CHAPITRE QUINZE
C'était la première fois que je me retrouvais seule avec mon plus jeune frère, Electère. Bion et Cléarque étaient partis rejoindre le roi est la reine pour parler du placement temporaire des princes de Corinthe à Athènes. Cela faisait déjà plusieurs minutes qu'ils étaient partis, et que j'observais Electère jouer.
J'étais face à lui, et lui m'ignorait. Cela me faisait mal à coeur. Il m'ignorait, et ne devait probablement ressentir aucun amour pour moi, alors que je l'aimais plus que ma vie. J'aurais voulu le prendre dans mes bras et l'embrasser comme je le faisais lorsqu'il n'était encore qu'un nourrisson. Il était le parfait petit héritier que notre père avait toujours rêvé d'avoir.
Il faisait battre entre deux ses deux soldats en bois. À simplement le regarder comme ça, il avait juste l'air d'un petit garçon comme les autres. C'était peut-être ce qu'il était, au fond.
« L'un de tes soldats est un héros ? » Demandais-je doucement.
Je voulais tenter de construire un lien, aussi fin soit-il. Je voulais partager quelque chose avec lui. Je voulais qu'il se souvienne de moi.
« C'est Héraclès. » Me dit-il en me montrant l'un de ses deux soldats de bois.
« Qui combat Héraclès ? »
« Arès. »
Je souris.
« Tu reproduis le combat d'Heraclès et Arès, lorsque le héros abat les fils du dieu de la guerre avec une javeline, avant de blesser le dieu à la cuisse. »
Il releva les yeux verts moi.
« Tu connais l'histoire ? »
« Je peux te raconter tout plein d'histoire. Tu aimes les histoires ? »
Le bambin lâcha presque immédiatement ses jouets, désintéressé.
« Oui. »
« Quelle est ta préférée ? »
« Celle d'Héraclès et ses douze travaux. »
« Je comprends que tu apprécies Héraclès. C'est surement le plus grand héros que la Grèce a connu et connaîtra. »
« La Grèce ne me connaît pas encore. »
Je fis un sourire amusé, mais avec cependant un certain remord. Notre père avait dû lui dire qu'il était quelqu'un d'important, et il l'avait probablement crue.
« En attendant que ce jour arrive, je peux peut-être te raconter l'un des travaux d'Héraclès, qu'est-ce que tu en dis ? »
Il hocha la tête, avant de me demander de lui raconter l'épisode d'Héraclès et des pommes d'or des Hespérides.
« Cet épisode se passe huit ans après le début de ses travaux. Mais les dix épreuves affrontées dans le passé ne suffisent pas à expier le mettre de sa femme et de ses enfants. Alors qu'il revenait à peine de l'île d'Erythie où il s'est emparé des boeufs de Géryion, le héros doit à nouveau partir. Eurysthée était certain de ce que la onzième épreuve était impossible à accomplir pour Hercule. Il demanda à son cousin d'aller cueillir les pommes d'or du jardin des Hespérides.
» Tant convoités, ces fruits furent offert par Gaïa, la terre Mère, lors du mariage d'Héra et Zeus. Mais Héraclès ignore tout de l'emplacement de ce jardin divin. Mais une difficulté en accompagne une autre : ces fruits appartenant à son ennemi de toujours, la déesse Héra.
» Héraclès ignore donc que le pommier se trouve sur les pentes du mon Atlas dans un jardin protégé par les films du géant. Mais celles-ci son aidé par Ladin, un épouvantable Dragon qui n'a pas moins de cent têtes. À l'aide de sa bravoure, Heraclès part tout de même pour sa quête. Après des semaines et des semaines à arpenter la Grèce sans trouver le moindre signe des pommes d'or, il finit par arriver dans la patrie du dieu Nérée.
