𝐗𝐗𝐗𝐈𝐈𝐈. 𝐔n trou dans un mur

XXXIII


« Hé bien, crois-moi ou pas, mais je ne peux pas penser à tout ! » râla Vendredanche, toujours appuyé sur Mac, dont les nerfs avaient probablement lâché à un moment ou un autre de l'histoire, — sans que cet dernier fait été de près ou de loin une évolution notable par rapport à son état habituel.

« On est foutus » psalmodiait Mac avec un air à mi-chemin entre l'abattement le plus profond et une résignation bizarrement nihiliste. Ça n'arrangeait en rien la situation. Tout au plus donnait-ce l'impression qu'il avait fait de ces trois derniers mots son credo officiel.

Ils s'étaient engouffrés, en désespoir de cause, — dans le tunnel de gauche, — et après plusieurs minutes de marches n'arrivaient toujours pas à déterminer s'il s'était agi d'une bonne ou d'une mauvaise idée, ce qui ne paraissait pas totalement une excellente nouvelle concernant leur survie immédiate. Enfin, ils continuaient.

Pour être parfaitement honnête, il n'était pas certain qu'ils allaient en effet pouvoir continuer pendant longtemps. La jambe de Vendredanche le lançaient de plus en plus. La santé mentale de Mac avait bien rigolé et s'apprêtait à prendre ses cliques et ses claques pour un monde meilleur.

Le viocque derrière eux suivait gentiment et le schlip-schlap content que faisaient ses pieds à peu près aussi plats que des palmes décathlon commençait sérieusement à leur porter sur le système.

« Oh, vous, ça va commencer à suffire, hein ? » explosa brusquement Vendredanche, en se tournant vers le viocque avec agacement. « Vous pouvez pas nous lâcher ?

— J'ai oublié, » couina le viocque, avec un air penaud de chaton à qui on aurait volé son saumon.

« Ça me fait une belle jambe ! » râla Vendredanche, qui raffermit son appui sur l'épaule de Mac (lequel Mac faillit se casser la figure mais c'était habituel). « Déjà, levez les pieds quand vous marchez, par pitié, j'ai l'impression d'être suivi par un aspirateur dépressif qui aurait bien besoin d'un coup de WD-40 !

— Pourquoi un aspirateur dépr...

— AAAH, NE COMMENCE PAS ! » s'énerva Vendredanche en se tournant vers Mac. « Là, on marche ! On continue ! ET LE PREMIER QUI L'OUVRE, JE PROMETS QU'IL VA REGRETTER SA MAMAN ! »

Mac ouvrit justement la bouche pour dire « pardon », mais la referma. Il se remit en marche sans un mot, Vendredanche appuyé sur son épaule d'un air de colère déterminé. Il baissait la tête.

Ils marchèrent en silence, quelques minutes.

Au bout de ces quelques minutes, Mac ouvrit la bouche. Vendredanche se crispa, par pure mesure de prévention.

« ...Je regrette ma maman, » lâcha-t-il d'une petite voix.

Vendredanche soupira lourdement. « Écoute, Mac, je suis désolé de m'être énervé, » fit-il doucement. « Mais, là, c'était trop.

— Oui, mais quand même. On est entre adultes responsables. Ça servait à rien de crier, » marmonna Mac.

« ...Je m'excuse, voilà.

— D'accord.

— Tu es content ?

— Un peu. » Vendredanche hocha la tête, content que Mac se déride. Entre voir Mac triste et un chiot eurasier pleurnicher, Vendredanche trouvait que la première option relevait bien plus de la torture psychologique que la seconde. Le stagiaire raffermit son appui sur l'épaule de Mac ; sa jambe lui faisait affreusement mal. « ...On y voit rien » râla-t-il finalement, en plissant les yeux. « Ton briquet éclaire pas des masses.

— Il est pas fait pour éclairer des galeries de sous-sol et de local poubelle, » nota Mac. « En plus, il fait des ombres inquiétantes. J'en ai vue une en forme de crabe, là-bas. »

Vendredanche sursauta si violemment que la flammèche faiblarde faillit s'étrangler — elle vacilla, jetant des lumière rouges et oranges dans chaque repli de béton. « QUOI ? » glapit-il.

« Ne crie pas ! » grimaça Mac, en se massant l'oreille gauche. « C'était juste là ! Dans le petit recoin » précisa-t-il, en pointant un tas de pénombre un peu plus loin, au milieu de gravats mal balayés. Le cœur de Vendredanche reprit une vitesse normale lorsque ses yeux se posèrent sur la tache d'obscurité incriminée. Ce n'était en effet bien qu'une ombre, jetée là par un trou dans le mur, à moitié effondré, en forme de —

...De crabe ?

« Non, mais c'est pas le crabe, hein » lâcha platement Mac, après un silence. « C'est juste un trou.

— Oui, mais il est en forme de crabe, » fit faiblement Vendredanche.

« Ben, oui. Mais tu sais, j'ai une tache de naissance en forme de lapin unijambiste sur l'omoplate gauche, je suis à peu près sûr que ça n'a aucun sens, » fit Mac d'un air poli.

« ...Attends. Tu peux te baisser une seconde ? » demanda Vendredanche. Le recenseur le regarda d'un air un peu perdu, mais se pencha obligeamment, pour permettre au stagiaire de s'abaisser à la hauteur du trou. Vendredanche prit ça comme une invitation et s'accroupit carrément, emportant par son appui du même coup l'épaule de Mac qui faillit — de fait — se casser la figure.

« C'est bizarre, » nota Vendredanche à voix basse, en se foutant pas mal de Mac qui se remettait de ses émotions à côté en tricotant des genoux. « Regarde. On dirait que... »

Il se tut soudain, — passa une main au-travers du trou. Ses doigts rencontrèrent du vide, puis du béton brossé, au sol. Vendredanche écarquilla les yeux. Il se tourna vers Mac et retira son bras comme ému, pour annoncer le verdict :

« ...J'crois qu'il y a une pièce derrière, » lâcha-t-il d'une voix blanche.


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