaient intéressés à moi. Je n'étais qu'une fille pour eux. Alors que pour Athéna, j'étais sa fille. Son unique et seul enfant.
Je hochai alors la tête, et me détourna légèrement pour essuyer du coin de la main la larme qui commençait à monter. Elle me sourit, et s'avança vers moi. Je sentis sa main se poser dans mon dos et, ensemble, nous sortîmes de la salle du banquet.
« Je n'aime pas vraiment les banquets. » Fit-elle en attrapant mon bras gauche. « Surtout lorsqu'il commence à se faire tard, et que tout le monde commence à être trop enivré par le vin. Tu aimes les banquets ? »
Nos bras désormais emmêlés, nous marchâmes dans les couleurs du palais, l'une à côté de l'autre, comme une mère et une fille pouvaient se balader dans une ville, à la recherche de nouveaux achats à faire.
« Tout dépend des invités, du lieu et de la raison. J'imagine. » Répondis-je avec un sourire.
« C'est exactement ce que je pense ! Je déteste le banquet lorsque Poséidon est présent, comme ce soir. Il n'en manque pas une pour me faire une petite remarque. Il est insupportable, ce gros poisson. » Répondit-elle en me regardant, un sourire moqueur.
Je ne pus m'empêcher de rire face à cette remarque sur le dieu de la mer. Je l'entendis rire par la suite. Rire avec une déesse m'avait pris quelques secondes à peine, rire avec la reine de Corinthe... jamais je n'avais ri avec elle, en fait. Arès et Athéna m'avaient donné plus de signes d'amour en quelques rencontres que mes deux parents à Corinthe en toute une vie.
« Et si tu me parlais de ce que tu aimes faire ? Nous avons sûrement plein de choses en commun, toi et moi. » Me dit-elle avec un grand sourire.
Alors, je souris.
Pour la première fois, depuis longtemps, je me sentis bien.
Enfin, j'avais trouvé ma place dans ce monde.
Enfin.
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