» Les nymphes de la rivière se présentaient face au héros, avant de l'emmener voir leur père qui a le pouvoir d'aider Héraclès dans sa quête. Impatient, le demi-dieu bouscule Nérée qui était endormi. Cela agaça le dieu, et il n'hésita pas à se métamorphoser en serpent pour échapper à Héraclès. Mais Héraclès était fort, très fort. Après une suite de métamorphoses en tous genres de la part du dieu, c'est finalement le héros qui tenu bon. Nérée fut alors contraint de lui réveiller l'emplacement de somme d'or. « Les pommes d'or se trouvent en Mauritanie, dans le royaume d'Altas, père des Hespérides » a alors dit le père des nymphes des rivières.
» Alors, Heraclès voyagea jusqu'en Mauritanie, s'ouvrant le conseil du dieu marin. Une fois là-bas, il s'adressa directement au Titan Atlas, en lui exposant sa mission. Atlas, fier de la convoitise de ses pommes d'or, oublia l'avertissement que Thétis lui avait fait. Elle lui avait dit que son arbre allait être dépouillé par un fils de Zeus.
» Atlas, ennuyé de porter la voute céleste jusqu'à la fin des temps, proposa à Héraclès d'aller lui-même lui chercher les pommes d'or à condition qu'il soulage sa lourde charge et qu'il abatte le dragon chargé de garder le pommier merveilleux, Ladon.
» Héraclès pénétra alors dans un univers d'une profonde douceur. Tout y était beau, calme, et d'une clarté sans nom. Là-bas, il y rencontra les trois filles d'Atlas qui, comblées dans tous leurs désirs, évoluent avec insouciance. Le héros troubla la tranquillité de l'endroit en décochant une flèche sur le dragon, le tuant sur le coup. Après quoi, Héraclès fit demi-tour et rejoignit Atlas pour le décharger de son terrible fardeau.
» Héraclès fut bien naïf sur ce coup-là. Atlas alla bien lui chercher les pommes d'or. Mais lorsqu'il revient vers le héros, le Titan ne souhaita pas reprendre la voute céleste, et proposa au demi-dieu d'inverser leur rôle. Altas irait lui-même apporter les pommes d'or à Eurysthée, tandis qu'Hercule porterait le poids du ciel sur ses épaules.
» Il était impossible pour Héraclès de se décharger du fardeau sur ses épaules. Alors, il fit mine d'être d'accord avec le Titan Atlas. Cependant, il lui demande de reprendre sa charge juste un instant. Juste le temps de mettre un coussin sur ses épaules. Atlas, assoiffé face à la future liberté face à lui, accepte sans aucune méfiance face au héros et posa les pommes à terre. À nouveau son fardeau sur le dos, Héraclès ramasse les fruits, salue le Titan, et s'éloigne. Atlas, de nouveau courbé par son fardeau, s'est fait prendre par la ruse du fils de Zeus.
» Butin à la main, Héraclès prend alors le chemin du retour. À son arrivée, la cupidité de son cousin pousse ce dernier à se jeter sur les fruits d'or. Il ne put cependant pas les conserver, car la propriété d'Héra doit lui être restituée. Malgré la convoitise qui l'habite, Eurysthée fut contraint de donner les pommes d'or à Athéna qui se chargea de les rendre aux Hespérides.
» D'ailleurs, ces dernières, affligées de tristesses, se sont transformées en arbres pleureurs. Héra, quant à elle, pleure la mort de Ladon, le dragon qui périt en protégeant son bien. Héra aurait voulu le sauver, mais elle ne put rien faire face à cette tragédie. Les flèches d'Héraclès avaient étés empoisonnés par le venin de l'Hydre de Lerne.
» Alors, pour ne pas oublier l'effroyable monstre qui avait passé sa vie à protéger le bien de la déesse du mariage, elle l'envoyait dans le ciel étoilé. »
Electère me regardait avec des yeux brillants. Je l'avais vue boire mes paroles pendant mon récit, et j'avais apprécié ce petit moment de complicité avec mon jeune frère. Car j'étais persuadé que je n'aurais pas plus qu'un regard émerveillé de sa part. Et cela me suffit.
« Tu l'as rencontré ? »
Je ricanai avec amusement.
« C'est un dieu maintenant. Il vit sur l'Olympe, je ne le ferais jamais. Mais peut-être que toi oui. Si tu le pries, peut-être viendra-t-il te rendre visite. »
« Pourquoi dit-on que tu es marié avec Apollon ? » demanda-t-il d'une voix innocente.
« Les gens aiment parfois diffuser des fausses informations, et déformer la réalité. »
Il ne répondit pas, se contentant de reprendre ses deux jouets en bois. Il me tendit l'un d'eux.
« Toi, tu fais l'Hippalectryon. Et moi, je fais toi. »
Alors qu'il commençait à attaquer le soldat en bois - enfin, l'Hippalectryon - que j'avais dans les mains, je me rendis compte que l'épisode de mon combat contre un fils de dieu olympien commençait à se répandre.
L'histoire de la princesse exilée de Corinthe commençait à se faire connaitre.
...
Le soir venu, moi et mes trois frères furent invités à dîner auprès du roi et de la reine d'Athènes. Electère était à côté de la reine pour qu'elle puisse l'aider à manger. Elle s'occupait de mon petit frère comme si cet enfant était le sien, et cela me conforta sur mon envie de laisser cet enfant dans ce palais.
Bion sembla le remarquer également.
« Ma reine, » Commença-t-il alors. « As-tu réfléchi à la proposition que je t'ai faite, ce matin ? »
Je vis le roi et la reine échange un regard. Je ne saurais dire ce qu'ils ressentaient à cet instant.
« Si... Si l'offre consiste bien à ce que j'adopte ce garçon, il sera roi d'Athènes. Es-tu sûr de cela, roi Bion ? »
« Ma soeur et moi devons rapidement partir en quête. Nous devons retrouver le prince Alexios de Phtie, fils d'Apollon et Athanasie, pour pouvoir ensuite reconstruire nos terres. Electère est trop petit pour partir. Il a besoin d'une stabilité. Ma soeur exige également que Cléarque reste avec vous ici. Si je venais à mourir, ce serait lui qui prendrait ainsi le trône de Corinthe. »
« Et si ce garçon venait à mourir aussi ? » Intervint le roi.
J'observai le reine qui lança un regard dur à son époux. Avant qu'elle ne puisse rétorquer quelque chose, j'intervins à mon tour.
« Le roi Bion a un enfant qui naitra à Argos. Il pourra devenir roi une fois adulte. Et si cela n'est pas possible, je ne reste pas moins une héritière du trône. S'il me réhabilite, je peux devenir reine. »
Je n'avais jamais pensé à être un jour reine de Corinthe. J'étais une fille, et j'avais beau être la plus âgée de ma fratrie, cela voulait dire que j'étais la dernière dans l'ordre d'accession au trône. Je n'avais jamais pensé pouvoir être dans une telle situation maintenant.
La reine avait détourné le regard vers Electère qui avait du ragout partout autour de la bouche. Elle l'essuya avec une telle tendresse que cela me conforta définitivement à mon premier choix.
« Ma reine, tu ferras une excellente mère pour mon frère. Il mérite une mère qui s'occupe de lui et qui l'aime. Et toi, tu mérites que l'on te donne un fils. »
Elle me regarda, et je vis ses yeux commencer à légèrement briller. Je lui fit un sourire reconnaissant.
« J'assumerais ce rôle. Tu pourrais partir l'esprit tranquille. »
Je rencontrai le regard de Bion, avant de le dévier pour regarder mon assiette.
« Tu seras une excellente mère. » Dis-je faiblement, avalant difficilement ma salive.
« Toi aussi. Je suis sûr que tes futurs enfants seront fiers d'avoir une mère aussi forte que toi. »
Mon regard se figea sur le verre face à moi. Je sentis Bion me donner un léger coup de pied pour attirer mon attention vers lui. Lorsque je levai le regard vers lui, je fus certain qu'il comprit ma réaction.
« Je... Je ne peux pas avoir d'enfant. » Dis-je alors, luttant pour garder une voix normale.
J'avais instauré un malaise autour de la table, je le savais.
« Tu es encore jeune. » Me fit le roi, essayant d'être compréhensible. « Tu auras le temps de... »
« Je n'ai jamais saigné, donc je n'aurais pas d'enfant. » L'interrompais-je d'une voix agacée.
Il y eut un nouveau silence dans lequel tout le monde me regardait, même Electère.
« Je... Je suis désolé. J'ai du mal à contrôler ma colère en ce moment. Pardonne-moi, mon roi. »
Je passai rapidement une main sur mon visage, mordant l'intérieur de ma joue. Je m'en voulais de m'énerver aussi facilement. D'habitude, j'arrivais à la contrôler. Mais plus je grandissais, et moins je parvenais à contrôler mes légers excès de colère.
Par la suite, le sujet de conversation dévia légèrement. Personne ne me parla, je restai prostré dans le silence. Je pouvais percevoir Cléarque, qui tentait tant bien que mal d'établir un contact visuel entre nous. Alors, je lui fis un léger sourire pour le rassurer.
« Agria, est-ce vrai que tu as combattu l'Hippalectryon ? Tout le monde ne parle que de cet instant. » Demanda le roi.
« Oui... Oui c'est vrai. » Répondis-je en hochant la tête.
« Comment cela est possible ? » Demanda par la suite la reine.
Electère était désormais sur ses genoux en train de somnoler. Je souris légèrement.
« Je suis passé par Thèbes, et j'ai vu une femme paniquée et blessé au bras. Tout le monde la croyait folle, mais j'ai décidé de la croire. Un commerçant m'a pris de haut, et j'ai conclu un marché avec lui. Si cette femme avait raison, j'exigeais mon poids en drachmes. Si elle était folle, je lui donnais le caducée du dieu Hermès. J'ai poussé le pari plus loin, en lui promettant que si je mourrais face à la bête, il pourrait prendre tout ce que j'avais sur moi. Mais si je lui ramenais la tête du monstre, je le tuerais. » Expliquais-je.
À nouveau, on me regard silencieusement. Même Electère avait trouvé un semblant d'énergie pour m'écouter.
« Le caducée d'Hermès ? » Me fit alors le roi.
« Le centaure Chiron m'a fait partbde ma quête. Il m'a dit que je devrais me retrouver sur la colline la plus haute de Delphes et que je devrais prié. Athéna, Arès, Artèmis, Héphaistos et Hermès sont venus à ma rencontre. J'ai reçu l'égide d'Athéna, la lance d'Arès, l'arc et les flèches d'argent d'Artémis, l'armure d'Héphaïstos conçu pour moi, et le caducée d'Hermès. »
« Et ensuite ? Le combat ? » Demanda Electère.
« La bête se trouvait dans les vignes de Thèbes, il mangeait les grappes de raisin. C'est là que j'ai appris qu'il était le fils de Dionysos. Nous nous sommes combattus, et j'ai été plus maligne. J'ai pris en compte l'environnement et j'ai fait de l'environnement mon allié, comme je l'ai appris auprès des Myrmidons. J'ai ramené sa tête au commerçant. »
« Tu l'as tué ? » Me demanda Cléarque.
« J'ai d'abord exigé mon payement. Dix mille neuf cents drachmes en tout. Il n'en avait à peine mille. Au final, c'est son roi qui lui a sauvé la mise. Il m'a donné neuf mille drachmes pour que je parte de sa cité et que j'épargne l'homme. Alors, je suis partie avec ma bourse remplie aux as. » Continuais-je. « Je vous donnerais une partie de ce butin, pour vous remercier d'accueillir mes deux petits frères dans votre palais. »
« Tu n'es pas obligé. »
« La bourse est si longue que ça en devient contraignant. » Répondis-je avec un sourire en coin.
...
Nous restâmes encore deux jours au palais du roi et de la reine d'Athènes. J'avais besoin de me reposer après mes jours de marches intensives. J'en profitai également pour passer du temps avec Cléarquee et Electère. Le petit garçon avait semblé s'apaiser, et oublier un peu ce que son père lui avait dit à mon sujet.
En fait, après l'histoire que j'avais racontée avec l'Hippalectryon, il me voyait comme un héros au même titre que Hercule. J'étais fier de devenir une sorte de modèle pour mon petit frère. Il me promit de devenir un homme fort et prêt à tout pour son peuple pour devenir aussi courageux qu'Héraclès.
Le dernier repas avant notre départ fut tendu. Cléarque et Electère ne parlèrent pas, et moi et Bion non plus. Chacun pensait à ce qui allait arriver par la suite. Et nous étions tous les quatre terrifiés.
Nous avions conclu qu'il était préférable pour nous de partir de nuit. Alors, juste après le coucher du soleil, il était temps de dire au revoir à nos frères. Je revêtis mon armure tout en accrochant bien les attributs des dieux que j'avais. Mon frère enfila également une armure, mais celle d'un soldat athénien. Cela pourrait être un bon pour nous, car rien ne montrait que nous étions originaires de Corinthe.
Cléarque était dans le bras de Bion. Ce dernier tentait de le réconforter comme il le pouvait, mais notre jeune frère avait du mal à contenir ses larmes.
Je m'avançai timidement de Electère. Il me permit de le prendre dans ses bras pour la première fois. J'étais heureuse, à ce moment précis. Triste de quitter mes frères, mais heureuse que mon petit frère accepte que je le prenne dans mes bras. C'était la première, mais aussi la dernière fois que je le prenais dans mes bras.
Je me reculai, et lui embrassa le front.
« Soit un bon garçon. Écoute toujours ce que le roi et la reine te disent de faire. Soit un garçon respectueux, on te le rendra. Et pries les dieux régulièrement pour ceux que tu aimes, d'accord ? »
Il hocha énergiquement la tête. Je lui fis un dernier sourire, avant de m'avancer vers Cléarque.
« Ne pleure pas... » Dis-je en essuyant ses larmes, comme lorsque nous nous étions retrouvés il y a de ça quelques jours.
« À peine rentré auprès de nous, voilà que tu pars déjà... » M'avoua-t-il entre deux sanglots.
« Nous nous reverrons, je te le jure. Si ce n'est pas ici, ce sera ailleurs. Je viendrais te chercher. »
Je le pris contre moi, et observai Bion serrer Electère à son tour. Le roi et la reine étaient derrière les garçons, à quelques mètres de nous. Les yeux fermés, je savourai quelques secondes de l'instant présent, avant de revenir à la dure réalité et de m'écarter de mon frère.
Cléarque me regarda tristement, avant de me laisser partir.
« Soyez de bons garçons, d'accord ? » Leur dis-je à nouveau, voulant qu'il garde cet ordre en tête.
Ils hochèrent tous les deux la tête. Je montai sur le cheval que le roi nous avait gentiment fait cadeau, et Bion fit de même sur le sien.
Après un dernier regard partagé, je me retournai et, Bion et moi s'éloignâmes de nos frères. J'entendais Electère commençait à pleurer bruyamment, alors que Cléarque nous supplier de finalement l'emmener avec nous.
Les larmes aux yeux, je ne me retournai pas, et Bion non plus. Nous nous éloignèrent tellement que, rapidement, les pleures de nos frères n'étaient plus que de mauvais souvenirs.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top